indivisible [ ɛ̃divizibl ] adj.
• 1314; bas lat. indivisibilis
♦ Qui n'est pas divisible. L'homme est un composé indivisible. La République une et indivisible, proclamation de l'unité de la République sous la Révolution, qui s'opposait aux tendances fédéralistes.
♢ Dr. Qui n'est pas divisible, en parlant d'une obligation. L'hypothèque est indivisible.
● indivisible adjectif (bas latin indivisibilis) Qui ne peut être divisé, séparé, distingué en parties ; qui ne peut être dissocié de quelque chose d'autre. ● indivisible (expressions) adjectif (bas latin indivisibilis) Obligation indivisible, obligation qui ne peut pas être exécutée partiellement et à laquelle chacun des obligés est tenu pour le tout. ● indivisible (synonymes) adjectif (bas latin indivisibilis) Qui ne peut être divisé, séparé, distingué en parties ; qui...
Synonymes :
- inséparable
- un
Contraires :
indivisible
adj. Qui ne peut être divisé.
⇒INDIVISIBLE, adj.
A. — [Correspond à diviser A]
1. Qui ne peut être divisé en plusieurs parties ou décomposé, analysé.
a) [En parlant d'une chose concr.] La chimie ne repose que sur la constatation des molécules, et qui dit molécule (si infinitésimale qu'elle soit) dit corps défini, c'est-à-dire indivisible (SAND, Corresp., t. 5, 1866, p. 150). À son dernier terme indivisible, la matière aboutit à l'atome, au tétraèdre (ARNOUX, Rhône, 1944, p. 82) :
• 1. ... l'homme n'est pas séparable en parties. Si on isolait ses organes les uns des autres, il cesserait d'exister. Quoique indivisible, il présente des aspects divers. Ses aspects sont la manifestation hétérogène de son unité à nos organes des sens.
CARREL, L'Homme, 1935, p. 50.
— Emploi subst. masc. Élément indivisible. Il y aurait absurdité à dire que deux atomes, deux indivisibles rigoureux d'hydrogène, se combinent avec un atome, un indivisible d'oxygène pour donner deux indivisibles d'eau (RENOUVIER, Essais crit. gén., 3e essai, 1864, p. 83). On ne saurait contester que la formation ou construction d'un nombre implique la discontinuité. En d'autres termes (...) chacune des unités avec lesquelles je forme le nombre trois paraît constituer un indivisible pendant que j'opère sur elle (BERGSON, Essai donn. imm., 1889, p. 72).
b) [En parlant d'une chose abstr.] Savoir si la moralité forme un tout indivisible, comme le veut l'idéalisme; si vraiment, par tel acte immoral particulier, je nie globalement la moralité (G. MARCEL, Journal, 1919, p. 211). Le génie est indivisible. Tout Wagner est déjà contenu en puissance dans l'opéra qui sombrait alors sous les sifflets des messieurs du Jockey (MAURIAC, Mém. intér., 1959, p. 42) :
• 2. ... ce que nous croyons notre amour, notre jalousie, n'est pas une même passion continue, indivisible. Ils se composent d'une infinité d'amours successifs, de jalousies différentes et qui sont éphémères, mais par leur multitude ininterrompue donnent l'impression de la continuité, l'illusion de l'unité.
PROUST, Swann, 1913, p. 372.
♦ Emploi subst.
Masc. sing. à valeur de neutre. Caractère d'une chose indivisible. Ici, mélange intime de vrai et de faux. Il est vrai que j'étouffe; il est faux qu'un lion me presse (...). Embarras. C'est l'inextricable ou l'indivisible de ce mélange qui est caractéristique du rêve (VALÉRY, Variété II, 1929, p. 241).
Gén. masc. plur. MATH., vieilli. Élément infiniment petit. Cavalieri, dans sa Géométrie des indivisibles (1635), considère les plans comme formés (...) par des sommes infinies de lignes, les solides, par des sommes infinies de plans, et désigne du terme d'indivisibles les éléments infiniment petits ainsi supposés (Gds cour. pensée math., 1948, p. 246).
— HIST. La République une et indivisible. Titre que s'est donné la première République, à la suite de l'agitation fédéraliste. La République n'est plus une, indivisible, elle est partagée : la bourgeoisie a ses intérêts, le peuple a les siens (ERCKM.-CHATR., Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 512). Le fédéralisme était vaincu : la République une, indivisible, vaincrait tous ses ennemis (FRANCE, Dieux ont soif, 1912, p. 100).
♦ Absol., subst. fém. Et de se dépouiller, (...) de montrer au vicaire ahuri les cicatrices de deux ou trois balles reçues dans le fondement, alors que les gendarmes le pourchassaient, en l'An deux de l'Indivisible... (POURRAT, Gaspard, 1922, p. 51). Un baron échappé (...) à la redoutable et nécessaire suspicion de l'Indivisible, sauvé par la réaction thermidorienne, le modérantisme arrivé au pouvoir (ARNOUX, Rhône, 1944, p. 68).
2. En partic. Qui ne peut être partagé (entre plusieurs personnes) généralement en raison d'une loi, d'un principe. Principauté indivisible. Chez elle [Sparte] le patrimoine était indivisible et le cadet n'avait aucune part (FUSTEL DE COUL., Cité antique, 1864, p. 99). Un chef doit être maître dans son bureau, comme un capitaine à son bord; l'autorité est indivisible, sans quoi il n'y a pas de service possible (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Opin. publ., 1881, p. 367) :
• 3. La beauté est indivisible; celui qui l'a possédée tout entière préfère l'anéantir, maudissant tout partage de possession.
NERVAL, Sec. Faust, 1840, p. 241.
— DR. Obligation indivisible. Obligation qui ne peut pas être exécutée partiellement et à laquelle chacun des obligés est tenu pour le tout (d'apr. Lar. encyclop.). L'obligation est divisible ou indivisible selon qu'elle a pour objet ou une chose qui dans sa livraison, ou un fait qui dans l'exécution, est ou n'est pas susceptible de division, soit matérielle, soit intellectuelle (Code civil, 1804, art. 1217, p. 218).
B. — [Correspond à diviser B] Qui ne peut être séparé (de quelque chose). Sing. Être indivisible de qqc. Plur. Être indivisibles. Le grade et l'emploi sont indivisibles (...). Or, votre lettre m'apprend aujourd'hui que je suis maintenu secrétaire du conseil en cessant d'être officier (HUGO, Corresp., 1830, p. 480). J'allais alors cherchant la vérité religieuse et la vérité sociale dans une seule et même vérité. Grâce à Éverard, j'avais compris que ces deux vérités sont indivisibles et doivent se compléter l'une par l'autre (SAND, Hist. vie, t. 4, 1855, p. 357). L'esprit et l'humeur sont toujours ensemble, et indivisibles; il n'y a pas plus d'esprit séparé que de cercle parfait; et l'humeur pure ne serait plus humeur (ALAIN, Propos, 1929, p. 872) :
• 4. Dans les domaines de la création, qui sont aussi les domaines de l'orgueil, la nécessité de se distinguer est indivisible de l'existence même.
VALÉRY, Variété II, 1929, p. 133.
REM. Indivisable, adj., rare, synon. Cette lunette, qui a dedans des fils d'araignées, d'araignées qu'on fait jeûner, pour que leurs fils soient tout à fait ténus et deviennent des diviseurs de riens indivisables (GONCOURT, Journal, 1893, p. 450).
Prononc. et Orth. : []. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1314 « qui n'est pas divisible » (HENRI DE MONDEVILLE, Chirurgie, éd. A. Bos, § 337); 2. 1804 dr. (Code civil, loc. cit.). Empr. au b. lat. indivisibilis « qui n'est pas divisible ». Fréq. abs. littér. : 430. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 553, b) 444; XXe s. : a) 565, b) 778.
DÉR. 1. Indivisibilité, subst. fém. Caractère de ce qui ne peut pas être divisé, partagé ou analysé. Indivisibilité d'un atome, de l'âme, de la personne, de Dieu, de la République, d'une obligation. Les hommes ne passèrent pas d'un seul bond de l'indivisibilité du patrimoine au partage égal entre les frères (FUSTEL DE COUL., Cité antique, 1864, p. 328). La vie est susceptible de niveaux et de tonalités mais non de parties; ou, si l'on veut, elle est l'indivisibilité de l'étendue et du mouvement en première personne (RICŒUR, Philos. volonté, 1949, p. 387). C'est le plâtre ou le bronze qui sont divisibles : mais cette femme qui marche a l'indivisibilité d'une idée, d'un sentiment; elle n'a pas de parties parce qu'elle se livre toute à la fois (SARTRE, Sit. III, 1949, p. 301). — []. Att. ds Ac. dep. 1718. — 1res attest. a) 1516 [éd.] « indissolubilité (du mariage) » (Mir. hist. de Fr., f° 86 v° ds GDF. Compl.), b) 1691 « caractère de ce qui est indivisible » (BOSSUET, Avert. aux Prot. ds BRUNOT t. 4, 1, p. 485), c) 1804 dr. indivisibilité [d'une obligation] (Code civil, art. 1219, p. 219); dér. sav. de indivisible, suff. -(i)té; cf. aussi le lat. chrét. indivisibilitas « indivisibilité (de la Trinité) » (TLL t. 7, 1, col. 1211, 39), lat. médiév. « le fait de ne pas être séparé (de Dieu) » (BLAISE Latin. Med. Aev.) et le m. fr. indivisibleté « caractère de ce qui est indivisible » (fin du XIVe s., ROQUES t. 2, 5865). — Fréq. abs. littér. : 49. 2. Indivisiblement, adv. De manière indivisible. L'homme est, de sa nature et par essence, sensation-sentiment-connaissance indivisiblement unis (P. LEROUX, De l'Humanité, t. 1, 1840, p. 157). Le droit de déterminer ou de transmettre l'autorité réside non point partiellement dans chaque individu, mais indivisiblement dans l'unité du corps social (BLONDEL, Action, 1893, p. 272). — []. Att. ds Ac. dep. 1694. — 1re attest. XVe s. [date du ms.] « de manière indivisible » (CORBICHON, Propriétés des choses, ms. B.N. fr. 22533, f° 6 ds GDF. Compl.); de indivisible, suff. -ment2. Cf. également le lat. chrét. indivisibiliter « de manière indivisible » (TLL; BLAISE Lat. chrét.). — Fréq. abs. littér. : 23.
indivisible [ɛ̃divizibl] adj.
ÉTYM. 1314; bas lat. indivisibilis « qui n'est pas divisible », de in- (→ 1. In-), et divisibilis. → Divisible.
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1 Didact. Qui n'est pas divisible. || Les atomes (cit. 1 et 3) considérés comme indivisibles par Épicure, comme divisibles par Descartes. || L'espace n'est pas indivisible (→ Étendue, cit. 2, Pascal). || Point indivisible (→ Autre, cit. 35, Pascal). || Dieu un et indivisible (→ Baptême, cit. 2, Bossuet). || L'homme (cit. 44) est un composé, un tout indivisible (→ Fond, cit. 47), une partie indivisible du tout (→ Commun, cit. 6). — Chose indivisible d'une autre.
1 L'homme n'est pas séparable en parties. Si on isolait ses organes les uns des autres, il cesserait d'exister. Quoique indivisible, il présente des aspects divers. Ses aspects sont la manifestation hétérogène de son unité à nos organes des sens.
Alexis Carrel, l'Homme, cet inconnu, II, IV.
♦ Par ext. || Famille indivisible.
2 La famille, indivisible et nombreuse, était trop forte et trop indépendante pour que le pouvoir social n'éprouvât pas la tentation et même le besoin de l'affaiblir.
Fustel de Coulanges, la Cité antique, IV, V.
2 Plus cour. || Souveraineté inaliénable (cit. 1, Rousseau) et indivisible. — ☑ Loc. La République (française) une et indivisible, proclamation de l'unité de la République française sous la Révolution, qui s'opposait aux tendances fédéralistes.
3 C'est l'un d'eux, Rabaut Saint-Étienne, qui, le 9 août 91, avait fait proclamer l'unité indivisible de la France.Déjà Condorcet, en 90, dans un très bel opuscule digne de ce grand esprit, avait très bien établi que Paris était le puissant moyen, l'instrument de cette unité.
Michelet, Hist. de la Révolution franç., X, I.
4 La République une et indivisible, voilà ce qui est sorti de la déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen. C'est de cette République-là que nous sommes républicains.
Ch. Péguy, la République…, p. 319.
3 Dr. Qui n'est pas divisible, en parlant d'une obligation. ⇒ Indivisibilité. || L'hypothèque (cit. 1) est indivisible.
5 L'obligation est divisible ou indivisible selon qu'elle a pour objet ou une chose qui dans sa livraison, ou un fait qui dans l'exécution, est ou n'est pas susceptible de division, soit matérielle, soit intellectuelle.
Code civil, art. 1217.
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CONTR. Divisible.
DÉR. Indivisiblement, indivisibilité.
Encyclopédie Universelle. 2012.