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manier

manier [ manje ] v. tr. <conjug. : 7>
XVIe; maneier 1165; de main
I
1Vx Tâter, palper.
2Façonner, modeler avec la main. « manier la glaise et réaliser la maquette » (Balzac).
Pétrir (de la farine et du beurre). P. p. adj. Beurre manié, mélangé et malaxé avec de la farine.
3Avoir en main, entre les mains tout en déplaçant, en remuant. « Un plaisir de petite fille qui trouve et manie un jouet nouveau » (Maupassant). Manier un objet avec précaution. manipuler.
4Utiliser en ayant en main. Manier les armes. « Savoir manier l'épée et le poignard pour sa défense » (Taine). Manier le pinceau. Manier l'encensoir, la brosse à reluire. Utiliser (une machine, un véhicule) pour une manœuvre. manœuvrer; maniable. « Avion assez rapide [...] mais difficile à manier » (Malraux). Manier un cheval, le faire évoluer. — Manier de l'argent, de grosses sommes d'argent. 1. brasser. Manier des fonds. gérer.
5(fin XVe) Fig. Mener à son gré. diriger, gouverner. « Pour manier ces masses » (Balzac).
6Employer de façon plus ou moins habile. Nul « n'a manié l'alexandrin dramatique d'une façon plus magistrale » (Gautier). Bien manier une langue étrangère. Savoir manier l'ironie.
IIFam. SE MANIER (seult inf.) ou SE MAGNER[ maɲe ] <conjug. : 1> :se remuer, se dépêcher. ⇒ se dégrouiller, se grouiller. « On t'attend à la caserne, je te conseille de te manier » (Sartre). Magnez-vous ! Loc. vulg. (même sens) Se manier, se magner le cul, le pot, le popotin. « eh bien grouille-toi, fais fiça, magne-toi le pot » (Queneau).

manier verbe transitif (de main) Tenir quelque chose entre ses mains, le tourner en divers sens, le manipuler : Des bibelots à manier avec précaution. Se servir d'un appareil, d'un instrument, l'utiliser : Apprendre à manier un sextant. Manier le pinceau. Manœuvrer un véhicule, une machine : Un camion difficile à manier. Employer, combiner avec habileté des mots, des idées, des sentiments : Manier l'humour. Pétrir à la main du beurre avec de la farine pour les mêler intimement. ● manier (expressions) verbe transitif (de main) Vieux. Manier une foule, un peuple, etc., les diriger, orienter leur action. Manier de l'argent, des fonds, verser et encaisser des sommes considérables, gérer des finances. ● manier (homonymes) verbe transitif (de main) magner verbemanier (synonymes) verbe transitif (de main) Tenir quelque chose entre ses mains, le tourner en divers sens...
Synonymes :
- tripatouiller (familier)
- tripoter (familier)
Se servir d'un appareil, d'un instrument, l'utiliser
Synonymes :
- jouer de
Manœuvrer un véhicule, une machine
Synonymes :
Employer, combiner avec habileté des mots, des idées, des sentiments
Synonymes :
Pétrir à la main du beurre avec de la farine...
Synonymes :
- pétrir
Manier une foule, un peuple, etc.
Synonymes :
- régenter

manier
v. tr.
d1./d Avoir entre les mains (qqch que l'on bouge). Manier un objet fragile avec précaution.
|| Fig. Manier des fonds: faire des opérations de recettes, de placement, etc.
d2./d Façonner. Forgeron qui manie bien le fer.
d3./d CUIS Manier le beurre, le pétrir en le mélangeant à de la farine.
d4./d Se servir avec plus ou moins d'adresse (d'une arme, d'un instrument). Savoir manier l'épée, le ciseau.
Fig. Manier l'ironie.
d5./d Diriger, mener à son gré. Une voiture difficile à manier.
|| Fig. L'art de manier les esprits, les foules.

I.
⇒MANIER1, verbe trans.
A. — 1. Vieilli. Manipuler, toucher un objet de ses mains. Des cheveux luisants, touffus, qui donnaient envie de les manier (BALZAC, Méd. camp., 1833, p. 245). Pour mieux manier les tiges de ses fleurs, elle avait ôté ses gants, et je voyais ses belles mains blanches dont les doigts fragiles allaient et venaient (BOURGET, Disciple, 1889, p. 156):
1. Il était assis sur le billard, les pieds ballants, et il maniait une boule de la main gauche, tandis que de la droite il tripotait un linge qui servait à effacer les points sur le tableau d'ardoise...
MAUPASS., Contes et nouv., t. 2, Mlle Perle, 1886, p. 638.
En partic. [En parlant d'une étoffe] Tâter, palper. Gabrielle trouvait Étienne beau, elle voulut manier le velours du manteau, toucher la dentelle du collet (BALZAC, Enf. maudit, 1831, p. 430). Il pelote et manie et chiffonne, de ses doigts caressants, des satins, dans lesquels il fait courir des moires et des cassures luisantes (GONCOURT, Journal, 1883, p. 243).
P. métaph. Augustin voyait de près sur le visage encore robuste de sa mère, tout un réseau de plis et de rides né depuis son dernier séjour. Il maniait du regard, comme il en eût de sa main palpé l'étoffe (MALÈGUE, Augustin, t. 1, 1933, p. 294).
2. Avoir en main quelque chose ou quelqu'un que l'on déplace, que l'on remue. Manier un cadavre, un essaim d'abeilles; manier qqn avec douceur. Un léger murmure de grelots annonça qu'on maniait les harnais (MAUPASS., Contes et nouv., t. 2, Boule de suif, 1880, p. 119). Adroits, habitués à manier des objets délicats, deux ouvriers soulevèrent Jean avec précaution (CHARDONNE, Dest. sent., III, 1936, p. 262). Lundi, il s'est sauvé, il a pris le train et il est rentré chez lui. C'est en maniant une arme à feu qu'il s'est tué (GREEN, Moïra, 1950, p. 133).
P. ext.
a) Remuer, déplacer quelque chose (avec une autre partie du corps). Les Maori manient les ficelles avec leurs dents et leurs doigts de pied aussi bien qu'avec leurs mains (LOWIE, Anthropol. cult., trad. par G. Métraux, 1936, p. 188).
b) Remuer, déplacer les mains ou les pieds. Ce géant osseux à la grosse moustache broussailleuse semblait puéril à cause de son inhabilité à manier ses formidables mains et ses pieds (BARRÈS, Serv. All., 1905, p. 139). Avec son sourire de monseigneur et ses grosses mains qu'il manie si doucement (BERNANOS, M. Ouine, 1943, p. 1532).
3. ARTS
a) [En parlant de matériau] Façonner, modeler avec la main. Manier la cire. V. maquette A 1 ex. de Balzac.
Modeler avec un outil. Après quinze siècles de production ininterrompue, le statuaire thébain manie la matière avec trop de facilité (FAURE, Hist. art, 1909, p. 54).
b) [En parlant d'une peinture] Employer judicieusement (les tons, les couleurs); exceller à rendre quelque chose. Manier les éléments d'une composition. Une toile peinte dans les tons les plus difficiles à manier: les cadmiums et les violets, toile éblouissante pleine de vérité (LHOTE, Peint. d'abord, 1942, p. 150):
2. Comme d'autres un madrigal, il improvisait des épopées. Comme d'autres manient les physionomies et les gestes par des couleurs et des volumes, il maniait, non pas au gré de son esprit, mais au gré des instincts sauvages que lui imposaient ses sens, les foules, la mer et les nuages par de la lumière et de l'obscurité.
FAUREHist. art, 1914, p. 447.
c) ART CULIN. Malaxer, pétrir; mélanger du beurre ramolli avec une autre substance (farine, persil, etc.). Sauce hachée (...) au moment de servir, vous y mettez un ou deux anchois pilés et maniés avec du beurre (VIARD, Cuisin. roy., 1831, p. 44). Foie de boeuf sur le gril. (...) servez deux tranches l'une sur l'autre, et mettez entre chacune une boulette de beurre manié de persil (AUDOT, Cuisin. campagne et ville, 1896, p. 196).
Part. passé en emploi adj. Beurre manié. Beurre ramolli dans lequel on a incorporé de la farine. Une sauce liée au beurre manié ne doit plus bouillir, parce qu'elle risque de contracter un désagréable goût de farine crue (L'Art culinaire fr., Paris, Flammarion, 1950, p. 165).
4. [En parlant d'un objet, d'un outil, d'une arme, d'un instrument] Utiliser, employer quelque chose que l'on a en main; s'en servir. Ces doigts boudinés et roses, ces poignets épais et grossiers, c'étaient les mains d'un homme dont le père, durant un demi-siècle, avait dû manier la charrue (MONTHERL., Lépreuses, 1939, p. 1452). Quelqu'un qui sait se servir de ses mains, c'est quelqu'un qui sait manier des outils, qui a un métier en mains (RICOEUR, Philos. volonté, 1949, p. 198). S'il ne s'agit que de tenir le sabre, dit-il, c'est facile (...). Quant à le manier, c'est une affaire d'homme (GIONO, Angelo, 1958, p. 224):
3. ... une fille qui sait une foule de belles choses, je l'avoue, mais qui manie également le couteau d'une manière fort agréable, comme j'en ai reçu moi-même la preuve dans l'épaule...
GOBINEAU, Nouv. asiat., 1876, p. 36.
SYNT. Manier l'épée, le fleuret, un fusil, la lance, le poignard, le révolver; manier l'aiguille, le burin, le pinceau; manier la hache, le maillet, le marteau, la pelle, le tournevis; manier la raquette; manier qqc. adroitement, habilement, hardiment, vigoureusement, avec adresse.
Emploi pronom. passif. La vergue de la voile se manie à l'aide d'une roue placée sur l'habitacle (DU CAMP, Nil, 1854, p. 200).
En partic.
a) [En parlant d'un produit] Utiliser, employer. Manier un médicament avec discrétion. C'est à partir de ce moment (...) qu'on s'appliqua à manier adroitement les assaisonnements, à les manier harmonieusement (ALI-BAB, Gastr. prat., 1907, p. 28):
4. ... c'était une image qui, un jour, se présenterait à mon esprit entièrement décantée de tout ce qu'elle contenait de nocif, comme ces poisons mortels qu'on manie sans danger, comme un peu de dynamite à quoi on peut allumer sa cigarette sans crainte d'explosion.
PROUST, J. filles en fleurs, 1918, p. 626.
b) [En parlant d'un bateau, d'un véhicule, etc.] Le manoeuvrer, le faire évoluer. Dans les idées de mon père, un officier de marine ne devait savoir manier que son vaisseau (CHATEAUBR., Mém., t. 1, 1848, p. 83). C'était de très petits canons (...). On les maniait aisément (A. FRANCE, J. d'Arc, t. 1, 1908, p. 153). Avion assez rapide, avec de fortes réserves d'essence, mais difficile à manier (MALRAUX, Espoir, 1937, p. 561).
B.Au fig.
1. [En parlant d'un animé]
[En parlant d'une pers.] Diriger, faire agir quelqu'un comme on le désire. Manier qqn doucement. C'était la personne la plus difficile à manier qu'il y eût au monde. J'en étais venue à bout dans ses dernières années, mais ce n'était pas sans peine et sans souffrance (SAND, Hist. vie, t. 2, 1855, p. 246). Elle refusa et fit une telle résistance qu'il dut s'apercevoir qu'il n'est pas facile de manier une sainte (A. FRANCE,J. d'Arc, t. 1, 1908 p. 310):
5. Les petits enfants sont en somme ce que je connais le mieux et ce que je manie avec le plus d'adresse. Je les possède à la fois par intuition et par expérience, et je les lis jusque dans les moelles.
AMIEL, Journal, 1866, p. 134.
[En parlant d'un animal] Conduire, mener, diriger. La belle, objet de tous les voeux, montée sur un très-beau cheval bai, qu'elle maniait avec adresse (BRILLAT-SAV., Physiol. goût, 1825, p. 303). Le chameau n'a pas été facile à domestiquer et aujourd'hui encore il est besoin de beaucoup d'habileté pour savoir le manier (LOWIE, Anthropol. cult., trad. par G. Métraux, 1936, p. 62).
2. [En parlant d'une chose abstr.] Utiliser, employer habilement. Manier le langage, des idées, des notions, des mots, des symboles; manier l'ironie, la moquerie, la morale. Je ne fais plus d'astrologie, me dit-il brusquement. C'est une science à la fois trop précise et pas assez, que personne ne sait aujourd'hui manier (ABELLIO, Pacifiques, 1946, p. 136). Honneur de cette langue anglaise, que nous ne parlons plus au souper, depuis que Mme Rezeau s'est aperçue que nous savions désormais la manier mieux qu'elle (H. BAZIN, Vipère, 1948, p. 231).
3. Avoir entre les mains, diriger quelque chose. Depuis longtemps Madame Gérard n'avait eu à manier une affaire aussi intéressante que ce mariage (DURANTY, Malh. H. Gérard, 1860, p. 205).
En partic. Gérer (des fonds); s'occuper de (sommes d'argent importantes). Manier les deniers de l'État, de gros capitaux. Ces vieux banquiers, tous deux retirés à la campagne (...) lui laissèrent leurs fonds à manier, moyennant un léger intérêt (BALZAC, Curé vill., 1839, p. 20). Les comptables du Trésor manient des deniers publics. Les comptables des corps de troupe (...) manient soit des deniers ministériels (...) soit des deniers privés (LUBRANO-LAVADERA, Législ. et admin. milit., 1954, p. 180):
6. Tous les jours il était appelé à manier des sommes considérables; ce matin même, à côté de l'enveloppe aux treize mille francs, une autre enveloppe contenant quinze mille était là...
GIDE, Souv. Cour d'ass., 1913, p. 635.
4. Rare. Changer, modifier la forme, la disposition de quelque chose. Synon. remanier. Je les ai tellement travaillées [les pages], recopiées, changées, maniées, que pour le moment je n'y vois que du feu (FLAUB., Corresp., 1852, p. 394).
Prononc. et Orth.:[manje], (il) manie [mani]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1165 maneier «toucher avec la main» (BENOÎT DE STE-MAURE, Troie, éd. L. Constans, 29236); 1690 manier «éprouver la qualité d'une chose en la tâtant avec les mains» (FUR.); 2. ca 1180 maniër «avoir en main (quelque chose, pour l'utiliser)» (MARIE DE FRANCE, Fables, éd. K. Warnke, 92, 10); d'où a) ca 1200 maneier «utiliser, se servir d'un outil» (Chanson Guillaume, éd. D. MacMillan, 1741); p. ext. 1256 maniier «gérer, administrer» (Août, Flines, Arch. Nord ds GDF.); fin XIVe s. argent mannyer (EUSTACHE DESCHAMPS, Ballades, éd. Queux de Saint-Hilaire, t. 5, p. 233, 38); b) fin XVe s. fig. manyer qqn «le diriger, l'influencer» (COMMYNES, Mém., éd. J. Calmette, t. 1, p. 170); c) 1559 manier «faire évoluer (un animal)» (AMYOT, Marius, 22 ds LITTRÉ); d) se manier «se dépêcher», v. se magner; 3. XIIIe s. manier «façonner» (Médicinaire liégeois, éd. J. Haust, 311). Dér. anc. de main; suff. -eier, v. -oyer, réduit à -ier. Fréq. abs. littér.:1080. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 1174, b) 1579; XXe s.: a) 1872, b) 1619.
DÉR. Maniage, subst. masc. a) Action de manier l'argile afin d'en faire des boules destinées à être moulées. [Pour le] moulage à la balle, on fait par le maniage des balles de pâte bien homogènes (Al. BRONGNIART, Arts céram., t. 1, 1844, p. 136). b) Opération consistant à faire glisser les feuilles d'or les unes sur les autres en les étageant, afin de les détacher de la baudruche, où elles finiraient par s'incruster (d'apr. GUÉRIN 1892). []. 1res attest. 1694 (CORNEILLE), a) 1840 (Ac. Compl. 1842), b) 1873 (Lar. 19e); de manier, suff. -age.
II.
⇒MAGNER (SE), MANIER2 (SE), verbe pronom.
Arg. et pop. Se dépêcher, faire vite; agir avec célérité. Synon. se grouiller (pop.), se remuer (fam.). — Quelle heure est-il? demanda Pinette. — Cinq heures dix. — Merde! Je suis déjà en retard. — Eh bien! Magne-toi, vas-y (SARTRE, Mort ds âme, 1949, p. 98). Des caves décarrant de leur boulot, dropaient dans la rue. Ils se magnaient vers leur rata (LE BRETON, Rififi, 1953, p. 205).
Emploi pronom. réfl. indir. Se magner le cul, le fion, les fesses, la fraise, l'o(i)gnon, le prose, le rond. Eh bien, grouille-toi, fais fiça, magne-toi le pot, le popotin si tu préfères (QUENEAU, Pierrot, 1942, p. 80). Tout le monde aux abris et un peu vite! Allons, maniez-vous le train (H. BAZIN, Tête contre murs, 1949, p. 83). Et magne-toi la raie si tu veux pas qu'on se fâche (LE BRETON, Rififi, 1953, p. 114).
Prononc. et Orth.:[], [-nje]. Ds Lar. Lang. fr. var. se manier. Étymol. et Hist. 1907 se magner «se dépêcher» (FRANCE); 1916 s'manier la fraise «s'activer, se hâter» (BARBUSSE, Feu, 1916, p. 232); 1918 se manier, magne-toi (DAUZAT, Arg. guerre, p. 179). Se magner forme pop. (cf. magnier «remuer» dès 1753) issue phonétiquement de se manier attesté au sens de «se mouvoir, s'activer (d'un bateau)» dès le début du XVIIe s. 1616-20 D'AUBIGNÉ, Histoire universelle, Maillé, t. 2, p. 302, «se mouvoir (de quelqu'un)» au XVIe s. ds TH. DE BÈZE, Ps. de David, 147 ds HUG., (cf. l'a. fr. se manoier «se remuer» 1180-90 ALEX. DE PARIS, Alexandre, III, 7640 in Elliott Monographs, 37, p.316), emploi pronom. de manier «faire aller».

1. manier [manje] v. tr. [CONJUG. prier.]
ÉTYM. V. 1165, maneier; de main.
1 Vx. Tâter, palper. Palper, patiner (vx), toucher. || Manier une étoffe pour juger de sa qualité.
1 Innocent, lui dit-elle, ce feu-là (le follet) ne brûle point, et si tu étais assez subtil pour le manier, tu verrais qu'il ne laisse pas seulement sa marque.
G. Sand, la Petite Fadette, XIII.
2 (V. 1180). Avoir en main, entre les mains (un objet, un être que l'on déplace, remue, presse…). || Manier un paquet avec précaution (→ Étiquette, cit. 2). Manipuler. || Manier un haltère (cit. 2) avec adresse. || Enfant qui manie un jouet (cit. 1) nouveau. || Rien n'avait été manié, profané (→ Intact, cit. 2). Malaxer, tripoter (fam.), tripatouiller (fam.). || Impotent qui se laisse manier comme un cadavre (cit. 6). || Manier quelqu'un brutalement (cit. 2).
2 Il ne se sert à table que de ses mains; il manie les viandes, les remanie, démembre, déchire (…)
La Bruyère, les Caractères, VI, 121.
3 Chaque soir, en maniant un col, une cravate, il lui semblait recommencer les préparatifs de ce grand jour.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. III, V, p. 79.
3 Spécialt. Façonner, modeler avec la main. Modeler, pétrir. || Manier de la cire (→ Maniable, cit. 1), de l'argile.
Vieilli. Façonner avec un outil, mettre en œuvre. || Manier le bronze.
4 Bernin n'a pas manié le marbre ni traité toutes ses figures d'une égale force.
La Bruyère, Discours de réception à l'Académie, 15 juin 1693, Préface.
5 Dès qu'il s'agissait d'aller à l'atelier du Gros-Caillou, manier la glaise et réaliser la maquette (…)
Balzac, la Cousine Bette, Pl., t. VI, p. 320.
4 (V. 1200, maneier). Utiliser avec les mains, se servir de (un outil, un instrument, etc.) avec plus ou moins d'adresse, d'habileté. || Manier les armes (cit. 3), les armes blanches (→ Escrime, cit. 2 et 3), le poignard (→ Gladiateur, cit. 2), l'escopette (cit. 2). || Manier des outils (→ Hache, cit. 3; hoyau, cit. 2), le pinceau (→ Coutume, cit. 1). || Savoir manier un livre pour y retrouver un passage (→ Érudition, cit. 5).
6 C'est que vous croyez avoir affaire à quelque barbier de village, et qui ne sait manier que le rasoir ?
Beaumarchais, le Barbier de Séville, III, 5.
7 Sa main, si molle, si fluide, maniait un pistolet, un fusil, avec la vigueur d'un chasseur exercé.
Balzac, Une ténébreuse affaire, Pl., t. VII, p. 483.
8 (…) elle passait souvent ses matinées dans le potager; elle savait manier à propos la serpe, le râteau et l'arrosoir (…)
A. de Musset, Nouvelles, « Margot », V.
(En parlant d'une machine, d'un véhicule). Utiliser pour une manœuvre. || Véhicule facile, difficile à manier.
9 Avion assez rapide, avec de fortes réserves d'essence, mais difficile à manier.
Malraux, l'Espoir, II, I, V.
Loc. fig. Manier la brosse à reluire.
(Fin XIVe). || Manier de l'argent. Brasser, manipuler. || Ce caissier manie des sommes considérables (→ Elles lui passent par les mains).Par ext. || Manier des fonds. Gérer.
10 Il est aussi capable de manier de l'argent que de porter les armes.
La Bruyère, les Caractères, I, 153.
11 (…) il avait fini par se trouver maître du comptoir après avoir désintéressé ces vieux banquiers, tous deux retirés à la campagne et qui lui laissèrent leurs fonds à manier, moyennant un léger intérêt.
Balzac, le Curé de village, Pl., t. VIII, p. 551.
(1559). Techn. (hippol.). Vieilli. || Manier un cheval, le mener, le faire manœuvrer, évoluer. Travailler.
12 S'il monte un cheval que l'on lui a prêté, il le presse de l'éperon, veut le manier, et lui faisant faire des voltes ou des caracoles, il tombe lourdement et se casse la tête.
La Bruyère, les Caractères de Théophraste, « Tardive instruction ».
5 (Fin XVe). Fig. (Compl. n. de personne). Mener à son gré. Conduire, diriger, manœuvre, mener. || Manier les masses (→ Instituteur, cit. 3). || Un caractère difficile, facile à manier. Gouverner; maniable.
13 Non, l'on n'a point vu d'âme à manier si dure,
Ni d'accommodement plus pénible à conclure (…)
Molière, le Misanthrope, IV, 1.
14 (…) la comtesse, qui avait deviné son intendant, le surveillait adroitement, et savait si bien le manier, qu'elle en avait déjà tiré un très bon parti pour l'augmentation de sa fortune particulière.
Balzac, le Colonel Chabert, Pl., t. II, p. 1122.
6 (Compl. désignant des idées, des mots…). Employer de façon plus ou moins habile. || Manier les idées avec prudence (→ Force, cit. 69). Traiter, utiliser. || Manier des principes (→ Géomètre, cit. 4), une vérité (→ Épuiser, cit. 13), un argument. || Sujet aisé à manier (→ Ingrat, cit. 9). || Manier savamment une langue (→ Évocatoire, cit.). User (de). || Être habile à manier les mots (→ Idée, cit. 15). || Savoir manier l'ironie, le paradoxe…Iron. || Manier la gaffe.
15 On considère maintenant en France, et avec raison, comme le complément nécessaire d'une éducation élégante, une certaine facilité à manier ce qu'on est convenu d'appeler le style épistolaire.
Hugo, Littérature et Philosophie mêlées, « Fantaisie », avr. 1820.
16 Au théâtre, nul depuis Victor Hugo n'a manié l'alexandrin dramatique d'une façon plus magistrale.
Th. Gautier, Portraits contemporains, « L. Bouilhet ».
17 (…) il maniera la plaisanterie comme un humoriste audacieux (…)
G. Duhamel, les Plaisirs et les Jeux, II, XI.
——————
se manier v. pron.
1 (Au sens passif). Être manié. || Cheval qui se manie très bien (→ Courbette, cit. 1). || Outil qui se manie aisément.
2 (Au sens réfl.). a Vx. Se conduire avec adresse et diligence.
18 Châteauneuf savait se manier, et s'était mis fort avant dans la confiance de la princesse des Ursins, à qui il ne fut pas inutile.
Saint-Simon, Mémoires, II, XXII.
b (1907). Mod. et fam. || Se manier [manje] (seult inf.) ou se magner [maɲe]  : se dépêcher. → Se grouiller. || On t'attend, tu feras bien de te manier (→ Fascicule, cit. 1). || Magnez-vous, les gars ! || Magne-toi !
19 (…) becqueter, manger, piqueter, boire (…) et se manier, se remuer, qu'il faut bien écrire becter, picter, magner, puisqu'ils se conjuguent : je becte, je picte, ou magne-toi.
A. Dauzat, l'Argot de la guerre, VI.
20 Il y a des meubles, derrière la caserne, des matelas, des brocs, des pots à eau, il n'y a qu'à se baisser pour les prendre, mais il faut vous manier parce que c'est la foire d'empoigne.
Sartre, la Mort dans l'âme, p. 222.
21 Si je tournais pas les pouces, que je me magne du matin au soir et la nuit encore, que je drope comme un zèbre, je devais y arriver peut-être en quinze à vingt jours. C'est-à-dire juste pour les épreuves !
Céline, le Pont de Londres, p. 121.
(Même sens).Se manier, se magner le train, le cul, le pot, le popotin.
22 Ce n'est pas trop tôt, dit-il. Enfile-moi cet uniforme, là, oui, c'est ça, eh bien, grouille-toi, fais fiça, magne-toi le pot, le popotin si tu préfères, enfin t'y voilà (…)
R. Queneau, Pierrot mon ami, Folio, p. 81.
REM. La graphie magner correspond à une hésitation dans la prononciation, entre [manje] et [maɲe].
——————
manié, ée p. p. adj.
|| Outil bien, mal manié.Spécialt. Cuis. || Beurre manié, malaxé et mêlé à une substance (farine, etc.) par un pétrissage manuel.
DÉR. Maniable, maniage, maniement, maniette, manieur.
COMP. Remanier.
————————
2. manier [manje] n. m.
ÉTYM. Fin XVIe, d'Aubigné, au manier; inf. substantivé de manier.
Rare. Maniement. || « Vous reconnaîtrez cette étoffe au manier » (Académie, 1936).

Encyclopédie Universelle. 2012.