mitraille [ mitraj ] n. f.
• mistraille 1375; a. fr. mitaille, de mite « morceau de cuivre de Flandre », moy. néerl. mite, d'un rad. germ. mit- « couper en morceaux »
1 ♦ Ferraille, puis balles de fonte qu'on utilisait autrefois sur les canons comme projectiles meurtriers. Canons chargés à mitraille. Tirer à mitraille. — Mod. et cour. Décharge d'artillerie, spécialt d'obus et de balles. Fuir sous la mitraille. « les lignes de défense crachaient sans arrêt leur mitraille » (Martin du Gard).
2 ♦ Fam. Menue monnaie de métal. ⇒ ferraille. Avoir les poches pleines de mitraille.
3 ♦ Vx Débris de métaux. ⇒ ferraille.
● mitraille nom féminin (ancien français mitaille, de mite, menue monnaie) Amas de ferraille qui entrait jadis dans la composition des cartouches d'artillerie. (On disait charger, tirer à mitraille, par opposition à charger ou tirer à boulets.) Décharge d'obus, de balles. Familier. Menue monnaie de métal. Ensemble de menus déchets de métal ou d'alliage. ● mitraille (citations) nom féminin (ancien français mitaille, de mite, menue monnaie) Victor Hugo Besançon 1802-Paris 1885 Tranquille, souriant à la mitraille anglaise, La garde impériale entra dans la fournaise. Les Châtiments, l'Expiation, V, 13 ● mitraille (expressions) nom féminin (ancien français mitaille, de mite, menue monnaie) Boîte à mitraille, enveloppe cylindrique renfermant la ferraille et les balles utilisées dans les anciens canons. Obus à mitraille, obus rempli de galettes de fonte qui se morcellent dans l'éclatement du projectile.
mitraille
n. f.
d1./d Menus morceaux de cuivre; vieille ferraille.
|| Fam. Menue monnaie.
d2./d Décharge de balles, d'obus.
⇒MITRAILLE, subst. fém.
I. —Pop. et fam. Menue monnaie; monnaie de billon. Synon. fam. ferraille. Il ne m'a payé qu'en mitraille (Ac. 1835, 1878). Tu trouveras aisément une centaine de pièces de deux liards à l'effigie de Louis XV et de Louis XVI? — Eh! que diable, voulez-vous faire de cette mitraille? (RABAN, MARCO SAINT-HILAIRE, Mém. forçat, t.2, 1828-29, p.123). Mais pas besoin de simagrées. Voilà trois francs, Amédée, et garde la mitraille (ARNOUX, Solde, 1958, p.188).
II. A. —Ensemble de fragments de divers métaux (comprenant clous, morceaux de ferraille, débris de cuivre, de bronze) destinés à la fonte. On classe séparément les divers échantillons de fonte de provenance variée, en fontes blanches, truitées ou grises. Puis les lingots d'acier (...); enfin, les profilés, les tôles, les mitrailles, etc. (BARNERIAS, Aciéries, 1934, p.82).
— TECHNOL. Laiton à souder (composé de cuivre, de fer et d'argent); ,,débris de laiton utilisé pour faire des brasures`` (DUVAL 1959).
B. —ARTILL., vx. Ensemble de vieux fers, clous, fragments de divers métaux dont à l'origine on chargeait les canons (incorporés le cas échéant, à des matériaux explosifs) et employés, par la suite dans la fabrication des cartouches pour l'artillerie (une fois enfermés dans des boîtes ou en paquets dans des sacs de toile). Tonneau rempli de poudre et de mitraille; canon chargé de mitraille, canon à mitraille; tirer à mitraille. Il a existé un complot tendant au meurtre du Premier Consul; (...) il y a eu amas de poudre, mitraille, balles et pierres pour l'exécution de ce complot; (...) ces munitions ont servi à composer une machine meurtrière (Procès conspir. 1erConsul, t.2, 1801, p.336). Pour tirer à mitraille, il faut être près de l'ennemi, parce que la mitraille ne porte pas loin. On ne se sert de ce genre de projectile que contre les masses, car la mitraille s'écarte comme le petit plomb (BOUILLET 1859). L'emploi de la mitraille est presque contemporain de l'emploi de l'artillerie (BACH.-DEZ. 1882).
— P. métaph. [À propos d'un mélange de petits corps durs] Maurice avala cette mitraille [des petits pois mal cuits] (H. BAZIN, Qui j'ose aimer, 1956, p.66).
— Boîte à mitraille. Ancien projectile formé de vieux fers, clous, fragments de métaux, de balles et de biscaïens, enfermés dans une petite boîte cylindrique en fer-blanc (afin de ne pas endommager l'âme des canons), et qui éclatait dès sa sortie de la bouche à feu. Les boîtes à mitraille sont destinées à la défense rapprochée, de 0 à 600 mètres (ALVIN, Artill., Matér., 1908, p.221). V. aussi crachat rem., ex. de Zola.
— Obus à mitraille.
C. — 1. Décharge collective d'armes à feu, notamment de pièces d'artillerie:
• 1. La France ne se séparera plus de vous, Républicains, car la France n'a jamais demandé que deux choses à un gouvernement: l'ordre et la liberté. Or, l'ordre, c'est vous qui pouvez seuls l'assurer, non pas pour un jour, mais pour toujours; non pas par des mitrailles ou des charges de cavalerie sur les boulevards!
Fondateurs 3e Républ., Gambetta, 1872, p.163.
— En partic. Décharge, tir nourri d'obus, de balles d'armes automatiques (fusils, mitrailleuses). Synon. feu, bombardement. Braver la mitraille; charger sous la mitraille; fuir, résister, tenir sous la mitraille. P. méton. Ensemble des projectiles ainsi tirés incluant les éclats d'obus. Le tir faisait rage: les lignes de défense crachaient sans arrêt leur mitraille; de minute en minute, une nouvelle batterie, plus proche, entrait en action. (...). Dans les intervalles des coups, il perçut, soudain un crépitement de mitrailleuses (MARTIN DU G., Thib., Épil., 1940, p.905). Les paysans moissonnent la tête en l'air, sous les avions qui lâchent des bordées de mitraille (TRIOLET, Prem. accroc, 1945, p.383).
♦P. métaph., au fig. Une mitraille de dragées, de fleurs, de bravos, de baisers, de salive. La réalité du cirque et sa mitraille circulaire d'yeux avides (COLETTE, Jumelle, 1938, p.165):
• 2. Certes, c'est quelque chose que d'avoir construit les barricades de février (...) mais c'est quelque chose aussi que d'être sans cesse (...) debout sur les barricades de la pensée, exposé aux haines du pouvoir et à la mitraille des partis.
HUGO, Actes et par., 2, 1875, p.177.
2. P. méton., arg. milit. Ensemble des mitrailleurs d'un régiment. Au 219e les lettres sont adressées «(...) 3e Mitraille», le capitaine Courtois, en arrivant au 116e Inf., ordonne que les adresses portent «(...) C. M.-3». Au 109e le poilu ne dit jamais la troisième cé-èm (ESN., Notes compl. «Poilu», [1919] 1956).
Prononc. et Orth.:[], [-aj]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. 1. a) 1375 mistraille «morceau de métal» (Arch. KK 350, f° 276 v° ds GDF., s.v. mitaille); b) 1667 mitraille «sorte de ferraille dont on charge les canons» (FOURNIER, Hydrographie); 1765 «balles de fer mêlées de ferraille, dont on charge les canons» (Encyclop.); c) 1872 boîte à mitraille (HUGO, Année terr., p.106); 1908 obus à mitraille (ALVIN, Artill., Matér., p.215); 2. 1872 «décharge collective d'artillerie» (Fondateurs 3e Républ., loc. cit.). II. 1701 pop. «menue monnaie de cuivre» (Trév.). Altération de l'a. fr. mitaille attesté au sens de «morceau de métal» en 1295 (doc. ds GDF.) et de «petite monnaie» au XIVe s. (GDF.), lui-même dér., à l'aide du suff. -aille, de l'a. fr. mite «monnaie de cuivre de Flandre» (1288, JACQUEMARD GIELÉE, Renart le Nouvel, éd. H. Roussel, 7350), lequel est empr. du m. néerl. mite «id.», dér. de la racine germ. mit- «couper en morceaux». Fréq. abs. littér.:231. Fréq. rel. littér.: XIXe s.: a) 229, b) 936; XXe s.: a) 303, b) 102. Bbg. GAMILLSCHEG (E.). Etymologische Miszellen. Rom. Jahrb. 1950, t.3, pp.290-291. — Neue Beitr. zur rom. Etymologie. Hrsg. von H. Meier. Heidelberg, 1975, pp.368-376. — QUEM. DDL t.3.
mitraille [mitʀɑj] n. f.
ÉTYM. 1375, mistraille; mitraille, 1667; altér. de l'anc. franç. mitaille « fragments de métaux », de mite (1288), moy. néerl. mite « monnaie de cuivre », d'un rad. germanique mit- « diviser, couper »; ou (P. Guiraud), de micitus, du lat. mica « miette ».
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1 Ferraille, puis balles de fonte qu'on utilisait autrefois dans les canons comme projectiles. || Canons chargés à mitraille. || Tir à mitraille. || Boulets (cit. 1) et mitraille. || Déluge de mitraille (→ Garder, cit. 18; flanc, cit. 13; fournaise, cit. 8). || Obus à mitraille. || Boîte à mitraille : boîte de ferraille ou de balles dont on chargeait un canon (la mitraille nue détériorant l'âme des canons).
1 Les canons sont tout chauds; ils ont fait leur devoir,
La mitraille invoquée a tenu sa promesse.
Hugo, les Années funestes, XXXVII, II.
♦ Mod., cour. Décharge d'artillerie, et, spécialt, d'obus et de balles. || Civils que la mitraille et les bombes ont arrêtés dans l'exode (cit. 6). || Fuir sous la mitraille. || Bruit, crépitement de mitraille.
2 À l'est, au nord, le tir faisait rage : les lignes de défense crachaient sans arrêt leur mitraille (…)
Martin du Gard, les Thibault, t. IX, p. 134.
2 (1701, Furetière). Fam. Petite monnaie de métal. || Je n'ai que de la mitraille sur moi.
REM. Un homonyme plaisant a servi à désigner sous la Révolution l'ensemble des évêques : mitraille, de mitre (d'après canaille, etc.).
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DÉR. Mitrailler.
Encyclopédie Universelle. 2012.