offusquer [ ɔfyske ] v. tr. <conjug. : 1> ♦ Indisposer (qqn) par des actes ou des propos qui lui déplaisent. ⇒ choquer, froisser, heurter. Il est offusqué d'un tel sans-gêne. « Les succès de Proust continuaient à offusquer Montesquiou » (Maurois).
♢ Pronom. Être choqué, se formaliser. ⇒ se froisser, s'offenser. Elle s'est offusquée de ce que vous lui avez dit.
● offusquer verbe transitif (bas latin offuscare, du latin classique fuscare, obscurcir) Blesser quelqu'un, le froisser, le heurter dans sa dignité, son honneur, ses opinions, etc. : Il l'a offusquée par ses récits grivois. ● offusquer (synonymes) verbe transitif (bas latin offuscare, du latin classique fuscare, obscurcir) Blesser quelqu'un, le froisser, le heurter dans sa dignité, son...
Synonymes :
- blesser
- choquer
- froisser
- heurter
- offenser
- piquer
- vexer
offusquer
v. tr. Choquer, porter ombrage à. Son franc-parler offusque les gens.
|| v. Pron. réfl. être choqué, froissé. S'offusquer d'une remarque.
⇒OFFUSQUER, verbe trans.
A. —[L'obj. désigne une chose]
1. Vieilli
a) Cacher à la vue, masquer. Mme de Genlis (...) n'attendait personne; elle était vêtue d'une robe noire: ses cheveux blancs offusquaient son visage (CHATEAUBR., Mém., t.3, 1848, p.338):
• 1. Quand je quittai Yeddo, le grand soleil flamboyait dans l'air net; à la fin de l'après-midi, arrivant à la jonction d'Utsonomiya, je vois que la nue offusque tout le couchant. Faite de grands cumulus amalgamés, elle présente cet aspect volumineux et chaotique qu'arrange parfois le soir.
CLAUDEL, Connaiss. Est, 1907, p.81.
b) Priver de lumière. Les croisées (...) étaient mal jointes et les vitres offusquées par un mur haut et proche (A. FRANCE, Mannequin, 1897, p.1):
• 2. [Le petit bourgeois] ne tolère (...) que les fruitiers, ceux qui rapportent, mais à la condition que ces végétaux malheureux rampent humblement le long des murs et n'offusquent pas le potager, car le petit bourgeois aime le soleil.
BLOY, Femme pauvre, 1897, p.243.
c) Gêner (la vue), empêcher de voir
— Gêner (la vue), empêcher de voir, par excès de lumière. Synon. éblouir. Le soleil m'offusque les yeux (Ac. 1835-1935). [P. méton.] La lumière l'offusque [le hibou], (...) trouble sa large prunelle faite pour l'ombre, amie de la clarté laiteuse de la lune et du rayon pâle de l'étoile (PESQUIDOUX, Chez nous, 1923, p.207).
— Gêner (la vue), empêcher de voir, en formant un écran. Synon. troubler. Mes regards étaient offusqués par ces larmes rebelles qui ne veulent pas tomber (BAUDEL., Poèmes prose, 1867, p.74).
2. Au fig., littér.
a) Masquer quelque chose, atténuer l'éclat de quelque chose, le prestige de quelqu'un. L'âme offusque le réel (DURRY, Nerval, 1956, p.134). L'éclat resplendissant du maître saxon [Wagner] offusque ses successeurs, et, seul, Richard Strauss parvient à rayonner à son tour (DUMESNIL, Hist. théâtre lyr., 1953, p.168).
b) En partic.
— [L'obj. désigne une faculté intellectuelle] Priver de clarté, de perspicacité. Offusquer la raison. J'ai souvent des ténèbres qui offusquent mon intelligence et je ne vois pas les vérités les plus simples (MAINE DE BIRAN, Journal, 1821, p.306). Une vague impression de complicité entre Geneviève et Françoise peu à peu m'offusquait l'esprit (BOSCO, Mas Théot., 1945, p.91).
♦[P. méton.] Va travailler mon fils, car j'ai remarqué que le travail te distrait de tes fantaisies qui t'offusquent et rend le calme à ta raison troublée par de mauvais songes (NODIER, Fée Miettes, 1831, p.164).
— [L'obj. désigne un obj. de connaissance, une recherche] Dès les premiers mots paraît l'invincible confusion qui offusque tout le débat (BREMOND, Poés. pure, 1926, p.84). Ce qui est évidence au regard ingénu disparaît quelquefois aux yeux des connaisseurs par la fixité même et le raffinement de leurs attentions. Il ne faut alors rien de moins qu'un homme de génie pour apercevoir quelque vérité essentielle et fort simple qu'ont offusquée les travaux et l'application d'une quantité de têtes profondes (VALÉRY, Variété IV, 1938, p.60).
B. —Au fig. [L'obj. désigne une pers.]
1. Vieilli. Porter ombrage à. Des députés ennemis jusqu'alors (...) se touchaient la main de joie, en pensant qu'ils auraient le bonheur d'écarter des hommes dont la supériorité les offusquait depuis deux années (STAËL, Consid. Révol. fr., t.1, 1817, p.334):
• 3. Il y avait trop d'avenir et trop de supériorité vraie chez Lucien pour que les jeunes gens, que son retour à Paris et sa fortune inexpliquable offusquaient ou froissaient, ne fussent pas enchantés de lui jouer un mauvais tour.
BALZAC, Splend. et mis., 1844, p.83.
2. Indisposer, choquer par une attitude, des propos qui heurtent le goût, la bienséance ou l'amour-propre. Le rire des gens et du pays m'offusquent; peut-être que j'appelle «être triste» simplement n'être pas aussi bruyant qu'eux (GIDE, Porte étr., 1909, p.553).
— [P. méton.] Offusquer les bonnes moeurs. À ces tromperies des personnages d'une piété et, souvent, d'une vertu incontestées ne craignaient pas de prêter la main. Visiblement, elles n'offusquaient guère la moralité commune (M. BLOCH, Apol. pour hist., 1944, p.44).
— Empl. pronom. réfl. S'offusquer de qqc. Se formaliser de quelque chose. Indifférence ou dissimulation, Gina eut le talent de ne pas s'offusquer d'être laissée seule dans son taxi, place de l'Étoile (ABELLIO, Pacifiques, 1946, p.52):
• 4. Engagé jeune dans l'état ecclésiastique, il fut nommé (...) curé de la paroisse de Saint-Sulpice (...). Sa piété tendre et susceptible s'offusqua d'une foule de choses qui, jusque-là, avaient paru innocentes, par exemple d'un cabaret qui s'était établi dans les charniers de l'église et où les chantres buvaient.
RENAN, Souv. enf., 1883, p.208.
3. Littér. Choquer par une impression sur les sens ou la sensibilité. Dans une rue, j'ai été offusquée de la teinte uniformément rousse des devantures de boutiques, ce rouge de vieux sang me crispait (FRAPIÉ, Maternelle, 1904, p.296). Il ouvrit la porte de sa chambre et fut aussitôt offusqué par la poignante fragrance de fauve qui s'étalait en nappes épaisses dans l'atmosphère de la pièce (QUENEAU, Pierrot, 1942, p.178).
REM. Offusquement, subst. masc., rare. Action d'offusquer (v. supra A 2 b); résultat de cette action. Synon. offuscation (v. ce mot B). Tu passes de l'insecte aux mammifères; c'est passer de l'intelligence à la sensibilité. Ils ont le sang, le lait, les règles. Leur intelligence en est un peu offusquée, leur personnalité fortifiée et énervée. Les mâles, qui n'ont pas l'offusquement du sang et des règles, ont celui de leurs désirs (MICHELET, Journal, 1857, p.332).
Prononc. et Orth.: [], (il) offusque []. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Fin du XIVe s. «arrêter dans son fonctionnement régulier» (Somme maître Gautier, ms. B.N., fr. 1288, f°19v° ds GDF. Compl.); 2. a) début du XVe s. «empêcher quelque chose d'être vu, en le masquant» (E. DESCHAMPS, La Fiction du lyon, 1014 ds OEuvres compl., éd. G. Raynaud, t.8, p.278); b) ca 1485 au fig. (Myst. du V. Testament, éd. J. de Rothschild, 39693: songe offusqué [cf. aussi ibid., 40144]); 3. ca 1485 «empêcher, boucher (la vue)» (ibid., 10247); 4. a) 1766 «porter ombrage à quelqu'un, l'indisposer» (BESENVAL, Mém., I, 328 ds BRUNOT t.6, p.1363); b) 1832 pronom. (RAYMOND). Empr. au b. lat. offuscare, proprement «obscurcir» (ob, fuscus «sombre»), également «gêner (la vision)» et, au fig., «diminuer l'éclat de quelque chose», v. Nov. gloss. Fréq. abs. littér.:136. Bbg. GOHIN 1903, p.345.
offusquer [ɔfyske] v. tr.
ÉTYM. XIVe, obfusquer « gêner, porter préjudice à »; du lat. offuscare « obscurcir ».
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1 Vieilli ou littér. Empêcher (un objet) d'être vu, en masquant. ⇒ Cacher. || Les nuages offusquent le soleil. ⇒ Éclipser, obscurcir. || Cheveux qui offusquent la figure (→ Muguet, cit. 3).
1 Un taillis de sourcils hideusement offusque
Ses gros yeux enflammés, ensanglantés et roux (…)
Ronsard, Second livre des hymnes, « Pollux et Castor ».
2 (…) ses cheveux blancs offusquaient son visage (…)
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. IV, p. 293.
♦ (Le compl. désigne la lumière). || Rideau qui offusque la lumière du jour.
2 Vieilli ou littér. Empêcher de voir, boucher la vue. || Un mur offusquait la fenêtre. — Au p. p. || Vitres d'une fenêtre (cit. 5) offusquées par un mur haut et proche. — Les larmes offusquent sa vue. ⇒ Troubler.
3 (…) je me suis avancée, et, le cœur gros de sanglots, j'ai collé mon visage sur le sien : je n'ai plus su ce qu'il devenait; les larmes m'offusquaient la vue, ma tête commençait à se perdre, et il était temps que mon rôle finît.
Rousseau, Julie ou la Nouvelle Héloïse, I, Lettre LXV.
3 (Déb. XVIe). Fig. Priver l'esprit, pour quelque cause, de ses qualités naturelles, l'obscurcir. || Offusquer la raison. || Le corps, les organes offusquent l'âme (→ Affaisser, cit. 5; aveugler, cit. 12, Rousseau).
4 (…) je me délivrais peu à peu de beaucoup d'erreurs qui peuvent offusquer notre lumière naturelle (…)
Descartes, Discours de la méthode, I.
4 (XVIIIe). Indisposer (qqn) par des actes ou des propos qui lui déplaisent. ⇒ Choquer, froisser, heurter. || Ne lui parlez pas sur ce ton gaillard, vous l'offusqueriez. ⇒ Effaroucher. || Il est offusqué d'un tel sans-gêne. — Spécialt. || La réussite des autres l'offusque, le contrarie, lui porte ombrage.
5 Les succès de Proust continuaient à offusquer Montesquiou.
A. Maurois, À la recherche de Marcel Proust, X, II.
♦ Par ext. Choquer moralement. || Sa conduite offusque les bonnes mœurs. ⇒ Offenser.
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s'offusquer v. pron. réfl.
♦ Se froisser, se formaliser. ⇒ Choquer, froisser. || Il est susceptible, il s'offusque des moindres plaisanteries.
6 Les gens qui n'ont jamais manqué de rien peuvent s'offusquer qu'une vie confortable en tous points suffise à rendre heureux.
Pierre Benoit, Kœnigsmark, II, §7.
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CONTR. (Du fig.) Charmer, complaire, plaire.
DÉR. Offuscation.
Encyclopédie Universelle. 2012.