1. rade [ rad ] n. f.
• 1474; a. angl. rad → raid
♦ Bassin naturel de vastes dimensions, ayant issue vers la mer et dans lequel les navires peuvent trouver un bon mouillage. Mouiller sur rade, en rade. « la flotte était en rade, à Bizerte, à Toulon » (Sartre) .
♢ Loc. fam. EN RADE. Laisser (qqn, qqch.) en rade, l'abandonner. Une voiture en rade sur le bord de la route, en panne. Le projet est resté en rade.
⊗ HOM. Rad.
rade 2. rade [ rad ] n. m.
♦ Arg. Bar, bistrot.
● rade nom féminin (moyen anglais rade) Grand bassin, naturel ou artificiel, ayant issue libre vers la mer et où les navires peuvent mouiller. ● rade (expressions) nom féminin (moyen anglais rade) Familier. En rade, à l'écart, hors de course, à la traîne. ● rade (homonymes) nom féminin (moyen anglais rade) rad nom masculin rade nom masculin ● rade nom masculin (abréviation de radeau) Argot. Café, bar. ● rade (homonymes) nom masculin (abréviation de radeau) rad nom masculin rade nom féminin
rade
n. f. Vaste bassin naturel comportant une libre issue vers la mer, où les navires peuvent trouver de bons mouillages. La rade de Dakar.
I.
⇒RADE1, subst. fém.
MAR. Bassin naturel ou artificiel de vastes dimensions, ayant une issue vers la mer, où les navires trouvent un bon mouillage. Être, mettre en rade; mouiller en rade, sur rade; rade en eau profonde; la rade de Brest, de Toulon. La Grèce possède un bon port: le Pirée; deux rades excellentes à Salamine et à Milo. La rade de Syra est médiocre: elle n'est ni assez fermée ni assez profonde (ABOUT, Grèce, 1854, p. 176). Par la fenêtre, on voyait tout Paimpol, toute la rade, avec les Islandais là-bas, au mouillage, — et la passe par où ils s'en vont (LOTI, Pêch. Isl., 1886, p. 98):
• 1. ... des lotissements dans les labours inondés (...) aux alentours des grandes usines sur rade qui vomissent des fumées noires et des scories et qui engloutissent des trains de chalands de charbon qui glissent dans leurs entrailles surchauffées sur une eau fétide et huileuse.
CENDRARS, Homme foudr., 1945, p. 276.
♦ Grande rade. Plan d'eau qui sépare parfois les ports ou rades de la pleine mer, et peut servir de mouillage (d'apr. GRUSS 1952). Cet établissement est au fond de l'anse qu'on appelle de bon-port, qui fait partie de la grande rade; les bâtimens peuvent y mouiller à l'abri de tous les vents (Voy. La Pérouse, t. 4, 1797, p. 96).
♦ Rade fermée. Rade qui ne possède qu'une sortie étroite et se trouve bien abritée des vents et de la houle (d'apr. BARBER. 1969).
♦ Rade foraine. V. forain1 A 3.
— Loc. pop.
♦ Laisser qqn ou qqc. en rade, être en rade. Abandonner quelqu'un/quelque chose, être abandonné. Elle était parvenue à vendre une bonne partie des « rossignols », des guipures à franges et les lourds châles de Castille qu'étaient en rade depuis l'Empire! (CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 365):
• 2. — Alors, qu'est-ce qu'on va foutre? demanda Hamel dont la manche déchirée laissait couler un peu de sang. Tu ne vois pas qu'ils nous laissent en rade? — Mais non, dit Gilbert (...) mais on doit attendre que l'artillerie prépare.
DORGELÈS, Croix de bois, 1919, p. 204.
♦ [Le suj. désigne une chose ou une pers.] Être, rester, tomber en rade. Être en panne, être dans l'impossibilité de continuer. Projet qui reste en rade; voiture qui tombe en rade. [La Mouche, aux voyageurs du coche:] Si je n'étais pas là (...) Vous resteriez en rad', sans moteurs à crottin (MARCUS, Quinze fables, 1947, p. 9).
♦ [En parlant d'une pers.; avec une valeur d'adj.] En rade de. Dépourvu de. Institutrice 21 ans cherche copain sympa pour garder Frédérique, 4 ans et demi, marrante et dégourdie mais en rade d'affection, le samedi matin dès la rentrée (Le Sauvage, 1er oct. 1976, p. 129, col. 1).
Prononc. et Orth.:[]. Homon. rade2 et 3. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1474 « partie de mer qui s'enfonce dans la terre et présente aux vaisseaux des mouillages à l'abri des vents et des lames » (Ordonnance de Louis XI pour la formation d'un port et château fort à la Hague ds Rec. gén. des anc. lois fr., par MM. Isambert et Decrusy, t. 10, p. 682); 2. [1914 d'apr. ESN.] 1919 en rade « seul, à l'abandon » supra ex. 2. Empr. au m. angl. rade att. au même sens dep. 1320, issu du vieil angl. rád « chevauchée, voyage, passage » qui est aussi à l'orig. de la forme mod. road « voie, chemin, route », v. aussi raid.
II.
⇒RADE2, subst. masc.
Arg. Comptoir d'un bar. Pour faire plaisir au camarade On l'invite à v'nir en prendre un Su' l'rade (J. BERTHIER ds BRUANT 1901, p. 170). Au-dessus du rade étaient accrochées, collées, glissées (...) une tinée de photos, vedettes et boxeurs français (LE BRETON, Rififi, 1953, p. 131).
— P. méton. Café, bistrot. J'aimerais bien, tout de même, aller un de ces jours patienter une demi-heure « Chez Marcel », rue de la Santé, en face de la taule. Les visages de ce rade appartiennent à des amis non admis au parloir, des amis des parents du détenu (A. SARRAZIN, L'Astragale, 1966, p. 135).
Prononc.:[]. Homon. rade1 et 3. Étymol. et Hist. 1. 1815 « boutique » (Chanson de Winter ds VIDOCQ, Mém., t. 3, p. 297); 1935 (LACASSAGNE, Arg. « milieu »: rade. Bar. Synonyme de zinc.); 2. 1836 (VIDOCQ, Voleurs, t. 2, p. 45: rade ou radeau. Tiroir de comptoir); 3. 1844 « comptoir » (ID., Vrais myst. Paris, t. 4, p. 8). Dér. régr. de l'arg. radeau « comptoir » 1821 (ANSIAUME ds ESN.), empl. métaph. du fr. radeau. Bbg. SAIN. Arg. 1972 [1907] p. 255.
III.
⇒RADE3, subst. masc.
Arg., vieilli. Trottoir. J'ai poireauté deux plombes su'l'rade à attendre madame (BRUANT 1901, p. 431).
— Faire le rade. Se livrer à la prostitution sur la voie publique. Synon. faire le trottoir. Dix-huit ans: Je ferai le rade (LARCHEY, Dict. hist. arg., 1878, p. X).
REM. Radeuse, subst. fém., arg. Prostituée qui fait le trottoir. Tout un monde de clochards venus de Paris (...) en train de faire l'amour avec des chineuses en vacances et des radeuses sur le trimard (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 306). Ça fait pas reluisant, une ancienne radeuse, même honnête. Et ça ne se décrasse pas du métier en un jour (ARNOUX, Crimes innoc., 1952, p. 185).
Prononc.:[]. Homon. rade1 et 2. Étymol. et Hist. 1873 arg. des souteneurs « trottoir » (ds Figaro 4-8 d'apr. LARCHEY, loc. cit.). Orig. obsc.; il n'est pas sûr qu'il s'agisse du même mot que rade2. Le rattacher au norm. rade « chemin » (MOISY), que FEW t. 16, p. 652b range sous l'étymon ags. râd « chemin » se heurte au fait que ce subst. est fém. Quant à le tirer de rapidus « rapide », comme le font ESN. et CELLARD-REY, cela n'est pas fondé étant donné que le m. fr. rader n'est pas att. au sens de « cheminer » et que dérader, outre l'argument sém., est un dér. du subst. rade1.
STAT. — Rade1, 2 et 3. Fréq. abs. littér.:379. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 956, b) 579; XXe s.: a) 388, b) 251.
1. rade [ʀad] n. f.
ÉTYM. 1474; anc. angl. rad. → Raid, étymologie.
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1 Bassin naturel de vastes dimensions, ayant issue vers la mer et dans lequel les navires peuvent trouver un bon mouillage ⇒ Mouillage. (→ Abri, cit. 4; peupler, cit. 8). || Rade fermée. || Rade foraine. || Rade en eau profonde. || Goulet d'une rade. || Rade constituant un port naturel. || La rade de Toulon, de Villefranche, de Brest, de Bizerte. || Mouiller (cit. 9) sur rade, en rade. || Sur rade de Nagasaki (→ Pavois, cit. 3). || Navire que la tempête chasse hors d'une rade. ⇒ Dérader. || Entrer en rade. — Grande rade ou grand'rade : « plan d'eau qui sépare parfois les ports ou rades de la pleine mer et qui peut servir de mouillage aux bâtiments » (Gruss). || Mouiller en grande rade (→ 1. Appareiller, cit. 3). || La grand'rade de Brest, de Cherbourg.
1 La Triomphante, qui était sur rade (…) entre aujourd'hui au bassin, pour réparer ses flancs éraillés pendant le long blocus de Formose.
Loti, Mme Chrysanthème, XXIV.
1.1 Là, tout de suite, dès l'entrée en rade, c'était le commencement de la désagrégation du navire et de l'équipage (…) quelques canots arrivaient à l'entour de la Saône, lourds et rudes canots de la rade de Brest (…)
Loti, Matelot, p. 203.
2 (…) la guerre n'avait pas encore éclaté; les gens dînaient tranquillement dans les villas; pas un canon, pas un soldat, pas de barbelés, la flotte était en rade, à Bizerte, à Toulon (…)
Sartre, le Sursis, p. 49.
2 ☑ (1914). Loc. fam. En rade. || Laisser (qqn, qqch.) en rade : l'abandonner. || Rester en rade : être abandonné (cf. Rester en panne). || Projet qui reste, qui tombe en rade.
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DÉR. 2. Rader.
COMP. Dérader.
HOM. Rad, 2. rade, 3. rade.
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2. rade [ʀad] n. m.
ÉTYM. 1844, « comptoir », hésitation sur le genre : « la rade est le comptoir du marchand de vin » (A. Monnier in Larchey); « boutique », 1815; de radeau, même sens.
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♦ Argot. Bar. || Prendre un pot au rade. || Consommer au rade.
1 La grande glace courant derrière les boutanches (bouteilles), sur tout l'arrière du rade, lui renvoie son image. D'un soleil il a l'air dans toute cette grisaille, d'un milord parmi des gueux !
Albert Simonin, Hotu soit qui mal y pense, p. 78.
♦ Café. ⇒ Bistrot. || Se donner rendez-vous dans un rade.
1.1 Il tenait un rade à Marseille, rue Longue.
Roger Borniche, le Play-boy, p. 208.
2 Ils me disent d'apporter la livraison à trois heures, par exemple, et ils s'amènent à cinq, et moi je me fais tartir dans ce rade à boire des Ricard (…)
A. Sarrazin, l'Astragale, p. 127.
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HOM. Rad, 1. rade, 3. rade.
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3. rade [ʀad] n. m.
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♦ Argot. (Vx). ☑ Loc. Faire le rade : faire le trottoir, se prostituer.
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DÉR. Radasse, radeuse.
HOM. Rad, 1. rade, 2. rade.
Encyclopédie Universelle. 2012.