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ressouvenir

ressouvenir (se) [ r(ə)suv(ə)nir ] v. pron. <conjug. : 22>
XVIe; impers. XIIe; de re- et se souvenir
Vieilli ou littér. Se souvenir (d'une chose ancienne ou qui avait été oubliée). se remémorer. Elle « s'exténua encore une fois à se ressouvenir » (Duras). « Et je me ressouviens de mes jeunes amours » (Molière). (Avec ellipse de se) « Il lui fait ressouvenir qu'il lui a autrefois rendu service » (La Bruyère). rappeler, se souvenir.

I.
⇒RESSOUVENIR1 (SE), verbe pronom.
A. — Vieilli ou littér. Continuer à se souvenir d'une chose ancienne ou retrouver le souvenir d'une chose plus ou moins lointaine qui avait été oubliée. Synon. rappeler (se), remémorer (se); anton. oublier.
1. Absol. Tout le corps a de la mémoire. Les pieds d'un danseur, les doigts d'un musicien habile, ont, dans un degré éminent, la faculté de se ressouvenir (JOUBERT, Pensées, t. 1, 1824, p. 146). À la vue de la bête, une petite joie presque cruelle éclairait le visage de la femme au maillot, qui un moment semblait se ressouvenir et dont les pensées remontaient son passé (E. DE GONCOURT, Zemganno, 1879, p. 22).
2. Se ressouvenir de + subst. ou verbe à l'inf./que + verbe. Se ressouvenir de qqc., de qqn; se ressouvenir d'une conversation, d'un roman; se ressouvenir brusquement, toujours; se ressouvenir que l'on a dit, fait, promis qqc. Pour qu'il [l'enfant] apprenne à se ressouvenir de son chemin, il faut qu'il se soit égaré (BERN. DE ST-P., Harm. nat., 1814, p. 291). M. d'Aubigny, se ressouvenant tout d'un coup qu'il était janséniste d'éducation (SAINTE-BEUVE, Port-Royal, t. 3, 1848, p. 511).
3. [Avec ell. de se] Absol. Faire ressouvenir. Synon. rappeler. Vous ne pouvez avoir une idée (...) de notre dépendance près des directeurs de théâtre et des autres! (...) Oh! de grâce, ne me faites pas ressouvenir! (E. DE GONCOURT, Faustin, 1882, p. 270). Faire ressouvenir (qqn) de qqc./que + verbe. Rappeler (à quelqu'un) quelque chose. De très-bonne heure, même autour d'elle [Marie-Antoinette], on la faisait ressouvenir qu'elle était étrangère (SAINTE-BEUVE, Nouv. lundis, t. 8, 1864, p. 325):
24 mai. — La nuit passée, une douleur fort vive à l'intérieur du crâne. Cela m'a fait ressouvenir de la façon dont est morte ma mère, et je me suis demandé, l'heure et la solitude aidant, si j'étais menacé du même sort.
GREEN, Journal, 1941, p. 98.
4. Empl. impers. Revenir à l'esprit. Il m'en ressouvient; nous en ressouvient-il? Vous que j'ai délaissés, ô mon père, ô ma mère, Faut-il donc que je sois sans vous revoir jamais, Que dans l'enfer je sois sans savoir où vous êtes, Me ressouvient le temps de jeunesse passée (PÉGUY, Tapisserie Ste Geneviève et J. d'Arc, 1913, p. 680).
B. — P. ext., vx. Considérer, faire attention à, garder en pensée. Il faut se ressouvenir que partout on honore l'habit et non l'homme. Peu importe que vous soyez un fripon, si vous êtes riche; un honnête homme, si vous êtes pauvre (CHATEAUBR., Essai Révol., t. 2, 1797, p. 161).
C. — Fam., vieilli. [Gén. avec idée de vengeance, parfois en manière de menace] Garder un souvenir amer de quelque chose, en garder du ressentiment. Synon. s'en souvenir. Je m'en ressouviendrai quelque jour (Ac.). Subir les conséquences du ressentiment qu'on a provoqué chez quelqu'un; être puni de. Il se ressouviendra de ce qu'il m'a fait. Vous vous en ressouviendrez tôt ou tard, vous en serez puni (Ac.).
Prononc. et Orth.:[], (il se) ressouvient [], [-]. Cette dernière forme ds BARBEAU-RODHE 1930. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. a) Ca 1165... me resovient de... verbe impers. « je me souviens de » (Troie, 24646 ds T.-L.); b) 1572 ressouvenir qqc. à qqn « rappeler quelque chose à quelqu'un » (Lettre de Mandelot à Ch. IX ds GDF. Compl.); c) 1580 se ressouvenir « avoir mémoire de » (MONTAIGNE, Essais, II, 12, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, t. 1, p. 548); 1607 [éd.] se ressouvenir de « considérer, faire réflexion sur » (D'URFÉ, Astrée, f ° 23 v °-24 r°); d) 1798 je m'en ressouviendrai « je me vengerai (terme de menace) », il s'en ressouviendra « il en sera puni » (Ac.). Dér. de (se) souvenir; préf. re-. Fréq. abs. littér.:335. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 745, b) 491; XXe s.: a) 451, b) 250. Bbg. BRADEMANN (K.). Die Bezeichnungen für den Begriff des « Erinnerns im Alt- und Mittelfranzösischen. Tübingen, 1979, pp. 214-222.
II.
⇒RESSOUVENIR2, subst. masc.
A. — Vieilli ou littér.
1. Souvenir que l'on continue à garder d'une chose passée ou souvenir d'une chose oubliée; p. méton., évocation, rappel de ce souvenir. Synon. rappel, réminiscence; anton. oubli. Vague ressouvenir. J'ai osé lui rappeler [à l'Empereur] les quatorze paragraphes dont il avait déjà eu l'idée, et que j'ai déjà mentionnés ailleurs. Il en a écouté le ressouvenir avec plaisir (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 2, 1823, p. 337). En réfléchissant sur la fraîcheur des souvenirs, sur la couleur enchantée qu'ils revêtent (...) j'admirais ce travail (...) de l'âme qui écarte et supprime dans le ressouvenir de moments agréables, tout ce qui en diminuait le charme (DELACROIX, Journal, 1854, p. 174).
2. En partic. [À propos d'une œuvre artist.] Ce qui dans une œuvre évoque le style d'un autre artiste, d'un autre auteur. Synon. réminiscence. Il y a dans ses œuvres [de Theuriet] un ressouvenir de George Sand (ZOLA, Romanc. natur., Les Romanc. contemp., 1881, p. 283).
B. — Fam., vieilli. Sentiment d'une douleur, d'une souffrance qui se renouvelle; souvenir amer de quelque chose. Il y a des maux dont on n'est jamais si bien guéri qu'il n'en reste quelque ressouvenir (Ac.).
C. — Fam., vx. Petit morceau de papier que l'on accrochait sur la manche de son habit afin que sa vue rappelle une chose qu'on craint d'oublier. Synon. usuels mémento, pense-bête. (Dict. XIXe et XXe s.).
Prononc.:[]. Étymol. et Hist. a) XIIIe s. [date du ms.] resovenir « souvenir lointain ou renouvelé » (Les Poésies de Guillaume le Vinier, éd. Ph. Ménard, XXVIII, p. 190, 47), attest. isolée; de nouv. 1552 [éd.] ressouvenir (PONTUS DE LYARD, Solitaire premier, p. 43); b) 1752 « petit morceau de papier qu'on attache sur sa manche pour faire souvenir de quelque chose » (Trév.). Empl. subst. de [se] ressouvenir.
DÉR. Ressouvenance, subst. fém., littér., synon. deressouvenir. Ces figures qui me sont chères, comme l'est toute ressouvenance du jeune âge (TOEPFFER, Nouv. genev., 1839, p. 206). []. BARBEAU-RODHE 1930: la ressouvenance [-]. Att. ds Ac. dep. 1694. 1res attest. ca 1350 resovenance (JEAN D'ARKEL, Art d'amour, éd. J. Petit, t. 1, p. 205, attest. isolée), de nouv. 1556 resouvenance (LE CARON, Dialogues, I, 3 (125 v °) ds HUG.); de (se) ressouvenir, suff. -ance.

ressouvenir (se) [ʀ(ə)suvniʀ] v. pron. [CONJUG. souvenir. → Venir.]
ÉTYM. 1572, ressouvenir (qqch. à qqn) « rappeler »; me resovient de…, v. impers., v. 1160; comp. de re-, et (se) souvenir.
Vieilli ou littér. Se souvenir (d'une chose ancienne ou qui avait été oubliée). || L'âme retient et se ressouvient (→ Faculté, cit. 3, Bossuet). || « Et je me ressouviens de mes jeunes (cit. 18) amours » (Molière). || Ils se ressouvenaient des romans qu'ils avaient lus (→ Livresque, cit. 3). || Se ressouvenir que… (→ Épine-vinette, cit. 1).Faire ressouvenir (avec ellipse de se). || Il lui fait ressouvenir que… (→ Convenir, cit. 9). Rappeler, souvenir. || « L'usage a préféré “faire ressouvenir” à “ramentevoir” » (La Bruyère, les Caractères, II, 213).
1 (…) s'il est vrai (…) que (…) les vérités absolues, universelles, nécessaires, soient innées ou infuses à notre âme, de telle sorte qu'en entendant, pour la première fois, les paroles ou les signes qui les expriment, l'âme ne fasse que s'en ressouvenir ou en avoir la réminiscence (…)
Maine de Biran, Du physique et du moral de l'homme, Note.
2 En revoyant ces endroits aimés, je me ressouviens des uns et des autres, et de mes petits compagnons (…)
Ed. et J. de Goncourt, Journal, 26 sept. 1855, t. I, p. 86.
2.1 Anne Desbaresdes s'exténua encore une fois à se ressouvenir.
M. Duras, Moderato cantabile, p. 54.
Vx (avec un compl. direct). || « Et ressouvenez-vous quel prélat vous servez » (Boileau, le Lutrin, III), pensez-y, songez-y.
3 Attendez qu'on vous en demande plus d'une fois, et vous ressouvenez de porter toujours beaucoup d'eau.
Molière, l'Avare, III, I.
Vx. Impers. || Il me ressouvient que… || Vous en ressouvient-il ? (Littré, Académie).
DÉR. Ressouvenance, ressouvenir (n. m.).
————————
ressouvenir [ʀ(ə)suvniʀ] n. m.
ÉTYM. 1552; un exemple du XIIIe (resovenir) dans Littré paraît douteux; emploi substantivé de ressouvenir (se).
Vx ou littér. Action de se ressouvenir; souvenir lointain ou renouvelé.REM. Ce mot, fréquent dans la langue classique (→ Douloureux, cit. 6, Voltaire), reparaît chez les écrivains de la fin du XIXe s.
0 La vieille Marie-Jeanne remémore encore avec un ressouvenir affectueux et tendre les coups de canne distribués aux uns et aux autres.
Ed. et J. de Goncourt, Journal, 11 juil. 1857, t. I, p. 156.

Encyclopédie Universelle. 2012.