APACHE
APACHE
Fermiers et pillards du sud-ouest de l’Amérique du Nord, qui jouèrent un rôle important dans l’histoire de cette région pendant la seconde moitié du XIXe siècle. Menés par des chefs tels que Cochise, Mangas Coloradas, Geronimo et Victorio, les Apache vivaient en Arizona, au Colorado, au Nouveau-Mexique, au Texas, ainsi qu’au nord de Chihuahua et de Sonora, dans l’actuel Mexique. Les ancêtres des Apache arrivèrent probablement dans le Sud-Ouest, vers l’an mille. Dès que le cheval fit son apparition, ces Indiens et d’autres Apache des plaines furent fortement repoussés vers le Sud et l’Ouest par les Comanche et les Ute.
Du point de vue culturel, on divise les Apache en deux groupes: les Apache de l’Est (Mescalero, Jicarilla, Chiricahua, Lipan, Apache Kiowa) et les Apache de l’Ouest (Cibecue, Mimbreno, Coyotero, Tonto du Nord et du Sud, qu’on appelle aussi Apache Mogollon). L’absence d’organisation tribale centralisée est la principale caractéristique des Apache de l’Est et des Apache de l’Ouest, exception faite des Apache Kiowa. Rassemblement autonome de petits groupes locaux, à l’intérieur d’une région déterminée, la «bande» formait le groupe politique fondamental ainsi que le groupe de base pour les guerres et les raids; le chef le plus puissant à l’intérieur des groupes locaux devenait de facto celui de la bande, et plusieurs bandes pouvaient être réunies sous la direction d’un leader.
Les shamans apaches avaient des pouvoirs spéciaux leur permettant de guérir les malades et d’assurer le bien-être de la tribu. Les Apache pensaient que les filles avaient, au moment de la puberté, des pouvoirs spéciaux qui procuraient la fertilité et la santé à toute la tribu, si bien que les rites de passage des filles à la puberté formaient une partie importante de leur rituel. Ils vivaient de la chasse et de la cueillette des plantes sauvages, mais aussi des produits de la culture et du pillage. Ainsi, les Jicarilla cultivaient du maïs et d’autres légumes, mais, comme d’autres Indiens des plaines, ils s’adonnaient aussi à la chasse au bison. Les Mescalero avaient un régime alimentaire reposant surtout sur le «mescal» dont ils tiennent leur nom. De tous les Apache qui vivaient à l’ouest du Río Grande, les Chiricahua étaient peut-être les plus belliqueux et leur mode de vie présentait les traits de nomadisme les plus marqués; depuis leur repaire des montagnes du Dragon, ils étendaient leurs raids de pillage jusqu’au nord du Mexique, en Arizona et au Nouveau-Mexique. Quant aux Apache de l’Ouest, ils semblent avoir été beaucoup plus sédentaires que leurs parents de l’Est.
De toutes les guerres qui eurent lieu à la frontière, les guerres apaches furent parmi les plus sauvages. Et pourtant, les Indiens essayèrent d’abord d’entretenir de bons rapports avec les Espagnols, avec les Mexicains et, plus tard, avec les Américains. Cependant, dès le XVIIe siècle, les Apache organisèrent des raids contre les missions espagnoles et furent peut-être en partie les instigateurs de la révolte pueblo de 1860. Une paix fut conclue au cours d’une réunion, en 1858, entre Américains et Chiricahua, à la Passe-Apache dans les montagnes du Dragon. Cochise y mit fin en 1861. À la fin de la guerre de Sécession, en 1865, le gouvernement américain tenta de limiter les territoires et de surveiller les mouvements des Apache. Des troubles très sérieux éclatèrent lorsque les Chiricahua furent forcés d’abandonner leurs territoires et de rejoindre les Apache de l’Ouest. La dernière guerre se termina en 1886, par la reddition de Géronimo et de ses derniers compagnons. Toute la tribu des Chiricahua fut chassée de l’Ouest; les Indiens furent gardés vingt-sept ans prisonniers en Floride, en Alabama et à Fort Sill en Oklahoma; et c’est seulement en 1913 que l’on consentit aux membres de la tribu certains terrains en Oklahoma ou qu’on leur permit d’aller vivre au Nouveau-Mexique, dans la réserve des Mescalero. D’après le recensement de 1990, la population apache est d’environ 50 000 personnes, dont 19 000 en Arizona.
apache [ apaʃ ] n. et adj.
• 1751; de l'hispano-amér. (Mexique) d'o. i.
1 ♦ Indien d'une tribu du sud des États-Unis, réputée pour son courage, ses ruses guerrières et sa férocité. Les Apaches d'Arizona. — Adj. Des danses apaches.
2 ♦ N. m. (1902) vx Malfaiteur, voyou de grande ville prêt à tous les mauvais coups. ⇒ malfrat.
● apache nom masculin (de Apache, nom d'une tribu indienne) Vieux. Voyou des grandes villes. ● apache adjectif Qui relève des Apaches.
⇒APACHE, subst. et adj.
I.— Substantif
A.— Au plur. Tribu indienne d'Amérique du Nord, localisée près du golfe de Californie, célèbre par son courage et sa ruse à la guerre. Agression, exploits, ruses d'Apaches; les derniers Apaches du Far-West.
— Au sing., LING. ,,Idiome parlé par la Tribu des Apaches et faisant partie de la langue Athapaska.`` (GUÉRIN 1892).
B.— P. ext.
1. Bandit, malfaiteur qui, par le vol, l'agression ou l'assassinat, sévissait à Paris et dans les grandes villes; individu peu recommandable. Dangereux, jeune apache, coupe-gorge d'apache, figure d'apache :
• 1. Ballmeyer fut le type même de l'escroc du grand monde; (...) il n'était point d'« apache », comme on dit aujourd'hui, plus audacieux et plus terrible que lui.
G. LEROUX, Le Mystère de la chambre jaune, 1907, p. 137.
• 2. Il fallait s'y attendre : on transforme, vite et sûrement, ma boudeuse et fraîche apache [Jadin] en p'tite femme de café-concert!
COLETTE, La Vagabonde, 1910, p. 125.
• 3. Mais c'est lui ce petit apache ... Mais à la fin, nom de Dieu! Vas-tu comprendre que c'est lui, ce petit infernal fripouille qui nous rend tous ici malades! L'abjecte vipère! Mais c'est lui qui veut notre peau! Depuis toujours qu'il nous guette! Il veut notre cimetière! Il le veut! ...
CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 388.
• 4. On l'a convoqué de nouveau pour de la figuration. (...) Il s'agit cette fois d'être apache, avec la casquette et les rouflaquettes.
QUENEAU, Loin de Rueil, 1944, p. 162.
2. Arg., vieilli. ,,Élève venu d'outre-mer, hormis l'Afrique du Nord.`` (Arts, Aix, 1910 ds ESN. 1966).
II.— Adjectif
A.— Qui appartient ou est propre aux tribus d'Apaches. Guerrier, dompteur apache; danses apaches (supra I A).
B.— Qui tient de l'apache (supra I B 1) :
• 5. « ... À votre âge j'étais plus dessalé que cela », ajouta-t-il, car il aimait employer les expressions du monde apache, peut-être par goût, peut-être pour ne pas avoir l'air, en les évitant, d'avouer qu'il fréquentait ceux dont c'était le vocabulaire courant.
PROUST, Sodome et Gomorrhe, 1922, p. 1091.
Rem. On rencontre dans la docum. le néol. apacherie, subst. fém. (BARRÈS, Mes cahiers, t. 12, 1919-20, p. 224 : le ton de l'apacherie; suff. -erie). Manière d'être ou de parler des apaches (au sens I B 1).
PRONONC. :[].
ÉTYMOL. ET HIST.
I.— Subst. 1902 adaptation de l'ethnique par des journalistes parisiens ds Le Matin et Le Journal pour désigner « la pègre des boulevards extérieurs » d'apr. Dauzat ds Fr. mod., t. 6, p. 24 qui explique : Victor Morris, chef des informations du Matin s'attribua la paternité du mot, que j'ai entendu revendiquer pour Arthur Dupin, chef des informations du Journal [...]; 1902 « id. » attesté dans un texte angl. : Westm. Gaz., 22 oct. 8/I ds NED Suppl. : The leader of the band of roughs in Paris, known as the ,,Apaches``; 1905 (VILLOT, Les Plaies sociales. Comment on nous tue. Comment on nous vole, pp. 309-320 d'apr. SAIN. Lang. par. 1920, p. 211 : les Apaches [cf. 1897 emploi du terme ethnique dans un tour et un cont. arg. : A. BRUANT, Route, p. 114, ibid., p. 210 : Et des loucherbèmes en sauvages Qui vont guincher le soir en pince-cul Avec des gonzesses en Apaches]).
II.— Adj. 1905, ROSNY aîné, Les Rafales [sous-titre] Mœurs apaches, ibid. p. 211.
Empr. à l'anglo-amér. Apache (MACK. t. 1, p. 254; COR.; FEW t. 20, p. 56) nom de la tribu indienne appartenant à la famille des Athapaska; entrés en relation avec les blancs après la conquête du Texas et du Nouveau Mexique, les Apaches, réputés pour leur férocité, furent connus en France grâce aux romans de Gabriel FERRY, Coureur des bois, 1853 et de Gustave AIMARD, Les Peaux-Rouges de Paris, 1888 (d'apr. BL.-W.5). L'anglo-amér. Apache est attesté comme terme ethnique dep. 1745 (H. Moll's Atlas Minor Plate, 46 ds DAE) et viendrait d'un esp. mexicain d'orig. incertaine (DAE); cf. 1909, Times, 9 févr. 4/4 ds NED Suppl. : Those « apaches » with which Brussels is haunted.
STAT. — Fréq. abs. littér. : Apache. 95. Apacherie. 1.
BBG. — BARTH (A.). Beiträge zur französichen Lexikographie. Vox rom. 1936, t. 1, pp. 110-116. — DAUZAT (A.). Notes étymol. et lexicol. Fr. mod. 1938, t. 6, pp. 23-24. — ÉD. 1967. — ESN. 1966. — FRANCE Suppl. 1907. — LAJAUNIE (M.-A.). Préjugés et lang. Vie Lang. 1969, n° 202, pp. 7-8.
1. apache [apaʃ] n. et adj.
ÉTYM. 1751, in D. D. L.; de l'angl. américain Apache [apatʃi], 1745, empr. à l'esp. apache [apatʃe], lui-même d'une langue indienne.
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♦ Indien du groupe Athapaska, appartenant à une tribu du Sud des États-Unis (Texas, etc.), réputée pour son courage, ses mœurs et ses ruses guerrières, ainsi que pour sa férocité. — N. m. Langue des ethnies apaches.
➪ tableau Classification des langues.
♦ Adj. || Guerrier, chef apache. || Danses apaches.
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DÉR. 2. Apache.
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2. apache [apaʃ] n. m.
ÉTYM. 1902; de 1. Apache, ces Indiens étant réputés féroces et rusés.
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♦ Vieilli. Malfaiteur, voyou de grande ville prêt à tous les mauvais coups. || Un crime d'apache.
1 Apache, malandrin, est une création journalistique qui remonte au début de 1902 : des reporters parisiens, voulant dramatiser des rixes assez banales entre souteneurs de Charonne, avaient imaginé une lutte homérique en règle, au sujet d'une Hélène de trottoir, Casque d'or, entre deux bandes rivales dont ils avaient surnommé l'une les Apaches. Le mot eut une fortune rapide.
A. Dauzat, les Argots, p. 133.
2 On l'a convoqué de nouveau pour de la figuration (…). Il s'agit cette fois d'être apache, avec la casquette et les rouflaquettes.
R. Queneau, Loin de Rueil, p. 162.
♦ Adj. Qui évoque l'allure d'un mauvais garçon. || Porter la casquette d'un air apache. || « Les expressions du monde apache » (Proust, Sodome et Gomorrhe).
REM. L'emploi de apache au fém., dans ce sens, est exceptionnel, car le mot, au début du XXe siècle, ne s'applique qu'aux hommes de la pègre parisienne. Cf. cependant en emploi extensif : || « ma boudeuse et fraîche apache (…) » (Colette, la Vagabonde, in T. L. F.).
Encyclopédie Universelle. 2012.