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RHODOPHYCÉES
RHODOPHYCÉES

Les Rhodophycées ou Algues rouges sont en majorité des algues marines. On en connaît plus de 4 000 espèces, réparties dans 600 genres environ. Seule classe de l’embranchement des Rhodophytes, elles comprennent deux sous-classes assez différentes l’une de l’autre à bien des égards: les Bangiophycidées et les Floridéophycidées ou Floridées.

Les Rhodophycées se distinguent par un ensemble de caractères: cytologiques (plastes colorés en rouge par des pigments surnuméraires: les phycobiliprotéines; présence de synapses entre les cellules), biochimiques (présence d’amidon floridéen, extraplastidial et d’hétérosides du glycérol ou de l’acide glycérique), morphologiques (structure cladomienne souvent très différenciée chez les Floridées). Leur reproduction sexuée, caractérisée par l’absence de cellules reproductrices flagellées, s’opère par trichogamie. Leur cycle d’alternance de générations, en général trigénétique, comprend une génération, issue du zygote, parasite du gamétophyte.

La plupart des Rhodophycées sont de taille modeste, ne mesurant que quelques centimètres ou quelques décimètres de long; certaines sont microscopiques; très rares sont celles qui dépassent le mètre.

1. Caractères généraux

Les Rhodophycées sont des algues eucaryotes à cellules souvent plurinucléées. Leurs plastes (rhodoplastes), rarement uniques dans les cellules et ordinairement dépourvus de pyrénoïde, renferment de la chlorophylle a associée à des caroténoïdes. La couleur verte de la chlorophylle est masquée par des phycobiliprotéines: la r-phycoérythrine et la r-phycocyanine, la première étant la plus abondante et souvent la seule présente. L’ultrastructure des rhodoplastes est particulière: les thylacoïdes, isolés les uns des autres (cf. PLASTES, fig. 2), portent, sur leur face externe, des phycobilisomes renfermant les phycobiliprotéines.

Une autre caractéristique de la cellule des Rhodophycées est la présence constante (sauf chez beaucoup de Bangiophycidées) de synapses (fig. 1); une synapse est une ouverture laissée dans la paroi lors de la formation de deux cellules et occupée par un «bouchon» de nature lipo-protéique en contact direct avec le cytoplasme des deux cellules. Le rôle de ces synapses dans la migration des substances dissoutes ou dans la transmission d’informations morphogénétiques, bien que probable, n’est pas encore définitivement démontré.

La paroi cellulaire est constituée de cellulose associée à des polyholosides à base de galactose et en partie estérifiés par de l’acide sulfurique (agar-agar, carragahénine). Certaines Rhodophycées fixent du carbonate de calcium, associé à de moindres quantités de carbonate de magnésium, dans leur paroi cellulaire sous forme de calcite (Corallinacées). Chez d’autres, le carbonate de calcium, sous forme d’aragonite, se dépose dans le mucilage intercellulaire (Liagora, Galaxaura ).

Les produits du métabolisme sont surtout constitués par des grains d’un amidon caractéristique, l’amidon floridéen , qui se distingue de celui des plantes supérieures et des Algues vertes par le mode de liaison des molécules de glucose et par sa localisation dans le cytoplasme et non dans les plastes. En outre, des hétérosides particuliers, composés de glycérol et de galactose (floridoside), ou d’acide glycérique et de mannose, sont souvent abondants dans le suc vacuolaire. Certaines espèces (Bonnemaisoniacées) renferment des cellules sécrétrices spéciales, les ioduques, accumulant de l’iode.

2. Morphologie

À l’exception de quelques Bangiophycidées (Porphyridium, Rhodosorus ), les Rhodophycées sont pluricellulaires et présentent fréquemment une morphologie très complexe.

Chez les Bangiophycidées, la croissance est généralement intercalaire. Toutes les cellules du thalle, sauf celles de la base, demeurent capables de se diviser (Porphyra ). Chez les Floridées, la croissance est terminale et le thalle est le plus souvent constitué de cladomes uniaxiaux ou multiaxiaux, de formes variées. Ces cladomes naissent dans la plupart des cas (Némalionales, Gigartinales, Cryptonémiales) d’un protonéma issu de la spore et donnant un thalle hétérotriche composé soit de filaments indifférenciés, les uns rampants, les autres dressés, soit de filaments coalescents en disque ou en massif cellulaire hémisphérique.

À partir de ces protonémas se développent des filaments cellulaires dressés, susceptibles de croissance indéfinie grâce à une cellule initiale terminale. Ils constituent des axes de cladomes et portent latéralement des ramifications à croissance limitée (pleuridies ) tantôt verticillées, tantôt opposées ou alternes.

Lorsqu’il n’existe qu’un seul filament axial, la structure est dite uniaxiale. Dans d’autres cas, plusieurs axes de cladomes se développent côte à côte simultanément, formant un faisceau de filaments à croissance synchrone produisant à sa périphérie des pleuridies: la structure est alors multiaxiale (fig. 2).

Dans l’ordre des Acrochaetiales, il n’y a pas de cladome, l’appareil végétatif demeurant à l’état de thalle hétérotriche. Chez les Céramiales, au contraire, les spores ne produisent pas de protonéma; elles donnent directement naissance à un rhizoïde et, au pôle opposé, à une cellule qui deviendra la cellule initiale d’un cladome uniaxial dressé de structure tantôt très simple (exemple: Antithamnion , fig. 3), tantôt plus complexe; dans ce cas, autour du filament axial s’édifie un manchon continu de cellules péricentrales ou coxales, au nombre de quatre ou plus, représentant chacune la cellule basale d’une pleuridie (Polysiphonia , fig. 5). Il y a en outre, chez ces algues, des axes secondaires à croissance limitée et réduits à des poils ramifiés (trichoblastes). Cette structure, caractéristique de la fronde des Rhodomélacées, présente une symétrie axiale. Dans la famille des Délessériacées, la symétrie devient bilatérale par développement, à partir de deux cellules péricentrales opposées, de pleuridies coalescentes entre elles dans un même plan: ainsi se crée un thalle foliacé, pourvu d’une nervure centrale parfois indistincte (exemple: Delesseria ; cf. ALGUES, planche II).

Chez beaucoup de Gigartinales, Cryptonémiales et Rhodyméniales, les cellules de l’extrémité des pleuridies se soudent entre elles en un tissu cortical formant un manchon autour du ou des filaments axiaux; ces derniers peuvent se différencier en un tissu médullaire tantôt dense, tantôt très lâche, dans lequel les cellules plus ou moins étoilées et anastomosées entre elles se trouvent au sein d’un mucilage abondant. On observe ainsi des structures très complexes, en tubes creux, en lames plus ou moins découpées, ou en frondes charnues diversement ramifiées.

Parfois, les filaments axiaux se soudent latéralement et acquièrent une croissance simultanée: il en résulte un thalle en éventail plus ou moins lobé, à croissance marginale (Peyssonnelia ). Dans d’autres cas, les structures uniaxiales ou multiaxiales peuvent devenir indistinctes: la croissance s’effectue alors par la multiplication de cellules marginales (Nitophyllum ) ou par le fonctionnement d’un méristème apical donnant naissance à des tissus parenchymateux (Rhodymenia, Gracilaria ).

Chez les formes les plus complexes, la différenciation morphologique des cellules correspond à une spécialisation physiologique: rôle assimilateur pour les cellules du cortex externe, rôle accumulateur de réserves pour les cellules du cortex interne, rôle de soutien pour les rhizoïdes internes issus de diverses cellules, rôle conducteur pour les cellules axiales.

Il existe en outre chez diverses espèces des cellules sécrétrices accumulant soit de l’iode, soit des protides, ou intervenant dans la sécrétion du mucilage qui remplit souvent les frondes creuses.

3. Reproduction

L’absence constante de cellules reproductrices flagellées, caractère essentiel des Rhodophycées, entraîne, lors de la reproduction sexuée, des modalités de fécondation tout à fait particulières.

Reproduction asexuée

Chez certaines Bangiophycidées, la reproduction s’effectue uniquement par voie végétative, par fragmentation du thalle en cellules isolées. Chez d’autres, ainsi que chez certaines Floridées, il existe une reproduction indépendante du cycle sexué, par spores mitotiques (monospores et paraspores) qui redonnent directement une génération identique à celle qui les a produites.

Reproduction sexuée

Les gamétophytes

Les gamétophytes sont en majorité dioïques. La cellule femelle (carpogone ) ne libère pas de gamète; elle demeure fixée au gamétophyte et est pourvue d’une papille (Bangiophycidées) ou d’un long poil appelé trichogyne (Floridées) permettant la fécondation. Le carpogone résulte parfois (Acrochaetiales) de la transformation d’une cellule végétative quelconque du thalle, mais, plus souvent, il se trouve au sommet d’un court rameau adventif, en général de deux à cinq cellules: le rameau carpogonial (fig. 4); chez les Cryptonémiales (Dudresnaya ), celui-ci est lui-même porté par un rameau adventif différencié, le gonophore carpogonial, qui joue un rôle important lors du développement du zygote.

Les gamètes mâles proviennent, chez les Bangiophycidées, de la division répétée d’une cellule végétative par des cloisonnements successifs, perpendiculaires les uns aux autres, en petites cellules incolores, libérées par gélification des parois. Chez les Floridées, les cellules mâles se forment isolément dans des spermatocystes souvent groupés en bouquets (exemple: Polysiphonia , fig. 5). Dans tous les cas, les cellules mâles, ou spermaties , sont de petites cellules, immobiles et dépourvues de paroi cellulaire. Elles sont transportées passivement par les mouvements de l’eau, au voisinage d’un trichogyne sur lequel l’une d’elles se fixe et déverse son contenu dans le trichogyne, le noyau mâle fusionnant ensuite avec celui du carpogone. Ce mode de fécondation très particulier est une trichogamie . Dans le règne végétal, il ne se rencontre, en dehors des Rhodophycées, que chez certains Ascomycètes [cf. REPRODUCTION].

Développement du zygote: le carposporophyte

Le zygote né du carpogone fécondé demeure sur le gamétophyte. Chez les Porphyra , il se divise en un certain nombre de spores (carpospores) qui sont ensuite libérées (fig. 7). Chez les Floridées, il se développe en un tissu diploïde (gonimoblaste ) qui produira des carpospores; il représente une génération distincte, le carposporophyte .

Chez les Floridées les plus inférieures, le carposporophyte, constitué de cellules à plastes pigmentés, n’est pas totalement parasite; par contre, chez les formes les plus évoluées, le carposporophyte, dépourvu à l’état jeune de pigments assimilateurs, est devenu un parasite obligatoire du gamétophyte. Ce parasitisme se manifeste notamment par la fusion de filaments issus du zygote, donc diploïdes, avec des cellules particulières du gamétophyte. Les cellules qui hébergent ainsi un noyau parasite diploïde constituent des cellules auxiliaires; elles vont permettre à ce noyau de se multiplier pour donner finalement naissance à des groupes de carpospores.

La disposition, le nombre des cellules auxiliaires, leurs relations avec le rameau carpogonial varient selon les différents ordres de Floridées. Chez les Cryptonémiales (exemple: Dudresnaya , fig. 4), où le rameau carpogonial est porté par un gonophore carpogonial, le carpogone fécondé émet des filaments de jonction qui fusionnent avec des cellules du gonophore, devenues alors des cellules auxiliaires primaires. De celles-ci naissent de nouveaux filaments de jonction qui vont s’unir avec d’autres cellules auxiliaires appartenant à des gonophores stériles (gonophores auxiliaires). À partir de ces cellules auxiliaires ayant reçu un noyau diploïde apparaissent des masses arrondies de carpospores.

Dans certains autres groupes (Gélidiales, Bonnemaisoniales), il existe, au voisinage du carposporophyte en voie de développement, des cellules nourricières qui, riches en matières de réserve, assurent la nutrition du carposporophyte parasite sans qu’il y ait fusion entre les cellules.

Chez les formes très évoluées telles que les Rhodomélacées (exemple: Polysiphonia , fig. 5), le gamétophyte réagit à la présence d’un carposporophyte parasite par l’élaboration autour de lui d’une enveloppe, le cystocarpe. Celui-ci est comparable au fruit des plantes à fleurs, qui se développe autour des graines en voie de maturation, ou aux galles (cécidies) autour des larves d’insectes.

Les tétrasporophytes

Chez la très grande majorité des Floridées, les carpospores libérées donnent naissance à une algue morphologiquement identique au gamétophyte, mais diploïde: c’est le tétrasporophyte, dont les organes reproducteurs sont des tétrasporocystes renfermant quatre tétraspores; celles-ci résultent de la méiose du noyau diploïde de la cellule mère. Selon le mode de division des tétrasporocystes, les tétraspores peuvent avoir une disposition cruciée, zonée ou tétraédrique. Libérées, les tétraspores se développent en un gamétophyte haploïde.

Toutefois, dans certains cas, le tétrasporophyte est d’une structure beaucoup plus simple que le gamétophyte. Tel est le cas de l’Asparagopsis armata , dont le gamétophyte (cf. fig. 6 et ALGUES, planche II) possède une morphologie et une anatomie très différenciées, et dont le tétrasporophyte, qui forme de petits pompons rouges de fins filaments de structure plus simple, fut longtemps considéré comme étant un genre entièrement différent (Falkenbergia ).

Chez les Némalionales, le tétrasporophyte, obtenu par culture des carpospores, se présente sous l’aspect d’un thalle hétérotriche indifférencié, semblable au protonéma qui précède la formation des cladomes du gamétophyte. Il s’agit là d’un cas de néoténie tout à fait remarquable: le tétrasporophyte diploïde conserve la structure de l’état juvénile et devient fertile (tétrasporocystes) sous cette forme, tandis que, chez le gamétophyte, le protonéma produit des cladomes de structure complexe qui porteront les organes reproducteurs sexués.

Chez les Porphyra , il existe également une hétéromorphie des deux générations (fig. 7): le gamétophyte est une lame foliacée, formée d’une seule assise de cellules, atteignant 10 à 30 cm de haut et portant au printemps, sur sa marge, les organes reproducteurs sexués mâles et femelles, tandis que le sporophyte est constitué de très fins filaments ramifiés qui se développent à l’intérieur de coquilles vides, en dissolvant le calcaire, et sont décrits sous le nom de Conchocelis . La découverte de ce cycle a permis d’améliorer considérablement les méthodes de culture de cette algue au Japon, où elle joue un rôle important dans l’alimentation.

4. Les cycles d’alternance de générations et de phases nucléaires

Cycle trigénétique

Comme on vient de le voir, le cycle de la plupart des Floridées est trigénétique et comporte l’alternance de trois générations distinctes (cf. ALGUES, fig. 5: cycle de l’Antithamnion plumula ). Le cycle nucléaire est diplohaplophasique. On peut le résumer ainsi:

Une des générations, le gamétophyte, est haploïde et les deux autres (carposporophyte et tétrasporophyte) sont diploïdes.

Si le gamétophyte et le tétrasporophyte sont morphologiquement identiques dans la plupart des cas, le carposporophyte, parasite sur le gamétophyte, ne possède qu’un appareil végétatif très simple et très réduit, ce qui semble pouvoir s’expliquer par son mode de vie; une telle réduction morphologique est en effet fréquente chez les organismes parasites.

Cycles digénétiques

Chez certaines Floridées, l’une des générations du cycle trigénétique fait défaut, généralement le tétrasporophyte.

Chez certaines Némalionales à carpotétraspores (Liagora tetrasporifera par exemple), le noyau diploïde des carposporocystes subit la méiose et chaque carposporocyste renferme quatre carpotétraspores haploïdes qui donnent directement naissance à des gamétophytes.

Chez les Floridées d’eau douce du genre Lemanea , les carpospores diploïdes produisent un protonéma qui bourgeonne en jeunes cladomes gamétophytiques d’abord diploïdes; la méiose (somatoméiose ) s’effectue ensuite, non pas dans un sporocyste individualisé, mais dans la cellule initiale terminale du jeune gamétophyte, cellule qui continue son fonctionnement régulier, mais avec son noyau devenu haploïde. Il ne subsiste plus que deux générations, le gamétophyte et le carposporophyte, mais le cycle nucléaire d’alternance de phases ne coïncide plus avec les générations morphologiques, puisque la partie inférieure du gamétophyte est diploïde, tandis que la partie supérieure, seule capable de produire des organes sexués, est haploïde.

Chez certaines Phyllophoracées (Phyllophora brodiaei, Gymnogongrus norvegicus ), c’est au contraire le carposporophyte qui fait défaut; le zygote, au lieu de se développer vers l’intérieur du thalle, comme chez les autres Phyllophoracées à cycle trigénétique, en filaments qui se transforment en amas de carpospores, donne naissance à un tétrasporoblaste qui s’accroît vers l’extérieur en traversant le tissu cortical; il s’épanouit à l’extérieur en un éventail de filaments serrés les uns contre les autres (némathécie) et dont chaque cellule devient un tétrasporocyste.

Un cas remarquable est celui du Rhodochorton purpureum , dont le cycle ne comporte que deux générations très semblables morphologiquement, toutes deux étant susceptibles de vivre indépendamment: l’une est un gamétophyte produisant des organes sexués mâles et femelles; l’autre, issue du zygote, engendre des tétraspores. Chez cette espèce, à cycle sans doute primitif, il est impossible de décider si la génération sporophytique peut être assimilée à un carposporophyte, d’après son origine à partir du zygote, ou à un tétrasporophyte, d’après la nature de ses spores.

Cycles dérivés

En fait, les deux caractéristiques essentielles que présente la génération carposporophytique dans le type de cycle décrit ci-dessus, c’est-à-dire son implantation sur la génération qui la précède, d’une part, et sa réduction morphologique par rapport aux deux autres générations, d’autre part, peuvent se retrouver ensemble ou séparément chez ces dernières. Il en résulte des types de cycle très divers.

Chez certaines Némalionales à carpotétraspores (Liagora tetrasporifera , par exemple), les carposporocystes se transforment en tétrasporocystes – on les nomme alors carpotétrasporocystes – et représentent à eux seuls le tétrasporophyte. Leurs noyaux, diploïdes à l’origine, subissent la méiose et les spores, formées par quatre (carpotétraspores) et haploïdes, donnent directement naissance à des gamétophytes.

Chez les Floridées d’eau douce des genres Lemanea et Batrachospermum , les carpospores diploïdes produisent un protonema (nommé Chantransia ) qui bourgeonne des cladomes d’abord diploïdes; la méiose s’effectue ensuite, non pas dans un sporocyste individualisé comme chez les autres Rhodophycées, mais dans la cellule initiale du jeune cladome; devenue haploïde, celle-ci reprend son activité de croissance en élaborant le reste du cladome qui, à maturité, produira les gamètes puis supportera le carposporophyte. La partie terminale haploïde du cladome représente donc le gamétophyte et l’ensemble protonema-base diploïde du cladome, le tétrasporophyte.

Chez certaines Phyllophoracées (Phyllophora brodiaei , Gymnogongrus crenulatus ), le zygote, au lieu de se développer vers l’intérieur du thalle, comme chez les autres Phyllophoracées, en filaments qui se transforment en amas de carpospores et représentent le carposporophyte, donne naissance directement à un tétrasporophyte réduit et parasite (tétrasporoblaste) qui s’accroît vers l’extérieur en traversant le tissu cortical; il s’épanouit en un éventail de filaments serrés les uns contre les autres (némathécie) et dont chaque cellule devient un tétrasporocyste.

Un cas remarquable est celui du Rhodochorton purpureum , longtemps connu dans la nature seulement par son tétrasporophyte. Les tétraspores produites par celui-ci donnent des gamétophytes paucicellulaires très petits. Le zygote se développe en une série de cellules qui, bien qu’elles ne se séparent pas du gamétophyte femelle, peuvent être considérées comme des carpospores. En effet, une (ou plusieurs) d’entre elles se développe en un filament dressé qui constitue un nouveau tétrasporophyte. Dans certaines lignées même, ainsi que chez Rhodothamniella floridula , le zygote se développe directement en un nouveau tétrasporophyte.

Chez Palmaria palmata , les tétraspores formées par le tétrasporophyte germent en gamétophytes de deux types. Le gamétophyte mâle est semblable au tétrasporophyte et d’une taille de plusieurs décimètres, alors que le gamétophyte femelle demeure microscopique et n’est connu qu’en culture. Le zygote se développe directement en un nouveau tétrasporophyte.

Chez Rhodophysema , les thalles sont des gamétophytes. Après la fécondation, le zygote formé se divise en deux cellules dont l’une devient un tétrasporocyste demeurant inclus dans le gamétophyte.

Enfin, chez un Acrochaetium , le zygote peut dans certains cas être libéré (sporozygote) de l’enveloppe du carpogone et se développer en un tétrasporophyte indépendant, tandis que chez une autre espèce du même genre il peut, sur place, se transformer en un tétrasporocyste.

5. Affinités et classification

Très isolées parmi les Algues, les Rhodophycées ne semblent avoir d’affinités qu’avec les Cyanophycées avec lesquelles elles ont en commun l’absence de cellules flagellées et l’existence de phycobiliprotéines. Toutefois, ces affinités sont très lointaines, puisque les Cyanophycées sont des Procaryotes, alors que les Rhodophycées constituent le groupe le plus évolué parmi les Algues.

Bien que très homogènes par suite de tout un ensemble de caractères communs, les Rhodophycées présentent une très grande diversité qui les a fait subdiviser en deux sous-classes ayant vraisemblablement évolué indépendamment l’une de l’autre et en un certain nombre d’ordres selon la structure de leur appareil végétatif et celle de leurs organes reproducteurs.

Bangiophycidées

La sous-classe des Bangiophycidées est caractérisée par un appareil végétatif peu évolué, à croissance intercalaire. Elle comprend trois ordres principaux:

– Les Porphyridiales , unicellulaires ou à cellules groupées en colonies palmelloïdes ou filamenteuses, sans reproduction sexuée; certaines vivent sur la terre humide (Porphyridium ), d’autres sont marines.

– Les Bangiales , à thalle filamenteux ou en lame mince, ayant une reproduction sexuée (Porphyra ).

– Les Compsopogonales , représentées par un seul genre (Compsopogon ) dans les eaux douces tropicales; plus évoluées, leurs cellules renferment de nombreux plastes sans pyrénoïde et la croissance de leur thalle n’est plus intercalaire mais terminale.

Floridées

Bien plus nombreuses que les Bangiophycidées, les Floridées se caractérisent généralement par un thalle cladomien à croissance apicale, très souvent complexe; toutes les cellules sont unies entre elles par des synapses. La classification actuellement admise repose essentiellement sur la situation du carpogone et sur le mode de développement du carposporophyte (cf. chap. 3, Reproduction sexuée ).

Les Acrochaetiales , souvent réunies à l’ordre suivant, s’en distinguent par leur thalle hétérotriche (non cladomien) comparable au protonéma des autres Floridées. Leurs cellules renferment généralement un seul plaste pourvu d’un pyrénoïde. Il n’y a ni rameau carpogonial ni cellules auxiliaires.

Les Némalionales possèdent des gamétophytes formés de cladomes uniaxiaux ou multiaxiaux, tandis que leurs tétrasporophytes sont réduits à des thalles hétérotriches très semblables aux thalles des Acrochaetiales. Le carpogone est porté par un rameau carpogonial plus ou moins différencié, mais il n’y a pas de cellules auxiliaires. Les formes marines, à structure multiaxiale, ont des cellules renfermant un seul plaste pourvu d’un pyrénoïde (Nemalion, Liagora, Galaxaura ). On rattache à cet ordre des formes d’eau douce à structure uniaxiale et à plastes nombreux et sans pyrénoïde dans chaque cellule (Lemanea, Batrachospermum ).

Les Gélidiales ont une fronde cladomienne uniaxiale et des cellules nourricières. Les Gelidium constituent la principale matière première pour la préparation de l’agar-agar.

Les Gigartinales comprennent de nombreuses familles de structures variées. Leurs cellules auxiliaires sont des cellules intercalaires des pleuridies ou des filaments corticaux. Les Gigartina et le Chondrus crispus sont utilisés pour la préparation de carragahénanes. Les Gracilaria fournissent de l’agar-agar.

Les Rhodyméniales diffèrent des précédentes par leurs cellules auxiliaires terminales. Le Palmaria palmata est consommé dans certains pays (Irlande, Nouvelle-Écosse).

Les Cryptonémiales , de structures très variées, sont caractérisées par la présence de gonophores carpogoniaux et auxiliaires. La famille des Corallinacées, à thalle fortement incrusté de calcaire, comprend des espèces en croûtes plus ou moins mamelonnées ou en massifs branchus (Lithophyllum, Lithothamnium ). D’autres ont des articles calcifiés unis par des parties non calcifiées (Corallina ).

Les Bonnemaisoniales , réunies par certains auteurs aux Némalionales, s’en distinguent néanmoins par leur appareil végétatif (cladomes uniaxiaux) beaucoup plus évolué, ce qui les rapproche des Céramiales. Leur cycle est souvent hétéromorphe (Asparagopsis ).

Les Céramiales représentent à elles seules les deux cinquièmes des Rhodophycées. Toutes possèdent des cladomes uniaxiaux tantôt filamenteux (Céramiacées), tantôt en lame (Délessériacées), ou de structure très complexe (Rhodomélacées, Polysiphonia ). Beaucoup de Rhodomélacées renferment des phénols bromés propres à cette famille, d’autres un pigment particulier (floridorubine ) qui remplace la phycoérythrine dans les plastes.

6. Données écologiques et biologiques

Les Rhodophycées se rencontrent dans toutes les mers du globe et sous toutes les latitudes. Elles sont toutefois proportionnellement moins nombreuses dans les mers arctiques, leur nombre augmentant progressivement dans l’Atlantique Nord au fur et à mesure que l’on se rapproche du tropique. Beaucoup de genres sont cosmopolites et représentés dans les divers océans par des espèces différentes. D’autres sont propres aux régions tropicales ou aux régions tempérées boréales ou australes. D’autres enfin ont une répartition géographique plus restreinte, tel le genre Rissoella localisé dans la Méditerranée.

Les Rhodophycées d’eau douce, peu nombreuses, sont fréquentes dans les eaux courantes et peu minéralisées (Batrachospermum, Lemanea ). Dans les régions tropicales, des espèces appartenant à des genres marins (Bostrychia, Caloglossa ) peuvent vivre dans les eaux douces, très loin de la mer.

Grâce à leurs pigments surnuméraires (phycoérythrine en particulier) qui leur permettent de capter l’énergie des radiations vertes qui seules pénètrent en profondeur dans la mer et qui ne sont pas directement utilisables par la chlorophylle, beaucoup de Rhodophycées vivent dans l’étage infralittoral, au-dessous du niveau des basses mers et jusqu’à la limite inférieure de la végétation marine (120 à 130 m en moyenne). Toutefois, quelques espèces se trouvent près du niveau de la mer et même dans l’étage littoral, en plein soleil (Rissoella ). Les Corallinacées peuvent former des revêtements ou des massifs calcaires importants sur les rochers ou contribuer à souder entre eux les blocs de madréporaires des récifs coralliens. Certaines formes non fixées (Lithothamnium calcareum et L. corallioides ) s’accumulent sur le fond, en une assez grande épaisseur, et constituent le maerl exploité en Bretagne.

Certaines Rhodophycées épiphytes sur d’autres algues envoient dans les tissus de leur support des rhizoïdes ou des rameaux endophytes; ces algues, bien pigmentées et photosynthétiques, sont tout au plus des hémiparasites (Polysiphonia lanosa sur l’Ascophyllum ). D’autres Rhodophycées, dépourvues ou presque de pigments photosynthétiques, sont par contre des parasites obligatoires qui ne se développent que sur un hôte déterminé. Parmi ces parasites, certains tel l’Harveyella mirabilis qui forme de petits mamelons blanchâtres sur les rameaux de son hôte (Rhodomela ), appartiennent à des familles particulières, très éloignées systématiquement de l’algue sur laquelle elles se développent. Ce sont des alloparasites . D’autres, au contraire, qualifiées d’adelphoparasites , dont l’appareil végétatif très réduit et indifférencié rappelle une tumeur, possèdent des organes reproducteurs très semblables à ceux de leur hôte, avec lequel ils ont parfois en commun des particularités cytologiques spécifiques. C’est le cas par exemple du Janczewskia verrucaeformis , parasite du Laurencia obtusa . On peut admettre que ces adelphoparasites tirent leur origine d’une mutation de la plante hôte, lui ayant fait perdre son aptitude à la photosynthèse, mutation qui n’a pu se perpétuer que par une sorte d’autoparasitisme sur l’espèce dont elle dérive ou sur des espèces voisines. Quelques Rhodophycées marines vivent en symbiose avec des Éponges qui les recouvrent entièrement. C’est ainsi que le Ceratodictyon spongiosum présente des rameaux enchevêtrés et anastomosés qui, à l’intérieur des tissus de l’Éponge, jouent le même rôle de soutien que le réseau de spongine des Éponges cornées auquel cette algue ressemble beaucoup.

rhodophycées [ rɔdɔfise ] n. f. pl.
• déb. XXe; de rhodo- et gr. phucos « algue »
Bot. Famille d'algues rouges (essentiellement des floridées), à forte teneur en pigment rouge qui masque les chlorophylles.

rhodophycées
n. f. pl. BOT Important groupe d'algues, marines pour la plupart, couramment appelées "algues rouges" à cause des plastes violacés qui les colorent.
Sing. Une rhodophycée.

rhodophycées [ʀɔdɔfise] n. f. pl.
ÉTYM. Déb. XXe; de rhodo-, et grec phucos « algue ».
Bot. Algues rouges également appelées floridées. || Les rhodophycées envahissent les eaux peu oxygénées.Au sing. || Une rhodophycée.
tableau Les grandes divisions en botanique.

Encyclopédie Universelle. 2012.