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SCEPTRE
SCEPTRE

SCEPTRE

Depuis l’Antiquité, bergers, rois et dieux portent de longs sceptres qui sont le signe de leur autorité sur le troupeau, sur le peuple ou sur le cosmos. On y place souvent au sommet un emblème destiné à montrer quelle est la source de ce pouvoir, le symbole de la divinité tutélaire, parfois une fleur de lis ou encore un oiseau (aigle, colombidé mâle) pouvant établir la jonction entre le Ciel et la Terre, le premier étant chargé de forces bénéfiques et fécondes (la pluie, la grâce), parfois dangereuses (la foudre). Le sceptre est alors canal, axe du monde ou du royaume, tenu par l’intermédiaire qu’est le souverain. Les rois carolingiens se servent de sceptres d’or gemmés (Charles II le Chauve reçoit le premier un sceptre lors de son sacre, 848) qui s’intègrent dans l’ordo du sacre, qu’ils soient longs ou courts, dualité qui provient d’une lecture de la Vulgate (le roi de l’Ancien Testament peut avoir long baculus et courte virga ): l’ordo des Francs de l’Ouest (vers 900) et celui de Ratold de Corbie (ou de Fulrad de Saint-Vaast, 973-986) ont conservé des traces des deux insignes du pouvoir. Louis VI reçut ainsi sceptre et verge en 1108, pour la défense des églises et des pauvres (Suger). L’ordo de 1200 environ précise que la verge a une coudée (environ 50 centimètres, mesure sacrée venant de la Bible) et qu’elle est sommée d’une main d’ivoire: c’est la «main de justice», terme du XVe siècle, encore que l’idée de justice soit liée à tous les autres insignes, et en particulier au grand sceptre. Le roi de France capétien n’eut jamais de globe crucifère dans sa main gauche et il n’est pas certain que les Carolingiens aient eu réellement cet insigne avec lequel ils sont souvent représentés dans les peintures de manuscrits; par archaïsme et avec volonté de représenter un empereur, Charles II le Chauve eut à Saint-Denis un gisant métallique le montrant avec le globe (vers 1220), et Charles VIII fut figuré de même quand il se montra en roi de Sicile et de Jérusalem (après 1495). Le sceptre placé dans la main droite du roi était un long bâton de six pieds de haut (1,95 m) orné d’une fleur de lis au sommet et très rarement d’un oiseau (vers 1300). La «main de justice» qui fut placée dans la main gauche du roi et qui fut détruite en 1794, semble dater des premiers Valois; l’ivoire était réputé provenir d’une licorne (il y avait d’ailleurs à Saint-Denis une corne de narval que l’on pensait venir d’une licorne; elle est au musée de Cluny). Charles V pour son sacre (1364) fit faire un sceptre orné, au sommet, d’un blanc lis des jardins sortant d’une pomme sur laquelle étaient figurés trois épisodes de la légende de Charlemagne, saint Charles empereur et roi, patron du roi, auteur de la loi successorale héréditaire française (selon Jean Golein), qui était encore représenté en statuette au-dessus du lis, trônant en majesté. Ce sceptre servit à tous les rois de France sauf à Charles VII et à Henri IV: pour ce dernier, sacré à Chartres alors que le trésor de Saint-Denis était détenu à Paris par la Ligue, on créa un petit sceptre et une petite main de justice que l’on retrouve sur de nombreux tableaux des rois Bourbons. On prit l’habitude de figurer ces insignes croisés en sautoir depuis Henri IV. En 1804, on restaura le sceptre «de Charlemagne» fait en 1364: sa partie haute conservée fut montée sur un morceau de bâton de chantre de Saint-Denis de la fin du XIVe siècle et une tige en cuivre doré. La main de justice fut créée de travers (main gauche) avec divers bijoux à sa base, dont un du XIe siècle provenant de Saint-Denis; une monture de cuivre doré la compléta. Ces insignes figurant dans les armoiries impériales ont servi à Charles X et leur partie supérieure seule est visible dans la galerie d’Apollon du Louvre. Napoléon Ier porta un long sceptre sommé de l’aigle romaine et une main de justice aux doigts étendus et non pas faisant un geste de bénédiction (le tout à la fonte en 1819). La reine portait des sceptres similaires et plus petits selon l’ordo , mais on sait que Charles V fit prendre à sa femme Jeanne de Bourbon le sceptre «de Dagobert» (début XIIe siècle, avec un oiseau monté d’un petit bonhomme nu, scène d’apothéose, détruit en 1794) et le sceptre à la rose (XIIe siècle?, détruit par la Ligue au XVIe). Signe par excellence du roi de France, la main de justice fut donc reprise par Napoléon et passa à tous ses parents placés sur des trônes satellites. Cet emblème ayant été conservé sur les armoiries de Louis-Philippe Ier, roi des Français, il passa par imitation idéologique à Léopold Ier roi des Belges. Le duc de Lorraine prit aussi la main de justice au XVIIe siècle.

sceptre [ sɛptr ] n. m.
• 1080; lat. sceptrum, gr. skeptron
1Bâton de commandement, signe d'autorité suprême. Le sceptre des empereurs romains. Sceptre surmonté d'un globe, d'une aigle, d'une main.
2Fig. L'autorité souveraine, dont le sceptre est l'insigne; l'état de souverain. royauté. Un sceptre de fer : une autorité tyrannique, un despotisme. « Le sceptre est un jouet pour un enfant, une hache pour Richelieu, et pour Napoléon un levier à faire pencher le monde » (Balzac).
3Littér. Signe de supériorité; prééminence. « une ville qui tient aujourd'hui le sceptre des arts et de la littérature » (Balzac).

sceptre nom masculin (latin sceptrum, du grec skêptron, bâton) Bâton de commandement, qui est un des insignes du pouvoir suprême (royauté, empire). Symbole dans la langue littéraire du pouvoir monarchique, de la royauté, de l'autorité suprême. ● sceptre (citations) nom masculin (latin sceptrum, du grec skêptron, bâton) Pierre de Ronsard château de la Possonnière, Couture-sur-Loir, 1524-prieuré de Saint-Cosme-en-l'Isle, près de Tours, 1585 Un roi sans la vertu porte le sceptre en vain. Discours, Institution pour l'adolescence du roi très chrétien, Charles neuvième du nom sceptre (synonymes) nom masculin (latin sceptrum, du grec skêptron, bâton) Symbole dans la langue littéraire du pouvoir monarchique, de la...
Synonymes :
- maîtrise
- royauté
- suprématie

sceptre
n. m.
d1./d Bâton de commandement, symbole de l'autorité monarchique.
d2./d Fig. Pouvoir souverain.

⇒SCEPTRE, subst. masc.
A. — 1. Bâton de commandement, parfois surmonté d'une figure emblématique, qui constitue dans certaines sociétés un des insignes du pouvoir royal ou impérial. Sceptre incrusté de pierreries; sceptre surmonté d'un aigle, d'une main; sceptre des empereurs byzantins, romains, des rois de France, des souverains de l'Europe. Il y avait le sceptre royal surmonté d'une fleur de lys, il y avait le sceptre impérial surmonté d'un globe, il y avait le sceptre de Charlemagne qui était en fer, il y avait le sceptre de Louis Le Grand qui était en or (HUGO, Misér., t. 2, 1862, p. 644). C'est un parapluie roulé, qu'ils tiennent sur l'épaule comme le licteur antique le faisceau, symbole de l'autorité de la loi! (...) et cela se porte gravement devant soi, à hauteur des yeux, comme une crosse d'évêque pour ne pas dire un bâton de maréchal ou un sceptre (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 97). V. houlette ex. de Chateaubriand.
RELIG. Sceptre de roseau. [P. allus. à Matth. XVII, 29] Roseau donné, par dérision, en guise de sceptre à Jésus-Christ pendant sa passion. V. flagellant ex. de Péguy.
2. P. méton., vieilli ou littér.
a) Pouvoir, autorité suprême d'un souverain. Convoiter, détenir, obtenir, perdre, usurper le sceptre; s'emparer du sceptre; arracher le sceptre des mains de qqn. Louis XIV reçut de ses mains [de Richelieu] un sceptre absolu, une monarchie brillante, éphémère, artificielle et superficielle (SAINTE-BEUVE, Tabl. poésie fr., 1828, p. 285). Les rois catholiques reprirent le sceptre en Angleterre et se vengèrent peu chrétiennement (SAND, Hist. vie, t. 3, 1855, p. 76).
Le sceptre et l'encensoir. Le pouvoir monarchique et la puissance ecclésiastique. Synon. le trône et l'autel. V. encensoir ex. de Ac. 1835.
Sceptre de fer. Pouvoir absolu et arbitraire; p. ext., autorité despotique. Régner avec un sceptre de fer. Envoyé des lieux sombres Où d'un sceptre de fer Aidès conduit les ombres (LECONTE DE LISLE, Poèmes ant., 1852, p. 97).
b) Souverain, monarque. On honore le sceptre par crainte ou par intérêt (Lar. 19e). Luttes d'instincts, loin des luttes de l'âme Entre voisins, pour l'orgueil vain d'une oriflamme; Haines de sceptre à sceptre (VERHAEREN, Villes tentac., 1895, p. 115).
Depuis le sceptre jusqu'à la houlette.
B. — Au fig.
1. Puissance, domination. Les licences sociales manifestées au rajeunissement de la France, les libertés de 1789 (...) se nivelaient déjà sous le sceptre populaire (CHATEAUBR., Mém., t. 1, 1848, p. 371).
[Suivi d'un compl. déterminatif objectif] Ruinée, dépeuplée, l'Europe a laissé échapper le sceptre du monde (J.-R. BLOCH, Dest. du S., 1931, p. 203).
[Suivi d'un compl. déterminatif subjectif] Son pouvoir brisera le sceptre des méchans (MICHAUD, Printemps proscrit, 1803, p. 81). Toute l'humanité agglomérée sous le sceptre de Rome (CLAUDEL, Poète regarde Croix, 1938, p. 297).
2. Prééminence, supériorité dans quelque chose. Parmi les autres habitués de mon salon, il en était un qui partageait le sceptre de l'originalité avec le membre de la société des naufrages (REYBAUD, J. Paturot, 1842, p. 271). Le commerce et l'industrie espèrent que le gouvernement ne voudra pas laisser perdre à la France le sceptre de la mode, élément de prospérité (STÉPHANE, Art coiff. fém., 1932, p. 186).
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1100 « bâton de commandement, l'une des marques de la royauté » (Roland, éd. J. Bédier, 2585); 2. déb. XVIe s. ceptre « le pouvoir royal lui-même » (J. D'AUTON, Chron., B. N. 5081, f ° 60 r °, I, 301 ds GDF. Compl.); 3. 1691 sceptre de fer « pouvoir despotique » (RACINE, Athalie, IV, 3); 4. 1779 « prééminence, supériorité dans un domaine quelconque » (D'ALEMBERT, Eloges, Bossuet ds LITTRÉ). Empr. au lat. sceptrum « sceptre », « trône, royaume, royauté », « suprématie », gr. « bâton pour s'appuyer », « bâton de commandement, de roi, de chef ». Fréq. abs. littér.:586. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 1 574, b) 1 008; XXe s.: a) 579, b) 259.

sceptre [sɛptʀ] n. m.
ÉTYM. 1080; lat. sceptrum, grec skeptron.
1 Bâton de commandement, l'un des signes de l'autorité suprême, dans certaines sociétés. || Sceptre des empereurs romains, byzantins, des souverains de l'Europe. || Sceptre surmonté d'un globe, d'une aigle, d'une fleur, d'une main. Main (de justice). || Couronne (cit. 8) et sceptre.
2 (V. 1500, ceptre). Fig. Autorité souveraine, dont le sceptre est l'insigne; l'état de souverain. Royauté. || Le sceptre et la houlette (cit. 1) : le roi et le berger. || Manier, porter le sceptre. || Un sceptre de fer (Racine, Athalie, IV, 3) : une autorité tyrannique, un despotisme (→ Grandir, cit. 11). || « Le trident de Neptune est le sceptre du monde » (cit. 20).Bibl. « La puissance, l'autorité, la magistrature » (Bossuet, Discours sur l'Histoire universelle, II, 2).
3 (Av. 1662). Littér. Signe de supériorité; prééminence. || Le sceptre d'or de la beauté (→ Frémissement, cit. 15).
0 (…) au centre des lumières, dans une ville qui tient aujourd'hui le sceptre des arts et de la littérature.
Balzac, la Fausse Maîtresse, Pl., t. II, p. 13.

Encyclopédie Universelle. 2012.