combler [ kɔ̃ble ] v. tr. <conjug. : 1>
• v. 1150; lat. cumulare « amonceler » → 1. comble
1 ♦ Rare Remplir jusqu'aux bords, complètement. Combler une mesure. — Loc. fig. COMBLER LA MESURE : commettre une dernière action qui fait cesser la patience et l'indulgence des autres. ⇒ exagérer (cf. Dépasser les bornes, la mesure). Il a comblé la mesure en ne répondant pas à ma lettre.
2 ♦ (1564) Combler (qqn) de : donner à profusion. ⇒ abreuver, accabler, couvrir, gorger. Vx Combler qqn de malheurs, de douleurs. Mod. Combler un enfant de cadeaux. Cela me comble de joie. « L'érudition de son employé le comblait d'aise » (Courteline). — Comblé d'honneurs. ⇒ chargé.
3 ♦ Remplir (un vide, un creux). ⇒ 1. boucher. Les cantonniers comblent les ornières. ⇒ remblayer. Combler un lac, un puits. Combler une brèche. ⇒ colmater. Combler un jour, un interstice. ⇒ obturer.
4 ♦ Fig. Combler une lacune. — Combler un déficit. — Combler son retard. ⇒ rattraper . — Combler un vide (moral), un besoin. Combler les vœux de qqn, les exaucer.
5 ♦ Combler qqn, le satisfaire pleinement. Vous me comblez ! vous êtes trop aimable. ⇒ gâter. Je suis comblé.
⊗ CONTR. Creuser, vider. Nuire.
● combler verbe transitif (latin cumulare) Remplir un creux, un vide, une cavité d'un matériau solide de manière à ce qu'il n'y ait plus de creux, que la cavité soit pleine, etc. : Combler un fossé avec de la terre. Faire en sorte qu'un manque, un déficit, une lacune, etc., disparaissent en faisant les apports ou les modifications nécessaires, en prenant les mesures appropriées : Ce livre vient combler une lacune. Satisfaire pleinement, réaliser le souhait, le désir de quelqu'un : Vous comblez tous mes espoirs. Donner à quelqu'un, lui apporter à profusion quelque chose d'agréable : Combler un enfant de cadeaux. Vous me comblez de joie. ● combler (expressions) verbe transitif (latin cumulare) Combler son retard, rattraper son retard. Combler un vide, faire en sorte que l'absence de quelqu'un ou de quelque chose ne soit plus fortement et douloureusement ressentie. ● combler (homonymes) verbe transitif (latin cumulare) ● combler (synonymes) verbe transitif (latin cumulare) Remplir un creux, un vide, une cavité d'un matériau solide...
Synonymes :
- boucher
- bourrer
- colmater
- obturer
Contraires :
- vider
Faire en sorte qu'un manque, un déficit, une lacune, etc....
Synonymes :
- boucher
- colmater
Satisfaire pleinement, réaliser le souhait, le désir de quelqu'un
Synonymes :
- exaucer
Donner à quelqu'un, lui apporter à profusion quelque chose d'agréable
Synonymes :
- abreuver
- couvrir
combler
v. tr.
d1./d Remplir (un vide, un trou, un creux). Combler un puits.
d2./d Fig. Compenser. Combler un déficit.
d3./d Fig. Combler qqn, le satisfaire pleinement. Combler les désirs, les voeux de qqn, les satisfaire pleinement.
|| Combler qqn de, le gratifier en abondance de. Combler qqn de bienfaits, de cadeaux.
⇒COMBLER, verbe trans.
A.— [L'obj. désigne un vide physique]
1. Vx ou littér. Remplir une mesure, un récipient au maximum de sa capacité avec un surplus qui le dépasse. Combler un boisseau (Ac. 1835, 1878), combler une mesure, la mesure (Ac. 1835-1932). Il (...) emprunta une petite charrette, et, (...) il la combla de meubles (HUYSMANS, Les Sœurs Vatard, 1879, p. 241).
— Loc. fig. (plus fréq.). Combler la mesure. Dépasser ce qui est admissible ou pardonnable. Par sa dernière faute, il a comblé la mesure; leurs crimes, leurs fautes ont comblé la mesure (Ac. 1835-1932) :
• 1. Mais cet assassinat juridique, en comblant la mesure de leurs crimes, n'étouffa pas la doctrine que Parole de Dieu avait semée.
PROUDHON, Qu'est-ce que la propriété? préf., 1840, p. 145.
2. Usuel. [L'obj. désigne une cavité, un vide] Remplir entièrement de façon compacte et bien apparente. Combler un fossé, des vallées, la tranchée (Ac. 1835-1932). Des maçons, (...) comblent les trous, bouchent les lézardes (DU CAMP, En Hollande, 1859, p. 228). Une barbe peu fournie comble la cavité des joues (R. MARTIN DU GARD, Jean Barois, 1913, p. 547) :
• 2. La neige avait nivelé toute la profonde vallée, comblant les crevasses, effaçant les deux lacs, capitonnant les rochers; ...
MAUPASSANT, Contes et nouvelles, t. 2, L'Auberge, 1886, p. 1078.
— Emploi pronom. à sens passif. Les puits se sont comblés, les canaux ont été envahis par le sable (J. et J. THARAUD, La Fête arabe, 1912, p. 162).
SYNT. Combler une fosse, une grotte, un trou. Âtre comblé de cendre (NODIER, Trilby, 1822, p. 180).
— P. métaph. Combler le gouffre d'une fortune ruinée (BALZAC, Correspondance, 1836, p. 26); un vide soudain se creusait dans sa vie, un vide affreux qu'il fallait combler à tout prix (R. MARTIN DU GARD, Les Thibault, Le Pénitencier, 1922, p. 800) :
• 3. Je vais retirer les petits poèmes en prose [du recueil], et combler le trou, qui ne sera pas très considérable, avec deux essais : ...
ROMAINS, Les Hommes de bonne volonté, La Douceur de la vie, 1939, p. 94.
Rem. L'Ac. mentionne un emploi rare : mettre le comble à qqc., le rendre complet. Il a comblé sa perfidie. Cette perte a comblé ses infortunes (Ac. 1835-1932).
B.— P. anal. et au fig.
1. [L'obj. désigne une pers.] Combler [qqn] de [qqc.]. Donner quelque chose en surabondance à quelqu'un, au-delà de la mesure normale. Combler de bienfaits, de dons, de présents. Ce que tu m'apprends du mariage d'Adrien, (...) m'a fait un extrême plaisir. Dis-lui bien que cette nouvelle me comble de joie (J.-J. AMPÈRE, Correspondance, 1827, p. 479).
SYNT. Combler de biens, de dons, de faveurs, d'honneurs, de gloire; combler d'attentions et de prévenances; combler de bénédictions.
— Absol. Combler qqn. Satisfaire tous ses désirs. Vous me comblez! Un homme comblé.
— En partic., dans le lang. de l'amour, de la passion :
• 4. Vous êtes trop et trop peu dans ma vie. Trop pour que je puisse aimer quelqu'un d'autre. Trop peu pour me combler et me satisfaire. Vous me donnez trop pour que je puisse cesser toute relation avec vous sans un déchirement affreux. Vous me donnez trop peu pour que ce peu ne soit pas aussi insuffisant et douloureux que le rien. Votre amitié m'est une torture, et la rupture de cette amitié me serait une torture elle aussi.
MONTHERLANT, Les Jeunes filles, 1936, p. 1016.
2. [L'obj., inanimé abstr., désigne un manque de qqc., ou de qqn., un besoin]
a) Domaine intellectuel. Combler une lacune, un vide. Rétablir entièrement l'enchaînement des faits ou des idées :
• 5. En faisant mes démonstrations il y aura nécessairement un grand nombre de lacunes, soit qu'elles soient impossibles à combler dans l'état actuel de la science, soit que je n'aie pas eu le temps de les aborder bien qu'elles puissent être solubles.
C. BERNARD, Principes de méd. exp., 1878, p. 283.
— FIN. Combler un déficit. Le supprimer entièrement par de nouveaux apports de fonds. Ce boni viendrait à point pour m'aider à combler mon déficit, car je suis fort arriéré et fort endetté (HUGO, Correspondance, 1867, p. 7).
b) Domaine affectif. Combler les convoitises, les espérances, les souhaits, les vœux de qqn. Les satisfaire entièrement, totalement. Satisfaire tous les appétits, combler toutes les convoitises (CLEMENCEAU, Vers la réparation, 1899, p. 352) :
• 6. ... des hommes et des femmes jadis insupportables, et qui avaient perdu à peu près tous leurs défauts, soit que la vie, en décevant ou comblant leurs désirs, leur eût enlevé de leur présomption ou de leur amertume.
PROUST, Le Temps retrouvé, 1922, p. 936.
Rem. 1. On relève un emploi adj. du part. prés. comblant, ante. La comblante et riche harmonie avec laquelle elles [les ressources techniques et spirituelles de l'artiste] se trouvaient ici [dans l'œuvre] distribuées (GRACQ, Au château d'Argol, 1938, p. 162). 2. On rencontre ds la docum. l'adj. combleur, euse, rare au fig. Qui comble. Passé et avenir, les seules richesses de l'homme. Avenir combleur de vides. Parfois aussi le passé joue ce rôle (S. WEIL, La Pesanteur et la grâce, 1943, p. 29).
Prononc. et Orth. :[], (je) comble []. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. Ca 1150 « remplir (une mesure, un récipient) jusque par-dessus le bord » (WACE, St Nicolas, éd. E. Ronsjö, 284); fig. ca 1583-90 (BRANTÔME, Grands Capit. estrang., L. I, ch. XXIX ds GDF. Compl. : Pour combler la mesure de ses meschencettez; il l'estrangla de ses propres mains); 2. 2e moitié XIIIe s. pronom. « se remplir (d'un vide, d'une cavité) » (Du Vilain qui a donné son ame au deable, éd. Montaiglon et Raynaud, VI, 40); 1441 (Charte ds DU CANGE, s.v. abosatio : avoient... comblé... ung puis); 3. 1165-70 part. passé adj. « qui a reçu des biens en abondance » (B. DE STE MAURE, Troie, 25 629 ds T.-L.); 1564 combler qqn de « lui donner une chose à profusion » (THIERRY). Du lat. class. cumulare « entasser, accumuler », « remplir qqc. en entassant » « pourvoir qqn en abondance ». Fréq. abs. littér. :1 305. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 2 062, b) 1 634; XXe s. : a) 1 575, b) 1 964. Bbg. GOTTSCH. Redens. 1930, p. 258. — SCHMIDT (H.). Fr. vivant. Rech. lexicol. Praxis 1969, t. 16, n° 3, pp. 331-332.
combler [kɔ̃ble] v. tr.
ÉTYM. V. 1150; du lat. cumulare « amonceler ». → 1. Comble, I.
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1 Rare. Remplir par-dessus les bords. || Combler une mesure. ⇒ Surcharger.
♦ ☑ Loc. fig. (V. 1585). Combler la mesure (cit. 21) : commettre une dernière action qui fait cesser la patience et l'indulgence des autres. ⇒ Attiger (pop.), dépasser (les bornes), exagérer, passer (la mesure…); → fam. Charrier, y aller fort. || Il a comblé la mesure en ne répondant pas à ma lettre. || Ses bêtises ont comblé la mesure.
1 Mes crimes désormais ont comblé la mesure.
Racine, Phèdre, IV, 6.
2 Vous avez comblé la mesure de vos calomnies.
Pascal, les Provinciales, 16.
2 (1564). Compl. n. de personne. || Combler qqn de… : donner à (qqn) qqch. à profusion. ⇒ Abreuver, accabler, charger, couvrir, gorger. Vx. || Combler qqn de maux, d'horreur. Mod. || Combler qqn de cadeaux, de bienfaits, de gloire. || Son arrivée me comble de joie.
3 J'étais lasse d'un trône où d'éternels malheurs
Me comblaient chaque jour de nouvelles douleurs.
Corneille, Rodogune, II, 3.
4 Tu trahis mes bienfaits, je les veux redoubler;
Je t'en avais comblé, je t'en veux accabler (…)
Corneille, Cinna, V, 3.
5 (…) elle (votre lettre) me comble d'une joie si vive, qu'à peine mon cœur (…) la peut contenir.
Mme de Sévigné, 370, 15 janv. 1674.
6 (…) les amitiés dont M. et Mme de Luxembourg me comblaient (…)
Rousseau, les Confessions, XI.
7 L'érudition de son employé le comblait d'aise (…)
Courteline, Messieurs les ronds-de-cuir, 3e tableau, I, p. 92.
REM. L'usage tend à ne donner au mot combler que les compléments qui expriment un avantage (par attraction de « vous me comblez », → ci-dessous, 5.).
3 Concret. (Compl. n. de chose; sujet n. de personne ou de chose). Remplir (un vide, un creux). ⇒ Boucher. || Les cantonniers, les terrassiers comblent les creux de la route. ⇒ Remblayer. || Matériau qui sert à combler la route. ⇒ Remblai. || Combler une vallée, un fossé, une ornière. ⇒ Aplanir, niveler. || Combler un lac, une lagune, un puits, un port. || Combler un jour, un interstice. ⇒ Obturer.
8 L'année prochaine, ce sillon sera comblé et couvert par un sillon nouveau.
G. Sand, la Mare au diable, II, p. 26.
9 La neige est partout : elle comble les mille vallées creusées dans la puissante échine des montagnes, comme la moelle dans les vertèbres.
André Suarès, Trois hommes, I, « Ibsen », p. 69.
9.1 (…) je ne savais plus ni comment expliquer ma venue, ni comment combler tout à coup ce vide énorme de deux années qui mettait entre nous comme un abîme de secrets, de réticences, et d'obscurités.
E. Fromentin, Dominique, p. 247.
10 Les historiens du XIXe siècle, plutôt que d'avouer leur ignorance (sur certains faits historiques antérieurs au XVIe siècle), ont tenu à constituer un exposé complet. Ils ont comblé les lacunes de nos connaissances soit par des légendes, soit par des conjectures sans fondement, soit par des raisonnements fondés sur des généralisations imprudentes.
Ch. Seignobos, Hist. sincère de la nation franç., p. 6.
♦ Combler un déficit, le faire cesser par des apports de fonds.
♦ Combler les silences, les vides (dans une conversation).
10.1 Lui non plus ne comprenait pas un mot de ce bavardage didactique, mais il affichait un air intéressé de spécialiste. Il hochait la tête, émettait des grognements importants, comblait les silences par des exclamations prudentes :
— Bien sûr !… Le contraire m'eût étonné !… Parbleu !…
H. Troyat, le Vivier, p. 67.
5 Spécialt. a Combler les vœux de qqn, les exaucer.
b (Compl. n. de personne; sujet n. de personne ou de chose). Satisfaire. || Cette relation, cette personne ne le (la) comble pas. || Vous me comblez ! : vous êtes trop aimable. ⇒ Gâter. — (Sujet n. de chose). || Sa réussite ne suffit pas à le combler. — Passif. || Être comblé. → ci-dessous, p. p., 3.
11 Il est triste d'aimer sans une grande fortune et qui nous donne les moyens de combler ce que l'on aime (…)
La Bruyère, les Caractères, IV, 20.
12 Vous êtes trop et trop peu dans ma vie (…)
Trop peu pour me combler et me satisfaire.
Montherlant, les Jeunes Filles, in Romans, t. I, Pl., p. 1 016.
13 Le spectacle de la relève de la garde, à Saint-James, les combla tellement qu'ils y retournèrent trois matins de suite, comme à un office.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. V, XXVI, p. 262.
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comblé, ée p. p. adj.
1 Qui est totalement rempli. ⇒ Plein. || Une vallée comblée. — REM. Dans l'usage moderne, ne s'emploie que si le remplissage est solide.
14 (…) les arches du Pont-Neuf sont quasi comblées (par la crue des eaux).
Mme de Sévigné, 127, 16 janv. 1671.
2 Fig. (Personnes). || Il revint comblé d'honneurs. ⇒ Accablé, abreuvé, chargé, couvert. || Être comblé de dons.
15 Mon petit naturaliste enorgueilli veut babiller, mais sur-le-champ je lui ferme la bouche, et l'emmène comblé d'éloges.
Rousseau, Émile, III.
16 Un jeune homme (Alexandre le Grand), comblé de tous les dons que puissent accorder à la fois la beauté, la force, le génie et l'intelligence (…)
Daniel-Rops, Hist. sainte, IV, p. 314.
3 (Personnes). Sans compl. || Je suis comblé. ⇒ Gâté, heureux, satisfait.
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CONTR. Creuser, vider. — Nuire.
DÉR. 2. Comble, comblement.
Encyclopédie Universelle. 2012.