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corvée

corvée [ kɔrve ] n. f.
• 1160; lat. pop. corrogata (opera), de corrogare « convoquer ensemble »
1Dr. anc. Travail gratuit que les serfs, les roturiers devaient au seigneur. Astreint à la corvée. corvéable.
2(v. 1460) Fig. Obligation ou travail pénible et inévitable. Quelle corvée ! Les corvées domestiques, ménagères : les travaux du ménage. Faire toutes les corvées. Par ext. Obligation qui déplaît. Ce cocktail, c'est une vraie corvée !
3(1835) Travail que font à tour de rôle les hommes d'un corps de troupe, les membres d'une communauté. besogne, service, 1. travail. Être de corvée. Homme de corvée. « les corvées quotidiennes de ravitaillement » (Mac Orlan).
4Région. (Canada) Travail en commun, entre voisins ou amis, occasionnel et gratuit.

corvée nom féminin (bas latin corrogata opera, travail obligatoire dû à un seigneur) Travail collectif gratuit qui était dû au seigneur ou au roi par le paysan. Travail effectué à tour de rôle par certains membres d'un groupe, d'une communauté, d'un corps de troupe ; équipe chargée de ce travail : La corvée de ravitaillement dans une équipe de randonneurs. Tâche, obligation pénible ou fastidieuse : La corvée du ménage.corvée (expressions) nom féminin (bas latin corrogata opera, travail obligatoire dû à un seigneur) Être de corvée, avoir à faire un travail pénible. Homme de corvée, chargé des gros travaux.

corvée
n. f.
d1./d DR FEOD Travail gratuit dû par les serfs, les paysans, au seigneur ou au roi.
d2./d Par ext. Travail que font tour à tour les soldats d'une unité, les membres d'une collectivité, etc. Corvée d'eau, de vivres.
d3./d Toute chose qu'on est obligé de faire et qu'on trouve pénible ou désagréable.

⇒CORVÉE, subst. fém.
I.— Travail imposé et non rémunéré.
A.— DR. ANC. Journées de travail collectives gratuites (d'hommes et de bêtes de somme) dues au seigneur (jusqu'en 1789) par les serfs, les roturiers, pour assurer l'entretien et l'exploitation de ses biens et domaines. Corvée seigneuriale; abolition de la corvée; être astreint à la corvée :
1. Un jour, il y a soixante-trois ans de cela, le peuple français (...) écrasé de gabelles, d'aides, (...) de redevances, de dîmes, de péages, de corvées, de banqueroutes (...) se mit en tête de demander des comptes à la monarchie...
HUGO, Napoléon le Petit, 1852, p. 37.
SYNT. Grande corvée; corvée extraordinaire, ordinaire, royale; corvées, cens et redevances en nature; transformation de la corvée en une prestation, en une taxe générale, locale, vicinale; être assujetti à la corvée; servir en corvée.
Corvée réelle. Liée au fonds. Corvée personnelle. Liée au lieu de résidence. Corvée à merci. Laissée à la discrétion du seigneur.
B.— Moderne
1. ADMIN. Travail réglementaire imposé à une collectivité militaire.
a) ARM. Tâches assignées à tour de rôle aux militaires d'une unité pour les besoins (d'entretien, de ravitaillement) du camp. Tenue de corvée. Corvée d'eau (CLAUDEL, Nuit Noël, 1915, II, p. 567). Hommes de corvée (DORGELÈS, Croix de bois, 1919, p. 30) :
2. [Dans le stalag]. La besogne la plus redoutée était pourtant la corvée de bois, parce qu'elle durait toute la journée et que les conditions où elle s'accomplissait la rendaient extrêmement pénible.
AMBRIÈRE, Les Grandes vacances, 1946, p. 88.
SYNT. Charrettes de corvée; corvée de vivres, d'eau, de bois, de pluche (d'épluchage) ou de patates, de chiottes.
Corvée de quartier (très usuel). Balayage, nettoyage des cours, cuisines et autres lieux (d'apr. MERLIN, Lang. verte troupier, 1886, p. 24).
Loc. fig., arg. milit. Tête à corvées. ,,Imbécile, tête d'idiot`` (RIGAUD, Dict. arg. mod., 1881, p. 363).
P. méton. Les hommes qui assurent la corvée. La corvée de soupe; camarades de corvée; commander, diriger une corvée; une corvée de 80 hommes est détachée. Sous les platanes du quai de Strasbourg, passait une corvée dont le pas lourd retentissait sur les pavés (CARCO, Innoc., 1916, p. 238).
b) MAR. Service à bord ou hors du bord imposé à une partie de l'équipage (commandée par un officier ou aspirant de corvée). La corvée d'équipage.
2. P. anal. Travail supplémentaire imposé à un individu (généralement travail manuel). La jeune femme, accoutumée à un service abêti de pauvres filles auxquelles on coupait leur pain, exigeait d'elles des corvées (ZOLA, Pot-Bouille, 1882, p. 226).
P. métaph. :
3. Ainsi, Rigou, tout en demandant de petites primes pour des retards de quelques mois, pressurait ses débiteurs en exigeant d'eux des services manuels, véritables corvées, auxquels ils se prêtaient, croyant ne rien donner parce qu'ils ne sortaient rien de leurs poches.
BALZAC, Les Paysans, 1844-50, p. 254.
3. Travaux réglementaires que se partagent à tour de rôle les membres d'une collectivité municipale (ou une communauté libre) pour les besoins de cette dernière. Corvée quotidienne, d'entretien; échapper à une corvée. Synon. besogne, service, tâche, travail. On distinguait les craquements du treuil où les hommes de corvée pressaient la vendange (FROMENTIN, Dominique, 1863, p. 12). Des jeunes filles au teint frais font la corvée d'eau du matin (A. BOMBARD, Naufragé volontaire, Paris, Le Livre de poche, 1967 [1958], p. 144).
SYNT. Corvée de nettoyage, de ravitaillement; heures de corvée réglementaire; être de corvée, relever qqn de la corvée, couper à une corvée, faire toutes les corvées (cf. être taillable et corvéable).
II.— P. ext.
A.— [L'accent est mis sur la marginalité ou le caractère occasionnel du travail]
1. Région. (Canada). Temps de travail gratuit et collectif fourni volontairement à un voisin pour lui venir en aide (en cas de sinistre, de difficulté). Faire une corvée pour reconstruire une maison, consolider une digue, etc.
2. Pop., vx. Petits travaux sur commande que les ouvriers vont faire en ville :
4. Garçon taillandier à l'ordinaire, ce gnome [Godain] travaillait chez le charron tant que l'ouvrage abondait; mais il se louait pour les corvées chèrement rétribuées.
BALZAC, Les Paysans, 1844-50, p. 230.
B.— [L'accent est mis sur le caractère pénible du travail] Tâche ingrate et fastidieuse ou pénible (en raison de son manque d'intérêt) à laquelle on ne peut pas se soustraire. Je ne te demande pas de m'écrire, car c'est corvée pour toi (NERVAL, Corresp., 1830-55, p. 234). Il n'y a d'amusant que le travail qui n'a pas encore été lu à personne. Tout le reste est corvée et métier, chose horrible (SAND, Corresp., t. 6, 1812-76, p. 311). Il faut que je sorte à trois heures! murmura-t-elle. En voilà une corvée! (ZOLA, Nana, 1880, p. 1128).
En partic.
1. Travaux du ménage. Corvées domestiques, ménagères, du dimanche.
2. Tâches imposées par les règles de la vie de société ou de la profession. À l'entr'acte, corvée de compliments (A. DAUDET, Immortel, 1888, p. 178) :
5. Mais surtout elle [Berthe] se rattrapait des trois hivers où elle avait couru la boue de Paris en souliers de bal, à la conquête d'un mari : (...) corvées de sourires et de grâces pudiques, auprès des jeunes gens imbéciles...
ZOLA, Pot-bouille, 1882, p. 239.
SYNT. a) Corvée abominable, accablante, affreuse, désagréable, ennuyeuse, fastidieuse, ignoble, insupportable, lourde, monotone, mortelle, pénible; corvée diplomatique, mondaine, officielle; corvée familiale; corvée conjugale, sexuelle. b) Corvée du mois; corvée d'obligation, de politesse, de reconnaissance; corvée d'une séance publique, d'une visite obligatoire. c) Imposer, infliger une corvée à qqn; délivrer qqn d'une corvée, le soustraire à une corvée; couper à une corvée.
Pop. S'appuyer une corvée. Faire quelque chose de désagréable. S'allonger une corvée. Faire quelque chose contre son gré.
Fam., vx. En être pour sa corvée ou faire corvée (comp. faire buisson creux). Faire une démarche désagréable sans résultat :
6. — Eh! bien, lui demanda-t-il [mon père à ma mère], as-tu encore fait corvée aujourd'hui?
— Dieu merci, non; ils ont tous acquitté la redevance...
BALZAC, Œuvres diverses, t. 1, 1850, p. 303.
Arg. Travail professionnel des prostituées.
Loc. Corvée de viande. Rapports sexuels. Aller à la corvée. ,,Raccrocher les hommes`` (FRANCE 1907).
Rem. On rencontre ds la docum. le dér. corvéieur [var. corvoyeur (Mirabeau), corvéïeur (Nouv. Lar. ill.), corvoyeur (Lar. 20e Lar. encyclop.)], subst. masc. vx. Celui qui travaille à la corvée. Attesté ds Ac. Compl. 1842, BESCH. 1845, LITTRÉ, Lar. 19e, GUÉRIN 1892, Lar. 20e, Lar. encyclop., QUILLET 1965.
Prononc. et Orth. :[]. Ds Ac. depuis 1694. Étymol. et Hist. 1. 1170-74 dr. médiév. (B. DE STE-MAURE, Chron. ducs Normandie, éd. C. Fahlin, 28904); 2. ca 1460 fig. (VILLON, Testament, éd. A. Longnon, 1031); 3. 1835 (Ac. : Corvée. Il se dit, en termes militaires, de Certains travaux que font tour à tour les soldats d'une compagnie). Du lat. de basse époque corrogata [opera] « travail obligatoire dû au seigneur » à l'origine « service qui consiste dans le labourage des terres de la réserve seigneuriale (mesuré par journées de travail) » (861 Polyptique de St Remi ds NIERM.), corvada (VIIIe-IXe s. Capitulaire de Villis, ibid.) part. passé de corrogare « inviter, solliciter ensemble ». Fréq. abs. littér. :579. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 333, b) 928; XXe s. : a) 1 088, b) 1 025. Bbg. LAMMENS 1890, p. 90. — RITTER (E.). Les Quatre dict. fr. B. de l'Inst. nat. genevois. 1905, t. 36, pp. 291-533. — ROG. 1965, p. 86.

corvée [kɔʀve] n. f.
ÉTYM. XIIe, corovée; cf. lat. médiéval corvea (1265), corvata; du lat. pop. corrogata (opera) « travail sollicité », de corrogare « solliciter », de co- (cum), et rogare « demander ».
1 (V. 1170). Dr. anc. Travail gratuit que les serfs, les roturiers devaient au seigneur. || Être astreint à la corvée. Corvéable. || Corvée réelle : corvée liée au fonds. || Corvée personnelle : corvée liée au lieu de résidence. || Corvée à merci : corvée laissée à la discrétion du seigneur. || Corvée publique : corvée due au souverain; corvée particulière, due au seigneur.
1 On distinguait la corvée particulière ou seigneuriale due spécialement par les serfs mais aussi par les vilains d'ordinaire au profit du seigneur, et la corvée publique ou royale due au souverain. (Celle-ci) consiste surtout en une obligation pour les roturiers (corvée personnelle) ou les propriétaires de terres roturières (corvée réelle) de fournir leur travail pour l'exécution de certains travaux publics, spécialement les chemins.
Lepointe, Voc. d'hist. du droit franç., Corvée.
2 Sa femme, ses enfants, les soldats, les impôts,
Le créancier et la corvée,
Lui font d'un malheureux la peinture achevée.
La Fontaine, Fables, I, 16.
3 (…) dans les anciens temps, lorsqu'on voulait forcer le pauvre monde à payer la taille et à faire la corvée, contrairement aux termes de la loi, qui était déjà bien assez dure, telle qu'on l'avait donnée.
G. Sand, la Petite Fadette, XXII, p. 156.
Spécialt. Travail pour l'entretien des chemins. Prestation.
Régional (Suisse rurale). Travaux en groupe obligatoires, dans une communauté. || Corvée communale, bourgeoisiale; la corvée d'un alpage communautaire.Ensemble des personnes participant à ces travaux.
3.1 Et, comme la maison d'école appartient à tout le monde, il s'agissait aussi que tout le monde participât à ce travail (la reconstruire), d'où ces corvées organisées; chaque habitant devait tant de jours de travail ou verser une somme d'argent équivalente.
C.-F. Ramuz, la Guerre dans le Haut-Pays, Œ. compl., t. VI, p. 129.
2 (1835). Mod. Travail que font à tour de rôle les hommes d'un corps de troupe, et, par anal., les membres d'une communauté. Besogne, service, travail. || Une corvée ennuyeuse, fastidieuse, pénible. || Corvée de vivres. || Corvée d'eau. || Corvée de patates : épluchage des pommes de terre. || Corvée de quartier. || Tenue de corvée. || Être de corvée.Fam. || S'allonger, s'appuyer une corvée.Hommes de corvée.
4 (…) quelques légionnaires descendus au méchouar pour les corvées quotidiennes de ravitaillement.
P. Mac Orlan, la Bandera, XII, p. 137.
4.1 Des jeunes filles au teint frais font la corvée d'eau du matin (car l'eau est le grand problème des Isles Fortunées). La taille cambrée et le port noble, elles marchent sans gêne aucune, portant sur la tête les récipients les plus variés, qui vont du plus classique pot de terre au moderne baril de tôle ondulée.
Alain Bombard, Naufragé volontaire, p. 144.
Loc. Corvée de bois : exécution sommaire d'un prisonnier emmené pour un simulacre de corvée de ramassage de bois et dont on prétendait qu'il avait tenté de s'évader.
4.2 Aujourd'hui, ce garçon me donne, de ce que les Algériens appellent « la corvée de bois », telle que des civils la pratiquent une version nouvelle pour moi (et atroce).
F. Mauriac, le Nouveau Bloc-notes 1958-1960, p. 36.
Mar. Service imposé à une partie de l'équipage. || La corvée d'équipage.
Par ext. Ensemble des personnes qui accomplissent une corvée. || La corvée de soupe vient d'arriver.
4.3 Après la soupe, une corvée balayait la chaussée, ponçait et remisait les roulantes (…)
Francis Carco, les Belles Manières, p. 104.
Rare. Homme de corvée; spécialt, soldat chargé de toucher la subsistance (3., b).
4.4 Les corvées nous servirent avec une attention extrême, supervisées par le prince, dont le tablier écru n'était pas de toute fraîcheur, suivi de son chien la truffe à la couture du pantalon de son maître.
Georges Borgeaud, le Voyage à l'étranger, I, p. 107.
3 (V. 1460). Fig. Obligation ou travail pénible, inévitable et sans intérêt. || Quelle corvée ! || Je me serais bien passé de cette corvée. || Corvées domestiques, ménagères : travaux du ménage. || C'est une corvée pour moi. || C'est lui, c'est elle qui fait, qui se tape, qui se farcit toutes les corvées.
5 Le genre de malheur que porte dans l'âme un amour contrarié, fait que toute chose demandant de l'attention et de l'action devient une atroce corvée.
Stendhal, la Chartreuse de Parme, II, p. 468.
6 Mais il cherchait des prétextes pour esquiver ce qui avait l'air d'être une corvée à ses yeux.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. V, XXVI, p. 244.
4 Régional (Canada). Travail en commun, entre voisins ou amis, occasionnel et gratuit.
5 Argot de métier. Travail peu important (en serrurerie, par exemple).
CONTR. Amusement, plaisir (partie de).

Encyclopédie Universelle. 2012.