croupir [ krupir ] v. intr. <conjug. : 2>
1 ♦ (Personnes) Demeurer (dans un état pénible, méprisable). Croupir dans la paresse, l'oisiveté, le vice. ⇒ moisir, pourrir. Croupir en prison. Croupir dans l'ignorance, la médiocrité. ⇒ s'encroûter. « C'est ainsi qu'ils vivaient, non ! qu'ils croupissaient ensemble, rivés au même fer, couchés dans le même ruisseau » (A. Daudet).
2 ♦ (1545 au p. p.) Stagner et se corrompre (liquide). ⇒ se corrompre. Eau qui croupit au fond d'une mare. « au milieu des bas-fonds où croupissait un reste d'eau » (Maupassant ). — P. p. adj. Eau croupie.
♢ Par ext. Demeurer dans l'eau stagnante. ⇒ moisir, pourrir. Saletés qui croupissent dans une flaque.
● croupir verbe intransitif En parlant de l'eau, se corrompre en restant stagnante. Être en train de pourrir dans un lieu humide : Détritus qui croupissent dans le ruisseau. Être contraint à l'immobilité, à l'inactivité ; pourrir, moisir : Croupir au fond d'un cachot. Rester dans un état pénible ou abject, méprisable, honteux : Croupir dans l'ignorance. ● croupir (synonymes) verbe intransitif Être en train de pourrir dans un lieu humide
Synonymes :
- stagner
Rester dans un état pénible ou abject, méprisable, honteux
Synonymes :
- moisir
- pourrir
- s'encroûter
- végéter
croupir
v. intr.
d1./d (Liquides) Se corrompre faute de mouvement. L'eau croupit.
— (Choses) Se corrompre dans une eau stagnante. Herbes qui croupissent dans une mare.
d2./d Fig. Vivre dans l'ordure, dans un état dégradant. Croupir dans sa crasse. Croupir dans le vice.
|| (S. comp.) être inactif, improductif.
⇒CROUPIR, verbe intrans.
A.— [En parlant de l'état matériel d'une substance]
1. [Le suj. désigne un liquide] Rester immobile et subir une décomposition faute d'écoulement. Près de là croupissait une vieille mare à purin, toute couverte de moisissure jaune (RICHEPIN, Miarka, 1883, p. 319). Aucun drainage n'était possible; l'eau stagnante croupissait au ras des maisons (MAUROIS, Byron, t. 2, 1930, p. 277).
♦ Emploi pronom., rare. L'eau sanglante se croupit... on brûle!... nous sommes en hiver, c'est tout profit!... (SARDOU, Patrie! 1869, I, tabl. 1, 2, p. 12).
— P. anal. (avec l'immobilité des flaques d'eau stagnantes). L'ombre, entre les hauts murs, croupissait comme au fond d'une cave. Elle était froide, inerte, morte dans toute son épaisseur (GENEVOIX, Rroû, 1931, p. 151). Il reste un peu de nuit dans un angle à croupir (GENET, Poèmes, 1948, p. 33).
2. P. ext.
a) [Le suj. désigne une matière solide] Subir une décomposition en séjournant dans une eau stagnante, dans des ordures, dans une atmosphère humide. Les pluies finies, toute sorte de détritus croupissaient, fermentant et pourrissant sous les premiers soleils (PESQUIDOUX, Livre raison, 1928, p. 114). Des détritus croupissent dans les ruisseaux, mêlés aux enfants chétifs, aux chats eczémateux (FARGUE, Piéton Paris, 1939, p. 104).
b) [Le suj. désigne du fluide dégagé par une matière solide] Des odeurs de légumes croupissent gentiment dans l'air humide (ROMAINS, Hommes b. vol., 1939, p. 40).
Rem. Ac. 1798-1932 et la plupart des dict. gén. (à l'exception de DUB. et Lar. Lang. fr.) attestent l'emploi de croupir, en parlant d'un enfant ou d'un malade, au sens de « rester immobile et couché dans un état de malpropreté ». Cet enfant croupit dans ses langes. Il ne faut pas laisser croupir un malade dans la saleté (Ac. 1798-1932). Cet emploi n'est pas attesté par la documentation.
B.— Au fig., péj. [Gén. avec un compl. circ.]
1. [Le compl., gén. introd. par la prép. sur ou dans, désigne un lieu]
a) [Le suj. désigne une pers. ou un groupe de pers.]
— Mener une existence morne et en particulier rester inactif, improductif, dans une stagnation intellectuelle. Croupir sur place, sur terre. Synon. s'ennuyer. Maintenant on croupit chez soi, c'est un événement quand on sort de la ville (ERCKM.-CHATR., Ami Fritz, 1864, p. 157). Quelques tribus extrêmement disséminées croupissaient çà et là entre leurs puces et leurs mouches, abruties par les totems (CÉLINE, Voyage, 1932, p. 197).
— Rester dans une même situation et y perdre son temps. Vous vous figuriez que j'allais rester à croupir ici entre vos rombières et vos vieux croûtons? (AYMÉ, Mouche, 1957, p. 143).
— Spéc. Être maintenu, contre sa volonté, dans un lieu dégradant pour l'individu. Synon. pourrir. Croupir en prison, dans un cachot. D'après les conclusions rédigées par Scriassine, quinze à vingt millions d'hommes y croupissaient [dans les camps de concentration] dans des conditions atroces (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 333).
b) [Le suj. désigne une chose] Rester dans un lieu fermé, caché, sans utilité aucune. Synon. moisir. L'exposition de l'Orangerie (...) nous a révélé la splendeur de certaines toiles (...) qui croupissent (...) dans les petites cabines, si souvent fermées (LHOTE, Peint., 1942, p. 41).
2. [Le compl. introd. par la prép. dans désigne un état socialement ou psychologiquement déconsidéré; le suj. désigne gén. une pers.] Demeurer longtemps dans un état moral considéré comme dégradant, sans désirer ou sans pouvoir en changer. Croupir dans le péché, le vice. Les prêtres ont toujours croupi dans une ignorance turpide, où ils s'efforcent d'engloutir avec eux les populations (FLAUB., Mme Bovary, t. 1, 1857, p. 88).
— [Le suj. désigne un groupe de pers. ou une caractéristique d'une pers. ou d'un groupe] La Bretagne est condamnée à croupir éternellement dans l'ignorance et la stupidité (SANDEAU, Sacs, 1851, p. 52). Il n'y a qu'une façon de faire un peuple, de créer des hommes, c'est de les instruire, c'est de développer par l'instruction cette force immense et perdue, qui croupit aujourd'hui dans l'ignorance et dans la paresse (ZOLA, Rome, 1896, p. 103).
Prononc. et Orth. :[], (je) croupis []. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. 1178 soi cropir « s'accroupir » (Renart, éd. Martin, br. III, 15); 2. 1549 p. ext. croupir long temps en ung lieu (EST.); av. 1650 fig. (VAUGELAS, Quinte Livre, V ds LITTRÉ : Croupir en une extrême misère); 3. 1545 eau croupie (EST.). Dér. de croupe; dés. -ir. Fréq. abs. littér. :141.
DÉR. 1. Croupissoir, subst. masc. Lieu où des matières fétides croupissent; avec valeur symbolique. J'ai beau patauger, depuis vingt ans, dans les immondices de Paris, je n'arrive pas à découvrir de quels amalgames de résidus sébacés, de quelles balayures excrémentielles marinées dans les plus fétides croupissoirs, purent être formés les sales enfants de bourgeois que l'événement de la Salette scandalise (BLOY, Femme pauvre, 1897, p. 76). — 1res attest. 1835 « excavation remplie d'eau où l'on fait pourrir les herbes usées du sarclage afin d'obtenir un liquide fertilisant » (Maison rustique du XIXe s., I, p. 234b); 1897 (BLOY, loc. cit.); du rad. du part. prés. de croupir, suff. -oir. — Fréq. abs. littér. : 1. 2. Croupissure, subst. fém. a) Liquide croupi; lieu où des choses croupissent. Le passage, c'est pas croyable comme croupissure (...) entre l'urine des petits clebs, la crotte (...) c'est plus infect qu'un dedans de prison (CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 79). b) Au fig. Croupissures secrètes (SARTRE, Mort âme, 1949, p. 79). — 1re attest. 1886 fig. (BLOY, Désesp., p. 142); du rad. du part. prés. de croupir, suff. -ure. — Fréq. abs. littér. : 2.
croupir [kʀupiʀ] v. intr.
ÉTYM. 1549; soi cropir « s'accroupir », 1178, le sens donné pour étymologique par Littré « demeurer couché dans ses ordures » semble artificiel; de croupe.
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1 Demeurer longtemps (dans un état pénible, mauvais). || Croupir dans la paresse, l'abjection, l'oisiveté, le vice. ⇒ Rester, séjourner, vivre. || Croupir dans l'ignorance. ⇒ Encroûter (s'). || Croupir en prison (ou en tout lieu où l'on est retenu contre son gré), en pension, dans une caserne. ⇒ Moisir, pourrir. — Laisser croupir une minorité, ne pas se préoccuper d'elle.
1 Nous aimons mieux croupir dans notre ignorance que de chercher à en sortir.
2 Enfin, lui dit-il, c'est l'amour du luxe qui est cause de cette fainéantise où tous les esprits, excepté un petit nombre, croupissent aujourd'hui.
3 C'est ainsi qu'ils vivaient, non ! qu'ils croupissaient ensemble, rivés au même fer, couchés dans le même ruisseau (…)
Alphonse Daudet, le Petit Chose, II, XII, p. 339.
2 (1545, au p. p.). Rester sans couler et se corrompre (liquide). ⇒ Stagner. || Eau qui croupit au fond d'une mare. — Demeurer dans l'eau stagnante. ⇒ Moisir, pourrir.
4 Au fond du bois croupit une eau dormante et sale :
Là, le monde se plaît aux vapeurs qu'elle exhale (…)
La Fontaine, Adonis.
5 (…) pas de jardins, pas de verdure, à peine un pied mourant de vigne ou de figuier qui croupit dans les décombres des carrefours.
E. Fromentin, Une année dans le Sahel, p. 27.
6 Parfois, au milieu des bas-fonds où croupissait un reste d'eau, dans le lit vidé des rivières, quelques joncs verts faisaient une tache crue et toute petite (…)
Maupassant, Au soleil, Le Zar'ez, p. 117.
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croupissant, ante p. prés. et adj.
♦ Qui croupit. || Eaux croupissantes. ⇒ Stagnant. — Fig. || Vie croupissante. ⇒ Inactif, oisif. — Richesses croupissantes. ⇒ Improductif, inutile.
7 Les imbéciles deviennent fous et dans leur folie l'imbécillité demeure croupissante ou agitée; dans la folie d'un homme de génie il reste souvent du génie : la forme de l'intelligence a été atteinte et non sa qualité (…)
R. de Gourmont, le Livre des masques, p. 139.
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croupi, ie p. p. adj.
♦ (1545). || Eau croupie, devenue fétide pour avoir séjourné sans couler. ⇒ Bourbe, cloaque.
8 (…) odeur de sève et de pourriture, d'herbe fraîche et d'eau croupie, de fleurs mortes et de champignons (…)
Edmond Jaloux, les Visiteurs, V, p. 56.
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DÉR. Croupissement, croupissoir, croupissure.
Encyclopédie Universelle. 2012.