évader (s') [ evade ] v. pron. <conjug. : 1>
• v. 1375; intr. jusqu'au XVIIe; lat. evadere « sortir de »
1 ♦ S'échapper d'un lieu où l'on était retenu, enfermé. ⇒ s'échapper, s'enfuir, fuir, se sauver; évasion. S'évader d'une prison; d'un camp de prisonniers (cf. Se faire la belle). Le prisonnier s'est évadé par la fenêtre. « Ce misérable, qui est doué d'une force herculéenne, avait trouvé moyen de s'évader » (Hugo). — (Avec ellipse du pron. pers.) Faire évader un prisonnier.
2 ♦ Par ext. Quitter un lieu furtivement, à la dérobée. ⇒ s'éclipser, s'esquiver. « Elle avait seulement voulu s'évader de ce salon, pour fuir la présence d'Antoine » (Martin du Gard).
3 ♦ Fig. Échapper volontairement à (une réalité). ⇒ échapper, fuir, se libérer, se soustraire. S'évader de sa condition. S'évader du réel par le rêve, par l'imagination. « le timide s'évade souvent de sa faiblesse par quelque manifestation de violence » (Duhamel).
évader (s')
v. Pron.
d1./d S'échapper (d'un lieu où l'on était prisonnier). S'évader de prison.
— (Avec ellipse du pronom.) Faire évader un prisonnier.
d2./d Fig. Se libérer de (ce qui contraint, embarrasse). S'évader de la réalité.
évader [evade] v.
ÉTYM. V. 1375, évader à, v. intr.; lat. evadere « sortir de », de e- (ex-), et vadere. → Aller.
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I Vx. || Évader.
1 V. tr. (1398; jusqu'au XVIe). Éviter, échapper à.
1 (…) ou nous évaderons ce danger, ou nous serons noyés.
Rabelais, le Quart Livre, 21.
2 De quelque côté que vous vous tourniez, il ne vous reste plus aucune défaite, aucun subterfuge, ni aucun moyen d'évader (…)
Bossuet, 2e sermon, 1er dimanche de l'Avent, II.
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1 S'échapper (d'un lieu où l'on était retenu, enfermé…). ⇒ Échapper (s'), cavaler (fam.), enfuir (s'); fuir, sauver (se); évasion (→ Se faire la belle). || S'évader d'une prison; d'un camp de prisonniers, d'un camp de concentration. || Le prisonnier s'est évadé par la fenêtre, s'est évadé après avoir tué le gardien. || Empêcher un accusé (cit. 1) de s'évader. || Il put s'évader avant qu'on ne l'arrêtât (→ Arrestation, cit. 4). || L'oiseau s'est évadé de sa cage (→ Cygne, cit. 3). ⇒ Dénicher (II.), envoler (s').
3 — Un ancien forçat libéré, nommé Jean Valjean, vient de comparaître devant la cour d'assises du Var (…) Ce scélérat était parvenu à tromper la vigilance de la police (…) Ce misérable, qui est doué d'une force herculéenne, avait trouvé moyen de s'évader; mais, trois ou quatre jours après son évasion, la police mit de nouveau la main sur lui (…)
Hugo, les Misérables, II, II, I.
♦ Absolt (avec ellipse du pron. pers.). || Faire évader un prisonnier.
4 Si je rentre chez moi, je ferai évader le drôle (…)
Molière, George Dandin, II, 6.
5 Sortir de la prison des chimères et en faire évader le genre humain, ce vieux captif que toutes les religions tiennent sous clef.
Hugo, Post-scriptum de ma vie, Un athée.
♦ Faire évader des capitaux. ⇒ Évasion (de capitaux).
2 Quitter furtivement, à la dérobée. ⇒ Aller (s'en), éclipser (s'), esquiver (s'), filer (à l'anglaise), retirer (se), sortir. || S'évader de chez un importun. || S'évader d'une réception ennuyeuse.
6 Nous nous évadons sans être aperçus, et nous nous renfermons dans notre chambre (…)
Rousseau, Émile, III.
7 Aussitôt après son dîner, vers deux heures de l'après-midi, le Roi s'évadait par la Cour de marbre, éperonné et botté, sautait à cheval, ou montait en voiture avec son fusil.
Louis Bertrand, Louis XIV, III, II.
8 Elle avait seulement voulu s'évader de ce salon, pour fuir la présence d'Antoine.
Martin du Gard, les Thibault, t. V, p. 263.
9 Cette odeur (…) ondulait autour des meubles (…) s'évadait dans l'escalier, rôdait d'une chambre à l'autre (…)
Léon Bloy, la Femme pauvre, p. 221.
10 Parfois (…) son regard s'évadait du livre de lecture pour errer le long des murs (…)
J. Green, Léviathan, p. 37.
3 Fig. Échapper volontairement à (une réalité). ⇒ Fuir, libérer (se), soustraire (se). || S'évader de sa condition, de son état, de sa situation, de sa faiblesse, de sa médiocrité. — S'évader du réel par le rêve, par l'imagination. || S'évader en des abstractions (cit. 8). || Impossible de fixer l'attention de cet enfant, il s'évade sans cesse.
11 (…) j'ai veillé, cherchant pourquoi il voulait tant s'évader de la réalité.
Rimbaud, Une saison en enfer, « Délires », I.
12 (…) ces Juifs éternellement insatisfaits de leur condition présente, et qui s'en évadent comme ils peuvent.
Jérôme et Jean Tharaud, l'Ombre de la croix, p. 42.
13 De même que le timide s'évade souvent de sa faiblesse par quelque manifestation de violence, de brutalité, de même l'homme que tourmente le complexe d'infériorité rompt parfois le cercle enchanté, à la faveur d'un événement imprévu, d'une chance heureuse.
G. Duhamel, Manuel du protestataire, p. 75.
♦ Spécialt. Se tirer d'un embarras, d'une difficulté par un artifice, une échappatoire. ⇒ Éluder, esquiver; et aussi évasif, évasion (2.).
14 Fourbe, tu crois par là peut-être t'évader (…)
Molière, Amphitryon, III, 5.
15 Il interrogeait avec passion, avec précision, avec incrédulité, ramenait au sujet l'interlocuteur qui s'évadait (…)
A. Maurois, À la recherche de Marcel Proust, V, I.
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évadé, ée p. p. adj. et n.
1 (XVIIe). Qui s'est échappé. || Forçat, prisonnier évadé. — Prisonnier de guerre évadé.
16 L'homme qui, s'étant livré longtemps à l'opium ou au haschisch, a pu trouver, affaibli comme il l'était par l'habitude de son servage, l'énergie nécessaire pour se délivrer, m'apparaît comme un prisonnier évadé.
Baudelaire, les Paradis artificiels, « Poème du haschisch », IV.
2 N. (XXe). Personne qui s'est échappée (d'une prison, d'un camp de prisonniers). || Un évadé dangereux. || Une évadée. || Poursuivre un évadé. || Reprendre, capturer un évadé. || Laisser filer un évadé.
17 (…) en marchant il gonflait d'air sa poitrine, comme un évadé.
Colette, Chéri, p. 190.
♦ Hist. || Les évadés des camps de concentration. || Évadé de guerre. || Médaille des évadés, récompensant l'évasion ou la tentative d'évasion des prisonniers des deux guerres mondiales.
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CONTR. Demeurer, rester. — Croupir, ensevelir (s'). — Captif, emprisonné, prisonnier.
Encyclopédie Universelle. 2012.