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destinée

destinée [ dɛstine ] n. f.
• v. 1131; de destiner
1Puissance souveraine considérée comme réglant d'avance tout ce qui doit être. destin (1o), fatalité. « quand les infortunés ne savent à qui s'en prendre de leurs malheurs, ils s'en prennent à la destinée, qu'ils personnifient » (Rousseau).
2Destin particulier d'un être ( destin, 2o ; sort). Il eut une heureuse, une malheureuse destinée. Tenir entre ses mains la destinée de qqn. « Voici des milliers de siècles que notre pauvre humanité accomplit sa destinée sur la terre » (Martin du Gard).
Ce à quoi une personne est destinée. destination, vocation . « Mon père se faisait de l'âme humaine et de sa destinée une idée sublime » (France). « C'est sa destinée d'être parfaitement aimé » (Mme de Sévigné).
Par ext. Avenir, sort (de qqch.). La destinée réservée à cette œuvre.
3(1640) Vie, existence. destin (3o). Littér. Finir sa destinée : mourir. Unir sa destinée à qqn, l'épouser. « Elle eut subitement la révélation que Jacques [...] choisissait sa destinée » (Martin du Gard).

destinée nom féminin Détermination préétablie des événements de la vie humaine par une puissance supérieure ; destin : À quoi bon accuser la destinée ? Vie humaine considérée sur le plan individuel comme un ensemble de circonstances heureuses ou malheureuses et envisagée dans une issue indépendante de la volonté : Être appelé à de hautes destinées. Condition, carrière réservée à quelque chose ; destin : La destinée d'un roman.destinée (citations) nom féminin Henri Barbusse Asnières 1873-Moscou 1935 On ne peut pas plus regarder face à face la destinée que le soleil et pourtant elle est grise. L'Enfer Librairie Mondiale Paul Claudel Villeneuve-sur-Fère, Aisne, 1868-Paris 1955 Tout le monde n'est pas fait pour être heureux. L'Otage, I, 1, Coûfontaine Gallimard Pierre Emmanuel, pseudonyme littéraire devenu le patronyme légal de Noël Mathieu Gan, Pyrénées-Atlantiques, 1916-Paris 1984 Le génie est dans cette alchimie supérieure qui change les vices de nature en éléments d'une destinée. Baudelaire Desclée de Brouwer Jean de La Fontaine Château-Thierry 1621-Paris 1695 On rencontre sa destinée Souvent par des chemins qu'on prend pour l'éviter. Fables, l'Horoscope André Maurois Elbeuf 1885-Neuilly 1967 Académie française, 1938 Nos destinées et nos volontés jouent presque toujours à contretemps. Climats Grasset Mathurin Régnier Chartres 1573-Rouen 1613 L'homme s'oppose en vain contre la destinée. Élégie, V Khosrô Ier Anôchirvân ou Chosroês Anouchirvan, roi de Perse sassanide (531-579) Si la destinée ne nous aide pas, nous l'aiderons nous-mêmes à se réaliser. Mémoiresdestinée (difficultés) nom féminin Emploi Recommandation Éviter le pléonasme destin fatal, destinée fatale (fatal vient du latin fatum, destin). ● destinée (synonymes) nom féminin Détermination préétablie des événements de la vie humaine par une...
Synonymes :
- destin
- fatalité
- fatum (littéraire)
Condition, carrière réservée à quelque chose ; destin
Synonymes :
- mission
- sort
- vocation

destinée
n. f.
d1./d Destin (sens 1). Se révolter contre la destinée.
d2./d Sort (d'une personne). Ma destinée était de vous rencontrer.
d3./d Vie, existence.
Unir sa destinée à qqn, l'épouser, s'unir à lui.

⇒DESTINÉE, subst. fém.
A.— Puissance (souvent personnifiée) qui selon certaines croyances, réglerait le déroulement inéluctable des événements et les lois régissant l'univers. Destinée cruelle, irrévocable. Synon. destin, fatalité. N'es-tu donc qu'un instrument aveugle de la destinée et ne comprends-tu ni les causes ni les fins de ton œuvre? (SAND, Lélia, 1839, p. 430). Il n'était pas le premier des humains que la destinée eût voué au culte de l'impossible (GOBINEAU, Pléiades, 1874, p. 258).
Expr. C'est la destinée. Incorrigible, toi. Mais c'est la destinée. Voilà pourquoi son cœur triste t'a pardonnée (VERLAINE, Œuvres compl., t. 3, Élégies, 1893, p. 54).
Rem. S'emploie fréquemment au plur. et avec une majuscule, dans ce sens, en prenant une valeur allégorique. C'est (...) dans la figuration des lignes du cerveau, que la main toute puissante de la Destinée a écrit les présages (DUMAS père, Reine Margot, 1847, III, 1, p. 105). Déesses vénérées (...) terribles ou douces, elles étaient encore les Fatales, elles étaient toujours les destinées (FRANCE, J. d'Arc, t. 1, 1908, p. 13) :
1. Depuis le premier jour de la création,
Les pieds lourds et puissants de chaque destinée
(...)
Ces froides déités liaient le joug de plomb
Sur le crâne et les yeux des hommes leurs esclaves...
VIGNY, Les Destinées, 1863, p. 12.
B.— Sort spécial réservé à quelqu'un ou quelque chose et prédéterminé par sa nature propre ou les événements extérieurs, généralement en dehors de toute volonté humaine. Synon. avenir, destination, fortune, mission, sort, vocation.
1. [À propos d'un être humain] L'interminable histoire d'une destinée de femme et de toutes les autres destinées qu'elle entraîne dans son orbite (DU BOS, Journal, 1927, p. 284) :
2. Nous ne disposons ni de notre naissance, ni de notre mort, et plus des trois quarts de notre destinée sont décidés par ces deux événements. Nul ne peut changer les données primitives de sa naissance, de son pays, de son siècle, etc. Nul ne peut acquérir la figure ou le génie qu'il n'a pas reçus de la nature; et de combien d'autres circonstances impérieuses encore la vie n'est-elle pas composée?
STAËL, De l'Allemagne, t. 5, 1810, p. 99.
3. ... dans la destinée de chaque homme, le bien et le mal se compensent : (...) « le ciel en nous formant mélangea notre vie de désirs, de dégoûts, de raison, de folie, de moments de plaisir, et de jours de tourments. De notre être imparfait voilà les éléments. (...) »
P. LEROUX, De l'Humanité, t. 1, 1840, p. 28.
Expr. Astre, étoile de la destinée. Astre, étoile qui est censé(e) influencer la destinée de tel individu. C'était apparemment les jours nécessaires pour changer le sort d'un homme pareil. Pendant ce temps-là l'astre de sa destinée s'inclinait (CHATEAUBR., Mém., t. 2, 1848, p. 445).
[P. allus. myth.]
a) [Aux Parques qui filaient les destinées] Longue quenouille chargée de laine, telle que les poètes en imaginaient entre les mains de la Parque qui filait nos destinées (BERN. DE ST-P., Harm. nat., 1814, p. 101).
b) [Au livre sur lequel est inscrite la destinée de chaque être humain] Ta destinée au ciel même est écrite (LECONTE DE L'ISLE, Poèmes barb., 1878, p. 140). Si les pages de ma destinée se fussent trouvées entre mes mains pour être déroulées ou fermées à jamais, avec quelle indifférence j'eusse abandonné la vaine succession de ces heures si longues et si fugitives, que tant d'amertumes flétrissent (SENANCOUR, Obermann, t. 1, 1840, p. 4).
En partic. Aboutissement, issue fatale. Quant à Pichegru, il fut victime de la plus infâme trahison (...). Sentant approcher sa destinée (...) la nuit venue, l'infidèle ami conduisit les agents de police à la porte de Pichegru (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 661).
Rem. L'emploi de destin dans ce sens est plus fréq., destinée exprimant davantage une idée de durée, de prolongation dans le temps.
2. [À propos d'une collectivité humaine] Un homme qui règle la destinée publique, qui médite et fait de grandes choses, peut ne tenir à aucun individu en particulier; les peuples sont ses amis (SENANCOUR, Obermann, t. 1, 1840 p. 185) :
4. Le retard d'un courrier a rendu l'Angleterre protestante, et changé la face politique de l'Europe. Les destinées du monde ne tiennent pas à des causes plus puissantes...
CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 3, 1848, p. 498.
3. [À propos d'une œuvre humaine] Cette lettre qui a eu une destinée si illustre (TOCQUEVILLE, Corresp. [avec H. Reeve], 1856, p. 206). [L'école hollandaise] À prendre l'histoire à ce moment [au début du dix-septième siècle], on sait à quoi s'en tenir sur les visées, le caractère et la destinée future de l'école (FROMENTIN, Maîtres autrefois, 1876, p. 161).
SYNT. a) Destinée + adj. : destinée accomplie, commune, éternelle, fatale, humaine, individuelle, lamentable, particulière, personnelle, singulière, spirituelle. b) Adj. + destinée : étrange, propre, triste destinée. c) Destinée(s) + de + subst. : destinée d(e) (l') homme, l'humanité, la patrie, du pays, du/des peuple(s). d) Subst. + de (la) destinée : accomplissement, bizarrerie(s), chances, hasards, problème, secret de la destinée. e) Verbe + la/les/sa destinée : accepter, accomplir, fixer, fuir, remplir la/sa destinée. f) Verbe + prép. + destinée : présider aux destinée(s), lutter contre sa destinée.
C.— Par affaiblissement. Existence d'un être humain, pouvant être modifiée par sa propre volonté. Influence sur sa destinée; conduire, lier les destinées; décider de, manquer sa destinée. Je devais séparer ma destinée de la sienne (SAND, Hist. vie, t. 4, 1855, p. 379) :
5. ... j'osai faire à Jenny le libre aveu de mes sentiments, et lui proposer d'unir nos destinées dès que nous serions rendus à une situation plus fixe et moins précaire (...). Elle me dit avec simplicité : « Je serai votre femme, Monsieur Henri ».
TOEPFFER, Nouvelles genevoises, 1839, p. 436.
En partic. Situation à venir, considérée principalement du point de vue de la réussite. Belle, brillante, magnifique, grande destinée; destinée manquée. Il le regardoit même avec un mélange de respect et d'admiration, comme un confesseur appelé par le ciel aux plus hautes destinées (CHATEAUBR., Martyrs, t. 2, 1810, p. 138). Je m'imagine que je joue un peu ma destinée (RIVIÈRE, Corresp. [avec Alain-Fournier], 1906, p. 155).
Rem. 1. Destin impliquerait essentiellement une idée de cause, dont les effets constitueraient la destinée. L'usage a quasiment confondu les 2 mots et en a fait plus ou moins des synon. 2. De façon inattendue, on remarque une certaine fréq. du plur. dans les catégories B et C. Le plur. insiste sans doute sur les particularités du sort de chaque individu.
Prononc. et Orth. :[]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. Ca 1130 « sort » (Le Couronnement de Louis, éd. E. Langlois, 1087); 2. 1640 « vie, existence » (CORNEILLE, Horace, V, 1). Part. passé fém. subst. de destiner. Fréq. abs. littér. : 4 401. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 9 822, b) 5 429; XXe s. : a) 4 749, b) 4 569. Bbg. PERKINS (M.L.). Destiny, sentiment and time in the Confessions of J.-J. Rousseau. Studies on Voltaire. 1969, t. 67.

destinée [dɛstine] n. f.
ÉTYM. V. 1131; p. p. subst. de destiner.
1 Destin (1.), fatalité. || Se soumettre à la destinée. || Accuser la destinée. || La main de la destinée. || Destinée cruelle, irrévocable. || C'est la destinée.« Les Destinées », poèmes de Vigny.
1 Mon cœur est à vous, mais la destinée n'est à personne; elle se moque de nous tous.
Voltaire, Lettre au duc de Richelieu, 8 nov. 1769.
2 (…) quand les infortunés ne savent à qui s'en prendre de leurs malheurs, ils s'en prennent à la destinée, qu'ils personnifient, et à laquelle ils prêtent des yeux et une intelligence pour les tourmenter à dessein.
Rousseau, Rêveries…, 8e promenade.
3 (…) la destinée est derrière nous qui nous écoute et se joue de nos calculs.
B. Constant, Journal intime, p. 175.
4 (…) il sentait qu'une mystérieuse destinée l'enchaînait ici cette année, et que, partout ailleurs, il traînerait une détresse pire.
Martin du Gard, les Thibault, t. II, p. 190.
2 Destin particulier d'un être Destin (2.), sort; ce à quoi il est destiné ( Destination, finalité, vocation). || Il eut une heureuse, une malheureuse destinée. || Suivre sa destinée, s'abandonner, se laisser aller à sa destinée. || Accomplir ses destinées. || On ne peut échapper, se dérober à sa destinée. || Sa destinée a été déterminée par ce geste. || Tenir entre ses mains la destinée de qqn. || Sa destinée était de devenir… (→ Avocat, cit. 17). || La trame des destinées.Astre (étoile) de la destinée, censé(e) influencer la destinée de tel individu.La destinée de l'homme, la destinée humaine. || La destinée d'un royaume, d'une civilisation, d'un continent (→ Crise, cit. 12). || Les destinées de l'empire.
5 (…) les poètes feignent que les destinées ont bien à la vérité été faites et ordonnées par Jupiter, mais que depuis qu'elles ont une fois par lui été établies, il s'est lui-même obligé de les garder (…)
Descartes, Méditations, Réponses aux 5es objections.
6 Une méchante destinée conduit quelquefois les personnes.
Molière, les Fourberies de Scapin, II, 7.
7 On rencontre sa destinée
Souvent par des chemins qu'on prend pour l'éviter.
La Fontaine, Fables, VIII, 16.
8 C'est sa destinée d'être parfaitement aimé.
Mme de Sévigné, Lettres, 496, in Littré.
9 L'essentiel, pour être le moins mal possible, est de se soumettre à sa destinée.
d'Alembert, Lettre au roi de Prusse, 15 déc. 1780.
10 La providence s'écrit souvent en toutes lettres dans la destinée des grands hommes.
Hugo, Post-scriptum de ma vie, IV.
11 Quelle bizarrerie dans la destinée humaine ! et que le hasard est un grand railleur !
Th. Gautier, Mlle de Maupin, VII, p. 161.
12 (…) les destinées des nations sont dans la paix et dans la liberté.
Fustel de Coulanges, Questions contemporaines, p. 58.
13 Mon père se faisait de l'âme humaine et de sa destinée une idée sublime; il la croyait faite pour les cieux; cette foi le rendait optimiste.
France, le Petit Pierre, I.
14 (…) il était décidé à suivre passivement sa destinée, un peu par fatalisme (…)
Loti, les Désenchantées, V, XXXVI, p. 207.
15 Avez-vous songé que voici des siècles, des milliers de siècles, que notre pauvre humanité accomplit sa destinée sur la terre ?
Martin du Gard, les Thibault, t. IV, p. 132.
Par ext. Condition, sort. || La destinée qui était réservée à cette œuvre.
16 La destinée ordinaire de ceux qui refusent de prêter l'oreille à la vérité est d'être entraînés à leur perte par des prophètes menteurs.
Bossuet, Disc. sur l'hist. universelle, II, 8, in Littré.
3 (1640). Vie, existence ( Destin, 3.). || Finir sa destinée : mourir. || Trancher la destinée de qqn, lui ôter la vie.Unir sa destinée à qqn, s'unir à lui, l'épouser. || Ils ont associé leurs destinées. || Enchaîner sa destinée à qqn. || Leurs destinées se sont croisées, rencontrées.
17 Sache donc que je touche à l'heureuse journée
Qui doit avec Clarice unir ma destinée (…)
Corneille, le Menteur, IV, 2.
18 Vous pouvez d'un seul mot trancher ma destinée (…)
Corneille, Horace, V, I.
Faire, former, modeler sa destinée. || Décider de sa destinée. || Changer (cit. 23) sa destinée, la destinée de quelqu'un.
19 Vous êtes à l'âge où l'on se décide; plus tard, on subit le joug de la destinée qu'on s'est faite, on gémit dans le tombeau sans pouvoir en soulever la pierre.
Lamennais, Lettre à Sainte-Beuve, in Billy, Sainte-Beuve, p. 137.
20 Elle eut subitement la révélation que Jacques, avec une froide cruauté d'homme, choisissait sa destinée, tandis que, elle, elle … Ah, elle ne pouvait rien pour choisir la sienne, pas même pour l'orienter, si peu que ce fût !
Martin du Gard, les Thibault, t. IV, p. 261.
21 (…) pour ce qui ne dépend pas de nous, notre manière d'y réagir est l'expression de notre caractère même; et là encore, nous modelons la destinée.
F. Mauriac, la Vie de J. Racine, XIV.

Encyclopédie Universelle. 2012.