Akademik

estime

estime [ ɛstim ] n. f.
XIIIe; de estimer
I
1Vx Détermination du prix, de la valeur (de qqch.). estimation.
2Mod. Mar. Calcul approximatif de la position d'un navire en estimant le chemin parcouru d'après les instruments de navigation. Navigation à l'estime. Loc. adv. À L'ESTIME : au juger. ⇒ approximativement. Évaluer le poids d'un paquet à l'estime.
IIFig.
1Vx Opinion.
2Sentiment favorable né de la bonne opinion qu'on a du mérite, de la valeur de qqn. considération, déférence, respect. Avoir de l'estime pour qqn. Avoir, tenir une personne en haute, en grande estime. Marques d'estime. égard. Personne digne d'estime. estimable. Monter, remonter dans l'estime de qqn; baisser dans son estime. Il me fit sentir « qu'il valait infiniment mieux avoir toujours l'estime des hommes que quelquefois leur admiration » (Rousseau).
Estime de soi-même : juste opinion de soi que donne une bonne conscience. ⇒ fierté. « nul ne peut être heureux s'il ne jouit de sa propre estime » (Rousseau).
Sentiment qui attache du prix à qqch.; cas que l'on fait de qqch. Sa ténacité inspire de l'estime. « Le mal qui réussit devient digne d'estime » (Hugo). Être en grande estime, quelque part, auprès de qqn. faveur, honneur. Succès d'estime, se dit d'un ouvrage de l'esprit (livre, pièce de théâtre) qui est accueilli avec estime par la critique mais n'obtient pas la faveur du grand public. Ce film a obtenu un succès d'estime.
3Vx Place que l'on a dans l'estime d'autrui. réputation. « Puisse tout l'univers bruire de votre estime ! » (P. Corneille).
⊗ CONTR. Déconsidération, décri, dédain, mépris, mésestime.

estime nom féminin (de estimer) Appréciation favorable que l'on porte sur quelqu'un, bonne opinion qu'on en a ; respect, considération : Il a forcé l'estime par son obstination. Opinion favorable qu'on a de quelque chose : J'ai beaucoup d'estime pour ce qu'il a fait. Calcul de la position approchée d'un navire, obtenue en combinant les routes suivies avec les distances parcourues sur chacune d'elles, en tenant compte de la vitesse du navire et des dérives dues aux vents et aux courants. ● estime (citations) nom féminin (de estimer) Sébastien Roch Nicolas, dit Nicolas de Chamfort près de Clermont-Ferrand 1740-Paris 1794 Académie française, 1781 L'importance sans mérite obtient des égards sans estime. Maximes et pensées Bernard Le Bovier de Fontenelle Rouen 1657-Paris 1757 On est rarement maître de se faire aimer, on l'est toujours de se faire estimer. Entretiens sur la pluralité des mondes Pierre Carlet de Chamblain de Marivaux Paris 1688-Paris 1763 Nous sommes plus jaloux de la considération des autres que de leur estime. La Vie de Marianne Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière Paris 1622-Paris 1673 Sur quelque préférence une estime se fonde, Et c'est n'estimer rien qu'estimer tout le monde. Le Misanthrope, I, 1, Alceste Michel Eyquem de Montaigne château de Montaigne, aujourd'hui commune de Saint-Michel-de-Montaigne, Dordogne, 1533-château de Montaigne, aujourd'hui commune de Saint-Michel-de-Montaigne, Dordogne, 1592 Je pense avoir les opinions bonnes et saines ; mais qui n'en croit autant des siennes ? L'une des meilleures preuves que j'en aie, c'est le peu d'estime que je fais de moi. Essais, II, 17 Charles de Secondat, baron de La Brède et de Montesquieu château de La Brède, près de Bordeaux, 1689-Paris 1755 Ce qui m'a toujours beaucoup nui, c'est que j'ai toujours trop méprisé ceux que je n'estimais pas. Mes pensées Charles de Secondat, baron de La Brède et de Montesquieu château de La Brède, près de Bordeaux, 1689-Paris 1755 Nous louons les gens à proportion de l'estime qu'ils ont pour nous. Mes pensées Blaise Pascal Clermont, aujourd'hui Clermont-Ferrand, 1623-Paris 1662 Il n'est pas nécessaire, parce que vous êtes duc, que je vous estime ; mais il est nécessaire que je vous salue. Discours sur la condition des grands, II Jean Rostand Paris 1894-Ville-d'Avray 1977 Académie française, 1959 Les injustes dédains nous poussent à briguer d'indignes estimes. Pensées d'un biologiste Stock Luc de Clapiers, marquis de Vauvenargues Aix-en-Provence 1715-Paris 1747 L'estime s'use comme l'amour. Réflexions et Maximes Luc de Clapiers, marquis de Vauvenargues Aix-en-Provence 1715-Paris 1747 Quand on sent qu'on n'a pas de quoi se faire estimer de quelqu'un, on est bien près de le haïr. Réflexions et Maximes Ivan Alekseïevitch Bounine Voronej 1870-Paris 1953 La jalousie, c'est un manque d'estime pour la personne qu'on aime. Le Sacrement de l'amour, II estime (expressions) nom féminin (de estimer) À l'estime, au jugé, approximativement. Baisser ou monter dans l'estime de quelqu'un, être moins ou plus apprécié par quelqu'un. Estime de soi-même, satisfaction que l'on tire de n'avoir rien à se reprocher. Succès d'estime, demi-succès d'une œuvre, louée par la critique, mais boudée par le grand public. Tenir quelqu'un en grande estime, l'apprécier. ● estime (synonymes) nom féminin (de estimer) Appréciation favorable que l'on porte sur quelqu'un, bonne opinion qu'on...
Synonymes :
- considération
- égard
- respect
- vénération
Contraires :
- déconsidération
- dédain
- mépris
- mésestime

estime
n. f.
d1./d Vx évaluation.
|| Mod. à l'estime: au jugé.
Navigation à l'estime, prenant en compte, pour déterminer la position d'un navire ou d'un avion, l'heure, la route suivie et la vitesse.
d2./d Opinion favorable, cas que l'on fait de qqn ou de qqch. Digne d'estime. Tenir qqn en grande estime. Syn. considération, respect.
|| Loc. Succès d'estime: se dit d'une oeuvre dont la qualité est reconnue, mais qui n'a pas les faveurs du public.

⇒ESTIME, subst. fém.
A.— [Avec une idée d'évaluation plus ou moins exacte]
1. Évaluation approximative d'une quantité nombrable. Faire une estime. (Quasi-)synon. estimation (cf. ce mot A 2). Le maire avait regardé la pendule; et, à cette estime, le baron paraissait avoir passé quarante minutes chez Lisbeth (BALZAC, Cous. Bette, 1846, p. 177). Cf. aussi estimer ex. 1.
Loc. adv. À l'estime. À l'estime on évalue toujours l'angle du cône par très grand excès (BOUASSE, Instrum. à vent, 1930, p. 140). Quand il [le médecin] l'eut soupesé [le bébé] à l'estime, comme un canard sur le marché (H. BAZIN, Barbe, 1957, p. 28).
MAR. Calcul approximatif de la position d'un navire, de la distance parcourue, etc., par référence à des données plus ou moins sûres. Le commodore Byron n'avait navigué que d'après les méthodes fautives de l'estime (Voy. La Pérouse, t. 3, 1797, p. 177). Nous obtenons enfin des observations qui nous mettent en latitude 73o50'30" nord, ce qui s'accorde assez bien avec mon estime (BELLOT, Voyage mers polaires, 1863, p. 274).
Loc. adv. (Gouverner, etc.) à l'estime. À défaut de boussole, cartes, portulans, tout comme l'ami Rouveret dirige son bateau à l'estime, le nez au vent, les vieux de la marine à voile faisaient usage du flair (CENDRARS, Homme foudr., 1945, p. 48) :
1. L'évaluation de la vitesse et la direction donnée par la boussole, vérifiée par des relèvements de la polaire, permettent de naviguer à l'estime, mais les courants, la dérive, une erreur d'appréciation dans la marche, peuvent fausser les résultats, et une réelle précision ne peut être obtenue qu'en corrigeant la route faite à l'estime par la navigation observée.
CHARCOT, Chr. Colomb, 1928, p. 91.
P. ext., AÉRON., etc. La navigation par l'estime est l'ensemble des procédés qui permettent de suivre une route déterminée et de connaître la position de l'aéronef, sans voir le sol, ni utiliser des procédés astronomiques, radiogoniométriques ou physiques (A. B. DUVAL, HÉBRARD, Nav. aér., 1928, p. 49). Au bout de six mois de reconnaissances et de pistages miraculeux dans tous les terrains variés, ils possédaient jusqu'à la fibre, l'orientation à l'estime (CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 606).
2. Au fig., vx. Jugement (favorable ou défavorable) par lequel on détermine, marque la valeur que l'on attribue ou doit attribuer à telle personne ou à telle chose abstraite. (Quasi-)synon. estimation (cf. ce mot B).
Loc. adv., plus usuel. À + adj. poss. estime, à l'estime de (telle personne). À mon, etc., avis, à l'avis de (telle personne). Cette partie du livre paraîtra incontestablement incomplète à l'estime des philosopheurs (RICHEPIN, Aimé, 1893, p. 144). Des romans [de Radiguet], surtout, à mon estime, « Le Diable au Corps », phénomènes aussi extraordinaires dans leur genre que les poèmes de Rimbaud (COCTEAU, Diff. d'être, 1947, p. 28).
B.— [Avec une valorisation affective] Appréciation positive à l'égard d'une personne ou d'une chose qui mérite l'admiration, un certain respect d'ordre intellectuel ou moral; tendance à lui accorder beaucoup de prix. Estime et/ou admiration, confiance, mépris, respect, sympathie, vénération.
1. Sentiment favorable que l'on attache, témoigne à une personne de valeur (ou considérée comme telle) et à ses qualités. Estime mutuelle; affectueuse estime; estime de ses concitoyens; estime pour (son/le) caractère, esprit, talent; attacher du prix à l'estime de (telle pers.). J'en suis au point de ne plus compter sur l'estime ni l'approbation de personne (MAINE DE BIRAN, Journal, 1820, p. 281). Ils tiennent M. Zola en petite estime littéraire et le renvoient à l'école parce qu'il n'a pas fait de bonnes humanités et que peut-être il n'écrit pas toujours parfaitement bien (LEMAITRE, Contemp., 1885, p. 267). Cf. aussi estimable ex. 1 :
2. « Forcer l'estime, à force de vertu ».
... il semblait bien que M. Thibault eût souffert de lui-même et des mérites qu'il acquérait si durement : « L'estime n'exclut pas nécessairement l'amitié, mais il semble rare qu'elle contribue à la faire naître. Admirer n'est pas aimer; et, si la vertu obtient la considération, elle n'ouvre pas souvent les cœurs ». Amertume secrète, qui l'amenait même à écrire, quelques pages plus loin : « L'homme de bien n'a pas d'amis... »
MARTIN DU G., Thib., Mort père, 1929, p. 1337.
[Dans une formule épistolaire] Mille assurances d'estime et d'affection (TOCQUEVILLE, Corresp. [avec Henry Reeve] 1849, p. 102).
En partic. Estime de soi. Bonne opinion que l'on a de soi-même, de sa propre valeur; satisfaction morale de pouvoir se juger irréprochable en conscience. Conserver, garder, perdre sa propre estime. Chercher sa propre estime et non point celle d'autrui (RAMUZ, A. Pache, 1911, p. 117). On ne se guérit de la colère qu'en se guérissant de l'estime excessive de soi et de la susceptibilité à l'injure qui en dérive (RICŒUR, Philos. volonté, 1949, p. 262).
P. anal. [À propos d'animaux] Les amateurs d'oiseaux de volière le [le Rossignol] tiennent en très haute estime à cause de sa belle voix et la façon mélodieuse et variée dont il agrémente les roucoulades de son chant (COUPIN, Animaux de nos pays, 1909, p. 149).
2. Opinion avantageuse que l'on attache, témoigne à une chose de valeur (ou considérée comme telle). Si l'on entend par humilité le peu de cas que l'homme ferait de sa nature, la petite estime dans laquelle il tiendrait sa condition, je refuse complètement à un tel sentiment le titre de vertu (RENAN, Avenir sc., 1890, p. 355). « Celle-là a l'air d'être découpée dans la doublure de mon manteau », dit-elle à Swann en lui montrant une orchidée, avec une nuance d'estime pour cette fleur si « chic » (PROUST, Swann, 1913, p. 221).
SYNT. (relatifs à B 1 et B 2). Estime générale, particulière, publique, universelle; estime profonde, respectueuse; grande, haute, moindre, sincère estime; digne d'estime; estime des (honnêtes) gens, du monde; marque, preuve, sentiments, témoignage d'estime; conquérir, gagner, garder, mériter, obtenir, perdre, regagner l'estime; accorder son estime; avoir droit à l'estime; baisser, remonter dans l'estime; avoir, concevoir, éprouver, inspirer, jouir de l'estime; tenir en grande, médiocre, piètre estime.
Loc. verbales. Faire estime de qqn, qqc. Faire cas de (cf. SAND, Maîtres sonneurs, 1853, p. 215); être en (haute) estime (cf. SAINTE-BEUVE, Port-Royal, t. 5, 1859, p. 389); mettre en grande estime (cf. ERCKM-CHATR., Hist. paysan, t. 1, 1870, p. 51).
C.— [P. oppos. à admiration] Opinion avantageuse mais limitée que l'on témoigne à quelqu'un ou à quelque chose en raison de ses qualités moyennes, normalement attendues, et généralement appréciées. De vieux Allemands (...) traitaient les évadés avec une correction où se marquait l'estime. Pour eux, un prisonnier qui s'évadait jouait le jeu (AMBRIÈRE, Gdes vac., 1946, p. 229). La vie n'est pas très passionnante. Du moins, on ne connaît pas chez nous le désordre. Et notre population franche, sympathique et active, a toujours provoqué chez le voyageur une estime raisonnable (CAMUS, Peste, 1947, p. 1219).
[À propos d'un ouvrage littér., artistique] Succès d'estime. Succès limité, sans enthousiasme, obtenu par exemple dans un cercle restreint de connaisseurs ou d'amateurs. Les caractères étaient vigoureusement tracés, l'observation habilement saisie dans nos mœurs, et le style remarquable par beaucoup d'élégance et de facilité. Il paraissait impossible qu'un pareil ouvrage n'obtînt pas au moins un succès d'estime (JOUY, Hermite, t. 2, 1812, p. 197). Ollendorff m'a fait le discours connu sur le succès d'estime qui m'attend certainement, et le succès d'argent qui m'attend aussi, mais avec moins d'impatience (RENARD, Journal, 1891, p. 99).
Prononc. et Orth. :[], [e-]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. XIIIe s. [d'apr. FEW t. 24 p. 232a] « estimation du prix, de la valeur de quelque chose » (Compt. de S. Germ. l'Aux., Arch. LL 535, f° 7 r° ds GDF.); 2. ca 1500 d'extime « de valeur, méritant la considération » (COMMYNES, Mém., VIII, 23, éd. J. Calmette, t. III, p. 284), Déverbal de estimer. Fréq. abs. littér. :2 298. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 4 400, b) 2 754; XXe s. : a) 2 466, b) 3 054. Bbg. DAUZAT Ling. fr. 1946, p. 15. — LA LANDELLE (G. de). Le Lang. des marins. Paris, 1859, p. 163.

estime [ɛstim] n. f.
ÉTYM. XIIIe; de estimer.
———
I
1 (1600). Vx ou littér. Détermination faite par quelqu'un d'une quantité ( Estimer, I., 2.), et, notamment, d'un prix ( Estimer, I., 1.; estimation).
0.1 Vers le 25, après une nouvelle alternative de neige et de pluie, le vent sauta au sud-est, et, subitement, le froid devint extrêmement vif. Suivant l'estime de l'ingénieur, la colonne mercurielle d'un thermomètre Fahrenheit n'eût pas marqué moins de 8° au-dessous de zéro (22°, 22 centigr. au-dessous de glace).
J. Verne, l'île mystérieuse, p. 290.
Fig. Le fait d'estimer la valeur (de…).
0.2 (…) le patriotisme, l'amour simple du citoyen pour l'air natal, les lieux où il a grandi sont, à mon estime, en recul depuis Michelet.
Emmanuel Berl, le Virage, p. 129.
2 (Mil. XVIe). Mod. (Mar.). Évaluation de la route parcourue par un navire depuis sa dernière position connue, et de la position approchée de celui-ci (d'après les informations données par les instruments de navigation). || L'estime doit tenir compte de la distance parcourue à chacun des caps tenus par le navire, de la dérive, et des données concernant les courants (force et direction). || Estime et navigation astronomique. || Estime précise, imprécise, correcte. || Porter l'estime sur la carte. || Confirmer l'estime par un relèvement à vue, un relèvement radio.
Loc. adv. À l'estime. || Navigation à l'estime.
0.3 (…) estime, en navigation, doit se traduire par approximation (…) l'estime ne sauraît être le guide d'un navigateur qui peut invoquer le secours de l'astronomie et de ses calculs infaillibles.
Jules Lecomte, Dict. pittoresque de marine, art. Estime.
0.4 En effet, le 17 au matin, il y avait quarante-huit heures que le Bonadventure était parti, et rien n'indiquait qu'il fût dans les parages de l'île. Il était impossible, d'ailleurs, pour évaluer la route parcourue, de s'en rapporter à l'estime, car la direction et la vitesse avaient été trop irrégulières.
J. Verne, l'île mystérieuse, p. 509.
0.5 (…) pour la première fois de ma vie, j'avais effectué une navigation instrumentale loin des côtes. Néanmoins, comme je ne me fiais pas à mes mesures astronomiques, j'avais en plus effectué une navigation à l'estime : chaque jour, je notais le nombre de milles que j'estimais avoir fait dans la direction donnée par la route au compas. Cela me donnait une route idéale au cas où je n'aurais absolument pas dérivé.
Alain Bombard, Naufragé volontaire, p. 140.
Par ext. || Pilotage d'un avion à l'estime.
Par anal. Au juger. Approximativement; fam. pif (au), pifomètre (au). || Évaluer le poids d'un paquet à l'estime.
———
II Fig.
1 (1534, in Rabelais). Vx. Opinion de quelqu'un sur (une personne, une chose). || Bonne, mauvaise estime.
1 Savez-vous si les écoutants
En feront une estime à la vôtre pareille ?
La Fontaine, Fables, XI, 9.
Spécialt. Opinion favorable.REM. Cette valeur n'est archaïque que dans certaines constructions (être dans l'estime de quelqu'un, etc.); dans les autres cas, elle se confond avec le sens 2., mais les connotations sont différentes dans la langue classique.
2 Notre mérite nous attire l'estime des honnêtes gens, et notre étoile celle du public.
La Rochefoucauld, Maximes, 165.
3 Sur quelque préférence une estime se fonde…
Molière, le Misanthrope, I, 1 (→ Estimer, cit. 13).
4 L'estime où je vous tiens (…)
Molière, le Misanthrope, I, 2.
5 Ce Monsieur Trissotin (…)
Qui n'a pas l'honneur d'être dans votre estime (…)
Molière, les Femmes savantes, II, 7.
6 Nous avons une si grande idée de l'âme de l'homme, que nous ne pouvons souffrir d'en être méprisés, et de n'être pas dans l'estime d'une âme; et toute la félicité des hommes consiste dans cette estime.
Pascal, Pensées, VI, 400.
2 (Mil. XVIe). Mod. Sentiment favorable né de la bonne opinion qu'on a du mérite, de la valeur (de qqn). Considération, déférence, respect. || Avoir de l'estime pour qqn. || Avoir, tenir une personne en haute, en grande estime. || Vous avez toute mon estime. || Il m'honore de son estime. || Marques d'estime. Égard (→ Caresse, cit. 17). || Personne digne d'estime. Estimable. || C'est un homme très respectable qui mérite beaucoup d'estime. || Monter, baisser dans l'estime de qqn. || Cette indiscrétion l'a fait baisser dans mon estime. || Il monte, remonte dans mon estime (cit. 10). || Estime qu'on éprouve pour un adversaire. || Ces amants n'ont aucune estime l'un pour l'autre. || Attachement, amour cimenté (cit. 4) par l'estime. || Avoir l'estime, être dans l'estime de qqn. || Tenir une grande place dans l'estime de qqn. || S'acquérir, conquérir l'estime de ses supérieurs. || S'attirer (cit. 46) l'estime d'un peuple. || L'homme a besoin de l'estime de ses semblables. || Perdre l'estime d'un ami ( Démériter). || Garder un peu d'estime pour qqn. || L'estime vaut mieux que l'admiration, que la célébrité (→ Bonheur, cit. 15; considération, cit. 6). || Se tenir en estime mutuelle. || Estime réciproque.
7 Il me fit sentir (…) qu'il valait infiniment mieux avoir toujours l'estime des hommes que quelquefois leur admiration.
Rousseau, les Confessions, III.
8 (…) il friserait de près l'Institut et jouirait de cette estime que les gens graves accordent aux ennuyeux, et qui se résout en croix, en places, en dignités.
Th. Gautier, Portraits contemporains, p. 226.
9 Adieu guerrier illustre; ton courage dans le malheur inspire de l'estime à ton ennemi le plus acharné (…)
Lautréamont, les Chants de Maldoror, VI, p. 248.
10 Cette estime, je souhaite de ne pas la perdre, mais certainement, je préfère la perdre que la devoir à un mensonge, ou à quelque mal-entendu.
Gide, Corydon, p. 9.
(Dans une formule épistolaire). || Veuillez recevoir l'expression de toute mon estime…, mon assurance d'estime.
Estime de soi-même : juste opinion de soi que donne une bonne conscience. Approbation, conscience, fierté, orgueil.
11 L'estime de soi-même est le plus grand mobile des âmes fières (…)
Rousseau, Rêveries, 8e promenade.
12 (…) nul ne peut être heureux s'il ne jouit de sa propre estime (…)
Rousseau, Julie ou la Nouvelle Héloïse, Lettre XI.
13 Je croyais qu'en vous sacrifiant tout, et perdant pour vous seul mes droits à l'estime des autres et à la mienne, je pouvais m'attendre cependant à ne pas être jugée par vous plus sévèrement que par le public (…)
Laclos, les Liaisons dangereuses, Lettre CXXXVI.
14 Les petits services que je lui rendais me haussaient beaucoup dans ma propre estime.
France, la Rôtisserie de la reine Pédauque, XI, Œ., t. VIII, p. 92.
Sentiment qui attache du prix, de l'importance, de la valeur à (une chose, action, œuvre…). Cas (faire cas de…). || Avoir de l'estime pour la conduite de qqn. || Sa ténacité inspire de l'estime. || Il tient en haute estime ces méthodes d'éducation (→ Austérité, cit. 7). || Haute, grande estime pour qqch. || Les sports sont en grande estime dans les pays scandinaves. || Cet ouvrage a eu l'estime du lecteur (→ Audience, cit. 6). — ☑ Loc., vx. Faire estime de qqn, de qqch. Estimer.Être en estime. Faveur, honneur.Tenir qqch. en (haute) estime. || Avoir qqch. en (grande) estime.
15 (…) quelle estime (…) voulez-vous que nous fassions du procédé irrégulier de ces gens-là ?
Molière, les Précieuses ridicules, 4.
16 (…) j'ai donc vu mieux qu'un autre l'estime qu'il fait de votre estime (…)
Mme de Sévigné, 883, 29 juin 1681.
17 (…) tous les objets de l'estime des hommes, qui en méritent si peu par eux-mêmes, et qui font l'unique occupation des gens que l'on croit heureux.
Rousseau, Rêveries, 8e promenade.
18 Le mal qui réussit devient digne d'estime.
Hugo, la Légende des siècles, XX, II.
19 Nous savions la haute estime que Moïse avait pour les trucs et la part qu'il leur attribuait dans les réussites de la vie.
Giraudoux, Bella, VIII, p. 176.
Succès d'estime, se dit d'un ouvrage de l'esprit (livre, pièce de théâtre…) qui est accueilli avec estime par la critique mais n'obtient pas la faveur du grand public.
3 Vx (langue class.). Place que l'on a dans l'estime d'autrui. Réputation; gloire (vx).
20 Puisse tout l'univers bruire de votre estime !
Corneille, l'Illusion, III, 9.
21 La grande estime que vos bonnes qualités vous ont donnée (…)
Retz, la Conjuration du comte de Fiesque.
Réputation (bonne ou mauvaise). — ☑ Loc. Être en estime de… : être connu pour, avoir la réputation de…
CONTR. Déconsidération, décri, dédain, mépris, mésestime.
DÉR. V. Estimer.
HOM. Formes du v. estimer.

Encyclopédie Universelle. 2012.