CIRCULATION
L’eau est le constituant majeur des organismes vivants. Les réactions chimiques complexes du métabolisme se déroulent en phase aqueuse et nécessitent des échanges permanents de substances: absorption de composés nutritifs et élimination de déchets. L’eau, intracellulaire aussi bien qu’extracellulaire, est le véhicule de ces substances.
Sur de faibles distances, de simples processus de diffusion moléculaire selon des gradients de potentiel chimique ou électrique peuvent suffire à ces transports de substances dissoutes. Cependant, chez les organismes de taille appréciable, les processus diffusifs trouvent rapidement leurs limites et les mouvements de substances doivent être des transports de masse par convection des fluides internes. L’énergie dissipée dans ces transports est alors l’énergie mécanique d’une pompe assurant la circulation des liquides. Par ailleurs, l’augmentation de la taille des organismes réduit leur surface relative de contact avec le milieu ambiant, source et déversoir des substances impliquées dans le métabolisme. Il en résulte un développement de zones d’échanges spécialisées: tube digestif, appareil respiratoire, appareil excréteur, etc., éloignées les unes des autres et entre lesquelles un dispositif de transport des substances dissoutes par convection devient indispensable. La circulation des liquides internes apparaît donc comme la solution fonctionnelle apportée aux problèmes posés par les échanges chez les organismes de taille importante et à spécialisation organique poussée. Elle rend alors possible une intensité accrue des échanges de matière et d’énergie et devient essentielle pour la coordination fonctionnelle des différentes activités métaboliques des organismes.
De fait, la fonction circulatoire répond à des besoins divers et multiples. Les liquides circulants transportent vers les tissus les matériaux nutritifs et l’oxygène, et ils évacuent les déchets du métabolisme. Mais ils véhiculent aussi nombre d’informations chimiques sous forme d’hormones. Par ailleurs, c’est grâce à la circulation que la chaleur produite par le métabolisme est transportée et éventuellement dissipée; les ajustements circulatoires jouent un rôle essentiel dans la régulation de la température centrale chez les organismes homéothermes. Enfin, les liquides internes circulants constituent le vecteur indispensable des antigènes et des cellules du système immunitaire spécialisé dans la défense de l’organisme contre les agressions chimiques et biologiques externes.
Différents stades évolutifs d’organisation et de spécialisation de la circulation des liquides internes peuvent être aisément distingués dans la série animale. La convection circulatoire peut affecter des compartiments liquidiens variés: liquide intracellulaire, liquides cœlomiques, sang proprement dit. Elle peut, dans des stades primitifs, ne pas être endiguée dans des structures vasculaires et ne pas comporter d’organe propulseur anatomiquement différencié. Ce n’est que chez les animaux supérieurs, Invertébrés ou Vertébrés, que la circulation devient parfaitement organisée selon des modes et des circuits bien définis, dans des structures anatomiques pouvant être extrêmement spécialisées. Ce perfectionnement permet non seulement des transferts de substances très intenses chez des organismes métaboliquement actifs, mais aussi une régulation du débit sanguin dans les différents organes en fonction de leurs besoins. En ce sens, une circulation active et adaptable est une pièce maîtresse du maintien de l’homéostasie et de l’indépendance des fonctions organiques vis-à-vis des fluctuations ambiantes. L’irréversibilité des lésions cérébrales résultant d’un arrêt circulatoire de quelques minutes seulement chez l’homme illustre bien le caractère indispensable de la circulation chez les Vertébrés supérieurs.
1. Organisation des appareils circulatoires
La convection des liquides internes de l’organisme n’implique pas obligatoirement l’existence d’un appareil circulatoire bien différencié. Des mécanismes convectifs relativement peu organisés peuvent assurer le mouvement des différents liquides internes. Cependant, la fonction circulatoire ne peut être réellement efficace que lorsque les liquides sont endigués dans des conduits bien définis et recyclés de façon ordonnée. Dans ce cas, les composants fonctionnels sont, dans leurs principes, communs à tous les systèmes circulatoires.
Compartimentation des liquides internes
Deux ensembles de distribution des liquides existent chez tous les animaux pluricellulaires: le compartiment intracellulaire et le compartiment extracellulaire. La plus ou moins grande complexité de ce dernier (fig. 1) dépend de la différenciation des feuillets embryonnaires déterminant le plan d’organisation.
Dans les phylums inférieurs d’Invertébrés, Spongiaires et Cœlentérés, dont la paroi est constituée de deux feuillets, endoderme et ectoderme, le seul liquide extracellulaire est interstitiel. Le troisième feuillet, ou mésoderme, apparaissant chez les Tridermiques, peut être réduit à l’état d’emballage mésenchymateux comme chez les Plathelminthes (fig. 1) et les Némertes. Chez ces derniers, le liquide extracellulaire comporte le liquide interstitiel et un compartiment endigué dans un système vasculaire primitif mais bien différencié. Les Cœlomates ont, au moins à l’état embryonnaire, un mésoderme creusé d’une (ou de plusieurs) cavité, ou cœlome, contenant une partie du liquide extracellulaire (liquide cœlomique; fig. 2). Beaucoup d’Annélides ont en plus un système vasculaire bien défini et entièrement clos contenant un sang circulant. Ainsi, chez ces animaux, on peut distinguer trois compartiments extracellulaires: sanguin, cœlomique et interstitiel. Les cavités cœlomiques peuvent disparaître en partie ou en totalité et se fondre dans la cavité embryonnaire primitive, ou blastocèle, pour former un schizocèle. C’est le cas de nombreux Mollusques et des Arthropodes (par exemple Crustacés) où le compartiment extracellulaire est donc unique, formant l’hémocèle contenant l’hémolymphe en continuité avec les espaces interstitiels. Chez les Vertébrés, enfin, le compartiment extracellulaire comporte un espace circulant complètement endigué dans les vaisseaux et un espace interstitiel qui, à l’exception de quelques groupes comme les Élasmobranches, est lentement drainé par des canaux lymphatiques. Les cavités cœlomiques sont dans ce cas peu développées par rapport à beaucoup d’Invertébrés et limitées aux espaces pleuraux, péricardiques et péritonéaux.
Variété des mécanismes circulatoires
Si la fonction circulatoire est définie comme le transport convectif de liquides au service des échanges d’un organisme, il apparaît que les mécanismes circulatoires sont aussi divers que les liquides circulants. Les liquides intracellulaires eux-mêmes circulent grâce à des courants cytoplasmiques. L’eau d’un Protozoaire comme la Paramécie est en permanence recyclée grâce aux vacuoles pulsatiles qui s’emplissent et se vident dans le milieu ambiant. Grâce à des mouvements flagellaires, l’eau externe circule dans la masse du corps des Spongiaires ou dans les cavités gastro-vasculaires des Cœlentérés en participant aux échanges de ces organismes. Ce sont aussi des mouvements ciliaires qui assurent la convection des liquides, cœlomiques ou non, qui emplissent les cavités si complexes des Échinodermes. Les grands espaces liquidiens «pseudo-cœlomiques» des Nématodes et cœlomiques des Annélides sont brassés par les mouvements de la paroi musculaire du corps. Dans ce cas, comme aussi dans celui des hémocèles pédieux des Mollusques, ces vastes compartiments liquidiens sont non seulement des vecteurs pour les transports de substances, mais aussi et surtout un soutien hydrostatique pour les mouvements de ces organismes à corps mou (squelette hydrostatique).
Les appareils circulatoires typiques, où le liquide circulant est endigué dans des vaisseaux et propulsé par un cœur à parois musculaires, s’organisent selon deux modalités essentielles: les Arthropodes et la plupart des Mollusques ainsi que les Prochordés ont un réseau vasculaire dont les extrémités s’ouvrent à plein canal dans les lacunes de l’hémocèle. Ce système circulatoire ouvert s’oppose au système clos des Vertébrés et des Annélides, où les vaisseaux se divisent en lits capillaires pénétrant au sein des organes et où le liquide circulant est entièrement séparé, au moins anatomiquement, du liquide interstitiel (fig. 2).
Composants fonctionnels des systèmes circulatoires
Tous les appareils circulatoires sont composés d’un ensemble de tubes, les vaisseaux, se ramifiant plus ou moins dans les tissus. Ces vaisseaux sont divisés en trois catégories d’après des critères anatomiques et physiologiques: les artères par lesquelles le sang quitte le cœur, les veines qui ramènent le sang au cœur et les capillaires formant des réseaux très fins interposés entre les artères et les veines. Les parois des artères et des veines possèdent, mais à des degrés divers, deux propriétés fondamentales: l’élasticité, due à divers matériaux constitutifs et qui permet, en particulier pour les artères, de régulariser le flot sanguin, et la contractilité, due à une musculature lisse dont le rôle est essentiel dans le contrôle du calibre. Lorsqu’ils existent dans les appareils circulatoires clos, les capillaires, extrêmement ramifiés, constituent la zone d’échanges entre le système vasculaire et les tissus. Leur paroi est mince, plus ou moins perméable, réduite à une seule couche de cellules, sans éléments musculaires ni élastiques.
La force nécessaire à la circulation du sang est procurée par des régions vasculaires particulièrement contractiles désignées du nom général de cœurs. Tous les cœurs sont des structures musculaires creuses, fonctionnant sur un mode pulsatile avec une phase de contraction, ou systole, propulsant le sang dans les vaisseaux, et une phase de relâchement, ou diastole, pendant laquelle s’effectue le remplissage de la cavité ou des cavités cardiaques. Quelle que soit son organisation et son mode de fonctionnement, le cœur agit d’une part en mettant le sang sous pression dans les vaisseaux (énergie potentielle), d’autre part en éjectant un certain volume de liquide (volume systolique), donc en mettant le sang en mouvement (énergie cinétique).
Enfin, la circulation ordonnée du sang exige le plus souvent la présence de valves ou valvules, dont le rôle est de ne permettre le mouvement du liquide que dans une seule direction. Ces valves sont la plupart du temps des structures non musculaires mais fibreuses, dont le mouvement est mécaniquement et anatomiquement limité, et qui s’ouvrent ou se ferment passivement sous l’influence des changements de pression du sang, de sorte que l’écoulement de celui-ci ne puisse s’effectuer que dans un seul sens. Pratiquement, toutes les sortes de cœurs sont munies de valves et il existe aussi des valves vasculaires, en particulier dans les secteurs où les différences de pression et les vitesses de circulation sont faibles et où il importe que le flot de sang soit orienté.
2. Circulation du sang dans les vaisseaux
La compréhension de la circulation du sang dans les vaisseaux s’appuie sur les principes généraux de l’hydrodynamique des fluides en mouvement dans les structures tubulaires. Si ces principes sont utiles, leur application est cependant limitée en raison des propriétés mécaniques particulières des parois vasculaires et des propriétés rhéologiques des liquides circulants.
Principes hémodynamiques
L’énergie dissipée par l’écoulement laminaire d’un fluide dans un tube est assimilable à trois composantes (théorème de Bernoulli): une composante liée à la diminution de pression interne, une composante due aux forces de gravité (surtout importante chez les animaux de grande taille vivant dans l’air) et une composante exprimant l’énergie cinétique du mouvement et dépendant donc de la vitesse. Vitesses de circulation et pressions intravasculaires (tabl. 1) diffèrent beaucoup dans le règne animal, c’est pourquoi la répartition de l’énergie totale du sang en mouvement entre ces trois termes peut être fort diverse, aussi bien dans les différentes régions d’un appareil circulatoire donné que selon les espèces.
Dans des conditions très restrictives, ne tenant compte en particulier que des variations de pression interne, le débit face="EU Updot" 落 circulant dans un tube de rayon r et de longueur l est lié à l’abaissement de pression interne P par la loi de Poiseuille:
où 兀 est la viscosité qui peut, pour les liquides biologiques circulants, dépendre de la vitesse d’écoulement et du calibre du tube (fluides non newtoniens). L’inverse du terme ( 神r 4)/(8 兀l ) mesure la résistance à l’écoulement ou résistance vasculaire R qui dépend donc largement du calibre des vaisseaux (r 4). Le débit sanguin, la chute de pression vasculaire et la résistance sont donc liés par une relation de la forme face="EU Updot" 落 = P/R, qui montre que le débit dans un secteur vasculaire donné peut être contrôlé soit par des changements de pression dépendant en définitive de la puissance développée par la pompe cardiaque, soit par des ajustements de la résistance vasculaire dépendant principalement du calibre des vaisseaux qui peut être modifié par le jeu de la musculature pariétale quand celle-ci existe.
Structure et propriétés des vaisseaux
Les parois vasculaires comportent généralement trois couches de tissus (fig. 2 a). De l’intérieur vers l’extérieur, on y trouve: un endothélium constitué d’une seule couche de cellules aplaties; une media comportant des fibres élastiques (élastine) et du tissu musculaire lisse; une adventice conjonctive contenant des fibres de collagène. L’élastine des Vertébrés (ou les substances elastin-like des Invertébrés) est un matériau relativement plus extensible sous faible tension que le collagène de l’adventice externe. Les proportions relatives des différents matériaux, élastiques et musculaires, constituant la paroi déterminent en définitive les propriétés mécaniques des vaisseaux (fig. 2 b). Chez les Vertébrés supérieurs, les grosses artères ont des parois élastiques, mais relativement peu
extensibles grâce à une couche de collagène importante. Elles constituent ainsi un secteur élastique capable de stocker en systole et de restituer en diastole une part de l’énergie de la pompe cardiaque, régularisant ainsi le débit sanguin au départ du cœur (fig. 2 c). Les veines, à parois plus minces, sont davantage distensibles et constituent un secteur «capacitif» pouvant accepter des volumes de sang importants et variables. L’importance relative de la tunique musculaire lisse augmente au long du secteur artériel pour atteindre un maximum au niveau des artérioles et des sphincters précapillaires où se localise la plus grande part de la résistance vasculaire. Ce secteur «résistif» a une importance fondamentale dans la régulation du débit sanguin au niveau des différents organes. Il faut noter néanmoins que dans certains cas chez les Invertébrés (Crustacés, par exemple) les artères sont purement élastiques, sans musculature vasculaire.
Appareils circulatoires clos et appareils circulatoires ouverts
Les caractéristiques fonctionnelles de ces deux types d’appareils circulatoires sont très différentes (tabl. 2 et fig. 3 a et 3 b). En plus du volume circulant, la différence essentielle porte sur la résistance vasculaire périphérique qui est élevée dans les appareils circulatoires clos et faible dans les appareils circulatoires ouverts, en raison de l’absence ou de la faible importance du secteur «résistif». De ce fait, la pression artérielle est élevée dans le premier cas et reste faible, de l’ordre de quelques dizaines de centimètres d’eau au plus dans le second cas (tabl. 1). Du point de vue de l’efficacité fonctionnelle, il en résulte le fait important que les débits circulatoires locaux peuvent être contrôlés avec précision dans les appareils circulatoires clos alors que ce contrôle est, jusqu’à preuve du contraire, inexistant ou très imparfait dans les appareils circulatoires ouverts. Dans les systèmes à faible pression sanguine sur le versant artériel, le retour du sang veineux au cœur pose également des problèmes fonctionnels qui sont résolus par des mécanismes de succion péricardique (voir plus loin fig. 6) ou éventuellement par la présence de cœurs accessoires (ci-après fig. 4 a: Mollusque Céphalopode).
En raison de l’importance du volume circulant, le temps de circulation est relativement long dans les systèmes ouverts. Mais le débit circulatoire n’est pas nécessairement faible. Chez les Crustacés Décapodes, par exemple, le débit cardiaque par unité de masse corporelle est généralement plus élevé que chez les Poissons. La dépense énergétique nécessaire à cette circulation active est cependant peu importante en raison des faibles pressions développées.
Disposition des appareils circulatoires
En dehors d’arrangements segmentaires tels que ceux des Annélides ou des Insectes, la disposition des appareils circulatoires est largement subordonnée à la nature et à la situation des organes respiratoires. L’importance primordiale de la fonction de transport des gaz comme facteur d’organisation de la circulation est attestée par le fait que, dans la majorité des organismes, la quasi-totalité du débit circulant est recyclée entre les organes respiratoires et les autres tissus.
Ce recyclage peut d’abord être assuré par une circulation unique , les deux résistances vasculaires correspondant à la perfusion des organes respiratoires et à celle des autres systèmes (circulation systémique) étant alors disposées en série. Dans ce cas, le cœur peut pulser le sang, soit d’abord dans la circulation systémique (cœur «artériel»), soit d’abord dans la circulation de l’organe d’échanges gazeux (cœur «veineux»). La première disposition est rencontrée chez les Mollusques (fig. 4 a) et les Crustacés Décapodes (fig. 4 b), et la seconde est typique des Poissons (fig. 4 c). D’une façon générale, la résistance vasculaire branchiale chez ces animaux est plus faible que la résistance systémique. Cela permet, chez les Poissons par exemple, de conserver une pression relativement élevée dans l’aorte dorsale et donc de réaliser une perfusion systémique efficace grâce aussi à une disposition en parallèle des différents lits vasculaires au niveau des organes (fig. 4 c).
Avec l’apparition de la vie aérienne chez les Vertébrés Tétrapodes, une double circulation s’instaure, et les deux circulations, systémique et pulmonaire, se séparent entièrement chez les Homéothermes, Oiseaux et Mammifères (fig. 4 d). De ce fait, les résistances vasculaires systémique et pulmonaire sont encore disposées en série, mais, contrairement au cas des Poissons, la division complète du cœur procure une pompe indépendante pour chaque circuit. Cette séparation complète est requise pour soutenir un métabolisme actif chez ces animaux. Elle est associée au développement d’une circulation systémique à haute pression sur le versant artériel, cette haute pression étant nécessaire, d’une part pour surmonter les forces hydrostatiques de gravité devenues importantes dans l’air, d’autre part pour permettre un meilleur contrôle des débits locaux par des variations de la résistance périphérique dans des lits systémiques disposés en parallèle. La circulation pulmonaire, quant à elle, est typiquement un système à basse pression et à faible résistance vasculaire permettant des débits élevés et des échanges gazeux efficaces avec une dépense énergétique relativement modérée. Cette différenciation anatomique et fonctionnelle des deux circulations se réalise progressivement dans la série des Vertébrés Tétrapodes avec augmentation de la pression et de la résistance vasculaire systémiques et diminution de la résistance pulmonaire (fig. 5). Chez les Amphibiens et les Reptiles, en l’absence d’un cloisonnement complet du cœur, les lits pulmonaire et systémique sont de fait disposés en parallèle et la distribution du débit cardiaque dans les deux circulations dépend essentiellement de leurs résistances respectives qui peuvent être contrôlées en fonction des conditions. Bien que cette disposition apparaisse a priori défavorable aux échanges gazeux, le mélange des sangs artériel et veineux est en général limité, au moins en conditions normales, grâce à des dispositifs cardiaques particuliers.
3. Les organes propulseurs: cœurs
Types généraux
La morphologie et les modes de fonctionnement des pompes cardiaques sont très divers. Dans le mode péristaltique, une onde de contraction se déplace le long d’un vaisseau, propulsant le sang dans un seul sens en l’absence de valves (fig. 6 a), ou bien, comme chez les Ascidies, alternativement dans un sens ou dans l’autre grâce à l’inversion du péristaltisme. De tels vaisseaux contractiles existent chez beaucoup d’Invertébrés et correspondent à des structures peu spécialisées. La plupart des cœurs massifs sont des chambres à paroi musculeuse propre, ou parfois à musculature extrinsèque. La contraction de la musculature provoque une réduction de volume et une éjection du sang dans un sens déterminé grâce à la présence de valvules. On peut schématiquement distinguer des cœurs accessoires en forme d’ampoule, activant la circulation là où le besoin s’en fait sentir (cœurs branchiaux des Céphalopodes, fig. 4 a, par exemple), des cœurs tubulaires et des cœurs composés de chambres multiples et spécialisées. Les cœurs tubulaires des Arthropodes sont suspendus dans un sinus péricardique par des ligaments élastiques ou des muscles extrinsèques (fig. 6 a). Ils sont percés d’ostioles munis de valvules par où s’effectue leur remplissage lors de la diastole. Les cœurs à plusieurs chambres des Mollusques (fig. 3 a et 4 a) et des Vertébrés (fig. 3 b et 6 b) comportent des cavités à parois minces, ou oreillettes, qui recoivent le sang et se contractent pour le faire passer dans les ventricules, à parois musculaires épaisses, dont la contraction pulsera ce même sang dans le système artériel. Dans ce dernier type de cœur, il existe des valvules auriculo-ventriculaires et des valvules artérielles dont le jeu coordonné est essentiel pour le fonctionnement harmonieux de la pompe.
Le rythme cardiaque
Quelle que soit sa morphologie, le fonctionnement du cœur est rythmique, avec une alternance de phases de contraction, ou systoles, et de phases de relâchement, ou diastoles. La contraction du muscle cardiaque, comme celle du muscle squelettique, est consécutive à la dépolarisation des membranes cellulaires. Le myocarde est assimilable à un syncytium fonctionnel en ce sens que les différentes cellules qui le constituent sont couplées grâce à des jonctions électriquement perméables, de telle sorte qu’une excitation apparaissant en un point quelconque est plus ou moins rapidement propagée à l’ensemble du tissu. Cette propriété de conduction de l’excitation est commune à l’ensemble du myocarde, mais, chez les Vertébrés supérieurs, elle est particulièrement développée dans des régions spécialisées formant le tissu nodal.
L’excitation qui déclenche le rythme naturel de contraction de l’organe peut provenir du tissu cardiaque lui-même (rythmicité myogène). Certaines cellules myocardiques sont alors douées d’autorythmicité en ce sens que leur potentiel de repos est affecté d’une dépolarisation spontanée qui déclenche un potentiel d’action propagé au-dessus d’un seuil. Ces cellules jouent ainsi le rôle de générateur de rythme ou pacemaker . Les cœurs à rythme myogène se rencontrent chez tous les Vertébrés, mais aussi chez les Mollusques, les Prochordés et, semble-t-il, de nombreux Insectes. Typiquement, ces cœurs continuent à battre lorsqu’ils sont isolés de toutes connexions nerveuses. Ces dernières, généralement présentes (mais cependant pas toujours), correspondent à des fibres extrinsèques cardiorégulatrices. À l’opposé, les cœurs de certains Arthropodes comme le Homard ou la Limule ne présentent pas de rythmicité myogène. Un ganglion cardiaque comportant un nombre restreint de neurones et situé à la face dorsale du cœur constitue le pacemaker cardiaque. Chez le Homard, par exemple, ce ganglion contient quatre petites cellules autorythmiques et cinq motoneurones plus grands. Ces cœurs sont considérés comme typiquement neurogènes, car les contractions rythmiques du myocarde ne sont conservées que si les connexions avec au moins une des petites cellules sont intactes. Il existe cependant une innervation extrinsèque cardiaque comprenant des fibres cardio-accélératrices et cardio-inhibitrices.
La distinction entre rythmes d’origine myogène et d’origine neurogène n’est pas toujours aisée et n’est peut-être pas aussi absolue qu’il y paraît. Par exemple, le cœur de l’embryon de la Limule commence à battre bien avant que les cellules du ganglion cardiaque soient différenciées. Ce n’est que plus tard que le rythme neurogène se substitue à cette myogénicité embryonnaire.
Mécanique de la pompe cardiaque
Puisque les résistances vasculaires périphériques abaissent la pression du sang circulant, le fonctionnement cardiaque doit permettre à la fois l’éjection du sang à pression élevée dans les artères lors de la systole et le remplissage du cœur à basse pression en diastole. L’existence de chambres cardiaques communiquant entre elles par des orifices gardés par des valvules permet ces importants gradients de pression au cours du cycle cardiaque. De plus, pendant la durée de la diastole, la pression est maintenue élevée dans le système artériel grâce à des valves aortiques qui empêchent le reflux du sang dans le cœur. De ce fait, la première phase de la systole correspond à une montée en pression isovolumétrique et l’éjection du sang ne débute que lorsque la pression intracardiaque est suffisamment élevée pour forcer les orifices artériels. La phase de relaxation diastolique débute par la fermeture passive des valves aortiques, isolant un compartiment à basse pression et permettant le remplissage ventriculaire. Quand l’oreillette existe, sa contraction participe dans des proportions variées à ce remplissage, et l’afflux du sang aux oreillettes est souvent favorisé par une aspiration synchrone de la systole ventriculaire et permise par des structures péricardiques à parois relativement peu déformables. La figure 6 illustre ces faits et montre sur deux exemples, auxquels on peut ajouter celui des Mammifères traité par ailleurs, que, en dépit de morphologies fort diverses, la mécanique des pompes cardiaques présente des caractéristiques relativement communes.
Le cœur des Vertébrés inférieurs
Le passage de la circulation unique des Poissons à la double circulation des Tétrapodes s’accompagne d’importants changements morphologiques et fonctionnels au niveau de la pompe cardiaque. Déjà chez les Poissons ayant une respiration aérienne accessoire, tels que les Dipneustes par exemple, le sang hématosé dans les organes d’échanges aériens retourne au cœur au lieu d’être distribué directement, comme le sang branchial, dans le lit vasculaire systémique. La respiration aérienne prenant de l’importance, il importe d’éviter un mélange des sangs artériel et veineux grâce à un cloisonnement du cœur tel qu’il est en définitive réalisé chez les Mammifères et les Oiseaux. Chez les Vertébrés inférieurs, Amphibiens et Reptiles, ce cloisonnement est incomplet et cela peut apparaître comme une disposition très imparfaite et peu favorable à la fonction de transport des gaz par la circulation. Cependant, le mélange des sangs, s’il est anatomiquement possible, apparaît le plus souvent physiologiquement limité. D’autre part, le cloisonnement incomplet du cœur laisse la possibilité de régulation indépendante des débits dans les deux circuits. En particulier, la circulation pulmonaire peut être largement «shuntée» dans les situations où elle ne s’impose pas, par exemple en fin de période d’apnée prolongée chez certains Reptiles (Tortues) ou encore pendant la plongée chez beaucoup d’Amphibiens et aussi de Reptiles (Crocodiliens).
Deux exemples seulement seront ici traités sommairement. Chez un Amphibien comme la Grenouille, le ventricule est unique, mais il existe un cloisonnement auriculaire, l’oreillette gauche collectant le sang hématosé pulmonaire et l’oreillette droite le sang veineux systémique (fig. 7 a). Selon la théorie la plus classique, une stratification s’établit lors du remplissage ventriculaire, le sang veineux systémique se superposant au sang hématosé pulmonaire. La contraction ventriculaire éjecte donc d’abord du sang veineux qui prend préférentiellement la voie pulmo-cutanée où la résistance vasculaire est la plus faible (fig. 7 a). Le sang artérialisé est éjecté dans un second temps et prend essentiellement la voie systémique, l’accès à la voie pulmo-cutanée étant alors interdit par la disposition du repli spiral du tronc artériel. Cette distribution sélective fonctionne lorsque l’animal respire en surface, mais, lors de la plongée, une augmentation de la résistance pulmonaire dérive la plus grande partie du débit cardiaque vers les circulations systémique et, probablement, cutanée, les échanges gazeux par la peau demeurant ainsi possibles. La possibilité d’un tel «shunt» est également conservée chez les Crocodiliens, où le cœur est entièrement cloisonné mais où les deux crosses aortiques, gauche et droite, donnant accès au circuit systémique sont en communication par un orifice, le foramen de Panizza (fig. 7 b). En surface (fig. 7 b), le débit ventriculaire droit prend uniquement la voie de l’artère pulmonaire où la résistance est plus faible (fig. 5 b) et l’existence du foramen de Panizza permet donc une séparation complète des sangs artériel et veineux. En plongée, une vasoconstriction pulmonaire permet de dériver la plus grande partie du débit droit dans la circulation systémique par la crosse aortique gauche (fig. 7 b). En présence d’une bradycardie et d’une diminution du débit cardiaque total comme chez tous les Vertébrés plongeurs, ces dispositifs permettent de toute évidence le maintien d’une perfusion systémique correcte aux dépens d’une perfusion pulmonaire devenue superflue.
circulation [ sirkylasjɔ̃ ] n. f.
• 1361; lat. circulatio
1 ♦ Vx Mouvement circulaire. ⇒ révolution.
2 ♦ (1667) Mouvement d'un fluide en circuit fermé. La circulation du sang ou la circulation sanguine : double mouvement du sang qui part du cœur et y revient (⇒ doppler) . Circulation artérielle, veineuse, vasculaire (⇒ angiologie) . Petite circulation (pulmonaire). Grande circulation (générale). Circulation extracorporelle. Absolt Avoir une bonne, une mauvaise circulation. Troubles de la circulation (⇒ circulatoire) . — Bot. La circulation de la sève dans les plantes. Circulation ascendante (sève brute), descendante (sève élaborée).
♢ (XIXe ) Déplacement et remplacement d'un fluide en circuit ouvert. Circulation des courants, des vents. Établir une double circulation d'air. ⇒ aération.
3 ♦ (1694) Écon. Mouvements des biens, des produits. Ensemble des échanges, des transactions. ⇒ commerce. Circulation des biens. Circulation de l'argent, des capitaux. ⇒ roulement. Mettre des espèces, des billets en circulation. ⇒ cours. Retirer une monnaie de la circulation (⇒ démonétiser) . — Par ext. La libre circulation des individus, de la main-d'œuvre.
4 ♦ Mouvement de ce qui se propage. Mettre un livre, un écrit en circulation, le répandre, le livrer au public. ⇒ diffusion, lancement. Mise en circulation de fausses nouvelles. ⇒ propagation , transmission.
5 ♦ (1829) Le fait ou la possibilité d'aller et venir, de se déplacer en utilisant les voies de communication. La circulation aérienne. La circulation des piétons. La circulation des trains. ⇒ trafic.
♢ Spécialt La circulation automobile, ou absolt la circulation. Circulation urbaine, routière. Une circulation fluide, dense, difficile. Voie à grande circulation. Il y a beaucoup de circulation. ⇒ bouchon, embouteillage, encombrement. Agent qui règle la circulation. Accident de la circulation. — Circulation alternée, à sens unique. — Ensemble des véhicules qui circulent. Détourner la circulation (⇒ délestage, détour, déviation) . — Loc. fam. Disparaître de la circulation : ne plus donner signe de vie.
● circulation nom féminin (latin circulatio, -onis, mouvement circulaire) Marche continue et successivement renouvelée d'un fluide, d'un liquide : Circulation de l'air dans une pièce. Mouvement continu du sang dans les artères et les veines : Avoir une mauvaise circulation. Mouvement des véhicules, des piétons, etc., qui se déplacent sur des voies de communication : Accident de la circulation. Circulation aérienne, ferroviaire. Action d'aller d'un lieu à l'autre, d'aller et venir : La circulation des capitaux. Fait d'être diffusé, publié, de passer de main en main, d'être propagé : Circulation de fausses nouvelles. Biologie Déplacement permanent d'un liquide à l'intérieur d'un organisme animal ou végétal pluricellulaire, assurant les échanges respiratoires, alimentaires et excrétoires d'une cellule à l'autre ou entre l'organisme et le milieu qui l'entoure. (Toute circulation, qu'elle mette en mouvement la sève [plantes] ou le sang [animaux], suppose un appareil circulatoire.) Économie Ensemble des structures et des mécanismes grâce auxquels les facteurs de la production, les produits et les services sont mis à la portée des utilisateurs et se déplacent sur les divers marchés. Forage Circuit ininterrompu effectué à l'intérieur d'un puits par un fluide liquide ou gazeux dans le but de remonter en surface les déblais formés au fur et à mesure par l'action du trépan. Militaire Ensemble des moyens et procédés, confiés au train, permettant l'appui des mouvements de grandes unités. Thermique Déplacement d'un fluide dans un circuit fermé. ● circulation (expressions) nom féminin (latin circulatio, -onis, mouvement circulaire) Familier. Disparaître de la circulation, ne plus être en contact avec ses proches, ses relations habituelles, etc., être dans un lieu inconnu. Être en circulation, être diffusé, propagé, passer de main en main. Libre circulation, fait de pouvoir être librement diffusé et, en particulier, de pouvoir passer librement d'un pays à l'autre. Retirer de la circulation, faire que quelque chose n'ait plus cours, cesser sa diffusion, sa vente. Circulation atmosphérique, ensemble des mouvements des grandes masses d'air dans l'atmosphère (plus précisément dans la troposphère). Droit de circulation, impôt sur le transport des boissons. Circulation monétaire, quantité de monnaie métallique, fiduciaire et scripturale en circulation au cours d'une période donnée. Circulation d'un champ de vecteurs sur un arc paramétré Γ, intégrale curviligne , étant défini sur un ouvert de R3 et Γ contenu dans cet ouvert. (Quand est un champ de forces, la circulation représente le travail.) Circulation extracorporelle, méthode transitoire de circulation du sang en dehors de l'organisme permettant d'intervenir chirurgicalement sur le cœur en l'excluant temporairement de la circulation. Circulation forcée, circulation obtenue ou accélérée par l'intervention d'une machine. Circulation naturelle, circulation d'un fluide sous l'effet des variations de volume massique qu'il subit, ou des différences de pression entre les extrémités de son parcours. ● circulation (synonymes) nom féminin (latin circulatio, -onis, mouvement circulaire) Mouvement des véhicules, des piétons, etc., qui se déplacent sur...
Synonymes :
- passage
- roulage
- trafic
Action d'aller d'un lieu à l'autre, d'aller et venir
Synonymes :
- échanges
Fait d'être diffusé, publié, de passer de main en main...
Synonymes :
circulation
n. f.
d1./d Mouvement d'un fluide qui circule.
|| PHYSIOL La circulation du sang ou (s. comp.) la circulation: le mouvement du sang qui part du coeur et y revient. (V. encycl. ci-après.)
— La grande circulation: la circulation générale. La petite circulation: la circulation pulmonaire.
|| METEO Circulation générale de l'atmosphère: ensemble des grands courants aériens à l'échelle planétaire.
d2./d Mouvement de personnes, de véhicules sur une, des voies. Les embarras de la circulation. Syn. (Belgique) roulage.
d3./d Mouvement des biens, des produits, passage de main en main. Circulation monétaire. Mettre en circulation: mettre à la disposition du public.
Encycl. Physiol. - La circulation sanguine permet l'apport d'oxygène, d'eau, et des nutriments indispensables aux organes et tissus de l'organisme, et transporte les produits excrétés par la cellule (déchets ou sécrétions hormonales). Le sang oxygéné venant des poumons gagne les cavités cardiaques gauches; après éjection dans le ventricule gauche, l'aorte et ses collatérales, il vient irriguer les organes et les tissus périphériques, où l'oxygène est consommé. Le sang veineux, pauvre en oxygène et chargé de dioxyde de carbone (CO 2), gagne les deux veines caves et l'oreillette droite, puis les artères pulmonaires, pour atteindre l'espace alvéolo-capillaire, où s'effectuent les échanges gazeux. Le coeur, qui agit comme une pompe, assure la circulation sanguine et permet de maintenir un niveau stable de pression artérielle.
⇒CIRCULATION, subst. fém.
A.— Action de se mouvoir d'une manière continue, circulairement, avec retour au point de départ.
1. [En parlant d'un astre] Mouvement circulaire. Notre planète, envisagée, quant à sa rotation journalière ou à sa circulation annuelle (A. COMTE, Cours de philos. positive, t. 4, 1839-42, p. 396).
2. [En parlant des fluides]
a) [des liquides]
— La circulation du sang. Mouvement continu du sang qui va du cœur aux extrémités et des extrémités vers le cœur. Grande circulation. Celle qui va du ventricule gauche à l'oreillette droite. Petite circulation. Du ventricule droit à l'oreillette gauche. Synon. circulation pulmonaire (cf. Méd. Biol. t. 1 1970) :
• 1. Nous nommons circulation double celle où aucune partie du sang veineux ne peut rentrer dans le tronc artériel qu'après avoir fait un circuit particulier dans l'organe de la respiration, qui doit être formé des expansions de deux vaisseaux, l'un artériel, l'autre veineux, ...
CUVIER, Leçons d'anat. comp., t. 1, 1805, p. 40.
— Usuel. La circulation. Activer la circulation (avec un gant de crin) (MIRBEAU, Le Journal d'une femme de chambre, 1900, p. 131). Meynestrel (...) allait et venait à travers l'étroite pièce, afin de rétablir la circulation dans sa jambe ankylosée (R. MARTIN DU GARD, Les Thibault, L'Été 1914, 1936, p. 242). Elle était couchée en chien de fusil, et [il] se promit de lui dire que cela n'était pas bon pour la circulation (MONTHERLANT, Le Démon du bien, 1937, p. 1338).
— La circulation de la sève. Mouvement de la sève dans les végétaux :
• 2. Ils [les élus] suivent la circulation de la sève dans les canaux des plantes; et l'hysope et le cèdre ne peuvent dérober à l'œil du saint, la navette qui croise la trame de leurs feuilles, et le tissu de leur écorce.
CHATEAUBRIAND, Les Natchez, 1826, p. 175.
— HYDROL. La circulation des eaux. Mouvement des eaux à l'état liquide sur notre planète (cf. GEORGE 1970).
— TECHNOL. La circulation d'eau. Mouvement de l'eau en circuit fermé. Appareil de chauffage par circulation d'eau chaude (L. SER, Traité de phys. industr., t. 2, 1890, p. 863) :
• 3. Le circuit de circulation d'eau a pour but d'assurer la réfrigération des parties métalliques du moteur en contact avec les gaz à température élevée.
P. DUMANOIS, Moteurs à combustion interne, 1924, p. 223.
b) [des gaz] La circulation de l'air. Son renouvellement :
• 4. Il faudrait remarquer aussi, (...) la disposition des ruelles et passages ménagés çà et là au travers ou autour des gâteaux pour assurer le trafic et la circulation de l'air, ...
MAETERLINCK, La Vie des abeilles, 1901, p. 147.
3. P. ext., BIOL. Ensemble des transformations que subissent les molécules chimiques qui constituent l'essentiel de la cellule vivante. La circulation protoplasmique (BERGSON, L'Évolution créatrice, 1907, p. 33).
B.— [En parlant de personnes, d'animaux, de véhicules terrestres, ou autres moyens de locomotion] Action d'aller et venir en utilisant les voies de communication et/ou selon un trajet bien défini. Circulation des voitures (circulation automobile), circulation des trains; circulation aérienne; agent de la circulation; régler la circulation; les accidents de la circulation. Les grandes voies de circulation (T'SERSTEVENS, L'Itinéraire espagnol, 1933, p. 21) :
• 5. ... des rues tortueuses, étranglées, qui ne suffisent nullement à la circulation des voitures, des animaux et de la foule...
SAY, Traité d'écon., 1832, p. 432.
• 6. ... la ville reste en état de siège et toute circulation est interdite à partir de huit heures du soir.
GIDE, Journal, 1943, p. 237.
— Spéc. Carte, permis de circulation. Titre qui autorise quelqu'un à se déplacer dans certaines conditions. Il fut gratifié d'une carte de circulation sur tout le réseau ferré de la république (DE VOGÜÉ, Les Morts qui parlent, 1899, p. 107) :
• 7. Partis de Vence vers dix-neuf heures, la crainte d'un brusque retrait de permis de circulation et d'une réquisition des autos nous mettait le feu au derrière.
GIDE, Journal, 1940, p. 26.
— P. méton.
♦ Ensemble des véhicules qui circulent. On entendait la clameur de la circulation sur la route nationale (QUENEAU, Pierrot mon ami, 1942, p. 63).
♦ Réseau routier permettant la circulation. Trente-trois grandes routes sortent de Washington (...) tracent une circulation de 25 747 milles (CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 1, 1848, p. 343).
— [Avec affaiblissement de sens] Expr. fam. [En parlant d'une pers.] Disparaître de la circulation (CAMUS, La Peste, 1947, p. 1446).
C.— ÉCON. POL. [En parlant de marchandises, de valeurs, de la monnaie] Mouvement (de ces biens) entre plusieurs personnes ou entre plusieurs pays, ensemble des échanges, des transactions. La circulation fiduciaire. La circulation du papier-monnaie, des billets de banque. Le cours du change, cette mesure infaillible de la circulation monétaire (BRILLAT-SAVARIN, Physiol. du goût, 1825, p. 144) :
• 8. ... aujourd'hui la nation française ne subsiste plus comme en 89, sur la propriété, mais sur la circulation...
PROUDHON, Les Confessions d'un révolutionnaire, 1849, p. 325.
Rem. Noter l'emploi plur. suivant dans Balzac (Melmoth réconcilié, 1835, p. 338) à rapprocher de capital circulant II A 2 b : Il [Castanier] eut recours à ce que le commerce nomme des circulations. C'est des billets qui ne représentent ni marchandises ni valeurs pécuniaires fournies...
— P. anal. [En parlant de pers.] Mouvement (des savants, des spécialistes) entre plusieurs pays. Instaurer le libre échange des produits et équipements de l'industrie nucléaire ainsi que la libre circulation des spécialistes (GOLDSCHMIDT, L'Aventure atomique, 1962, p. 131).
— Droit de circulation. Impôt perçu à l'occasion du transport des boissons.
— Expr. Mettre en circulation, lancer dans la circulation. Mettre, jeter sur le marché (cf. ZOLA, Au bonheur des dames, 1883, p. 643). Retirer (un numéro d'un journal) de la circulation (DE GAULLE, Mémoires de guerre, 1956, p. 93).
♦ P. anal., vieilli. [En parlant de pers.] Mettre en circulation (dans le monde). Lancer (dans le monde). (Être) en circulation. (Être) en vogue (cf. SAINTE-BEUVE, Causeries du lundi, t. 5, 1851-62, p. 377 et Portraits contemp., t. 4, 1846-69, p. 50).
D.— P. ext.
1. [En parlant d'objets quelconques] Mettre en circulation. Faire circuler, faire passer de main en main :
• 9. Tout en parlant, il bourrait de chanvre ou de tabac, les garabos, qu'il avait à portée de main, les alluma, selon la coutume en tira quelques bouffées et les mit en circulation.
MARAN, Batouala, 1925, p. 68.
2. [En parlant d'écrits, d'idées] Action de répandre dans le public, de propager; fait d'être répandu ou propagé :
• 10. La vive circulation des idées est pour la pensée, ce que la circulation des espèces est pour le commerce, une véritable source de richesses. On échange rarement ses idées ou son argent sans y gagner.
BONSTETTEN, L'Homme du Midi et l'homme du Nord, 1824, p. 175.
— Expr. Mettre en circulation, lancer dans la circulation. Répandre dans le public. La mise en circulation. La propagation. En circulation. En cours. Dans la plupart des villes de la Suisse allemande, il y a réellement trois langues en circulation (BONSTETTEN, L'Homme du Midi et l'homme du Nord, 1824 p. 93). On a organisé la mise en circulation d'une calomnie (STENDHAL, Lucien Leuwen, t. 2, 1836, p. 406).
Prononc. et Orth. :[]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1375 circulacion « mouvement de ce qui revient à son point de départ » (N. ORESME, Livre du ciel et du monde, éd. A. D. Menut et A. J. Denomy, p. 124 ds GDF. Compl.); b) 1657-62 circulation du sang (PASCAL, Pensées, section II, 72); 2. a) 1694 comm. fin. (Ac.); b) XVIIe s. circulation des idées (d'apr. BRUNOT t. 6, 1, p. 176); c) 1829 en parlant de véhicules (BOISTE). Empr. au lat. impérial circulatio « orbite, circuit (d'un astre) ». Fréq. abs. littér. :1 066. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 2 531, b) 1 039; XXe s. : a) 749, b) 1 365.
circulation [siʀkylɑsjɔ̃] n. f.
ÉTYM. 1361; lat. impérial circulatio, du supin de circulare. → Circuler.
❖
1 Vx. Mouvement circulaire. || La circulation des planètes. ⇒ Révolution.
2 (1667, Pascal). || La circulation du sang, la circulation sanguine, mouvement du sang qui part du cœur vers toutes les parties du corps au moyen des vaisseaux et revient vers le cœur après s'être purifié au niveau des poumons. ⇒ Sang. || Circulation artérielle, capillaire, cardiaque, veineuse. || Petite circulation (pulmonaire). || Grande circulation (générale). || Souffrir d'une mauvaise circulation. || Troubles de la circulation. || Atrophie de la circulation. — La circulation lymphatique. ⇒ Lymphe.
1 Nulle souffrance errante dans le corps. L'impression d'une circulation aisée, et d'un très léger spasme viscéral, qu'un nerveux ne peut guère éviter quand il atteint le seuil de l'allégresse physique.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, IV, Éros de Paris, XX, p. 215.
2 Déjà les mouvements nerveux s'atténuaient : la circulation reprenait son cours.
Martin du Gard, les Thibault, t. IV, p. 149.
3 Le sang effectue donc un double circuit : l'un court, allant du ventricule droit aux poumons et à l'oreillette gauche, l'autre très étendu, entre le ventricule gauche, les organes et l'oreillette droite. C'est à ces deux circuits qu'on donne le nom de petite et grande circulation, correspondant à la circulation pulmonaire et à la circulation générale.
P. Vallery-Radot, Notre corps…, p. 40.
♦ Circulation croisée : technique chirurgicale dans laquelle un individu en bonne santé « prête » son cœur et ses poumons à l'opéré, pour assurer une circulation suffisante à ce dernier pendant une opération à cœur ouvert. || La circulation croisée fut remplacée par les appareils de circulation extra-corporelle.
➪ tableau Lexique de la chirurgie.
♦ Par anal. || La circulation de la sève dans les plantes. || Circulation ascendante (sève brute). || Circulation descendante (sève élaborée).
♦ (XIXe). Mouvement des fluides (liquides, gaz). || Circulation de l'air : mouvement par lequel l'air se renouvelle dans un lieu fermé. ⇒ Aération, courant (d'air).
♦ Techn. || La circulation d'eau : le mouvement de l'eau en circuit fermé. || Un circuit de circulation d'eau chaude.
♦ Biol. Transformations subies par les molécules chimiques constitutives de la cellule vivante.
♦ Techn. (météor.). Ensemble des configurations des mouvements atmosphériques.
3 (Personnes, véhicules). Cour. Action d'aller et de venir en utilisant les voies de communication. || La circulation des piétons, des passants, des voitures. || La circulation automobile. — La circulation aérienne. — Absolt. || La circulation, celle des véhicules. || Circulation intense. || Circulation routière, circulation urbaine. || Gêner, arrêter, interrompre, entraver la circulation. || Agent qui règle la circulation. || Les accidents de la circulation, les embarras de la circulation. ⇒ Bouchon, embouteillage, encombrement, ralentissement. || Livrer une route à la circulation. || Détourner la circulation. ⇒ Bifurcation, détour, déviation. || Circulation à sens unique; circulation alternée. || Circulation réglementée. — Voie à grande circulation. || Couloir de circulation.
4 C'était pourtant dans ce Paris menacé d'étouffement que la circulation atteignait alors la plus grande rapidité qu'on lui ait connue.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, XVIII, p. 203.
5 L'industrie de l'automobile est désormais dominée par les problèmes conjoints de la circulation, du stationnement et de la stabulation.
G. Duhamel, Manuel du protestataire, p. 130.
5.1 La Circulation entre parmi les fonctions sociales et se classe au premier rang. Ce qui entraîne la priorité des parkings, des accès, de la voirie adéquate. Devant ce « système », la ville se défend mal.
Henri Lefebvre, la Vie quotidienne dans le monde moderne, p. 191.
♦ La circulation des trains. ⇒ Chemin de fer, trafic. || Circulation à voie unique, à voie double. || Mettre un nouveau matériel en circulation. ⇒ Service (en). — Circulation des voyageurs. || Permis de circulation. || Carte de circulation : titre qui autorise qqn à se déplacer dans certaines conditions. ⇒ Coupe-file, laissez-passer, passeport.
♦ Ensemble des véhicules qui circulent. || Détourner la circulation. || On entendait le bruit de la circulation.
♦ ☑ Loc. fig., fam. Disparaître de la circulation : ne plus donner signe de vie. || Cela fait bien trois mois qu'il a disparu de la circulation.
4 (1694). Ensemble des échanges économiques, des transactions indispensables pour fournir des biens aux producteurs et pour transférer les produits aux consommateurs. ⇒ Commerce, échange, transaction, transport. || La circulation des biens. || Droit de circulation : impôt qui se perçoit à l'occasion du transport de certaines marchandises, de boissons.
6 Les échanges déterminant une double circulation : une circulation idéale de droits qui changent de titulaire, une circulation matérielle réalisée par un transport des biens dans l'espace.
Paul Reboud, Précis d'économie politique, I, IV, 1, p. 319.
♦ Circulation de l'argent, des effets de commerce, des capitaux. ⇒ Roulement. || Circulation monétaire (cit.). — Mettre des espèces, des billets, des marchandises en circulation, lancer dans la circulation. ⇒ Émission; cours. || Retirer une monnaie de la circulation.
7 Cependant, c'est un fait que les 53 milliards de lingots entassés à la Banque de France ont pour contre-partie le gonflement de notre circulation de billets, qui atteint cette semaine (le 12 janv. 1931) le chiffre record de 79 milliards (…)
J. Bainville, la Fortune de la France, p. 260.
♦ Droit de circulation : impôt perçu à l'occasion du transport des boissons.
♦ Par ext. (Personnes). Mouvement (des savants, des techniciens, des spécialistes) entre plusieurs pays.
5 En circulation (emplois spéciaux mentionnés plus haut). || Mettre un livre, un écrit en circulation, le faire passer de main en main, le répandre, le livrer au public. ⇒ Diffusion, lancement. || Mise en circulation de fausses nouvelles, propagation. ⇒ Transmission.
8 L'amie de ma femme a la franchise de lui transmettre ce potin en circulation.
Georges Lecomte, Ma traversée, p. 519.
♦ Lancer dans la circulation, mettre en circulation (un produit, une nouvelle…), les répandre dans le public.
❖
COMP. Recirculation.
Encyclopédie Universelle. 2012.