Akademik

gothique

gothique [ gɔtik ] adj. et n.
• 1440 « médiéval »; bas lat. gothicus « relatif aux Goths »
1Vx et péj. Du Moyen Âge. médiéval. Les siècles gothiques.
2(1615; s'est dit de tout l'art du Moyen Âge [cf. 2. roman] jusqu'au XIXe) Style gothique : style répandu en Europe du XII e au XVI e s., entre le style roman et le style Renaissance. Architecture gothique, anciennement nommée ogivale ( ogive) . Notre-Dame de Paris, cathédrale gothique. Sculpture gothique. Chapelle gothique, flèche gothique. Peinture gothique. Subst. Le gothique : le style gothique. Premier gothique; gothique tardif (rayonnant, flamboyant). Gothique perpendiculaire anglais. Faux gothique ou néogothique (du XIX e).Par ext. Architecte, peintre gothique.
3Écriture gothique : écriture à caractères droits, à angles et à crochets, qui remplaça vers le XII e s. l'écriture romane. Écriture semi-gothique ou gothique onciale. Subst. La gothique. Écrire en gothique. Texte allemand imprimé en gothique.
N. m. Ling. gotique.

gothique adjectif (bas latin gothicus) Relatif aux Goths : Les coutumes gothiques. Se dit d'une forme d'art qui s'est épanouie en Europe du XIIe s. jusqu'à la Renaissance. Littéraire. Du Moyen Âge, archaïque, suranné. Aéronautique Se dit d'une forme d'aile pour vitesse supersonique. Littérature Se dit d'un courant littéraire apparu à la fin du XVIIIe s. et qui touche à la fois au roman noir et au fantastique, notamment dans les pays anglo-saxons. Paléographie Se dit d'une gamme de types d'écritures utilisées du XIIe au XVe s., dans lesquelles les traits courbes des lettres sont remplacés par des traits droits formant des angles les uns avec les autres. (Ce type d'écriture se maintint beaucoup plus longtemps dans les pays de langue germanique.) ● gothique (citations) adjectif (bas latin gothicus) André Malraux Paris 1901-Créteil 1976 Les marbres grecs regardent en dedans, mais les beaux gothiques ont toujours l'air d'aveugles qui cherchent. Les Noyers de l'Altenburg Gallimardgothique (difficultés) adjectif (bas latin gothicus) Orthographe 1. Gothique adj. = relatif à la forme d'art qui s'est épanouie en Europe du XIIe s. à la Renaissance. Les cathédrales gothiques. 2. Gotique n.m. = ancienne langue germanique du groupe oriental. ● gothique (expressions) adjectif (bas latin gothicus) Style gothique international, style d'un grand raffinement en vigueur aux alentours de 1400, dans la peinture et les arts décoratifs surtout. ● gothique (homonymes) adjectif (bas latin gothicus) gotique nom masculingothique nom masculin Art, style gothique. Courant littéraire gothique. ● gothique nom féminin Écriture gothique.

gothique
adj. et n. m.
d1./d Des Goths, qui a rapport aux Goths.
d2./d BX-A Style gothique ou, n. m., le gothique: style architectural qui s'est répandu en Europe du XIIe au XVIe s.
Encycl. Bx-A. - L'architecture gothique, née en France et en Angleterre au début du XIIe s., s'impose dans presque toute l'Europe jusqu'au XVIe s. Son essor est dû à l'emploi, pour les voûtes des édifices religieux, de la croisée d'ogives. Le style gothique se caractérise par l'emploi de l'arc brisé, la hauteur des supports, l'importance des ouvertures, garnies de vitraux. Au gothique primitif, de 1140 à 1200, et au gothique à lancettes, de 1200 à 1250 (cath. de Paris, Reims, Chartres, Bourges, et Sainte-Chapelle de Paris), succèdent le gothique rayonnant (XIVe s.) qui éclaire l'édifice d'immenses "roses" (cath. de Strasbourg, Metz, Cologne) puis le gothique flamboyant (XVe-XVIe s.), qui privilégie la décoration (cath. de Beauvais). L'architecture civile et militaire adopte aussi le style ogival: maison de Jacques Coeur à Bourges, palais des Papes à Avignon, enceintes fortifiées de Carcassonne, Saint-Malo, Aigues-Mortes (Gard).

⇒GOTHIQUE, adj. et subst.
A. — Relatif aux Goths.
1. [En parlant d'une pers.] Qui est membre de la peuplade des Goths, qui en descend. Cette cotte de mailles dorée de ce chevalier gothique [le Cid] à visage de jeune Viking (BRASILLACH, Corneille, 1938, p. 435).
[En parlant d'une collectivité] Enivré de ces succès, Valens s'apprête à triompher des peuples gothiques (CHATEAUBR., Ét. ou Disc. hist., t. 2, 1831, p. 171).
2. (Ce) qui est propre aux Goths, à leurs descendants. La dernière fois que je le vis [un Danois], il eut le tact gothique d'exhaler un grand dédain pour la France (BLOY, Journal, 1900, p. 399).
Spécialement
a) Subst. masc. sing. Langue des Goths. Grammaire comparée des différents dialectes germaniques, comprenant le gothique, l'islandais (J.-J. AMPÈRE, Corresp., 1827, p. 438). Le gotique (...) est antérieur de plusieurs siècles aux autres dialectes germaniques (SAUSSURE, Ling. gén., 1916, p. 297).
b) Relatif à cette langue. Préciser la part de l'influence gothique dans la déformation de la langue latine (GIDE, Immor., 1902, p. 407).
Alphabet gothique. Alphabet créé par l'évêque Ulphilas au IVe siècle, à partir des alphabets grec, romain et runique, pour transcrire la langue des Goths (cf. Ac. 1878, 1932).
B. — [P. réf. à cette peuplade, à l'époque ancienne, barbare, confuse où elle vivait]
1. B.-A.
a) Style gothique. Style des derniers siècles du Moyen Âge (XIIe s.-XVIe s. environ) en Europe, dont les caractéristiques varièrent selon les périodes et les arts, connu surtout par ses réalisations architecturales élancées, ouvragées et celles qui leur sont annexes (sculptures, vitraux) mais s'illustrant aussi dans certains arts mineurs (enluminure, orfèvrerie, tapisserie, mobilier en particulier) :
1. ... l'an 1000, où la peur de la fin du monde fit jaillir l'architecture religieuse médiévale : style roman, puis styles gothique et flamboyant.
LAMBERTIE, Industr. pierre et marbre, 1962, p. 62.
Emploi subst. masc. sing. Gothique primitif, tardif; gothique flamboyant, fleuri, rayonnant. En 1536 (...), l'église de Brou, la dernière et la plus mignonne fleur du gothique achevait d'éclore (TAINE, Philos. art, t. 2, 1865, p. 17).
Rem. Du XVIIe s. au début du XIXe s., ce terme s'applique à toute la période artistique allant de l'Antiquité à la Renaissance, avec souvent une nuance de mépris. Le gothique ancien désigne alors l'art roman (cf. A. REY, v. infra bbg.).
b) Relatif à ce style, réalisé dans ce style. Architecture, art, cathédrale gothique. Les pics de glace brillent comme des rosaces gothiques (QUINET, All. et Ital., 1836, p. 140) :
2. Regardez l'orbite amaigri et profond de la croisée gothique, de cet œil ogival, quand il fait effort pour s'ouvrir, au XIIe siècle. Cet œil de la croisée gothique est le signe par lequel se classe la nouvelle architecture.
MICHELET, Hist. de France, Paris, Marpon et Flammarion, t. 3, 1879 [1833], p. 216.
SYNT. Chapelle, château, cloître, flèche gothique; maisons, monuments, ornements, salles, statues, tours, voûtes gothiques.
c) [En parlant d'un artiste] Qui réalise des œuvres dans ce style. Le sculpteur gothique renonce aux stylisations radicales de ses prédécesseurs romans (HUYGHE, Dialog. avec visible, 1955, p. 135).
Emploi subst. Réalisme (...) qui atteint à la grandeur des gothiques (LHOTE, Peint. d'abord, 1942, p. 83).
d) [Avec une valeur caractérisante]
(Ce) qui est réalisé dans un style ressemblant au gothique; qui a certaines caractéristiques (légèreté, caractère ouvragé, élancé...) de ce style. Rodenbach : « (...) Longs doigts gothiques de Mlle Moreno. » (RENARD, Journal, 1894, p. 227). Le château [de Chambord] conserve un caractère bien gothique, qui est d'accumuler toute sa décoration sur ses combles (HOURTICQ, Hist. art, Fr., 1914, p. 151) :
3. Elle leva les bras au ciel, courut vers la porte, (...) entraîna dans les mailles de son fichu le dossier pointu et gothique d'une chaise second Empire...
COLETTE, Mais. Cl., 1922, p. 42.
Faux gothique. Style cherchant à imiter, au XIXe siècle essentiellement, le style gothique du Moyen Âge, certaines de ses caractéristiques :
4. Le bourg me parut riche et laid. Un morceau de route large et droite, bordé de maisons neuves, une école neuve à damiers de briques, une église neuve, en faux gothique grêle et coupant...
VERCEL, Cap. Conan, 1934, p. 249.
Rem. Cette loc. prend parfois un trait d'union (v. faux1 ex. 11).
[En parlant d'une pers.] Qui imite le style gothique, qui l'apprécie. L'archiviste est lui-même décorateur gothique (MICHELET, Journal, 1835, p. 197).
Emploi subst. Et nous sourions de ce gothique fervent [Théophile Gautier] qui n'a même pas pris la peine d'aller à Chartres visiter la cathédrale (PROUST, Past. et mél., 1919, p. 264).
e) P. ext. Qui date de l'époque du style gothique et plus largement du Moyen Âge :
5. ... il [le pape] fut dans le monde gothique le défenseur des franchises populaires, comme il devint dans le monde moderne le restituteur des sciences, des lettres et des arts.
CHATEAUBR., Mém., t. 3, 1848, p. 494.
Emploi subst. Je saisissais un volume sur sa tablette, quelque vénérable gothique ou un noble poète de la Renaissance (A. FRANCE, Bonnard, 1881, p. 504).
2. Domaines de l'écriture et de l'imprimerie.
a) Écriture gothique. Écriture dont les caractères sont droits, anguleux, ornés de pointes, de crochets, qui apparaît en Europe au XIIe siècle, peut-être influencée par le style artistique de cette époque, et dont la durée d'utilisation varia selon les pays (en particulier jusqu'en 1941, en Allemagne). De vieux parchemins couverts d'une écriture gothique (Ac. 1878).
Qui en a certaines caractéristiques. Il [le billet] était écrit d'une écriture franche, nette, mais un peu gothique, et qui rappelait les types allemands (VERNE, Vingt mille lieues, t. 1, 1870, p. 148).
Emploi subst. fém. sing. Quantité insensée d'inscriptions et de noms gravés en ronde (...), en bâtarde (...), en gothique, en anglaise (DU CAMP, Nil, 1854, p. 136).
b) [En parlant d'une lettre] Qui appartient à cette écriture, qui en a certaines caractéristiques. Caractères, lettres gothiques. J'y avais tracé autrefois mon chiffre artistement enlacé dans un L gothique (JANIN, Âne mort, 1829, p. 94).
c) [En parlant d'un écrit] Pour lequel l'écriture gothique a été utilisée. C'était une grande page de plain-chant, avec un texte gothique sous les portées de quatre lignes (A. FRANCE, Orme, 1897, p. 39).
3. Avec une nuance péj. Qui est d'un autre âge, désuet, barbare, conservateur. Idées, préjugés gothiques. Débarrassez-vous de ce vilain bonnet fourré, de cette gothique robe-de-chambre (JOUY, Hermite, t. 2, 1812, p. 68). Soit que (...) l'Europe crût que les royalistes de France n'étoient qu'un petit troupeau d'hommes gothiques sans force et sans capacité (CHATEAUBR., Polém., 1818-27, p. 256) :
6. ... il ne pose pas de question [à sa femme] : la jalousie est gothique, un reste de l'âge des Maures, un sentiment rétrograde qu'il rougirait d'éprouver...
MORAND, Flagell. Séville, 1951, p. 92.
REM. 1. Gothico-, élém. représentant gothique, formateur de composés adj., avec trait d'union; le second élém. est un adj. ou un subst. fr. indiquant un style artistique ou un ensemble géogr. a) [Le composé exprime des relations entre deux styles dans un cont. gén. défavorable] Gothico-Renaissance. adj. Qui est relatif à deux styles, gothique et Renaissance; qui mélange ces deux styles. En un style gothico-Renaissance édulcoré à souhait (GRANDJEAN, Orfèvr. XIXe s., 1962, p. 45). Gothico-roman. adj. Qui mélange styles roman et gothique. Autel gothico-roman (VERLAINE, Œuvres compl., t. 5, Confess., 1895, p. 56). b) [Le composé exprime des relations entre un lieu et une époque donnés] Gothico-messin. adj. Propre à la ville de Metz, au Moyen Âge. On trouve à Leipzig (...) un graduel écrit d'après la tradition gothico-messine (Bénédictins, Paléogr. mus., t. 3, 1889, p. 82). 2. Gothicisme, subst. masc. Tendance politique conservatrice s'opposant au libéralisme. Les feuilles ultra-libérales en France accusent le Conservateur de gothicisme (CHATEAUBR., Polém., 1818-27, p. 36). 3. Gothisme, subst. masc. Époque du style gothique; goût parfois excessif pour ce style. (Lar. 19e Suppl. 1878-Lar. 20e, QUILLET 1965). Ce mot prend des sens partic. chez certains auteurs. a) Goût pour les mythes populaires et moyenâgeux des Allemands, descendants des Goths. Faux gothisme [dans les œuvres de Wagner] (ROLLAND, J.-Chr., Révolte, 1907, p. 392). b) Attrait pour le style gothique et l'esprit de ses artistes qui préféraient l'art pour l'art à la recherche de la faveur du public. Il lui reste [à Lhote], malgré son gothisme, un peu de carriérisme indestructible (RIVIÈRE, Corresp. [avec Alain-Fournier], 1908, p. 33).
Prononc. et Orth. : []. Ds Ac. dep. 1718. Parfois gotique, en parlant du peuple ou de la langue (cf. SAUSSURE, loc. cit.); Étymol. et Hist. 1. 1482 gothicque « relatif aux Goths, au Moyen Âge » (FLAMENG, Passion de S. Didier, 65, Carnaudet ds DELB. Notes mss); spéc. 2. a) appliqué à la période artistique située entre l'Antiquité et la Renaissance 1615 (ETIENNE BINET, Essay sur les Merveilles de nature ds Fr. mod. t. 14, 1946, p. 284); 1626 (MARTELLANGE ds HOPE t. 1, p. 288, note 1); b) 1824 restreint à la période de l'art ogival adj. (DE CAUMONT, Essai sur l'architecture religieuse du moyen âge ds Mémoires de la Société des Antiquaires de la Normandie, Caen, 1re part., p. 540); 3. a) appliqué à la langue 1545 adj. gothique (J. BURCHET, Spit. fam. LXV, f° 44 ds DELB. Notes mss); 1840 subst. masc. (Ac. Compl. 1842); 1901 gotique (Nouv. Lar. ill.); b) appliqué à l'écriture 1585 (DU FAIL, Contes et discours d'Eutrapel, éd. J. Assézat, t. 2, p. 309 : lettres longues et gothiques); 1835 subst. fém. (Ac.). Empr. au b. lat. gothicus « relatif aux Goths » (FORC.) [dér. de Gothus, Goth], employé au XVe s. pour désigner l'écriture du Moyen Âge : cf. l'adv. gothice « d'une manière gothique » (1435-1444 LORENZO VALLA, Elegantiarum Latinae linguae libri sex ds FEW t. 16, p. 105, note 6); 2 prob. par l'intermédiaire de l'ital. gotico, les artistes de la Renaissance, notamment Raphaël dans une lettre célèbre à Léon X en 1519 (v. BRUNO MIGLIORINI, Lingua e cultura ds Nuova Biblioteca Italiana, 32, pp. 264-265), ayant enveloppé de mépris cette période artistique (HOPE t. 1, p. 288, note 1). La réaction fr. à cette proscription fut le fait de savants normands, inspirés des auteurs anglais qui avaient réagi contre cette tendance dès le début du XVIIIe s., et de Chateaubriand (FEW t. 16, p. 104b et note 8). Fréq. abs. littér. : 1 002. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 2 521, b) 1 159; XXe s. : a) 1 095, b) 829.
DÉR. Gothiquement, adv. a) En style gothique, dans un style qui imite le gothique. Il a exposé aussi une statuette en bois gothiquement moderne (HUYSMANS, Art mod., 1883, p. 265). b) En lettres gothiques. L'écriture gothiquement indéchiffrable [d'illustres paperasses] (GAUTIER, Fracasse, 1863, p. 225). []. 1res attest. 1534 Gotticquement « en lettres gothiques » (RABELAIS, Gargantua, éd. R. Calder, chap. 13, p. 96), à nouveau 1863 gothiquement (GAUTIER, loc. cit.), 1801 « à la façon gothique » (L.-B. PICARD, Théâtre, t. 3, Pte ville, p. 190); de gothique, suff. -ment2.
BBG. — HASLAG (J.) Gothic im siebzehnten und achtzehnten Jahrhundert. Köln-Graz, 1963, 203 p. - HOLBROOK (W.C). The Adjective gothique in the 18th century. Mod. Lang. Notes. 1941, t. 56, pp. 498-503. - NIES (F.). Die Semantische Aufwertung von fr. gothique vor Chateaubriand. Z. Rom. Philol. 1968, t. 84, pp. 67-88. - QUEM. DDL t. 6 (s.v. gothicisme); 17. - REY (A.). Le Lex. : images et modèles. Paris, 1977, p. 238; pp. 246-247. - VOSS (J.). Das Mittelalter im historischen Denken Frankreichs. München, 1972, 484 p.

gothique [gɔtik] adj. et n.
ÉTYM. 1440, « médiéval »; bas lat. gothicus « relatif aux Goths », du bas lat. Gothi. → Goth.
1 Vx et péj. Du moyen âge. Barbare, médiéval. || Les siècles gothiques.Par ext. Digne du moyen âge. Ancien, arriéré, suranné. || Langage gothique. Archaïsme (cit. 1).
1 On dirait que Ronsard, sur ses « pipeaux rustiques »,
Vient encor fredonner ses idylles gothiques (…)
Boileau, l'Art poétique, II.
2 Réhabilitations, mot (…) qui a fait vieillir et rendu gothique celui de lettres de noblesse (…)
La Bruyère, les Caractères, XIV, 3.
3 Les siècles gothiques nous ont laissé des monuments où la hardiesse et la majesté respirent à travers les ruines du goût et de l'élégance.
G.-T. Raynal, Hist. philosophique, XII, 19.
2 (1615; repris à l'ital. gotico, de même orig.). Vx. Se disait aux XVIIe et XVIIIe siècles, des Formes d'art connues en France entre la période de l'art antique et celle de l'art de la Renaissance, et que l'on croyait venir des Goths (y compris l'art nommé au début du XIXe siècle roman, appelé auparavant ancien gothique, gothique ancien). || L'art gothique et l'art classique.
4 (Tout s'y voyant) Assaisonné du sel de nos grâces antiques,
Et non du fade goût des ornements gothiques,
Ces monstres odieux des siècles ignorants (…)
Molière, la Gloire du Val-de-Grâce, 84.
5 On a entièrement abandonné l'ordre gothique (d'architecture…)
La Bruyère, les Caractères, I, 15.
6 Connaissez-vous l'architecture de nos vieilles églises, qu'on nomme gothique ? — Oui je la connais, on la trouve partout. — N'avez-vous pas remarqué ces roses, ces points, ces petits ornements coupés et sans dessein suivi, enfin tous ces colifichets dont elle est pleine ? (…) L'architecture grecque est bien plus simple : elle n'admet que les ornements majestueux et naturels; on n'y voit rien que de grand, de proportionné, de mis en place. Cette architecture, qu'on appelle gothique, nous est venue des Arabes.
Fénelon, Dialogue sur l'éloquence, II.
7 Architecture gothique est celle qui s'éloigne des proportions et du caractère de l'antique (…) L'Architecture gothique est souvent très solide, très pesante et très massive, et quelquefois au contraire, extrêmement déliée, délicate et riche. Son principal caractère est d'être chargée d'ornements qui n'ont ni goût ni justesse (…) Toutes les anciennes cathédrales sont d'une architecture gothique.
Encycl. (Diderot), 1757, art. Gothique.
3 Mod. || Style gothique : style d'architecture et de décoration, répandu en Europe du XIIe siècle au XVIe siècle, qui a fleuri entre le style roman et le style Renaissance, d'abord dans l'île-de-France, caractérisé notamment par l'emploi de l'ogive. || Architecture gothique, anciennement nommée ogivale. || Caractères de l'architecture gothique. Arc (brisé), arc-boutant, clef, ogive (→ Arc-doubleau, cit.; éprouver, cit. 22). || Notre-Dame de Paris, cathédrale gothique. || Vaisseau gothique à flèche élevée (→ Cathédrale, cit. 1). || Église gothique (→ Flamme, cit. 2). || La prodigieuse efflorescence (cit. 3) de l'art gothique dans la cathédrale de Burgos. || Fenêtre, portail gothique. || Réhabilitation et vogue du style gothique pendant le romantisme (→ Décolorer, cit. 2, Hugo). — Sculpture, statue gothique. || Peinture, miniature, orfèvrerie, vitraux gothiques.REM. Justement critiquée par les archéologues du début du XIXe s., qui lui préfèrent ogival, cette dénomination a triomphé (→ ci-dessous, cit. 10, Hugo); un autre terme concurrent, sarrazin (→ ci-dessous, cit. 8.1) n'a pas vécu longtemps. Le concept s'est opposé à byzantin, puis à roman.
8 Les forêts des Gaules ont passé à leur tour dans les temples de nos pères, et nos bois de chênes ont ainsi maintenu leur origine sacrée. Ces voûtes ciselées en feuillages, ces jambages qui appuient les murs et finissent brusquement comme des troncs brisés, la fraîcheur des voûtes, les ténèbres du sanctuaire, les ailes obscures, les passages secrets, les portes abaissées, tout retrace les labyrinthes des bois dans l'église gothique; tout en fait sentir la religieuse horreur, les mystères et la divinité.
Chateaubriand, le Génie du christianisme, III, I, VIII.
8.1 C'est principalement cette architecture (à ogives) qui avait reçu le nom de gothique, et rien n'est plus impropre qu'une pareille dénomination (…) les Goths, les Vandales et les autres peuples barbares n'ont jamais eu d'architecture à eux, ils n'ont fait qu'imiter les constructions romaines, et d'ailleurs les nations gothiques avaient disparu depuis longtemps de la scène du monde, quand le style ogival a commencé à s'y montrer (… en note). La dénomination de gothique avait été employée (…) pour qualifier tout genre d'architecture qui s'éloignait des principes de l'architecture grecque et romaine (…) Mais ce n'est pas seulement par le nom de gothique que l'on désigne ordinairement l'architecture à ogives (… d'autres) l'appellent architecture Sarrazine; pour d'autres (…) c'est le style oriental.
A. de Caumont, Cours d'antiquités monumentales, t. IV, p. 43 (1834).
9 (…) cette hardie et légère architecture, qu'on appelle gothique, et qui n'exprime en effet, que l'élan mystique du christianisme au moyen âge.
Michelet, Hist. de France, II, I.
10 Le mot gothique, dans le sens où on l'emploie généralement, est parfaitement impropre, mais parfaitement consacré. Nous l'acceptons donc, et nous l'adoptons, comme tout le monde, pour caractériser l'architecture de la seconde moitié du moyen âge, celle dont l'ogive est le principe, qui succède à l'architecture de la première période, dont le plein cintre est le générateur.
Hugo, Notre-Dame de Paris, I, I, note.
11 La cathédrale de Salisbury, toute gothique, a une flèche merveilleusement élancée; l'intérieur est un peu simple; il y a trop de nudité; mais en somme, que d'élégance et de grandeur !
Sainte-Beuve, Correspondance, 52, 12 sept. 1828.
12 La nuit. La pluie. Un ciel blafard que déchiquette
De flèches et de tours à jour la silhouette
D'une ville gothique éteinte au lointain gris.
Verlaine, Poèmes saturniens, « Effet de nuit ».
13 Cet édifice (…) était le dernier monument du moyen âge, la dernière fusée lancée par le style gothique flamboyant, par le gothique déchu mais exaspéré de mourir (…)
Huysmans, la Cathédrale, p. 406.
14 Devant notre art médiéval, l'Asiatique a l'impression d'impudeur, et bien plus vive que devant les nus de la Grèce : l'art gothique a démasqué l'homme.
Malraux, les Voix du silence, p. 219.
Par ext. || Architecte, peintre gothique. || Ferronniers romans et gothiques (→ Ferronnerie, cit. 1).N. m. (surtout plur.). || Les gothiques : les artistes gothiques (→ Fermer, cit. 39).
N. m. (1718). || Le gothique : le style, l'art gothique. || Les flèches déchiquetées du gothique. Chant, cit. 3. Vx. || Gothique ancien, premier gothique : le roman. || Gothique tardif (XIVe-XVe siècles). || Gothique rayonnant. || Gothique flamboyant ( Élancement, cit. 1). || Le gothique perpendiculaire anglais. || La mode romantique du gothique ( Faux, cit. 9).
14.1 Le gothique est venu avec ses élans vers le ciel, sa nervosité, sa fièvre (…)
J. Green, Journal, Vers l'invisible, 22 mars 1962.
Faux gothique : style néo-gothique du début du XIXe siècle. Néo-gothique.
4 (1617). || Écriture gothique : écriture à caractères droits, à angles et à crochets, qui remplaça vers le XIIe siècle l'écriture romane. || Écriture semi-gothique ou gothique onciale. || Caractères gothiques (→ Entremêler, cit. 5).N. f. (XIXe). || La gothique : l'écriture gothique. || Écrire en gothique. || La gothique, restée longtemps en usage en Allemagne, tend à disparaître et ne se rencontre plus guère que manuscrite.
15 À ces mots il saisit un vieil « Infortiat » (…)
Inutile ramas de gothique écriture (…)
Boileau, le Lutrin, V.
5 N. m. (1690, langue gothique). || Le gothique (vx) : langue des Goths. Gotique.
6 Hist. Qui correspond à l'époque du triomphe de l'art gothique (XIIIe-XVe siècle). || Le monde, la civilisation, l'époque gothique.
7 a Littér. (Empr. à l'angl. gothic novel). || Roman gothique : type de récit, à la mode en Angleterre à partir de 1760, puis dans l'Europe romantique, à thèmes mystérieux et terrifiants (Horace Walpole, Ann Radcliffe, Lewis…).
b (Repris à l'angl. gothic, après le gothic revival de 1869, et surtout de l'évolution du mouvement aux États-Unis et en Grande-Bretagne, après 1960 [écrit gothick en anglais britannique]). Mouvement à tendance macabre, parfois satanique et empreint de sorcellerie, mis en œuvre par certains récits et films anglo-saxons, et suscitant des attitudes et des pratiques chez les adolescents.
DÉR. Gothicisme, gothiquement, gothisme.
HOM. Gotique.

Encyclopédie Universelle. 2012.