hardi, ie [ 'ardi ] adj.
1 ♦ Qui manifeste, dénote un tempérament, un esprit prompt à oser sans se laisser intimider. ⇒ audacieux, aventureux, brave, courageux, déterminé, énergique, entreprenant, intrépide, résolu. Guerriers hardis. Hardi à l'excès. ⇒ risque-tout, téméraire. « Plus hardi à faire qu'à parler » (Bossuet).
♢ Contenance fière et hardie. ⇒ assuré, décidé. Entreprise hardie. Un projet particulièrement hardi. Faire une réponse hardie.
♢ Blas. Coq hardi, figuré la patte levée et le bec ouvert.
2 ♦ Péj. et vieilli ⇒ effronté, impudent, insolent. « Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage ? » (La Fontaine). Un hardi coquin. Un mensonge hardi.
♢ Spécialt ⇒ impudique, provocant. Une fille hardie. — Vous ne trouvez pas ce passage un peu hardi ? ⇒ leste, osé, risqué.
3 ♦ Qui est audacieux avec bonheur. ⇒ 2. original; nouveau. « Un talent hardi et novateur » (Romains) . Une métaphore hardie.
♢ Qui a qqch. de franc et d'aisé dans son audace. Une touche hardie. La flèche hardie de cette église gothique.
4 ♦ Interj. HARDI ! Formule servant à encourager et pousser en avant. ⇒ courage. Hardi, les gars ! Hardi, petit !
⊗ CONTR. Lâche, peureux, timide, timoré. Modeste. Banal, 1. plat, 1. terne.
hardi, ie
adj. et Interj.
rI./r adj.
d1./d Audacieux, entreprenant, intrépide. Ant. craintif, timide, timoré.
|| Qui dénote de l'assurance, de l'audace. Une entreprise hardie. Une mine hardie.
d2./d Qui est d'une originalité audacieuse. Proposition hardie.
d3./d Libre, franc, aisé. Coup de pinceau hardi.
rII./r Interj. (Employée pour encourager.) Hardi, les gars!
⇒HARDI, -IE, adj., interj., adv. et subst. masc.
I. Adjectif
A. — [Avec valeur laudative].
1. a) [En parlant d'une pers.] Qui prend l'initiative dans des entreprises hasardeuses, risquées; avec un sens atténué qui a de l'assurance. Monsieur de Villefort, voulez-vous me permettre de vous présenter mon ami, M. le baron Danglars, un de nos plus hardis spéculateurs, pour qui la Bourse a eu vingt Austerlitz (DUMAS père, Monte-Cristo, 1848, IV, 8, p. 110). Il avait deviné, croyait-elle, qu'il la blesserait en devenant plus hardi (MAUPASS., Mt-Oriol, 1887, p. 105). Même les saints, même les plus hardis héros, ont connu des heures de défaillance, de retombement et de doute (GIDE, Journal, 1934, p. 1210) :
• 1. Ce n'était plus Marius le rêveur enthousiaste, l'homme résolu, ardent et ferme, le hardi provocateur de la destinée, le cerveau qui échafaudait avenir sur avenir, le jeune esprit encombré de plans, de projets, de fiertés, d'idées et de volontés; c'était un chien perdu.
HUGO, Misér., t. 1, 1862, p. 865.
SYNT. Hardi aventurier, capitaine, chasseur, chevalier, constructeur, corsaire, dompteur, lutteur, marin, montagnard, novateur, pionnier, précurseur, voyageur, défenseur; homme, peuple, réformateur hardi; nation hardie.
♦ Hardi à, (plus rarement) pour + inf. Il [l'enfant] était fort, turbulent, hardi pour grimper dans les arbres (MAUPASS., Une vie, 1883, p. 205). Hardies souvent à mal faire, les femmes sont gauches quand s'offre l'instant de se montrer émues et simples (COLETTE, Chambre d'hôtel, 1940, p. 92).
— En partic. [En parlant d'un joueur] Qui joue gros jeu sans crainte; qui tient longtemps avec un petit jeu. C'est un hardi joueur. Être hardi au jeu (Ac.).
— Emploi subst. masc. Il ne sera pas dit (...) que, questionné, j'aurai balbutié. Le hardi qui fait peur, muet, ferait pitié (HUGO, Légende, t. 1, 1859, p. 278).
♦ Emploi subst. masc. à valeur de neutre. L'année suivante (1675), il [Villars] continua de servir sa Flandre sous Condé encore, puis sous Luxembourg, l'un de ses maîtres pour le brillant et le hardi comme pour le bonheur (SAINTE-BEUVE, Caus. lundi, t. 13, 1851-62, p. 50). Les histoires de garçons perdus qui vous mettent à la fois du mou et du hardi au cœur [au cinéma] (ARNOUX, Paris, 1939, p. 307).
— P. anal. [En parlant d'un animal] En hiver, pressé par la faim, sa lâcheté l'abandonne et il [le loup] devient très hardi, s'attaquant à l'homme même (COUPIN, Animaux de nos pays, 1909, p. 27). Des coqs hardis, toujours en humeur d'envahir (PESQUIDOUX, Livre raison, 1925, p. 144).
♦ CHASSE (fauconn.). [En parlant d'un oiseau de proie] Qui a du goût pour la chasse. (Dict. XIXe et XXe s.).
♦ HÉRALD. Coq hardi. Coq représenté une patte levée, le bec ouvert. (Dict. XXe s.).
b) P. ext.
— [En parlant de la manière d'être physique ou morale d'une pers.] Assuré, ferme. Air, caractère hardi; aisance, allure, candeur, contenance, démarche, mine hardie. Jeanne avait alors dix-huit ans. Elle était belle de cette beauté hardie et fière qui semble être l'apanage exclusif des vieilles races (PONSON DU TERR., Rocambole, t. 1, 1859, p. 165). M. Leconte de Lisle porte en jeune homme ses soixante-cinq ans, et à contempler sa large tête hâlée, ses traits hardis et réguliers, (...) on dirait plutôt un Breton, et un dur Breton, qu'un créole (VERLAINE, Œuvres compl., t. 5, Vingt-sept biogr. (Leconte de Lisle), 1896, p. 289). Il leur expliqua, avec une franchise naïve et hardie, que la vie serait sans plaisir pour lui et sans utilité pour le parti s'il ne pouvait « jouer le grand jeu » (MAUROIS, Disraëli, 1927, p. 193) :
• 2. ... elle était championne internationale de golf, elle avait beaucoup voyagé; ses cheveux courts, son chemisier bien coupé, sa large jupe à plis creux, son allure sportive, sa voix hardie dénotaient qu'elle avait grandi très loin de Saint-Thomas-d'Aquin...
BEAUVOIR, Mém. j. fille, 1958, p. 152.
— [En parlant d'une chose] Qui dénote ou demande de la force, de la fermeté, du goût pour le risque. Coup, plan, projet, stratagème hardi; conception, démarche, expérience, idée, innovation, résolution, tentative, prévision(s) hardie(s). Le Sénat (...) n'est point l'ennemi des nouveautés généreuses ni des hardies initiatives (Fondateurs 3e Républ., Ferry, 1893, p. 311). Le voyage en auto Alger-Le Cap (...) à travers le Sahara n'est point un fait nouveau, mais c'est tout de même une entreprise hardie, pleine de difficultés et de hasards (Le Monde, 19 janv. 1951, p. 7, col. 5) :
• 3. Le règne de Louis XVI s'ouvrit par deux décisions (...). La première fut d'appeler au ministère M. de Maurepas. Elle déplut à l'opinion publique, désappointée de voir revenir, alors qu'elle souhaitait une politique hardie et jeune, un ministre d'État de soixante-treize ans, élevé dans les traditions de l'ancienne cour...
MAUROIS, Mes songes, 1933, p. 110.
2. En partic.
a) Domaine de la vie intellectuelle
— [En parlant de l'expression d'un écrivain, d'un style, d'une figure de style] Qui est au-dessus des règles communes; qui est hasardé, audacieux avec bonheur. Image, métaphore hardie. Morellet, dont la plume éloquente et hardie Plaida pour le malheur devant la tyrannie (MICHAUD, Printemps proscrit, 1803, p. 57). Loin de moi le vulgaire odieux! Et d'un vaillant effort, s'il plaît aux Dieux, J'en veux polir, dans mes rimes hardies, Autant qu'Homère, esprit mélodieux, En son poëme a fait de rhapsodies (BANVILLE, Cariat., 1842, p. 179) :
• 4. Je relis une fois de plus Cinna avec un ravissement et une admiration extrêmes (...). Écrivit-il [Corneille] jamais vers plus denses, d'une sonorité plus belle, d'une syntaxe plus hardie?
GIDE, Journal, 1941, p. 71.
— [En parlant d'une thèse, d'une doctrine, d'une opinion] Qu'il est ambitieux, difficile ou dangereux de soutenir. Hypothèse, paradoxe hardi(e). Il n'y a pas d'opinion si hardie en théologie, en politique ou en littérature, qui ne soit exposée et défendue avec la plus grande vigueur (DELÉCLUZE, Journal, 1827, p. 393). Un platonisme trop hardi [serait] celui qui penserait que les idées donnent la vie; au lieu que la vie est donnée, et que c'est alors que les idées la peuvent aider (ALAIN, Propos, 1924, p. 601). Peut-être la coopération de l'homme à la procréation deviendra-t-elle un jour inutile (...) mais rien n'autorise une anticipation si hardie (BEAUVOIR, Deux. sexe, t. 1, 1949, p. 42).
b) Domaine de l'art et des réalisations demandant une maîtrise particulière. Qui ne manifeste ou n'exprime aucune hésitation, aucune timidité. Ce musicien a le jeu hardi (Ac.). Ce chirurgien a la main hardie (Ac. 1932). Il me contait que ses improvisations [de Chopin] étaient beaucoup plus hardies que ses compositions achevées (DELACROIX, Journal, 1853, p. 22). Rien n'y sentait la peine [dans La Caravane de Boucher]; la touche était hardie et spirituelle; on discernait partout le grand maître (NOLHAC, Boucher, 1907, p. 192). La pointe libre, hardie, impatiente de Castiglione (FOCILLON, Maîtres estampe, 1930, p. 83) :
• 5. Nous voyons dans cette œuvre [La Bataille d'Hastings de Debon] toutes sortes d'excellentes choses; — une belle couleur, la recherche sincère de la vérité, et la facilité hardie de composition qui fait les peintres d'histoire.
BAUDEL., Salon, 1845, p. 30.
— [En parlant d'une réalisation] Qui semble être à la limite des possibilités de la technique; qui défie le sens commun; qui a un caractère extraordinaire. Clocher, pilier, viaduc hardi; arche, flèche, nef, passerelle, voûte hardie. [La vallée de Gondo] Après avoir traversé des ponts hardis, des souterrains prodigieux, car il y en a un où tout le poids de la montagne porte sur une pile de maçonnerie, ou parvient à une région un peu moins resserrée (GAUTIER, Italia, 1852, p. 27). Les plafonds hardis que peignit Corrège à la bibliothèque et au dôme de Parme (FAURE, Hist. art, 1914, p. 421).
♦ P. anal. Promontoire hardi; chutes hardies. Des ruisseaux de cristal circulent et bondissent parmi ces gorges, dont les contours sont hardis sans âpreté (SAND, Lettres voy., 1837, p. 32). Les escarpements hardis du cap Roux (ÉLIE DE BEAUMONT, Stratigraphie, 1869, p. 321).
B. — [Avec valeur péj.]
1. a) [En parlant d'une pers.] Effronté, insolent; téméraire. Dites donc, madame, je vous trouve hardie d'oser lever les yeux sur moi quand vous avez un amant chez vous! (HUGO, Angelo, 1835, p. 56). [Le peuple parisien] une race de gens petite, sèche, maigre, pâle, hardie et sans gêne (ERCKM.-CHATR. Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 40). V. déluré ex. 1 :
• 6. Pour une petite fille qui affecte la dévotion, je vous trouve bien hardie dans vos propos. Tenez-vous Monsieur le Curé au courant de ces préoccupations étranges?
MAURIAC, Asmodée, 1938, II, 4, p. 73.
♦ Hardi(e) comme un page. C'est une jeune fille intelligente, mais hardie comme un page et dont il ne faut imiter ni les manières de garçon, ni la coiffure (COLETTE, Cl. école, 1900, p. 197).
b) P. ext.
— [Surtout en parlant de la manière d'être extérieure d'une pers.] Regard, sourire, ton hardi; gestes, mains, manières hardi(e)s. Les danseurs espagnols, quoique médiocres, ont un air cavalier, galant et hardi, que je préfère de beaucoup aux grâces équivoques et fades des nôtres (GAUTIER, Tra los montes, 1843, p. 286). Autrefois belle, encore galante avec les pêcheurs, elle a des moustaches à présent, une carrure d'homme et la réplique hardie (LOTI, Pêch. Isl., 1886, p. 213).
— Provocant. Une femme hardie; un décolleté hardi; des manières, des œillades, des postures hardies. Il aperçut Mme Pélussin, forte personne qui promenait des appas hardis dans une toilette tapageuse (VOGÜÉ, Morts, 1899, p. 60) :
• 7. Un visage adorné d'un éclat non pareil,
Un front d'ivoire mat et des yeux de soleil;
Puis un hardi corsage, et, sur un flanc qui ploie,
Des cheveux soyeux, pleins de délire et de joie...
BANVILLE, Cariat., 1842, p. 53.
2. En partic. [En parlant de paroles, d'écrits] Libre, à la limite de l'inconvenance. Synon. osé. Passage, propos, sous-entendus hardis; scène hardie. Il est très-vrai qu'il faut une clef pour plusieurs livres hardis du XVIe siècle (SAINTE-BEUVE, Nouv. lundis, t. 8, 1864, p. 39). Les mots hardis, les gauloiseries, les allusions graveleuses le faisaient rougir si vite que le Dr Barbesol l'avait surnommé le thermomètre de la pudeur (MAUPASS., Contes et nouv., t. 2, Rosier Mme Husson, 1887, p. 688) :
• 8. Il [un ancien religieux] me dit que là où il était, cinq pour cent seulement des religieux connaissaient la vie d'union avec Dieu. Ceux qui n'ont pas cette expérience mystique s'embourgeoisent dans une vie spirituelle toute faite, dans le ronron des psaumes, luttent contre la chair, ce qui les contraint d'y songer, et s'en tirent par des plaisanteries hardies qui les dédommagent un peu.
GREEN, Journal, 1955-58, p. 26.
♦ Cela est bien hardi. [Pour exprimer le fait qu'une liberté dans l'expression n'est pas approuvée par la critique qui n'ose pas non plus la condamner (d'apr. Ac.)]
II. — Interj. [Sert à exciter ou à encourager une pers. ou un groupe de pers. dans une tâche ou une action difficile et/ou dangereuse] Hardi les gars! Je finis par distinguer une canonnière arrêtée au pont de Bercy et s'efforçant de remonter le courant (...). Enfin un effort suprême la poussa en avant. Hardi, garçons!... (A. DAUDET, Contes lundi, 1873, p. 178). Dès que la cloche annonça la reprise des hostilités, ils se mirent à la poursuite des deux enfants pour les percuter. Et hardi! (QUENEAU, Pierrot, 1942, p. 21) :
• 9. [Le père Antiq :] — ... hardi! arrache les grosses pierres, construis-en des murs, retourne-toi les ongles (...) M. Mistre est là qui te surveille.
ARÈNE, Tor Entrays, 1876, p. 157.
— [Avec un sens atténué] Hardi petit!, loc. interjective. Plampougnis (...) était bâti pour ne rien craindre de ce qui pourrait lui venir à la rencontre. Il aurait vu trois malandrins sortir de ce hallier, sans balancer il leur aurait fait face. On retrousse ses manches, on arrache quelque branche, quelque baliveau, et hardi petit, mon ami! (POURRAT, Gaspard, 1922, p. 90). Je la rencontre dans la rue, la donzelle, sous la pluie (...) et trottant, hardi petit! (H. BAZIN, Lève-toi, 1952, p. 59).
III. — Adv., vx, pop. Beaucoup. Il n'y aura pas hardi de poisson au marché. — Il vente trop dur (HUGO, Travaill. mer, 1866, p. 67).
IV.— Subst. masc., NUMISM. Monnaie frappée sous le règne de Louis XI, dont le type représente de face, le buste royal et au revers une croix et d'autres figures ou inscriptions. Au nom de Louis XI qui décréta que les hardis d'un denier en valaient trois, au nom de Henri II, lequel fit des henris d'or qui étaient en plomb; pendant cinq siècles, on a bouilli vifs les faux monnayeurs (HUGO, Paris, 1867, p. 33).
Prononc. et Orth. : [] init. asp. Att. ds. Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. Adj. 1. Ca 1100 « vaillant, courageux » (Roland, éd. J. Bédier, 2027); 2. 1160-74 fol hardi « téméraire » (WACE, Rou, éd. A.J. Holden, II, 4364); ca 1255 « impudent, insolent » (Recueil actes 12e s.-13e s., éd. M. Tailliar, 224); 3. av. 1648 « qui est audacieux avec bonheur (spéc. dans le domaine de l'intelligence et de l'art) » (VOITURE, Lettres, 5 ds LITTRÉ). II. Interj. 1660 (MOLIÈRE, Sganarelle, XXI). Part. passé d'un a. verbe hardir, proprement « rendre dur » d'où « rendre courageux », lequel est issu de l'a.b.frq. hardjan « rendre dur », dér. de l'adj. hart « dur » (cf. all. hart « id. »). Fréq. abs. littér. : 2 084. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 3 737, b) 3 699; XXe s. : a) 2 565, b) 2 148. Bbg. HOLLYMAN 1957, p. 134. - MEILLER (A.). L'Expr. si hardi ds qq. textes du XVe s. Trav. Ling. Litt. Strasbourg. 1967, t. 5, n° 1, pp. 220-223. - VENCKELEER (T.). Le Sort des mots d'orig. germ... In : Congrès Internat. de Ling. et Philol. Rom. 13. 1971. Québec, 1976, t. 2, pp. 17-20.
hardi, ie ['aʀdi] adj.
ÉTYM. 1080; p. p. de l'anc. franç. hardir « rendre, devenir dur, hardi »; du francique hardjan « durcir », de l'adj. hart « dur »; cf. all. hart « dur », et härten « durcir ».
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1 a (Personnes). Qui manifeste, exprime, dénote un tempérament, un esprit prompt à oser sans se laisser intimider. ⇒ Audacieux, aventureux, brave, courageux, décidé, déterminé, énergique, entreprenant, intrépide, résolu. — Vieilli (en parlant du courage militaire). || Soldats, cavaliers, guerriers hardis (→ Abord, cit. 2; éclaireur, cit. 2; frapper, cit. 18). — Mod. || Être hardi, entreprenant. || Caractère hardi (→ Emportement, cit. 8; gascon, cit. 2). || Hardi à l'excès. ⇒ Présomptueux, risque-tout, téméraire. || Un hardi réformateur. || Hardi comme un lion. || Animal hardi (→ Besoin, cit. 10; faucon, cit. 3). — Le plus hardi. || Ce qui effraie les plus hardis. → Effarer, cit. 7; exécuter, cit. 7.
1 Un d'eux, le plus hardi, mais non pas le plus sage (…)
La Fontaine, Fables, VI, 4.
2 L'obscurité de la nuit semblait favorable à Charles; il prend son parti sur le champ : il se jette dans le fossé, accompagné des plus hardis, et suivi en un instant de tout le reste (…)
Voltaire, Hist. de Charles XII, VIII.
3 Plusieurs étaient plus hardis; ils parlaient haut, fort et ferme, remettaient le Roi à sa place.
Michelet, Hist. de la Révolution franç., Introd., II, §VIII.
4 Et comme elle n'était pas femme à reculer devant le diable, étant corporée comme un laboureur et hardie comme un soldat, elle s'avança tout auprès de lui, décidée qu'elle était à lui ôter ou tomber son chapeau pour voir si c'était un loup-garou ou un homme baptisé.
G. Sand, François le Champi, XVII.
♦ Spécialt (blason). || Coq hardi, figuré la patte levée et le bec ouvert. || Au Coq Hardi, enseigne de nombreuses auberges.
5 Mais qu'un traître, qui n'est hardi qu'à m'offenser (…)
Racine, Mithridate, II, 4.
6 (…) celui-là (Turenne) d'un air plus froid sans jamais rien avoir de lent, plus hardi à faire qu'à parler (…)
Bossuet, Oraison funèbre du Prince de Condé.
♦ N. m. || Philippe le Hardi, surnom de Philippe III, fils de Saint Louis.
b (1273). Choses. Mod. Qui dénote de l'audace et du courage. || Avoir la mine hardie. || Contenance fière et hardie. ⇒ Assuré, décidé. || Regard hardi.
7 Chez d'autres, un menton comme le sien paraîtrait « volontaire ». Chez lui, ce n'est qu'une saillie maladroite (…) Son nez, dans un autre visage, serait hardi et sensuel. Dans le sien, il est indiscret.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. II, I, p. 5.
♦ Qui demande de l'audace et du courage. || Action, entreprise hardie. || Attaque, marche hardie. || Un projet particulièrement hardi. || Tenter, réussir un coup hardi. || Spéculations hardies. || Faire une réponse hardie. || S'adresser à qqn d'une façon à la fois respectueuse et hardie (→ Galanterie, cit. 15).
8 Il eut sur-le-champ l'idée hardie de lui baiser la main. Bientôt il eut peur de son idée (…)
Stendhal, le Rouge et le Noir, I, VI.
♦ (1690, Furetière). Spécialt (en parlant de doctrines qu'il est dangereux de soutenir). || Mettre en avant les idées les plus hardies. || Il est seul à avoir pris sur ce problème une position aussi hardie.
9 (…) Collins, magistrat de Londres, auteur du livre De la Liberté de penser, et de plusieurs autres ouvrages aussi hardis que philosophiques.
Voltaire, Étude de la philos. de Newton, I, IV.
10 Le jeune diacre (…) assura qu'il fréquentait beaucoup le Père, qu'il était au courant de son évolution et que son traité serait beaucoup plus hardi encore et n'aurait sans doute pas l'imprimatur.
Camus, la Peste, p. 249.
2 (V. 1283). Péj. et vieilli. ⇒ Effronté, impudent, insolent. || « Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage (cit. 1) ? » (La Fontaine). || Des gens aventuriers (cit. 11) et hardis. || Un hardi menteur (→ 1. Être, cit. 32). ☑ Hardi comme un page (→ Faubourg, cit. 5). || Une commère hardie.
11 Et quoiqu'il eût reçu avec une extrême piété le viatique (…) et que la Gazette même en eût informé tout le public, ils n'en furent pas moins hardis à publier qu'il était mort sans vouloir recevoir ses sacrements.
Racine, Port-Royal, I.
12 Bahorel était un être de bonne humeur et de mauvaise compagnie, brave, panier percé, prodigue et rencontrant la générosité, bavard et rencontrant l'éloquence, hardi et rencontrant l'effronterie (…)
Hugo, les Misérables, III, IV, I.
♦ (1657, Pascal). Vieilli. Qui dénote un caractère effronté, insolent. ⇒ Cavalier. || Dévisager qqn d'un air hardi. || Se camper dans une attitude hardie. || Un mensonge hardi. || Rien n'est trop hardi pour ses calomniateurs (cit. 1). || Tiroirs forcés (cit. 1) par des mains hardies.
13 Quoi ? le traître sur vous porte ses mains hardies ?
Racine, Esther, III, 6.
14 (…) si tu n'avais point le regard si hardi et si moqueur, on aimerait être bien vu de ces yeux-là.
G. Sand, la Petite Fadette, XIX.
♦ Vx. ⇒ Impudique, provocant. || Femmes hardies, dont le front (cit. 11) ne rougit jamais. || Une fille hardie. — (Actions). || Grandes garces (cit. 2) aux œillades hardies. || Manières hardies et impudiques. || Décolleté hardi. ⇒ Audacieux.
15 Les trois autres, moins timides (…) étaient décolletées tout net, ce qui, l'été (…) a beaucoup de grâce et d'agacerie; mais à côté de ces ajustements hardis, le canezou de la blonde Fantine (…) semblait une trouvaille provocante de la décence (…)
Hugo, les Misérables, I, III, III.
♦ Mod. (en parlant de propos, d'écrits quelque peu libres sans être vraiment inconvenants). ⇒ Audacieux, gaillard, leste, osé, risqué. || Glisser des allusions, des sous-entendus hardis. || Vous ne trouvez pas ce passage un peu hardi ?
3 (Av. 1648, Voiture). Qui est audacieux avec bonheur (surtout dans le domaine de l'expression, de l'art). ⇒ Original; nouveau. || Une expression hardie. || Comparaisons, images, figures, métaphores hardies (→ Fertile, cit. 7). || Style, plume, manière hardie. || Pensée profonde et hardie (→ Farce, cit. 3). || Imagination hardie.
16 Je n'ai pu entendre l'oraison funèbre de Monsieur de Meaux (celle de la Princesse Palatine) elle a passé ici et à Paris pour l'une des plus belles qu'il ait faites et même que l'on puisse faire. Il y eut de très beaux traits, fort hardis, et le sublime y régna en bien des endroits (…)
La Bruyère, Lettre à Condé, 18 août 1685.
17 (…) et les écrivains de talent qui, venant après les écrivains de génie, renouvellent la langue par l'emploi nouveau et hardi qu'ils font des mots. Tel a voulu être Rivarol (…) je crois Chateaubriand un artiste de style bien autrement heureux, énergique et hardi, que Rivarol.
18 (…) les conceptions de Turpin témoignaient d'un talent hardi et novateur (…)
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. V, XXVII, p. 282.
♦ Qui a quelque chose de franc et d'aisé dans son audace. || Peintre au pinceau hardi. || Ciseau hardi (→ Fouiller, cit. 8). || Une touche hardie. || Le jeu brillant et hardi d'un virtuose. — Arche, voûte hardie conçue par un architecte, un ingénieur. || La flèche (cit. 17) hardie de cette église gothique (cit. 9). || Monument d'une élégance hardie.
19 Au moyen du dôme, inconnu des anciens, la religion a fait un heureux mélange de ce que l'ordre gothique a de hardi, et de ce que les ordres grecs ont de simple et de gracieux (…)
Chateaubriand, le Génie du christianisme, III, I, VI.
4 ☑ Loc. interj. (1660, Molière). Hardi !, expression servant à animer, à encourager et pousser en avant. || Hardi, les gars ! ⇒ Courage. Fam. || Hardi petit !, formule qui renforce hardi ! — REM. Employé seul, hardi ! est archaïque.
20 Là, hardi ! tâche à faire un effort généreux (…)
Molière, Sganarelle, 21.
21 — Hardi ! encore des pavés ! encore des tonneaux ! (…) une hottée de plâtras pour me boucher ce trou-là. C'est tout petit, votre barricade. Il faut que ça monte.
Hugo, les Misérables, IV, XII, IV.
➪ tableau Principales interjections.
B Adv. (Av. 1885, Hugo). Régional (îles Anglo-Normandes). Fam. Pop. et vx. Beaucoup. || Hardi de fleurs : beaucoup de fleurs.
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CONTR. (Du sens A, 1) Capon, couard, lâche, peureux, pusillanime, timide. — Embarrassé, modeste, réservé. — (Du sens A, 3) Banal, plat, terne.
DÉR. Hardiesse, hardiment.
COMP. Enhardir.
Encyclopédie Universelle. 2012.