DÉMOGRAPHIE
Science de la population, la démographie a vu depuis la fin du dernier conflit mondial se préciser et s’affiner ses méthodes propres, s’élargir le champ de ses investigations et croître le nombre des chercheurs qui lui consacrent tout ou partie de leur activité. Elle a définitivement acquis son autonomie, consacrée par la création d’un enseignement spécifique dans les universités de nombreux pays. Enfin, ses techniques et ses résultats, appliqués à des domaines de plus en plus variés, attestent la place désormais reconnue qu’elle occupe dans la cité.
Une telle croissance ne saurait être comprise hors du mouvement général des sciences, mathématiques et sciences humaines, avec lesquelles la démographie entretient d’étroits rapports, et hors des transformations rapides de la société contemporaine, résultant des progrès accumulés. Les circonstances qui ont présidé à son apparition tardive en tant que discipline indépendante expliquent aujourd’hui son développement.
L’enregistrement des faits d’état civil, la pratique des recensements, puis les progrès des mathématiques et du calcul des probabilités, étaient nécessaires pour lui fournir un matériel d’observation suffisamment précis et sûr, et lui permettre d’élaborer une théorie scientifique. En outre, l’évolution démographique elle-même pose des problèmes qui ne peuvent être ignorés. La baisse de la mortalité et la croissance de la population, puis, avec un décalage dans le temps plus ou moins long selon les pays, la limitation volontaire des naissances, enfin l’invention récente de procédés contraceptifs plus efficaces ont fait entrer l’humanité dans une phase nouvelle, où elle devient en quelque sorte maîtresse de son destin. À un état stationnaire ou à une croissance modérée sur une très longue période, à un équilibre millénaire a succédé une phase de transition, chargée d’interrogations. L’humanité est à la recherche d’un nouvel équilibre.
Mais l’importance et l’urgence des problèmes en cause n’imposent que plus de prudence au chercheur. La politique démographique et ses effets éventuels offrent au démographe un thème de réflexions, mais il importe au plus haut point que les deux plans de la connaissance et de l’action ne soient pas confondus.
1. Objet de la démographie
La démographie est «une science ayant pour objet l’étude des populations humaines, et traitant de leur dimension, de leur structure, de leur évolution et de leurs caractères généraux, envisagés principalement d’un point de vue quantitatif» (Dictionnaire démographique multilingue , Nations unies). Elle procède donc à une description numérique des populations, sous un double aspect, statique et dynamique, en étudiant l’«état de la population» et le «mouvement de la population». Cette description constitue la démographie pure, ou encore théorique, ou statistique. Comptabilité d’hommes, elle enregistre leur nombre et ses variations, elle est une branche des mathématiques, «l’étude des ensembles renouvelés». Faisant le plus large appel à la statistique, sa méthode spécifique est l’analyse quantitative appliquée aux populations humaines, l’analyse démographique.
Mais, comme toute science, la démographie ne se propose pas seulement de décrire les phénomènes. Il lui faut tenter de les expliquer, d’en déterminer les causes et d’en apprécier les conséquences, de découvrir les lois qui les régissent. L’explication est à chercher dans l’ensemble des facteurs biologiques, économiques, culturels, politiques, sociaux qui les commandent dans une large mesure. Sans entrer dans une vaine querelle de définition, la démographie, en un sens étroit ou en un sens large, s’insère dans la vie sociale et dans le déroulement de l’histoire.
L’étendue et les limites de son domaine sont les bornes mêmes de la vie humaine: la naissance et la mort; entre les deux termes, le mariage, à l’intérieur duquel se produisent la plupart des naissances; autrement dit: natalité et fécondité, nuptialité et reproduction, mortalité. En outre, les hommes se déplacent, dans l’espace social comme dans l’espace géographique, et c’est en quelque sorte par abstraction qu’on peut parler de population «fermée». Les migrations internationales et les migrations à l’intérieur d’un pays, ou encore les passages d’un groupe professionnel à un autre, sont à l’origine de brassages qui modifient à tout moment l’équilibre de la population et agissent à leur tour sur les tendances démographiques et le renouvellement des générations.
L’évolution démographique n’en est pas moins dotée d’une grande force d’inertie. La répartition par âges d’une population et le nombre des naissances qui s’y produisent à un moment donné commandent l’avenir dans une très large mesure, quels que soient les changements qui peuvent arriver. Par sa nature même, la démographie a une dimension prospective, et les possibilités qu’elle offre de calculer les dimensions et les structures des populations de demain, dans le cadre d’hypothèses rigoureusement définies, expliquent en grande partie l’importance qu’elle a prise.
2. Sources documentaires et contrôle de la précision
Les données de base sont immenses; leur collecte suppose de grandes ressources en personnel, en équipement, en argent, et requiert le plus souvent l’autorité de la loi, incarnée par l’administration. Chaque pays moderne possède un service central de statistiques, dont la tâche est de rassembler et de présenter les données les plus variées concernant l’économie et la population. Sur le plan international, l’organisation des Nations unies ou d’autres organismes se chargent de rassembler les principales données relatives à l’ensemble des pays du monde.
État civil et recensements
Les sources sont essentiellement de deux ordres: enregistrement dans chaque unité administrative des faits d’état civil (naissances, mariages, divorces, décès, voire causes de décès), et recensement de la population à des intervalles plus ou moins réguliers.
L’état civil, indépendamment du problème délicat des causes de décès, atteint une très grande rigueur dans les pays avancés, mais souffre d’un sous-enregistrement plus ou moins important dans les pays insuffisamment développés. Quant aux recensements, encore très difficilement praticables dans le Tiers Monde, ils présentent, même dans les pays où l’administration fonctionne le mieux, des imperfections certaines par omissions ou doubles comptes.
Le nombre total d’habitants d’un État ne peut guère être connu, dans les meilleures conditions, qu’à 1 ou 2 p. 100 près, les erreurs pouvant être plus graves dans les sous-groupes de la population. Diverses méthodes permettent de contrôler la validité des recensements, comme l’étude du rapport entre les deux sexes aux différents âges, rapport assez bien connu dans sa généralité.
Les critères retenus pour étudier la répartition ou le mouvement de la population n’ont pas tous le même degré de rigueur. Le sexe et l’âge, voire l’état matrimonial ou la nationalité, sont plus faciles à définir que l’activité et le statut professionnel, ou le niveau d’instruction. Des ventilations particulières renseignent sur les familles, classées selon l’âge ou la profession du chef de famille et de la femme, selon le nombre d’enfants d’un certain âge, selon l’âge du père ou de la mère à la naissance des enfants, etc. La finesse de l’analyse dépend des possibilités de croisement des différents critères.
La connaissance des mouvements migratoires, entre pays ou à l’intérieur des pays, présente des difficultés particulières. Les entrées dans un territoire, et surtout les sorties, ne sont pas toujours enregistrées. Quant aux migrations internes, à défaut d’un registre individuel de population (que tiennent fort peu de pays) elles ne peuvent le plus souvent être appréciées que de manière indirecte.
Les causes de décès ont fait l’objet de nomenclatures internationales, révisées plusieurs fois depuis la fin du XIXe siècle. Sur ce point, comme en matière de résidence urbaine ou rurale, ou d’activité professionnelle, de difficiles problèmes de définition rendent souvent délicates les comparaisons dans le temps et dans l’espace.
Enquêtes et sondages
La méthode des enquêtes et sondages sur échantillons de population est d’un usage désormais courant.
En matière de recensement proprement dit, ces enquêtes permettent d’abord un contrôle, par la vérification dans des aires limitées des données recueillies au cours d’un recensement. Des dépouillements par sondages apportent une estimation plus rapide de la population totale. Des mises à jour, d’autant plus utiles que la population est plus mobile, sont également pratiquées de la sorte. Les sondages suppléent de plus en plus les recensements dans les pays sous-développés, où ils ne sont pas toujours possibles. L’Inde procède ainsi, de manière permanente. Depuis une quinzaine d’années, c’est par de tels procédés que sont mieux connues la situation et l’évolution démographique de nombreux pays d’Afrique noire.
Empruntant aux sociologues certains affinements de la méthode des sondages, des observations répétées ont lieu auprès des mêmes échantillons de population (panel surveys ), ou sur des échantillons différents, tirés au sort dans les mêmes conditions (enquêtes «répétées» en Afrique noire d’expression française). Enfin, les sondages permettent de recueillir des données beaucoup plus variées et fines que les recensements, et d’explorer les attitudes et les motivations des conduites à l’égard de toutes les questions de peuplement.
Mais qu’il s’agisse de recensements ou d’enquêtes, on ne prête jamais trop d’attention à la collecte des données. La qualité de l’ensemble dépend de la nature ou du nombre, ou de la forme des questions posées, et une longue expérience est aussi nécessaire au chercheur que le savoir théorique.
3. État et structure de la population
La première donnée sur la structure d’une population est la répartition en individus des deux sexes, et des différents âges. L’observation statistique et l’analyse démographique ont révélé l’existence de lois biologiques concernant l’inégale répartition des sexes à la conception et à la naissance, l’inégale mortalité intra-utérine et aux divers âges des sujets masculins et féminins.
La représentation traditionnelle, sous forme de pyramide, renseigne sur la structure d’une population par sexe et par âge, en même temps qu’elle donne une première indication sur son aptitude à se renouveler et à croître. Une population est dite d’autant plus «jeune» ou plus «vieille» que la proportion des jeunes ou des vieux est plus grande par rapport à l’ensemble, ou l’une par rapport à l’autre. Le vieillissement d’une population, qui mesure une proportion dans un ensemble, est un phénomène distinct du vieillissement individuel, ou sénescence. Il n’est pas irréversible, et une population peut rajeunir, ou encore connaître un mouvement simultané de vieillissement au sommet et de rajeunissement à la base de sa pyramide des âges.
Si une génération, ou cohorte, chemine en effet de manière progressive et régulièrement vers l’extinction, il n’en va pas nécessairement de même dans une population dont les générations successives peuvent ne pas avoir le même effectif à l’origine. En outre, la présence simultanée de générations successives, qui ne sont pas arrivées au même moment de leur histoire, représente un des problèmes majeurs en démographie, et fonde en particulier deux types d’analyse: l’analyse transversale ou du moment , qui procède à une coupe dans le temps, pour une année ou un groupe d’années donné, toutes générations étant mêlées, et l’analyse longitudinale , qui suit ou reconstitue dans la durée les événements auxquels est soumise une génération déterminée. Des circonstances extérieures – guerre, crise économique, mouvements migratoires –, aux effets sélectifs, peuvent modifier à tout moment la répartition des sexes ou celle des âges. Elles agissent également sur les effectifs des personnes mariables, provoquant des phénomènes d’avance ou de retard dont l’action se fait sentir sur l’âge au moment du mariage et sur le calendrier des naissances.
Quant au vieillissement, aux conséquences économiques et sociales importantes, sa cause essentielle a été jusqu’à présent, non pas comme on l’a pensé longtemps, l’allongement de la durée moyenne de vie, mais la baisse de la fécondité (Mortara, Sauvy, Bourgeois-Pichat). Des calculs à fécondité constante, ainsi que des observations sur la structure passée ou présente des diverses populations, montrent qu’il est d’autant plus précoce et accentué que la fécondité a baissé plus vite. Plus de jeunes que de vieux ont en effet été épargnés, modifiant la proportion respective. Mais des mécanismes psychologiques et sociaux complexes, et qui échappent à la mesure, provoquent un ajustement des conduites aux conditions de vie du moment, et le recul de la mortalité a pu agir de manière indirecte, en incitant les couples à limiter leur descendance.
Il résulte en tout cas des données recueillies à des moments précis et successifs du temps une vue cinématique des phénomènes, qui renseigne sur leur sens et leur intensité. Il est toujours loisible, selon les questions posées lors des recensements ou des enquêtes, de disposer d’informations relatives à d’autres critères: état matrimonial, résidence, activité, statut professionnel, nationalité, niveau d’instruction ou religion, par exemple. Des taux de nuptialité, d’activité ou de scolarité, par sexe et par âge, la dimension des familles selon le milieu et bien d’autres indications liées à ces critères peuvent être déduits aisément, qui donnent une description morphologique très poussée et mettent en lumière des variables explicatives.
4. Mouvement naturel de la population
Les instruments de mesure
Il faut pourtant aller plus avant pour mesurer les phénomènes démographiques proprement dits. Les instruments de mesure les plus simples, comme les taux ou les quotients, demeurent d’un usage courant.
Les taux de natalité ou de mortalité générales consistent à rapporter le nombre des événements survenus au cours d’une année, en l’espèce les naissances vivantes ou les décès, à l’effectif moyen de la population pendant la même année. La différence entre l’un et l’autre donne le taux d’accroissement naturel, positif ou négatif.
Les taux globaux ne tiennent pas compte de la structure par âge, qui accumule une croissance potentielle plus ou moins forte selon le degré de «jeunesse». Telle population peut avoir une natalité plus faible que d’autres, avec une fécondité générale plus élevée, dont le taux se définit de manière analogue en rapportant le nombre des naissances vivantes à celui des femmes en âge de procréer. Telle autre peut avoir une mortalité générale plus faible, tout en ayant un état sanitaire moins bon que d’autres populations et des taux de mortalité plus élevés à certains âges.
Les taux par âge ou groupe d’âge apportent une connaissance plus précise, mais les séries de valeurs observées rendent les comparaisons malaisées. Une méthode ancienne, de la population type ou, à l’inverse, de la mortalité ou de la natalité type, tend à les faciliter. On applique par exemple les taux de mortalité ou de fécondité à chaque âge pour différentes régions ou différentes époques à une même population ayant une composition par âge déterminée. Mais le caractère abstrait des taux «comparatifs» ou «rectifiés» réduit leur signification et limite leur usage.
D’autres indices, les quotients , envisagent les événements démographiques dans une perspective probabiliste. Ils mesurent la proportion des individus qui, dans une génération ou cohorte donnée, courent le risque de tels événements, naissance, mariage ou décès par exemple, entre deux groupes d’âge, consécutifs ou non. Leur intérêt se manifeste essentiellement dans la construction de tables de mortalité, qui sont les plus anciennes, de nuptialité ou de fécondité.
La construction de tables
Mortalité
Disposant pour la population totale d’un pays du classement par année de naissance, et du classement des décédés par année de naissance ou année d’âge, ou mieux du double classement par année de naissance et année d’âge, on établit la série des quotients de mortalité par année, ou par groupe d’année dans une table abrégée. De là se déduisent aisément le nombre de survivants à chaque âge (table de survie ) et d’autres séries caractéristiques de la mortalité par âge, comme l’espérance de vie ou la vie probable, etc. Les tables de mortalité se calculent séparément pour les deux sexes, et d’après les décès enregistrés pendant plusieurs années (3,5 ou 10 ans) pour éviter les fluctuations momentanées.
La durée de vie moyenne, ou ce qu’il convient plutôt d’appeler à partir des tables du moment l’espérance de vie , soit à la naissance, soit à tout autre âge, est le nombre d’années de vie qui resterait à chacun des survivants si le nombre des années qu’ils ont encore à vivre à eux tous était également partagé entre eux; ou encore, ce qui revient au même, la durée moyenne obtenue en répartissant également entre les survivants du même âge le nombre total des années qu’ils ont à vivre à eux tous.
C’est donc la vie moyenne qu’aurait une génération si, au cours de sa vie, elle avait à chaque âge des taux de mortalité enregistrés à un moment donné. Il s’agit d’une abstraction, mais le nombre unique obtenu est un bon résumé des différents taux de mortalité et permet de comparer aisément entre elles des populations très différentes. Son usage est de plus en plus fréquent.
Mortalité infantile
On attache une importance particulière à la mortalité des jeunes enfants par suite de son taux élevé et parce que l’élévation de l’espérance de vie résulte surtout des progrès réalisés dans la lutte contre cette mortalité.
La mortalité infantile, qui constitue un bon indice de la situation sanitaire d’un pays, prend en compte le plus généralement des décès d’enfants de moins d’un an, par rapport aux naissances vivantes. Le taux se confond avec le quotient de 0 à 1 an.
Une méthode biométrique (Bourgeois-Pichat), dont l’usage s’est répandu après guerre, permet d’isoler les deux composantes essentielles de la mortalité infantile, l’une endogène (malformations congénitales, risques obstétricaux, etc.), l’autre exogène , due à des causes postérieures à la naissance, par suite de risques infectieux ou alimentaires. La mortalité endogène se produit surtout dans les premiers jours et semaines de la vie. On peut la calculer de manière approchée par différence avec la mortalité exogène obtenue en augmentant d’un quart la mortalité infantile totale de 1 mois à 1 an.
Les progrès réalisés depuis plus d’un siècle l’ont été surtout par la réduction de la mortalité exogène. L’espérance de vie, encore aujourd’hui légèrement plus élevée à 1 an qu’à la naissance, tend, à la naissance, dans les pays avancés, à approcher, à 3 ou 4 années près, une limite «biologique» de la mortalité, dans l’état des connaissances médicales d’aujourd’hui. En effet, dans l’hypothèse d’une disparition complète des décès exogènes, une table de mortalité limite donne une espérance de vie de l’ordre de 76 ans pour les hommes et de 78 ans pour les femmes (Bourgeois-Pichat). Le progrès accompli est aisé à apprécier si l’on songe que l’espérance de vie à la naissance pouvait être, dans l’Europe du XVIIIe siècle, de l’ordre de 28 à 30 ans. Les gains aux différents âges sont d’autant plus réduits qu’on approche des âges élevés, et même la disparition d’une maladie comme le cancer, qui frappe surtout les personnes âgées, n’allongerait guère l’espérance de vie que de 2 à 3 ans.
Mortalité générale et infantile n’atteignent pas également les différents milieux sociaux, provoquant une véritable «inégalité devant la mort». De très nombreuses expressions statistiques ont été données de ce phénomènes, qui subsiste aujourd’hui tout en tendant à s’atténuer. Dans maints pays développés, des recherches répétées sont faites pour les mesurer et les suivre. Une première méthode consiste à comparer les bulletins de décès et les fichiers du recensement, mais en se limitant aux individus décédés peu de temps après un recensement, afin d’obtenir une bonne identification des professions. les difficultés sont moindres pour la mortalité infantile, parce que le critère d’identification est fixe et permet d’associer chaque bulletin de décès au bulletin de naissance. Une autre méthode consiste à observer les décès dans un ensemble d’individus échantillonnés par exemple lors d’un recensement, et suivis au cours d’une période donnée. De toute manière, les causes de décès et l’espérance de vie selon le milieu socio-professionnel, le niveau d’instruction ou tout autre caractère sont mieux connus, et l’action pour réduire cette mortalité sociale peut y gagner en efficacité.
Tables types de mortalité
En se fondant sur les relations fonctionnelles observées entre les quotients de mortalité à deux groupes d’âge consécutifs, et à partir de l’examen de 158 tables nationales échelonnées entre 1900 et 1950, le Service de la population des Nations unies a construit en 1956 un réseau de 40 tables types de mortalité. Ces tables donnent les fonctions biométriques usuelles correspondant à divers niveaux d’ensemble de la mortalité, définis par l’espérance de vie à la naissance. Entre les 40 premières tables types ont été en outre interpolées 24 autres tables correspondant à des espérances de vie à la naissance pour chacun des deux sexes.
En dépit des réserves techniques qui ont pu être formulées, ces tables représentent un instrument d’analyse de grande portée. La mortalité d’un pays peut être appréciée de manière nuancée par comparaison avec la structure moyenne de mortalité par âge. Elles rendent de très grands services pour estimer le niveau de mortalité ou l’espérance de vie à la naissance dans les populations sous-développées, où l’enregistrement des décès demeure imparfait ou fragmentaire. Elles permettent en outre un calcul immédiat des survivants, très utile pour établir des perspectives de population. Enfin, depuis ce premier travail, d’autres jeux de tables ont été calculés, dont les prolongements méthodologiques et pratiques se révèlent d’un grand intérêt (Coale et Demeny, Ledermann).
Fécondité et renouvellement de la population
Comme à propos de la mortalité, on a cherché une mesure de la fécondité qui rassemble en un nombre unique, facilitant les comparaisons, les taux de fécondité aux divers âges, et qui élimine en même temps l’«effet parasite» de la répartition par âge. Dès 1884, Böckh préconisait les taux brut et net de reproduction, généralisés par Kuczinski entre les deux guerres, et qui demeurent d’un usage courant.
Le taux brut est la somme des taux de fécondité, aux différents âges, des femmes appartenant à la population considérée, multipliée par le rapport du nombre des naissances féminines aux naissances totales. C’est donc le nombre de filles qu’aurait un effectif de femmes restant constant au cours de sa période de fécondité, de 15 à 49 ans, c’est-à-dire de mortalité nulle, et soumis à la loi de fécondité de la population étudiée. Sa signification est simple: s’il est inférieur ou égal à l’unité, aucune baisse de mortalité ne peut faire qu’une génération soit remplacée intégralement par la suivante.
Mais la mortalité n’est pas nulle et le taux net de reproduction ou de remplacement se calcule de la même manière, en appliquant les taux de fécondité aux seules femmes survivantes à chaque âge. Il mesure donc de manière plus exacte le nombre moyen de filles issues d’un effectif initial de femmes au cours de leur période de fécondité, soumises pendant toute cette période aux conditions de mortalité et de fécondité du moment. S’il est inférieur à l’unité, une population peut continuer à croître par suite d’une structure par âge favorable, mais s’il se maintient à ce niveau il est sûr qu’à la longue cette population est appelée à diminuer, sauf allongement illimité de la vie humaine.
Au taux net de reproduction est venu s’ajouter le taux intrinsèque d’accroissement naturel, ou taux de Lotka, étroitement apparenté au précédent et qui a même signification, mais mesure l’accroissement pendant une année et non dans l’intervalle de deux générations, soit environ 28 ans.
Si ces indices donnent une bonne caractéristique de la vitalité d’une population, ils n’en posent pas moins des questions encore non résolues. Les calculs sont faits le plus souvent pour le seul sexe féminin, les statistiques de naissances étant traditionnellement rapportées aux femmes, et les mécanismes d’adaptation entre les taux de croissance masculins et féminins restent encore obscurs après divers travaux (Karmel, Hajnal, Vincent).
En outre, ils ne tiennent pas compte de la nuptialité, et l’effort de la recherche vers les années cinquante a consisté à introduire cette variable dans la mesure de la fécondité. La prise en considération d’autres variables: âge au mariage, durée du mariage, nombre d’enfants déjà nés, ou une combinaison de ces variables selon les statistiques disponibles, a conduit à proposer toute une série d’indices nouveaux (Karmel, Ryder, Quensel, Clark et Dyne, Bourgeois-Pichat, Henry, Whelpton).
La mesure de la fécondité se heurte en fait à une difficulté analogue à celle de la mortalité, mais l’inconvénient qui en résulte est plus grave parce que ses fluctuations, sensibles même à court terme, surtout dans les pays de basse fécondité, risquent de compromettre l’appréciation sur le renouvellement d’une population.
La mesure est rigoureuse si elle porte en effet sur une génération ou cohorte féminine donnée, suivie dans le temps, jusqu’à l’âge de fin de fertilité: on sait combien d’enfants ont été mis au monde. Mais la connaissance est rétrospective et l’on ignore le comportement des cohortes actuellement d’âge fertile, qui sont les plus intéressantes à considérer. Si l’on part au contraire des naissances d’une année donnée, qui portent à la fois sur plusieurs cohortes, les résultats peuvent être trompeurs. Diverses circonstances (économiques, politiques ou sociales) sont susceptibles de modifier l’histoire génésique des cohortes successives, faisant apparaître des phénomènes d’ajournement ou de récupération.
Il n’y a aucune solution théorique au problème posé, et pour tenter de serrer de plus près la réalité, divers auteurs (Whelpton, Ryder, Henry) ont ajouté au cours de la dernière décennie une analyse et une synthèse longitudinales par cohortes aux indices classiques du moment. Le principe consiste à étudier séparément plusieurs cohortes au cours du temps, qu’elles aient ou non achevé leur période de fécondité, et à observer le comportement de chacune d’entre elles en tentant compte du temps écoulé entre divers événements: durée de mariage, intervalles intergénésiques par exemple. La méthode des «probabilités d’agrandissement» des familles consiste à calculer les probabilités, pour des femmes mariées n’ayant aucun enfant ou ayant un nombre donné d’enfants nés vivants, d’avoir une naissance au cours de l’année. Le conjoncturiste peut suivre ainsi de plus près les tendances de la fécondité, affectée éventuellement par les modifications de l’âge au mariage ou de la durée de constitution des familles.
Fertilité de l’espèce humaine
La connaissance en matière de fertilité et de pouvoir multiplicateur de l’espèce humaine a progressé de manière importante depuis la fin des années quarante. L’effort des historiens, soucieux de plus en plus d’histoire quantitative, s’est conjugué heureusement avec celui des démographes pour observer des populations ne recourant pas à la prévention des naissances, condition nécessaire de cette étude. L’exploitation systématique des registres paroissiaux anciens a commencé dans de nombreux pays (Hyrenius, Henry, Eversley). En outre, ont eu lieu dans plusieurs pays des études sur des familles nombreuses ou des échantillons de familles «non contraceptives» pendant une période donnée (Kiser et Whelpton, Tietze, Notestein, Potter, Vincent).
De nouvelles mesures apparaissent et des concepts se précisent: probabilité de conception à chaque cycle, ou fécondabilité, probabilité de conception au cours d’une période donnée, calcul du temps mort, ou période de fertilité nulle après une conception, y compris la durée de grossesse, intervalle intergénésique moyen selon le rang, croissance de la stérilité avec l’âge. Toutes ces notions, et les résultats acquis, montrent à quel point la fécondité est un phénomène aléatoire.
La documentation statistique et l’analyse démographique apportent ainsi un concours à la médecine et à la biologie. Il en va de même d’une discipline qui ne peut être qu’évoquée, la génétique de population, qui conquiert un domaine distinct où se rejoignent mathématiques, biologie et démographie quantitative et qualitative, avec la préoccupation constante des phénomènes d’hérédité.
Populations stables et quasi stables
Le concept fondamental de population stable, dû à Lotka, systématisait une idée incluse dans les méthodes de mesure de la reproduction introduites par Böckh.
Étudiant par l’analyse mathématique le cas d’une population fermée, dont les taux de fécondité et de mortalité resteraient invariables à tous les âges, Lotka a montré que la structure par âge d’une telle population tend asymptotiquement vers un modèle fixe. Cette population limite s’accroîtrait ou diminuerait à un rythme constant, tout en gardant même composition par âge. Elle est dite «stable», les perturbations accidentelles se trouvant peu à peu nivelées par la constance des lois de mortalité et de fécondité. Si, dans une telle population, le nombre annuel des naissances et le régime de mortalité sont constants, les effectifs sont toujours les mêmes: on la dit «stationnaire», et sa pyramide des âges correspond à la table de survie de son régime de mortalité.
Évoquant «les travaux récents ayant trait à la théorie quantitative des populations, de leur mode de croissance et de renouvellement», on a pu noter (Tabah) que «l’œuvre de Lotka est encore à l’origine de maintes recherches, ou tout au moins sert de point d’appui à un grand nombre d’entre elles, qui constituent souvent pour elle de simples prolongements», mais qui, avec l’évolution des techniques mathématiques, font appel à des variables discrètes plutôt que continues ou suivent une méthode stochastique plutôt que déterministe (Leslie, Lopez, Keyfitz, Kendall, Sheps).
On ne rencontre plus de populations stationnaires maintenant que la mortalité baisse, mais, lorsque les populations conservent une fécondité constante, leur distribution par âge est peu variable avec le niveau de la mortalité. D’où la notion de population «quasi stable» appliquée à de telles populations, qui facilite l’étude de pays entrés dans cette phase, généralement les pays sous-développés.
5. Perspectives de population
Les nombres de naissances enregistrées chaque année, les probabilités de survie des générations successives placent naturellement l’observation démographique dans le domaine du futur. L’effectif ultérieur d’une population dépendant, toutes choses égales d’ailleurs, de ces données d’aujourd’hui, il était naturel que la démographie procédât à des calculs perspectifs.
Les calculs perspectifs
La prise de conscience d’un fléchissement de la fécondité, compromettant l’avenir des populations européennes, fait prendre de l’extension à ces calculs, entre les deux guerres mondiales, malgré les critiques qui leur sont adressées. Mais c’est depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, avec la nécessité de plus en plus ressentie de procéder à une planification économique, qu’ils connaissent un essor considérable. Il n’est pratiquement plus de pays pour lesquels on n’ait procédé à une ou plusieurs perspectives, ou projections , à échéance plus ou moins longue.
Toute perspective, quelle qu’elle soit, on ne le répétera jamais assez, a un caractère conditionnel et suppose que se réalise dans l’avenir telle ou telle hypothèse, formulée à partir de la population d’origine, dans son volume global comme dans sa structure par âge. Les variables les plus couramment prises en considération concernent la mortalité et la fécondité aux différents âges, dont on prolonge les tendances actuelles à tel ou tel niveau pendant un temps donné, ou encore diverses combinaisons de ces deux variables. Il est classique de calculer ainsi un jeu de perspectives, forte, moyenne et faible par exemple, la fourchette allant s’élargissant à mesure qu’on avance dans le temps.
Des perfectionnements ont été introduits pour estimer le nombre de naissances dans l’avenir, sur lequel pèsent les plus fortes incertitudes. Ils consistent notamment, après le calcul des survivants de chaque génération, à introduire des variables supplémentaires telles que la nuptialité, féminine et masculine, la fécondité future des promotions de mariage, les naissances légitimes par rang et les naissances illégitimes. Un pas de plus peut être franchi dans le calcul de certaines projections en évaluant le volume possible des migrations. L’entrée en scène des ordinateurs électroniques, par l’exécution rapide de calculs laborieux, permet au démographe de faire intervenir dans les projections un nombre accru de variables, en même temps qu’elle facilite la construction de modèles plus complexes ou le recours à des procédés de simulation.
Enfin, des perspectives dérivées sont tirées de plus en plus des perspectives globales, en tenant compte de certains taux et de leurs variations prévisibles – taux de scolarité ou taux d’activité, proportion de travailleurs dans telle ou telle branche – afin de calculer des effectifs de population par région, de population scolaire ou de population active.
Les mêmes méthodes peuvent s’appliquer aux besoins en logements différenciés dans un grand ensemble collectif d’habitations ou dans une ville aussi bien qu’à la structure du personnel d’une grande entreprise ou d’une administration. On saisit à ces quelques exemples tous les services, de plus en plus attendus dans l’organisation économique, que peut rendre le recours aux projections. Mais une extrême prudence est requise dans leur utilisation. Elles peuvent atteindre dans certains cas une grande précision, s’il s’agit par exemple d’estimer pour les quelques années futures le volume global des effectifs scolaires dans un pays donné, puisque les enfants sont nés, et que d’autre part la mortalité, très faible à cet âge, peut être pratiquement négligée. Mais s’il s’agit de «prolonger» ces effectifs, ou de les répartir entre les régions ou les résidences, ou encore entre les diverses orientations possibles, bien d’autres variables sont en cause, qui font intervenir des hypothèses que les faits ne confirmeront pas nécessairement.
En tant que telles, les perspectives ont un caractère purement arithmétique, et les résultats sont sous la dépendance rigoureuse des hypothèses. Même si la perspective se réalise, rien ne prouve que les hypothèses étaient fondées, si d’autres variables sont apparues entre-temps. Les spécialistes ne craignent pas de dire, lorsqu’ils donnent une fourchette assez large, que la valeur centrale n’a pas nécessairement une probabilité plus forte de s’inscrire dans les faits que les valeurs encadrantes, et qu’il est même fort possible que la réalité se situe en dehors d’elles.
Une histoire des perspectives de population, comparant systématiquement celles qui ont été dressées avec l’évolution observée quelques années plus tard, serait d’un immense intérêt. On apercevrait peut-être les variables qui ont exercé la plus grande influence et qu’il conviendrait de privilégier. On chercherait aussi à apprécier de quel poids les projections ont pu peser sur les décisions des responsables ou sur la prise de conscience de leur avenir par les populations concernées. De toute manière, il importe de remettre en chantier le plus souvent possible les projections antérieures en les confrontant avec les données nouvelles afin de suivre au plus près la conjoncture, et d’apercevoir aussitôt que possible les directions où s’engage l’avenir.
Facteurs de la fécondité, croissance de la population et développement
Une tendance à la baisse se manifeste dans les pays à basse fécondité, et, selon les indicateurs retenus, son ampleur apparaît plus ou moins grande. Mais, dans l’état présent des connaissances, nous ne savons pas si ces changements représentent des aléas conjoncturels et seront suivis d’une sorte de rattrapage, ou s’ils amorcent le début d’une tendance durable, dont l’intensité échappe elle aussi à la mesure. Dans le Tiers Monde, l’ampleur réelle de la croissance dans l’avenir dépend du moment où la baisse de la fécondité commencera, et de l’intensité qu’elle revêtira.
Aussi bien se tourne-t-on de plus en plus vers l’observation des facteurs psychologiques et sociaux de la fécondité. Dans les pays développés, aux États-Unis notamment, diverses enquêtes (Indianapolis, Princeton, Growth American Family) observent et suivent dans le temps les attentes et le comportement des familles, «contraceptives» ou non, au cours de leur constitution, en tenant compte de variables sociales et culturelles. En pays sous-développés, maintes enquêtes psycho-sociologiques ont été faites, de type K.A.P. (knowledge, attitude, practice ). Elles explorent et définissent les attitudes des populations à l’égard de la dimension idéale de la famille et de la limitation des naissances. Les attitudes s’étant révélées favorables à la limitation des naissances, les enquêtes les plus récentes concernent plutôt les moyens mêmes de contraception et leur degré d’acceptabilité.
À défaut d’un recul des limites de la vie humaine, la croissance des populations dépend avant tout et à la longue du niveau de leur fécondité et de leur aspiration à un bien-être dont les normes ne cessent de s’élever. L’idée d’une population «logistique», tendant vers une limite supérieure après une phase de croissance rapide et par suite des résistances du milieu (Quételet, Verhulst, Pearl et Reed), ne trouverait pas aujourd’hui de nombreux défenseurs.
La pensée démographique, à la recherche d’une théorie générale, se tourne plutôt vers une notion de juste milieu, ou de population optimale, c’est-à-dire dont le nombre éviterait à la fois les risques du surpeuplement et ceux du sous-peuplement. Dans la ligne de la réflexion traditionnelle, il s’agit de préciser les liens entre le nombre des hommes et les moyens de subsistance, entre les possibilités de l’emploi et l’équilibre production-consommation. La notion d’optimum progresse à compter de la fin du siècle dernier et de l’entre-deux-guerres, mais depuis est considérée plutôt comme une simple méthode de travail.
Mais Lorimer et Sauvy soulignaient déjà l’imprécision du niveau optimal et les difficultés de sa mesure. On tend à lui substituer un concept plus dynamique, qui tienne compte des acquisitions du progrès, celui de rythme optimal de croissance ou de variation. Encore convient-il d’apprécier à la fois les inconvénients et les avantages de la croissance démographique, ou des modifications de structure par âge (Stassart). À ce point se trouve posé le problème du développement, et ouvert le champ immense des relations entre science économique et démographie, qu’il est tout aussi impossible d’ignorer que de traiter ici.
Meilleure connaissance du régime de fécondité naturelle et des lois qui président à la fertilité de l’espèce, affinement des méthodes et perfectionnement des techniques d’analyse, construction de modèles mathématiques plus complexes, introduction de variables plus nombreuses dans la mesure des phénomènes et dans le calcul des projections, progrès dans la connaissance des causes de décès aux différents âges, recours à des enquêtes psycho-sociologiques pour étudier les motivations des comportements à l’égard de la procréation, application de l’analyse démographique à des domaines très variés de la vie économique et sociale, efforts constants, pour élucider les relations entre croissance démographique et développement économique, tels sont quelques-uns des traits majeurs qui caractérisent, à l’heure présente, le développement de la démographie.
démographie [ demɔgrafi ] n. f.
1 ♦ Étude statistique des collectivités humaines. « Éléments de statistique humaine, ou Démographie comparée », de Guillard (1855). Tables de mortalité, natalité, nuptialité, divortialité données par la démographie.
♢ (1972) Étude quantitative des populations humaines ou animales et de leurs variations.
2 ♦ Par méton. État quantitatif d'une population. La démographie galopante des pays en voie de développement.
● démographie nom féminin Étude des populations humaines, de leur état, de leur mouvement ainsi que des facteurs (biologiques, socioculturels, etc.) agissant sur ces caractéristiques. État quantitatif de la population humaine dans une région ou un pays déterminés : La démographie du Japon.
démographie
n. f. Science qui décrit et étudie les peuples (natalité, mortalité, etc.), les populations (âge, profession, etc.).
— Par méton. état d'une population (sous l'aspect quantitatif).
⇒DÉMOGRAPHIE, subst. fém.
A.— Science dont l'objet est l'étude statistique des collectivités humaines dans leurs structures fondamentales, sociales, intellectuelles, etc. Démographie économique, générale, sociale. Prévisions (...) élaborées et précises en démographie (PERROUX, L'Écon. du XXe s., 1964, p. 559).
♦ Démographie pure. Partie de cette science qui cherche à tirer des lois générales des phénomènes observés et à les exprimer en termes mathématiques (cf. Hist. de la sc., 1957, p. 1598). Démographie qualitative. Partie de cette science qui étudie les caractéristiques physiques, intellectuelles, socio-culturelles d'une population (Hist. de la sc., 1957, p. 1617). Démographie quantitative. Partie de cette science qui s'attache à étudier les structures d'une population — par âge, sexe, profession, etc. — et ses mouvements internes — natalité, mortalité, migrations — en particulier (Hist. de la sc., 1957, p. 1617).
B.— P. méton. Réalité humaine étudiée par cette science; état d'une population déterminée, considérée surtout d'un point de vue quantitatif :
• L'idée que l'on peut se faire de la démographie de ce Japon primitif est celle d'une population à laquelle les abondantes pêcheries de son littoral maritime valurent de bonne heure une densité relativement forte.
VIDAL DE LA BLACHE, Principes de géogr. hum., 1921, p. 67.
Prononc. et Orth. :[]. Ds Ac. 1932. Étymol. et Hist. 1855 (A. GUILLARD, Eléments de statistique humaine, ou démographie comparée). Composé du gr. « peuple »; élément suff. -graphie. Fréq. abs. littér. :4.
démographie [demɔgʀafi] n. f.
ÉTYM. 1855, Guillard, ci-dessous, 1.; du grec dêmos « peuple », et -graphie.
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1 Étude statistique des collectivités humaines. || Éléments de statistique humaine, ou Démographie comparée, ouvrage de Guillard (1855). || La démographie est une des bases de l'anthropologie, elle étudie l'état et les mouvements de la population. ⇒ Population. || Tables de mortalité, natalité, nuptialité…; tables de profession, de migration, de consommation… données par la démographie.
♦ Démographie pure, qui cherche à tirer des lois générales à partir des phénomènes observés — Démographie quantitative : étude des structures d'une population (âge, sexe, profession) et de ses mouvements (natalité, mortalité, migration), d'après des données numériques, statistiques. — Démographie qualitative : étude des caractéristiques d'une collectivité d'après ces mêmes données.
1 (…) ces phénomènes si captivants et si emmêlés de la démographie, et qui s'appellent : la natalité, la nuptialité, la mortalité, etc.
Jean Brunhes, la Géographie humaine, t. I, p. 90.
2 Par métonymie. État (quantitatif) d'une population.
2 L'idée que l'on peut se faire de la démographie de ce Japon primitif est celle d'une population à laquelle les abondantes pêcheries de son littoral maritime valurent de bonne heure une densité relativement forte.
Vidal de la Blache, Principes de géographie humaine, 1921, p. 67, in T. L. F.
3 Par ext. Étude (et état) d'une population animale, en éthologie.
➪ tableau Noms de sciences et d'activités à caractère scientifique.
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DÉR. Démographe, démographique.
Encyclopédie Universelle. 2012.