sensibiliser [ sɑ̃sibilize ] v. tr. <conjug. : 1>
• 1839 ; « rendre perceptible » 1803; du rad. lat. de sensible
1 ♦ Vx Rendre sensible, pénétrer de sensibilité. — P. p. adj. « ce théisme doucement rationalisé et sensibilisé » (Sainte-Beuve).
2 ♦ (1859) Rendre sensible à l'action de la lumière (une plaque, une couche photographique).
3 ♦ Méd. Provoquer une sensibilisation (2o) chez (un être vivant).
4 ♦ Cour. Rendre sensible, faire réagir à... (surtout au p. p.). L'opinion publique est aujourd'hui sensibilisée à ce problème. « Je ne suis pas “sensibilisé” à cet événement » (Valéry). — Pronom. Le public s'est sensibilisé à ce problème.
● sensibiliser verbe transitif (de sensible) Rendre sensible à une action physique, chimique, etc. ; provoquer une sensibilisation. Rendre quelqu'un, un groupe sensible, réceptif à quelque chose pour lequel il ne manifestait pas d'intérêt : Les questions de sécurité sensibilisent vivement l'opinion.
sensibiliser
v. tr.
d1./d BIOL Produire la sensibilisation de l'organisme.
d3./d Fig. Sensibiliser qqn à une chose, la lui faire percevoir, comprendre.
⇒SENSIBILISER, verbe trans.
A. — Rare, littér.
1. Rendre sensible, douer de sensibilité. La chapelle du couvent était devenue comme le pôle autour duquel tournait la terre. Autour d'elle-même, la contemplative sensibilisait et animait toutes choses parce qu'elle croyait (TEILHARD DE CH., Milieu divin, 1955, p. 167).
— En partic. Rendre plus sensible, plus facile à émouvoir, plus rapide à réagir. La maladie (nous ne parlons ici bien entendu ni des psychoses ni des névroses) sensibilise (...) l'affectivité (MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 220). Ma joie sensibilise mon regard et le rend apte à lire sur la physionomie des choses et surtout des personnes la grandeur d'être qui y est peinte (RICŒUR, Philos. volonté, 1949, p. 244).
♦ Empl. pronom. La misère était-elle plus désespérée ici que dans les autres villes? Ou bien est-ce qu'au lieu de s'endurcir on se sensibilise au malheur? Le bleu du ciel semblait cruel au-dessus de l'ombre malsaine (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 87).
2. Rendre perceptible. L'imagination (...) viendra altérer les conceptions pures de l'entendement, et répondra, par quelque représentation plus ou moins vague, aux termes écrits ou parlés qui les sensibilisent à l'œil ou à l'ouïe (MAINE DE BIRAN, Influence habit., 1803, p. 166).
B. — Spécialement
1. MÉD., BIOL. [Corresp. à sensibilisation A 1] Faire subir une sensibilisation. Une (...) tuberculination sous-cutanée (...) sensibilise le sujet, qui répond alors par une réaction thermique précoce et de courte durée (BRION, Jurispr. vétér., 1943, p. 274).
— Empl. pronom. L'individu infecté souvent se « sensibilise » vis-à-vis du germe (QUILLET Méd. 1965, p. 194).
2. PHOT. [Corresp. à sensibilisation A 2] Rendre un support sensible à la lumière ou à une radiation. Des recherches effectuées dans ces dernières années ont permis de découvrir des colorants dérivés de la classe des cyanines, lesquels sensibilisent le gélatino-bromure pour le rouge et même pour les régions du spectre dites infrarouges (Arts et litt., 1935, p. 30-13). Ce diapositif est copié par contact à la lumière de lampes à arc sur un papier à couche sensible dit papier charbon (...). La couche est de la gélatine que l'on sensibilise avant usage au bichromate de potassium (Civilis. écr., 1939, p. 10-10).
C. — Au fig. [Le compl. désigne une pers. ou un groupe de pers.] Rendre sensible, réceptif, attentif à quelque chose. Sensibiliser l'opinion, la population. Une exposition sur le livre scolaire dans le but de « sensibiliser » tous les parents (Le Monde, 13 mai 1969 ds GILB. 1980).
— Sensibiliser qqn à/sur qqc. Sensibiliser, dès l'âge le plus tendre, les futurs conducteurs aux problèmes routiers (L'Action automobile et touristique, mai 1970 ds GILB. 1980). Cette association aura pour mission de sensibiliser le public sur les problèmes de la vie moderne en société (La Croix, 26 janv. 1972 ds GILB. 1980).
— Au passif. Il se trouve que je suis particulièrement « sensibilisé » à l'endroit de cette fameuse question du « temps » (VALÉRY, Lettres à qq.-uns, 1945, p. 229).
— Empl. pronom. Prendre intérêt à. Comment réagira le public? Pas forcément mal. Car il a beau n'être ni éduqué ni informé, et tenir à ses schémas traditionnels, à ses objets chargés de symboles, il se sensibilise peu à peu aux formes nouvelles (L'Express, 27 nov. 1967 ds GILB. 1980).
Prononc. et Orth.:[], (il) sensibilise [-i:z]. Att. ds Ac. 1935. Étymol. et Hist. 1. 1803 philos. « rendre perceptible à un organe » (MAINE DE BIRAN, loc. cit.); 2. 1839 « pénétrer de sensibilité » (E. DE GUÉRIN, Journal, p. 279: viendront les jours où je n'aurai de vie que dans le passé, le passé avec toi, près de toi jeune, intelligent, aimable, sensibilisant tout ce qui t'approchait); 3. 1859 phot. « rendre sensible à l'action de la lumière » ici fig. (GONCOURT, Journal, p. 147: la maladie sensibilise l'homme pour l'observation, comme une plaque de photographie). Dér. sav. de sensible; suff. -iser. Fréq. abs. littér.:35.
DÉR. Sensibilisable, adj. Qui peut être sensibilisé. (Dict. XXe s.). — []. — 1re attest. 1872 (LITTRÉ); de sensibiliser, suff. -able.
BBG. — ARVEILLER (R.). Contribution à l'ét. du lex. fr. Mél. Gamillscheg (E.) 1968, p. 32.
sensibiliser [sɑ̃sibilize] v. tr.
ÉTYM. 1861; p. p., « rendu sensible (II., 1.), concret », 1835; du rad. lat. de sensible.
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1 (1861, Sainte-Beuve). Vx et rare. Rendre sensible (I., 2.), douer ou pénétrer de sensibilité. || Sensibiliser la nature. Au p. p. :
1 (…) ce théisme doucement rationalisé et sensibilisé, à ravir un Bernardin de Saint-Pierre et à attendrir un Marmontel, n'est pas du tout la religion de Fénelon (…) mais c'est bien la religion de l'abbé de Saint-Pierre.
Sainte-Beuve, Causeries du lundi, 12 août 1861.
♦ Rendre sensible à la douleur, irritable. || « Sensibiliser l'amour-propre » (A. Daudet, 1876, in Littré, Suppl.).
2 (1865). Techn. (photogr.). Rendre sensible (1., 3.) à l'action de la lumière. || Sensibiliser une plaque, un papier. || Couche de gélatine sensibilisée (→ Héliogravure, cit.). — Par métaphore :
2 La maladie sensibilise l'homme pour l'observation, comme une plaque de photographie.
Ed. et J. de Goncourt, Journal, 27 mars 1865, t. II, p. 206.
3 (XXe). Méd. Rendre sensible (I., 1.) un être vivant, un organe, un tissu… à un agent physique, chimique ou biologique. ⇒ Anaphylaxie, sensibilisation.
4 Fig. Rendre sensible (à qqn), faire réagir (qqn) à… (surtout au p. p.). || Se trouver sensibilisé à certains événements, à certains propos. || L'opinion publique est aujourd'hui sensibilisée à ce problème. || « Pays “sensibilisés” par l'innovation » (le Monde, 12 nov. 1967). || « (Le public) se sensibilise aux formes nouvelles » (l'Express, 27 nov. 1967).
3 Que m'importe, si je n'ai point de billet de la loterie, que tel ou tel numéro sorte de l'urne ? Je ne suis pas « sensibilisé » à cet événement.
Valéry, Variété, « Études philosophiques », t. I, Pl., p. 898.
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DÉR. Sensibilisable.
COMP. V. Photosensibilisant.
Encyclopédie Universelle. 2012.