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sensible

sensible [ sɑ̃sibl ] adj.
XIIIe; lat. sensibilis « qui peut être senti »; « qui peut sentir », en lat. médiéval
ISens actif
1Capable de sensation et de perception. Les êtres sensibles. « Avoir l'ouïe sensible, fine et juste » (Rousseau). « si le système nerveux n'est pas sensible jusqu'à la douleur ou jusqu'à l'extase » (Maupassant). — SENSIBLE À... : excitable par..., capable de percevoir. L'oreille humaine n'est pas sensible à certains sons. « Il semble que certaines réalités transcendantes émettent autour d'elles des rayons auxquels la foule est sensible » (Proust).
Spécialt Que le moindre contact rend douloureux ou fait souffrir. Endroit, point sensible. névralgique. Chaussures pour pieds sensibles. Rendre moins sensible. désensibiliser, insensibiliser. Être sensible de la gorge, fragile.
Philos. Qui est le fait des sens. L'intuition sensible.
2(Personnes) Capable de sentiment, d'une vie affective intense; apte à ressentir profondément les impressions et à y intéresser sa personne tout entière. émotif, impressionnable. « Je résolus, par cela seul que j'étais sensible, de me montrer impassible » (Laclos). Les âmes sensibles. Tu es trop sensible. Film déconseillé aux personnes sensibles. Subst. C'est un, une sensible. 2. tendre.
Spécialt Particulièrement capable d'éprouver les sentiments de charité, d'humanité; prompt à compatir à la souffrance d'autrui. 2. aimant, 1. bon, compatissant, humain, 2. tendre. « Les généreux élans des cœurs sensibles » (Martin du Gard).
♢ SENSIBLE À... : qui se laisse toucher par, ressent vivement. ⇒ accessible, réceptif. J'ai été très sensible à cette attention. « Sensibles à certains procédés, à certains actes de prévenance » (Sainte-Beuve). Sensible au charme de qqn, à la force de certains arguments.
3(Choses) Qui réagit au contact, à de faibles variations. Balance sensible. Pellicule, plaque, émulsion sensible, ultrasensible, rapide ( sensitométrie) . — Faire vibrer la corde sensible. Mus. Note sensible, ou n. f. la sensible : septième degré de la gamme diatonique, un demi-ton au-dessous de la tonique.
II(déb. XIVe) Sens passif
1Qui peut être perçu par les sens. matériel, palpable, tangible, visible. Le monde sensible. « Une coloration légère [...] à peine sensible » (Baudelaire). Sensible à... : qui peut être perçu par. ⇒ perceptible. Son sensible à l'ouïe. « La panne d'oxygène n'est pas sensible à l'organisme » (Saint-Exupéry).
2Assez grand pour être perçu, et par ext. non négligeable. apparent, appréciable, notable. Baisse sensible des prix.
3Vieilli Qui se fait douloureusement sentir. pénible. « vous m'avez fait les maux qui pouvaient m'être les plus sensibles » (Rousseau).
4Anglic. Très délicat, qui requiert une attention, des précautions particulières, à cause des réactions possibles. Dossier social sensible. Banlieues sensibles. Quartier sensible. difficile. Matériel, technologie sensible.
⊗ CONTR. Insensible. Dur, 1. froid.

sensible adjectif (latin sensibilis, de sentire, percevoir) Qui est, qui peut être perçu par les sens : Le monde sensible. Qui est apte à éprouver des perceptions, des sensations : Avoir l'oreille sensible. Qui est très facilement affecté par la moindre action ou agression extérieure : Être sensible de la gorge. Une dent sensible au froid. Se dit d'une partie du corps que l'on ressent, qui est plus ou moins douloureuse : La douleur est moins vive, mais la zone est toujours sensible. Qui éprouve facilement des émotions, des sentiments, notamment de pitié, de compassion : Une nature sensible. Être sensible à la douleur d'autrui. Qui est particulièrement accessible à certaines impressions d'ordre intellectuel, moral, esthétique ; réceptif : Être sensible aux compliments. Se dit d'un appareil, d'un instrument de mesure, qui obéit à de très légères sollicitations : Une balance très sensible. Se dit d'un matériel, d'un produit qui est sujet à des variations de prix dépendant de facteurs extérieurs. Que l'on doit traiter avec une attention, une vigilance particulière : Dossier sensible. Qui fait l'objet d'une surveillance renforcée pour des raisons de sécurité : Vol sensible. Qui est facilement perçu par les sens ou par l'esprit : Une sensible différence de prix. Se dit d'une émulsion photographique, d'un explosif, d'un matériel, etc., doués de sensibilité. ● sensible (expressions) adjectif (latin sensibilis, de sentire, percevoir) Endroit, point sensible de quelqu'un, ce qui le touche particulièrement. ● sensible (synonymes) adjectif (latin sensibilis, de sentire, percevoir) Qui est, qui peut être perçu par les sens
Synonymes :
- concret
- matériel
- physique
Qui est apte à éprouver des perceptions, des sensations
Synonymes :
- délicat
- fin
Contraires :
- dur
- endurci
Qui est très facilement affecté par la moindre action ou...
Synonymes :
- fragile
Contraires :
- invulnérable
- solide
Se dit d'une partie du corps que l'on ressent, qui...
Synonymes :
- palpable
- perceptible
- saisissable
- visible
Contraires :
- inapparent
- inappréciable
- insaisissable
- insensible
- invisible
Qui éprouve facilement des émotions, des sentiments, notamment de pitié...
Synonymes :
- émotif
- humain
- impressionnable
Contraires :
- cruel
- desséché
- froid
- impitoyable
- indifférent
- inhumain
- insensible
- rude
- sec
Qui est particulièrement accessible à certaines impressions d'ordre intellectuel, moral...
Synonymes :
- accessible
- ouvert
- réceptif
- vulnérable
Contraires :
- étranger
- fermé
- inaccessible
- insensible
- rebelle
- réfractaire
- sourd
Qui est facilement perçu par les sens ou par l'esprit
Synonymes :
- évident
- manifeste
- tangible
Contraires :
- infime
- insignifiant
- minime
- négligeable
sensible nom masculin Selon Aristote, objet des sens. ● sensible nom féminin Nom donné à la note correspondant au 7e degré de la gamme diatonique.

sensible
adj. (et n.)
d1./d Qui éprouve des sensations. L'homme et les animaux sont des êtres sensibles.
|| Sensible à: qui est susceptible d'éprouver (telle sensation).
d2./d Qui a la propriété de réagir à certains stimuli (tissus, organes vivants). L'oeil est sensible à la lumière.
|| Absol. Avoir l'oreille sensible.
d3./d Qui devient facilement douloureux. Point sensible.
d4./d Qui ressent vivement certaines émotions, certaines impressions morales, esthétiques. être sensible à la misère, à la beauté, aux compliments.
|| Absol. Une personne sensible (à toutes les impressions).
Subst. Un(e) sensible.
Un coeur sensible, compatissant.
d5./d Qui réagit à de faibles variations (instruments, appareils).
Balance sensible au milligramme, qui peut mesurer des variations de masse de 1 mg.
|| PHOTO Plaque, papier, émulsion sensible, qui peut enregistrer une image photographique.
d6./d MUS Note sensible ou, n. f., la sensible: 7e degré de la gamme, note placée à un demi-ton au-dessous de la tonique.
d7./d PHILO Qui peut être perçu par les sens (par oppos. à intelligible). Le monde sensible.
d8./d Perceptible, appréciable. Faire des progrès sensibles.

⇒SENSIBLE, adj.
I. — Qui est doué de sensibilité.
A. — [En parlant d'un être vivant, de son organisme ou d'un de ses organes]
1. Qui peut éprouver des sensations, capable de percevoir des impressions. Êtres sensibles; nerfs, neurones, terminaisons sensibles. Commençons par des remarques qui s'appliquent, non à des organes de sensations spéciales, ou aux sens proprement dits, mais au système général de la sensibilité. L'animal reçoit par toutes les parties de son enveloppe sensible les impressions du chaud et du froid (COURNOT, Fond. connaiss., 1851, p. 136):
1. J'admets donc que tous les éléments organiques sont inconscients, mais sensibles à des degrés divers aux agents extérieurs. Chaque élément est sensible à sa manière, comme l'être tout entier l'est par le système nerveux. Mais le système nerveux n'est qu'un appareil le perfectionnant. Les êtres vivants sont tous sensibles, même les végétaux.
Cl. BERNARD, Princ. méd. exp., 1878, p. 155.
♦ [Constr. avec un compl. prép. introd. par à désignant l'objet qui produit la sensation ou la perception] Sensible à la chaleur, au froid, à la douleur, à la lumière. Les nerfs sont moins sensibles à la différence de pression elle-même qu'aux variations brusques de cette différence (H. POINCARÉ, Valeur sc., 1905, p. 135). V. supra ex. 1.
PHILOS. Qui appartient à la sensibilité. Excitation sensible. L'intuition sensible est en mathématiques l'instrument le plus ordinaire de l'invention (H. POINCARÉ, Valeur sc., 1905, p. 34). La différence d'orientation des figures symétriques par rapport à un plan dans l'espace ordinaire est apparue à Kant comme une intuition sensible, irréductible à toute détermination conceptuelle, et cette intervention nécessaire de la sensibilité dans la connaissance de la gauche et de la droite est à l'origine de la distinction kantienne entre la sensibilité et l'entendement (Gds cour. pensée math., 1948, p. 54).
2. En partic.
a) Qui peut éprouver certaines sensations à un haut degré, qui a une faculté de percevoir certaines impressions très développée. Odorat, ouïe sensible. C'est la note qui marque le ton, comme c'est la voyelle qui marque la voix. Mais ces différences de ton, qui sont assez grandes dans la musique pour être appréciées par toute oreille sensible et exercée, sont souvent à peine assignables dans le discours, et toujours impossibles à marquer avec exactitude (DESTUTT DE TR., Idéol. 2, 1803, p. 327):
2. Pendant plus de vingt minutes, tout le temps que tu insistais pour l'avoir, ce baiser que j'étais bien décidée à te donner, tout le temps que je me faisais prier — parce qu'il fallait te le donner selon les formes — je suis arrivée à m'anesthésier. Complètement. Dieu sait pourtant que j'ai la peau sensible: je n'ai rien senti, jusqu'à ce que nous nous soyons relevés.
SARTRE, Nausée, 1938, p. 189.
[Constr. avec un compl. prép. introd. par à désignant l'objet qui produit la sensation ou la perception] Être sensible au bruit. On sait qu'ignorer une langue rend l'oreille plus sensible à son harmonie (BAUDEL., Paradis artif., 1860, p. 413). L'expérience concrète découvre à l'intérieur de l'oreille, et presque sans rapport avec l'oreille musicale, un œil sonore, sensible aux formes et aux couleurs des sons, et aussi, puisqu'il y a deux oreilles comme deux yeux, au relief de ces sons (SCHAEFFER, Rech. mus. concr., 1952, p. 194).
b) Qui a une grande sensibilité, qui réagit aux moindres contacts. Blessure demeurée sensible, endroit, point sensible. Le maladroit enfant (...) venait, sans le savoir, sans le vouloir, sans y prétendre le moins du monde, d'enfoncer le doigt à l'endroit le plus sensible de sa plaie (GOBINEAU, Pléiades, 1874, p. 113). À l'examen clinique le foie est sensible, un peu gros (QUILLET Méd. 1965, p. 148).
c) Vulnérable, prédisposé à subir certaines atteintes physiques. Synon fragile. Gorge, estomac, peau sensible; reins sensibles. Toutes ces parties [stigmate, style, ovaire] sont très sensibles dans la plupart des fleurs (BERN. DE ST-P., Harm. nat., 1814, p. 323). Il était fier de ses pieds sensibles, qui le forçaient à porter, été comme hiver, deux chaussettes de laine superposées (MONTHERL., Célibataires, 1934, p. 741).
[Constr. avec un compl. prép. introd. par de désignant l'organe ou l'organisme vulnérable] Sensible de la gorge, des bronches, des poumons. (Dict. XIXe et XXe s.).
[Constr. avec un compl. prép. introd. par à désignant l'agent de la réaction] Sensible au brouillard, à la chaleur, à l'infection. Les Amérindiens en revanche résistent fort bien à cette maladie [la pneumonie], alors qu'ils sont très sensibles au paludisme des basses régions chaudes (Tiers Monde, 1956, p. 107). Certaines espèces fruitières sont sensibles à la chlorose (BOULAY, Arboric. et prod. fruit., 1961, p. 97).
3. Au fig. [En parlant d'une pers., d'un organisme, d'un système, d'un dispositif] Synon. faible, fragile, névralgique, vulnérable. Côté, partie, point sensible. Les réfugiés, encore une fois, ont pesé sur le point sensible, qui est la Bourse (GOBINEAU, Corresp. [avec Tocqueville], 1850, p. 117). Ne vous inquiétez pas de Lévy, et n'en parlons plus. Il n'est pas digne d'occuper notre pensée une minute. Il m'a profondément blessé dans un endroit sensible, le souvenir de mon pauvre Bouilhet. Cela est irréparable (FLAUB., Corresp., 1872, p. 458).
B. — [En parlant d'une pers. et p. méton. du déterminé]
1. Qui est capable de ressentir profondément des émotions et des sentiments; qui est doué d'une vie affective intense. Synon. émotif. Âme sensible. J'ai, quant à moi, si peu de goût pour le monde vivant, que, pareil à ces femmes sensibles et désœuvrées qui envoient, dit-on, par la poste leurs confidences à des amis imaginaires, volontiers je n'écrirais que pour les morts (BAUDEL., Paradis artif., 1860, p. 346). Il y avait de la fierté dans sa voix, quand il déclarait: « C'est cuit. Bouffez! » Et les hommes, qui savaient qu'un cuistot est sensible, n'étaient pas chiches de compliments. La bouche pleine, ils s'arrêtaient de mâcher pour dire: « Ch'est bath... » (BENJAMIN, Gaspard, 1915, p. 35).
2. En partic.
a) Capable d'éprouver des sentiments de compassion, de pitié, d'affection. La plupart des hommes sont maintenant trop sensibles pour s'intéresser à des malheurs réels; on pleure au spectacle, à la lecture d'un roman: on s'évanouirait à la vue des maux dont la supposition fait verser tant de larmes (JOUY, Hermite, t. 4, 1813, p. 298). Ne m'envoyez pas votre neveu. J'ai le cœur sensible... Tenez, un exemple: quand je vois un pauvre sur le trottoir, je traverse, parce que je sais bien que, si je rencontrais son regard, ce serait plus fort que moi, je lui donnerais. Que va-t-il se passer? Votre neveu va me faire pitié, et je vais me décarcasser pour lui (MONTHERL., Célibataires, 1934, p. 814). Empl. subst. Personne capable d'éprouver des sentiments de compassion, de pitié. On ne s'afflige pas plus d'être devenu un autre, les années ayant passé (...), qu'on ne s'afflige, à une même époque, d'être tour à tour les êtres contradictoires, le méchant, le sensible, le délicat, le mufle, le désintéressé, l'ambitieux qu'on est tour à tour chaque journée (PROUST, Fugit., 1922, p. 642). Le malheur est le meilleur moyen que Dieu ait trouvé pour reprendre la générosité aux âmes bonnes, l'éclat aux belles, la pitié aux sensibles (GIRAUDOUX, Sodome, 1943, II, 7, p. 139).
b) Vx. Qui est capable d'éprouver un sentiment amoureux. Elle avait été sensible autrefois, et même, dans une peine de cœur, avait écrit à Béranger pour en obtenir un conseil. Mais elle s'était aigrie sous les bourrasques de l'existence (FLAUB., Éduc. sent., t. 2, 1869, p. 248).
3. [Constr. avec un compl. prép. introd. par à désignant ce qui provoque la sensibilité] Qui se laisse toucher par, qui réagit, est impressionné par. Sensible à la flatterie, à la louange, à certains procédés; sensible à la beauté, au charme; sensible à l'éloquence de qqn; sensible à la misère, aux malheurs de qqn. Elle ne s'avouait pas combien elle était bouleversée par sa présence, combien elle était sensible encore au charme câlin de son regard, de son sourire, de ses gestes: il était l'homme de sa vie (MARTIN DU G., Thib., Cah. gr., 1922, p. 656). Nous laissions l'U.R.S.S. et le Parti faire tout le boulot, nous étions même plutôt trotskistes, nous parlions de la « Révolution permanente », nous étions des « intellectuels en chômage », plus sensibles au pathétique de l'insurrection qu'à la Révolution (VAILLAND, Drôle de jeu, 1945, p. 14).
C. — [En parlant d'une chose]
1. Qui est susceptible de réaction. Papier, pellicule, plaque, surface sensible; réactif sensible. Le photographe fixe une image fugitive sur la plaque sensible, par un lavage approprié (BERNANOS, Joie, 1929, p. 642). L'obtention de couches sensibles de plus en plus rapides permit bientôt la réalisation d'instantanés (Hist. gén. sc., t. 3, vol. 1, 1961, p. 169).
Corde sensible. V. corde III B 1.
[Constr. avec un compl. prép. introd. par à indiquant l'agent de la réaction] Préparation sensible au froid. Presque tous les colloïdes d'origine animale ou végétale mélangés à un bichromate alcalin ou organique deviennent, après séchage, sensibles à l'action de la lumière (Civilis. écr., 1939, p. 10-2). Inquiétude de l'eau: sensible au moindre changement de la déclivité (PONGE, Parti pris, 1942, p. 42).
En partic. [En parlant d'un mécanisme, d'un appareil] Dont le fonctionnement peut être troublé par. Dispositifs de guidage électroniques (...) assurant une grande précision, mais très sensibles au brouillage (BILLOTTE, Consid. strat., 1957, p. 40-16).
2. [En parlant d'un instrument de mesure ou d'un appareil servant à enregistrer ou capter des signaux] Capable de mesurer, d'enregistrer ou de capter des phénomènes infimes. Balance, thermomètre sensible; micro sensible. Le résonateur de Righi fonctionne à la manière des résonateurs rectilignes de Hertz (...). Cet appareil très sensible se prête facilement aux mesures (H. POINCARÉ, Théorie Maxwell, 1899, p. 64). La cellule photoélectrique, sensible au flux total qu'elle reçoit, se prête sans difficulté à la comparaison des galaxies aux étoiles (Hist. gén. sc., t. 3, vol. 2, 1964, p. 549).
3. MUS. Note sensible, ou, p. ell. du déterminé, la sensible. Septième degré de la gamme diatonique. Si l'on retranche le son fondamental dans l'accord de neuvième de dominante, les quatre sons qui restent forment un accord auquel on a donné le nom de septième de sensible parce que la note sensible en devient le son le plus grave par la suppression de la véritable fondamentale (SAVARD, Harm., t. 1, 1853, p. 159). Prenez l'habitude, en principe, de faire monter la sensible à la tonique, dans les leçons élémentaires du début [de l'harmonie] (KOECHLIN, Harm., t. 1, 1927, p. 12).
II. — Qui peut être perçu par la sensibilité.
A. — PHILOSOPHE
1. Qui peut être perçu par les sens. Monde sensible; réalité sensible; objets sensibles; apparences, phénomènes sensibles. Le témoignage de la vue ou de l'ouïe, sur les qualités sensibles qui sont de leur ressort, trompe rarement (OZANAM, Philos. Dante, 1838, p. 104). Il faut choisir: ou bien réduire le langage à la seule fonction transitive d'un système de signaux: ou bien souffrir que certains spéculent sur ses propriétés sensibles, en développent les effets actuels, les combinaisons formelles et musicales, — jusqu'à étonner parfois, ou exercer quelque temps les esprits (VALÉRY, Variété III, 1936, p. 18).
En partic. [P. oppos. à intelligible] Intensité, durée, détermination volontaire, voilà les trois idées qu'il s'agissait d'épurer, en les débarrassant de tout ce qu'elles doivent à l'intrusion du monde sensible (BERGSON, Essai donn. imm., 1889, p. 172). Le doute cartésien est une méthode de découverte de l'esprit. (...) une méthode pour nous élever de la nature matérielle à la nature spirituelle ou, suivant la terminologie platonicienne, du monde sensible au monde intelligible (LACROIX, Marxisme, existent., personn., 1949, p. 86).
♦ [Constr. avec un compl. prép. introd. par à désignant l'agent de la perception] Qui peut être perçu par. Sensible au toucher, à la vue. La parole et l'écriture, ou plutôt la pensée exprimée par des signes sensibles à l'oreille ou aux yeux, est le moyen unique de communication entre les intelligences (BONALD, Législ. primit., t. 1, 1802, p. 167). La grande invention de rendre les lois sensibles à l'œil et comme lisibles à vue s'est incorporée à la connaissance, et double en quelque sorte le monde de l'expérience d'un monde visible de courbes, de surfaces, de diagrammes, qui transposent les propriétés en figures (VALÉRY, Variété III, 1936, p. 181).
Empl. subst. masc. sing. à valeur de neutre. Ce qui peut être perçu par les sens. Il n'y aurait pas le présent, c'est-à-dire le sensible avec son épaisseur et sa richesse inépuisable, si la perception, pour parler comme Hegel, ne gardait un passé dans sa profondeur présente et ne le contractait en elle (MERLEAU-PONTY, Phénoménol. perception, 1945, p. 277).
[Chez Aristote et dans la philos. scolast.]
Sensible commun. Qualité qui peut être perçue par plusieurs sens (d'apr. LAL. 1968).
Sensible propre. Qualité qui ne peut être perçue que par un seul sens (d'apr. LAL. 1968).
[P. oppos. à intelligible] Descartes se trouve en présence des augustiniens dans la même situation que saint Augustin vis-à-vis des platoniciens (...). Il leur dit: « Vous avez bien compris l'essence de la philosophie qui est de s'élever du sensible à l'intelligible, du corporel au spirituel. Seulement vous n'avez pas trouvé un moyen suffisamment intellectuel, qui est le doute » (LACROIX, Marxisme, existent., personn., 1949, p. 87).
2. Qui relève, vient des sens; qui provient de la sensibilité. Données sensibles; évidence sensible. Par le concours des sens qui observent et de la raison qui interprète, on peut franchir sans présomption les limites de l'observation sensible, et arriver, sans cercle vicieux, au terme fixe de comparaison (...) dont on a besoin pour asseoir l'édifice de la théorie (COURNOT, Fond. connaiss., 1851, p. 143). En substituant progressivement aux expériences sensibles particulières des abstractions généralisées, on a permis le développement de l'intelligence humaine et son dépassement du stade animal (HUYGHE, Dialog. avec visible, 1955, p. 58).
[Chez Condillac] Idée sensible. Idée procédant immédiatement des sens. Si aucune de nos idées sensibles ne ressemble et ne peut ressembler à un objet matériel, étendu, figuré, sonore, etc., à plus forte raison nulle idée quelle qu'elle soit ne peut ressembler à un être spirituel (COUSIN, Philos. écoss., 1857, p. 279). Des idées sensibles, nous tirons toutes nos idées générales (COUSIN, Hist. gén. philos., 1861, p. 173).
B. — En partic.
1. Qui peut être facilement perçu par les sens. Refroidissement sensible; sensible différence de poids. Au centre [de la cour de Trinity College] une fontaine rendait sensible par le mouvement de son jet d'eau l'immobilité du décor (MAUROIS, Byron, t. 1, 1930, p. 108):
3. ... tout, sujet, ligne, couleur, mouvement, lumière, combine ses instances pour aboutir à un résultat unique qui se résout en nous par un choc sensible. Et cette harmonie profonde et funèbre, cette fanfare lugubre que Baudelaire entendait comme « un soupir étouffé de Weber », est à la fois beauté poignante de la nature, beauté grave des lignes et des tonalités, beauté finalement d'un état d'âme que tout concourt à recréer en nous, écho de l'âme même de Delacroix.
HUYGHE, Dialog. avec visible, 1955, p. 232.
2. Qui se fait sentir douloureusement, de façon pénible. Douleur sensible. Le mot palpitation du cœur, dans le langage médical usuel, peut être défini un battement du cœur sensible et incommode pour le malade (LAENNEC, Auscult., t. 2, 1819, p. 227). Le premier regard de miss Simons me causa un ébranlement sensible dans la région du cœur. J'éprouvai une commotion tout à fait inusitée, et qui pourtant n'avait rien de douloureux, et il me sembla que quelque chose s'était brisé dans la boîte osseuse de ma poitrine (ABOUT, Roi mont., 1857, p. 53).
3. Dans le domaine affectif ou sentimental. Qui se fait fortement ressentir, qui fait une impression pénible. Savoir que tu es souffrante est une peine sensible pour mon cœur (NAPOLÉON Ier, Lettres Joséph., 1803, p. 81). Je crois que la mort de ton beau-frère a été pour toi une perte peu sensible; aussi, mon cher vieux, n'est-ce pas une lettre de condoléance que je t'écris (FLAUB., Corresp., 1864, p. 14).
C. — P. ext.
1. Qui peut être perçu par une intuition immédiate, qui peut être facilement connu par l'esprit. Synon. évident. Rendre qqc. sensible; distinction, preuve sensible. Tout le monde fantastique de mes contes devenait sensible, évident, et je m'y perdais avec délices (SAND, Hist. vie, t. 2, 1855, p. 274). De vieilles idées qui, jusque-là, pour moi, n'avaient été que purs concepts philosophiques, me devenaient sensibles et présentes comme la lumière, le pain, l'eau et l'air respirable (DUHAMEL, Suzanne, 1941, p. 179).
[Constr. avec un compl. prép. introd. par à désignant l'agent de la perception] Intuitivement saisi, perçu par. Harmonie sensible à l'intelligence. La vérité qu'il recherche ne peut être saisie que par une adhésion immédiate à une intuition telle, qu'elle rende présente, et comme sensible à l'esprit, la dépendance réciproque des parties et des propriétés du système qu'il considère (VALÉRY, Variété [I], 1924, p. 127). Proust écrit de l'amour qu'il est « le temps rendu sensible au cœur » et l'amour qu'il vit, cependant, n'est qu'un supplice, un leurre où ce qu'il aime se dérobe sans fin à son étreinte (G. BATAILLE, Exp. int., 1943, p. 211).
2. Qui est assez grand, intense, important, manifeste pour être perçu, senti; p. ext., remarquable, appréciable. Baisse sensible de la température, des prix; progrès sensibles. Après des années d'efforts, d'insuccès, de recommencements, de grèves légitimes et de violences injustes, les bûcherons avaient obtenu une augmentation sensible des salaires. La journée était bien payée (R. BAZIN, Blé, 1907, p. 91). La minute qui suivit parut longue. Elle ne s'était pas écoulée, cependant, que déjà l'amélioration était sensible. Peu à peu, à petits coups, la respiration reprit. Bientôt, il fut manifeste que la face se décongestionnait (MARTIN DU G., Thib., Mort père, 1929, p. 1290).
REM. 1. Sensiblard, -arde, adj. et subst., fam., péj. Qui est d'une sensibilité excessive, geignarde; qui fait preuve de sensiblerie. Je ne suis pas un sensiblard, dit-il (VIALAR, Les Invités de la chasse, 1969, p. 115 ds ROB. 1985). 2. Sensibilisme, subst. masc. Doctrine, système philosophique faisant prévaloir la sensibilité. Les défenseurs du sensibilisme (ce mot, ou tout autre qu'on trouvera meilleur, est devenu nécessaire) (J. DE MAISTRE, Soirées St-Pétersb., t. 1, 1821, p. 156).
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. Adj. A. 1. ca 1265 « qui a la faculté de recevoir les impressions physiques » ame sensible (BRUNET LATIN, Tresor, éd. F. J. Carmody, II, 30, p. 200); 1314 en parlant d'un nerf (HENRI DE MONDEVILLE, Chirurgie, éd. Ch. Bos, 275, p. 81); 2. 1559 « facilement accessible à certaines idées » (AMYOT, Caton, 18 ds LITTRÉ); 3. ca 1590 « qui réagit vivement aux impressions physiques » (MONTAIGNE, Essais, I, 26, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, 153); 4. 1643 « qui est aisément touché, ému » (CORNEILLE, Pomp., IV, 1); 5. a) 1751 mus. accord sensible (Encyclop. t. 1, s.v. accord, p. 78b); 1752 note sensible (D'ALEMBERT, Élémens de mus., art. 77); b) 1751 phys. « qui indique les plus légères différences » (Encyclop. t. 2, p. 77b, s.v. baromètre: on a essayé plusieurs fois s'il étoit possible de rendre les variations du baromètre plus sensibles). B. 1. Ca 1320 « qui fait impression sur les sens » (Quatre filles de Dieu, cinquième version, 10, éd. A. Långfors, Notices et Extraits des mss, t. 42, p. 274); 2. 1559 « qui peut être perçu immédiatement par l'esprit » (AMYOT, Lucull., 16 ds LITTRÉ); 1670 sensible à « intuitivement senti par » (PASCAL, Pensées, éd. L. Lafuma, p. 552, § 424); 3. 1580 « qui se fait douloureusement sentir » (MONTAIGNE, op. cit., II, 12, p. 481). II. Subst. 1. 1680 « ce qui est susceptible d'être ému » (RICH. t. 2); 2. 1695 philos. sensibles communs, sensibles propres (BOSSUET, Instruction sur les états d'oraison, X, 17 ds LITTRÉ). Empr. au lat. impérial sensibilis, au sens passif « ce qui peut être ressenti », puis sens actif « doué de sensibilité », dér. de sensum, supin de sentire (v. sentir). Fréq. abs. littér.:6 352. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 10 863, b) 5 795; XXe s.: a) 5 767, b) 11 171. Bbg. Europäische Schlüsselwörter. II. 1. München, 1964, pp. 143-151. — GOHIN 1903, p. 300. — GRUNDT (L.-O.). Ét. sur l'adj. invarié en fr. Bergen-Oslo-Tromsø, 1972, p. 239. — QUEM. DDL t. 5 (s.v. sensibilisme). — SCKOMM. 1933, pp. 46-47.

sensible [sɑ̃sibl] adj.
ÉTYM. XIIIe; du lat. sensibilis, au sens passif « qui peut être senti », en lat. class., au sens actif « qui peut sentir », en lat. médiéval; de sentire « sentir ».
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I (Sens actif). Qui peut sentir ou est particulièrement apte à sentir.
1 Capable de sensation et de perception. || Les êtres sensibles (→ Heureux, cit. 35; imagination, cit. 3; 2. palais, cit. 2). || La nature (cit. 47) n'est point animée ni sensible.(En parlant du corps, des organes). || La pulpe sanguine et sensible (→ Chair, cit. 24). || Neurones, terminaisons sensibles (→ Réflexe, cit. 1).
1 Il semble en effet que si je suis obligé de ne faire aucun mal à mon semblable, c'est moins parce qu'il est un être raisonnable que parce qu'il est un être sensible, qualité qui, étant commune à la bête et à l'homme, doit au moins donner à l'une le droit de n'être point maltraitée inutilement par l'autre.
Rousseau, De l'inégalité parmi les hommes, Préface.
2 (…) si le système nerveux n'est pas sensible jusqu'à la douleur ou jusqu'à l'extase, il ne nous communique que des commotions moyennes, et des satisfactions vulgaires.
Maupassant, la Vie errante, II.
Relativement plus sensible (que la moyenne, qu'une référence). || Oreille (cit. 18 et 21), ouïe sensible. Fin. || Antennes (cit. 3) très sensibles.
Philos. Qui appartient à la sensibilité (1.). || Intuition sensible. || Excitation sensible. Sensitif, sensoriel.
Sensible à… : excitable par…, capable de sentir, de percevoir… || L'œil n'est pas sensible aux radiations infrarouges (→ Rayonnement, cit. 4). || Être sensible aux choses extérieures (→ Indifférent, cit. 12; influence, cit. 3). || Sensible à la chaleur et au froid (→ Période, cit. 1). Craindre. || Sensible au plaisir, à la douleur (→ Hypocondrie, cit. 4; moscovite, cit. 1).
(Sans compl. en à). Qui est particulièrement sensible à la douleur, que le moindre contact rend douloureux ou fait souffrir. || Partie du corps, régions sensibles, devenues sensibles (→ Accoutumance, cit. 4; mamelon, cit. 1). || Endroit (cit. 15), point sensible. Névralgique (cit.; et → Calus, cit. 2).Une femme trop sensible. Délicat, vulnérable; sensitive. || Il est sensible, mais pas douillet.Fig. || Avoir l'épiderme sensible.Rendre moins sensible. Désensibiliser, insensibiliser.
3 Sans être goutteux, il avait les pieds si sensibles, il marchait si difficilement qu'il gardait des souliers en veau d'Orléans par toutes les saisons.
Balzac, Ursule Mirouët, Pl., t. III, p. 289.
4 Leur adresse, qui consistait à frapper sur les parties les plus sensibles, comme le visage et le bas-ventre (…)
Lautréamont, les Chants de Maldoror, IV.
2 (Personnes). Capable de sentiment, dont la vie affective est intense; apte à ressentir profondément les impressions et à y intéresser sa personne tout entière. Émotif, impressionnable. || Êtres, âmes, cœurs sensibles (→ Affection, cit. 7; dur, cit. 19; étourdir, cit. 15; fond, cit. 32; montrer, cit. 38; perdre, cit. 57; raffinement, cit. 4). || Ce que le XVIIIe siècle appelait l'homme sensible (→ Incompris, cit. 2). || Femmes à la fois intellectuelles et sensibles (→ Matrone, cit. 1). || « Les grands poètes sont les êtres les moins sensibles (…) ils observent (cit. 14), étudient (…) » (Diderot).
5 Ô Julie ! que c'est un fatal présent du ciel qu'une âme sensible ! Celui qui l'a reçu doit s'attendre à n'avoir que peine et douleur sur la terre. Vil jouet de l'air et des saisons, le soleil ou les brouillards, l'air couvert ou serein, règleront sa destinée, et il sera content ou triste au gré des vents. Victime des préjugés il trouvera dans d'absurdes maximes un obstacle invincible aux justes vœux de son cœur (…) Il cherchera la félicité suprême sans se souvenir qu'il est homme : son cœur et sa raison seront incessamment en guerre, et des désirs sans bornes lui prépareront d'éternelles privations.
Rousseau, Julie ou la Nouvelle Héloïse, I, XXVI.
6 Il est sensible à l'excès. Sombre et tendre, pensif et violent, d'humeur parfois exubérante, le plus souvent taciturne, en tout il est extrême.
André Suarès, Trois hommes, « Dostoïevski », I.
Particulièrement capable d'éprouver les sentiments d'amour, de charité, ou de pitié et d'humanité; prompt à compatir à la souffrance d'autrui. 1. Aimant (cit. 1), bon, compatissant, généreux, humain, tendre. || Sensible et humanitaire (→ Affranchissement, cit. 3), porté à la bienfaisance (cit. 4). || Cœur trop compatissant, trop sensible (→ Discernement, cit. 6; domaine, cit. 6). || Larmoyeur (cit.), pleureur (cit. 2) et sensible.
7 Oui, ma fille, il est vrai qu'un père est toujours père (…)
Je porte un cœur sensible, et vous l'avez percé (…)
Corneille, Polyeucte, V, 3.
N. || Un, une sensible : une personne sensible. || C'est un sensible, un grand sensible.
8 Il y a des sensibles pour qui la vue dans les yeux des autres des larmes qu'eux-mêmes retiennent, est exaspérante.
Proust, la Prisonnière, Pl., t. III, p. 108.
Sensible à… : qui se laisse toucher par…, qui ressent vivement… Accessible, réceptif. || Sensible aux maux d'autrui, à la misère du peuple… (→ Aimer, cit. 4; amaigrir, cit. 1). || Sensible à la flatterie (cit. 4), à la louange (cit. 2), à la popularité (cit. 1), à certains procédés (→ Gens, cit. 28; invincible, cit. 2)… || Croyez bien que j'y suis sensible. Flatter. || Sensible à la beauté (→ Associer, cit. 27), à la cadence (cit. 2), au charme (→ Désuet, cit. 1), à la fraîcheur (cit. 13) || Sensible à la force d'une argumentation (cit. 3), à une objection, à l'imaginaire (cit. 9), aux influences…
3 (En parlant d'objets matériels). Capable de réaction. || Balance sensible.Photogr. || Pellicule, plaque, papier… sensible, ultra-sensible ( Rapide). || Mesurer la sensibilité d'une surface sensible. Sensitométrie.Qui réagit à…, est soumis à l'action de… — ☑ Par métaphore. Faire vibrer la corde sensible.
9 (…) des plus secrets métaux dégageant tout ce qui écoute et frémit, il sut faire des lames si sensibles qu'elles s'émussent à la seule approche de la main (…)
Claudel, Connaissance de l'Est, La cloche.
Mus. || Note sensible, ou n. f., la sensible : septième degré de la gamme diatonique, qui se trouve un demi-ton au-dessous de la tonique.
10 Les musiciens français, en dénommant les divers degrés de l'échelle, semblent s'être inspirés surtout des fonctions harmoniques des degrés V et VII. Le Ve degré, base exclusive de l'Accord Général, a reçu l'étiquette justifiée de Dominante. Le VIIe degré, le si, qui paraît avoir, disaient nos pères, tant de « sensibilité » pour l'ut, a été baptisé Sensible.
M. Emmanuel, Hist. de la langue musicale, t. I, p. 47.
Sensible à… || Navire, vaisseau sensible au plus léger mouvement du gouvernail. → Hippogriffe, cit. 2.
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II (Déb. XIVe). Sens passif. Qui peut être senti ou se fait particulièrement sentir.
1 Qui peut être perçu par les sens (notamment par oppos. à intelligible, cit. 3). Charnel, matériel, palpable, phénoménal, tangible, visible. || Le monde, la nature, les objets sensibles (→ Énigme, cit. 7; idée, cit. 5 et 10). || Faits sensibles. Phénomène. || Apparences sensibles (→ Imitation, cit. 12; réalité, cit. 4). || Qualités (cit. 2) sensibles. || Minimum, seuil, degré sensible (→ Guiderope, cit.). || Marques, signes, miracles (cit. 2 et 6) sensibles (→ Attendre, cit. 81; pitié, cit. 6). || Coloration légère (cit. 18) à peine sensible (→ aussi Frapper, cit. 45). Imperceptible (cit. 2).Sensible à…, qui peut être perçu par… (tel ou tel sens). Perceptible. || Ébranlements (cit. 1) sensibles au tact. || Sensible à l'œil (→ Graphique, cit. 4), à l'organisme (→ Oxygène, cit. 5).
2 Qui peut être perçu par une intuition analogue à l'intuition sensible. Apparent, clair, évident. || Il rendait sensible, évidente, l'aggravation (cit.) de la maladie. || Rendre une opposition plus sensible (→ Antithèse, cit. 4). || Chaque jour plus sensible (→ Avoir, cit. 93). || Effets déjà sensibles (→ Crise, cit. 9). || Différences qui commencent à être sensibles (→ Individu, cit. 4). || Preuve sensible (→ Cesser, cit. 12).Sensible à… : intuitivement senti par… || « Dieu sensible au cœur » (cit. 161, Pascal). || Rendre sensible à certains (→ Inconnu, cit. 6). || L'harmonie sensible à l'intelligence (→ Joli, cit. 12).
11 Le déshonneur est sûr, mon malheur m'est visible (…)
Mais le détail encor ne m'en est pas sensible,
Et mon juste courroux prétend s'en éclaircir.
Molière, Amphitryon, II, 2.
12 — Tu me dis « vous » tout d'un coup ? Tu es fâchée ?
— Oh ! non, seulement j'aime bien alterner, il ne faut pas user le tutoiement, c'est si agréable quand ça reste sensible.
A. Maurois, Bernard Quesnay, XI.
Assez grand, assez intense pour être perçu, senti, et, par suite, non négligeable. Appréciable, important, notable. || Une baisse sensible des prix (→ Optimisme, cit. 6). || Accroissement, progrès (cit. 12), amélioration sensible (→ Galbe, cit. 5).
3 (Vieilli). Qui se fait douloureusement sentir. Pénible. || Une trop sensible douleur (→ Après, cit. 10; et aussi étrange, cit. 3). || Les maux qui pouvaient m'être les plus sensibles (→ Haïr, cit. 8). || Un affront (cit. 3) si sensible. || L'indécence (cit. 5) avec laquelle nous étions traités m'était sensible. || Cette perte lui a été très sensible. Affecter. || Il lui aurait été très sensible qu'on l'accusât (→ Homme, cit. 131).
13 Si vous m'aimiez, Madame, il vous serait sensible
De voir qu'à d'autres vœux mon cœur fût accessible.
Corneille, Othon, I, 4.
4 (Du sens II., 2.). Très délicat, qui requiert des précautions particulières, à cause des réactions possibles. Délicat, difficile. || Dossier social sensible. || Affaire sensible. || Quartier sensible. || Banlieues sensibles. Difficile.
CONTR. Insensible; inanimé; aride, bronze (de), cruel, desséché, dur, étroit, froid, glacial, imperméable, réfractaire; intelligible; caché, insaisissable.
DÉR. Sensibilisme, sensiblard, sensiblement, sensiblerie. V. Sensibiliser, sensibilité, sensitométrie.
COMP. Hypersensible, insensible, photosensible, suprasensible.

Encyclopédie Universelle. 2012.