avenu, ue [ av(ə)ny ] adj.
• 1765; biens avenus par succession 1265; p. p. de l'a. v. avenir → advenir
♦ Vx ou littér. Choses avenues, non avenues, qui sont, ne sont pas arrivées. Une qualité particulière du silence suffit « à rendre non avenus tant de pensées, d'événements et de peines qui me séparent de cette enfance » (Yourcenar). — Mod. NUL ET NON AVENU [ nylenɔnav(ə)ny ] :inexistant. Je considère cette déclaration comme nulle et non avenue.
● avenu, avenue adjectif (participe passé de l'ancien français avenir, arriver) Nul et non avenu, considéré comme n'ayant jamais existé. ● avenu, avenue (difficultés) adjectif (participe passé de l'ancien français avenir, arriver) → advenir ● avenu, avenue (expressions) adjectif (participe passé de l'ancien français avenir, arriver) Nul et non avenu, considéré comme n'ayant jamais existé. ● avenu, avenue (homonymes) adjectif (participe passé de l'ancien français avenir, arriver) avenue nom féminin
avenu, ue
pp. de l'anc. verbe avenir. Loc. Nul(le) et non avenu(e): considéré(e) comme inexistant(e), sans valeur.
⇒ADVENU, UE, AVENU, UE, part. passé, adj. et subst.
I.— Part. passé de a(d)venir.
II.— Emploi adj., advenu ou avenu.
A.— Avenu (ou rarement advenu) [Dans des expr. négatives]
1. Non avenu (except. advenu). [En parlant d'une pers. ou d'une chose existant ou ayant réellement existé, mais considérée, apr. examen, comme n'ayant plus de valeur jur. ou hist.] Synon. aboli, annulé, disparu, fini, ignoré, inconnu, inexistant, nul; anton. arrivé, continué, devenu, fait, recommencé, reconnu, réel, venu.
a) [En parlant d'une pers.] :
Comme s'il me parlait un patois inconnu.
A. POMMIER, Crâneries et dettes de cœur, 1842, p. 60.
• 2. Louis XVIII aussi datait son bienfait de l'an dix-neuvième de son règne, regardant Bonaparte comme non avenu, de même que Charles II avait sauté à pieds joints par-dessus Cromwell : c'était une espèce d'insulte aux souverains qui avaient tous reconnu Napoléon, et qui dans ce moment même se trouvaient dans Paris. Ce langage suranné et ces prétentions des anciennes monarchies n'ajoutaient rien à la légitimité du droit et n'étaient que de puérils anachronismes.
F.-R. DE CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 2, 1848, p. 534.
b) [En parlant d'une chose antérieurement arrivée ou décidée] :
• 3. La conscience est comme un témoin qui nous avertit de tout ce qui se fait dans l'intérieur de notre âme. Elle n'est le principe d'aucune de nos facultés, mais elle est leur lumière à toutes. Ce n'est pas parce que nous avons conscience de ce qui se passe en nous qu'il se passe en nous quelque chose; mais ce qui s'y passe serait comme non avenu s'il ne nous était attesté par la conscience...
V. COUSIN, Hist. de la philosophie du XVIIIe siècle, t. 1, 1829, p. 99.
• 4. Je viens d'apprendre que Monsieur Victor Hugo se portait candidat pour succéder à feu Monsieur Michaud. J'ai l'honneur de vous prier dès lors de regarder la lettre par laquelle je vous annonçai ma candidature comme non avenue je renonce à me présenter en concurrence avec lui.
H. DE BALZAC, Correspondance, 1839, p. 775.
• 5. Il y a du Montaigne en chacun de nous. Tout goût, toute humeur et passion, toute diversion, amusement et fantaisie, où le christianisme n'a aucune part et où il est comme non avenu, où il est, non pas nié, non pas insulté, mais ignoré par une sorte d'oubli facile et qui veut se croire innocent, tout état pareil en nous, qu'est-ce autre chose que du Montaigne?
Ch.-A. SAINTE-BEUVE, Port-Royal, t. 2, 1842, p. 410.
• 6. La rupture qu'on avait crainte entre la Russie et la Porte n'arriva pas : la modération d'Alexandre retarda l'événement. (...) j'écrivis maintes dépêches qui sont allées moisir dans nos archives avec le rendu compte d'événements non advenus.
F.-R. DE CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 3, 1848, p. 96.
• 7. Ce primitif s'appelle Lucas Van den Leyden et il rend à mon sens inutiles et non avenus les quatre ou cinq cents ans de peinture qui sont venus après lui.
A. ARTAUD, Le Théâtre et son double, 1939, p. 40.
— En partic., dans la lang. du dr. :
• 8. Si l'assignation est nulle par défaut de forme, si le demandeur se désiste de sa demande, s'il laisse périmer l'instance, ou si sa demande est rejetée, l'interruption est regardée comme non avenue.
Code civil, 1804, p. 410.
2. Nul et non avenu (except. advenu). Même sens.
a) Dans un contexte jur. Expressément déclaré ou considéré comme non avenu :
• 9. Je déclare que je suis inviolablement pourvu du grade dont vous-même m'avez proclamé revêtu et que prétend révoquer la décision dont vous me faites l'honneur de me prévenir. Cette décision est, de fait comme de droit, nulle et non avenue. Je proteste contre cette décision. Et je vous prie de vouloir bien en provoquer la prompte révocation du général en chef.
V. HUGO, Correspondance, 1830, p. 481.
• 10. Hâtons-nous d'ajouter, continua le notaire, que le testateur n'ayant le droit d'aliéner qu'une partie de sa fortune, et ayant aliéné le tout, le testament ne résistera point à l'attaque, mais sera déclaré nul et non avenu.
A. DUMAS Père, Le Comte de Monte-Cristo, t. 2, 1846, p. 217.
• 11. Personne ne s'occupait de l'accord Darlan-Clark, tenu pour nul et non avenu par le Comité de la libération nationale et dont j'avais hautement déclaré à la tribune de l'Assemblée consultative qu'aux yeux de la France il n'existait pas.
Ch. DE GAULLE, Mémoires de guerre, L'Unité, 1956, p. 213.
Rem. Sur cette expr. pléonastique, cf. R. LINDON, Le Style et l'éloquence judiciaires, Paris, Albin Michel, 1968, p. 39 : ,,Ces excès sont ridicules. Même sans mériter cette épithète, d'autres clichés sont de purs pléonasmes. Pourquoi « nul et non avenu », (...) « en même et semblable état », « pour servir et valoir ce que de droit »? Je sais bien qu'ils viennent naturellement sous la plume, mais il me semble qu'il y aurait profit à les éliminer.``
b) P. ext., dans la lang. commune :
• 12. Peut-être chaque soir acceptons-nous le risque de vivre, en dormant, des souffrances que nous considérons comme nulles et non avenues parce qu'elles seront ressenties au cours d'un sommeil que nous croyons sans conscience.
M. PROUST, À la recherche du temps perdu, Sodome et Gomorrhe, 1922, p. 980.
• 13. Le fils repenti rentre à la maison (que le fils vertueux n'a jamais quittée) (...) il n'y a pas équivalence entre celui qui est resté et celui qui est parti, puis revenu, qui a péché, regretté et, sinon aboli le fait d'avoir-fait, du moins réparé la chose faite... On peut, recommençant da capo, tenir le temps pour nul et non advenu; mais on ne peut faire que le devenir ne soit pas devenu! On peut faire comme si rien n'était arrivé, on ne peut faire que rien ne soit arrivé! Malheur à ceux qui négligent le temps!
V. JANKÉLÉVITCH, Le Je-ne-sais-quoi et le presque-rien, 1957, p. 154.
B.— Advenu
1. [En parlant d'un événement] Qui est arrivé, qui s'est produit. Synon. arrivé, devenu, fait, réel; anton. inexistant, nul :
• 14. Quand nous décrivions tout à l'heure le recouvrement du temps par lui-même, nous ne réussissions à traiter le futur comme un passé qu'en ajoutant : un passé à venir, et le passé comme un avenir qu'en ajoutant : un avenir déjà advenu...
M. MERLEAU-PONTY, Phénoménologie de la perception, 1945, p. 484.
2. MYSTIQUE ANC. [En parlant de l'âme] Qui est entré dans le monde en s'unissant à un corps. Synon. allé, arrivé, venu :
• 15. LES CAINITES. — L'évangile de Judas!
BASILIDE. — Le traité de l'âme advenue!
MANÈS. — La prophétie de Barcouf!
Antoine se débat, leur échappe; ...
G. FLAUBERT, La Tentation de saint Antoine, 1874, p. 71.
Rem. Dans cet emploi, advenu se rapproche de l'emploi subst. anc. : « étranger nouvellement venu » (cf. Ac. Compl. 1842) (cf. aussi infra III A). Il s'agit pour l'âme de se joindre à un être corporel au moment de la naissance : ,,... l'âme, si le système de Basilide est conséquent avec lui-même, ne peut procéder du démiurge que (...) par voie d'émanation. Elle est, en effet, représentée comme quelque chose de divin, d'étranger à ce monde, d'antérieur à son union avec le corps.`` (Théol. cath. t. 2, I 1910, s.v. Basilide).
III.— Emploi subst. masc. ou fém., advenu.
A.— Masc. ou fém., domaine mystique, rare. Personne survenue en un certain lieu, à un certain moment non absolument prévisibles (cf. supra) :
• 16. Une juvénile forme féminine, en mante sombre, en était descendue, seule. La vision, après s'être orientée sur la plage crépusculaire, s'était hâtée, en courant vers les torches (...) l'homme au masque mystérieux était étendu dans son manteau.
— Ô malheureux! s'écria dans un sanglot et en se cachant la face, la jeune apparition lorsqu'elle arriva, tête nue, à côté de lui.
— Adieu! Adieu! répondit-il. (...) Tu es libre!.... ajouta-t-il, en laissant retomber sa tête sur la pierre.
— Tu es délivré! répondit la blanche advenue en élevant une petite croix d'or vers les cieux...
Ph.-A.-M. DE VILLIERS DE L'ISLE-ADAM, Contes cruels, Duke of Portland, 1883, pp. 107-108.
• 17. Combien (...) la grande page de Rubens nous apparaît consolante dans sa majesté et sa tendresse! Une page entre ses deux marges : d'un côté, la Vierge radieuse et triomphante qui vient rendre visite à sa cousine Élisabeth, et, de l'autre, c'est l'Attente constituée de l'ancienne Loi en la personne de Siméon qui reçoit le nouvel Advenu.
P. CLAUDEL, Un Poète regarde la Croix, 1938, p. 213.
Rem. Il s'agit dans l'ex. 16 d'une apparition, dans l'ex. 17 (qui joue sur le lat. patristique adventus « nativité ») de Jésus au moment de sa venue dans le monde.
B.— STYL., PHILOS.
1. Masc. Ce qui est réellement venu à l'existence à un certain moment :
• 18. Simplement, pour nous devant qui la biographie des morts s'étend différente de ce que la vie a été pour les vivants, — non pas l'inconnu qui, peu à peu, par fragments successifs, devenait connaissable, mais un tout dont à chaque moment nous possédons la suite et la fin et dont les possibles ont été supprimés par l'advenu, — l'analyse, dans Raoul Spifame, a l'accent d'une involontaire prescience et le diagnostic est pronostic.
M.-J. DURRY, Gérard de Nerval et le mythe, 1956, pp. 46-47.
2. Fém., néol. d'aut. Venue effective :
• 19. Le sujet nu ne « serait » même pas sans l'acte minimal de venir, qui le fait exister temporellement, c'est-à-dire changer; et vice-versa l'acte à peine senti et plutôt entrevu de venir, de venir et survenir, n'est rien d'autre que l'esse lui-même comme avènement, cet avènement étant souvenir, devenir ou advenir selon que l'on considère le surgissement du passé comme présent, la mutation de l'être actuel en un autre ou l'advenue de la nouveauté à venir.
V. JANKÉLÉVITCH, Le Je-ne-sais-quoi et le presque-rien, 1957, p. 22.
STAT. — Fréq. abs. litt. :165.
avenu, ue [avny] adj.
ÉTYM. 1765; bien avenus « qui adviennent par succession », 1265; p. p. de l'anc. v. avenir, parfois sous la forme advenu (vx). → Advenir.
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♦ Vx ou littér. || Choses avenues, non avenues, qui sont, ne sont pas arrivées.
♦ Mod. || Non avenu : qui existe, a existé, mais est considéré comme n'ayant pas de valeur. ☑ Nul et non avenu [nylenɔnavny] : inexistant. || Je considère cette déclaration comme non avenue, comme nulle et non avenue.
1 On reprit les choses où elles s'étaient arrêtées; ce qui s'était passé fut comme non avenu.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, III, p. 316.
2 (…) Je ne trouve nulle part Voltaire nommé dans ses Œuvres (de Daguesseau), et je ne vois pas non plus qu'il ait nommé une seule fois Molière. Molière et Voltaire semblent avoir été pour lui comme non avenus et comme inconnus (…)
Sainte-Beuve, Causeries du lundi, t. III, p. 413.
3 (…) une qualité particulière du silence, que je ne trouve qu'à Woroïno, suffisent à rendre non avenus tant de pensées, d'événements et de peines, qui me séparent de cette enfance.
M. Yourcenar, Alexis, p. 23.
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HOM. Avenue.
Encyclopédie Universelle. 2012.