colorer [ kɔlɔre ] v. tr. <conjug. : 1>
• 1160; dér. anc. de couleur, refait sur lat. colorare
1 ♦ Revêtir de couleur; donner une certaine teinte à (qqch.). ⇒ teindre, teinter (bleuir, jaunir, rougir, verdir, etc.). Le soleil colore le couchant. Pronom. Les raisins commencent à se colorer. Colorer qqch. en bleu, en rouge, avec des colorants, avec de la peinture. ⇒ colorier, peindre. Colorer une matière plastique, du verre, un tissu.
2 ♦ (XIIIe) Littér. Donner une belle apparence à, présenter sous un jour, sous un aspect favorable. « colorer de sophismes subtils ses passions et ses préjugés » (Rousseau). ⇒ 1. farder, orner, revêtir.
3 ♦ (Surtout pronom.) Donner un aspect particulier, sujet à changer. ⇒ empreindre. Cette tendresse « qui se colore de curiosité » (Duhamel). Une admiration colorée de jalousie (⇒ coloration, 2o; teinter) .
⊗ CONTR. Décolorer.
● colorer verbe transitif (de couleur, avec l'influence du latin colorare, colorer) Teinter quelque chose de telle couleur : Colorer un dessin en rouge. Donner à quelque chose de la couleur ou plus de couleur : L'émotion lui colora les joues. Littéraire. Apporter à quelque chose une teinte, une note particulière : Il colorait ses reproches d'une légère ironie. Donner une couleur à certains aliments en les faisant revenir dans un corps gras ou par adjonction de substances spécifiques. ● colorer (difficultés) verbe transitif (de couleur, avec l'influence du latin colorare, colorer) Sens 1. Colorer = donner une couleur à : colorer un bois ; teint coloré. Le substantif correspondant est coloration. 2. Colorier = appliquer des couleurs sur : album à colorier. Le substantif correspondant est coloriage. 3. Coloriser = mettre en couleurs les images d'un film en noir et blanc. Le substantif correspondant est colorisation. ● colorer (synonymes) verbe transitif (de couleur, avec l'influence du latin colorare, colorer) Teinter quelque chose de telle couleur
Synonymes :
- teinter
Contraires :
- décolorer
Donner à quelque chose de la couleur ou plus de couleur
Synonymes :
- animer
- embellir
Contraires :
- affadir
- ternir
Littéraire. Apporter à quelque chose une teinte, une note particulière
Synonymes :
- imprégner
- marquer
- nuancer
- pénétrer
colorer
v. tr.
d1./d Donner une couleur, de la couleur à. Le soleil colore les fruits.
d2./d Fig. Embellir, présenter sous un jour favorable.
d3./d v. Pron. Prendre de la couleur. Le ciel se colore au couchant.
⇒COLORER, verbe trans.
A.— Donner une (des) couleur(s). Ses cheveux étaient comme une nuée que le soleil à l'aube colore (GIDE, Le Voyage d'Urien, 1893, p. 31). [Cet oxyde] colore la flamme tantôt en vert (...) tantôt en violet (A. DE LAPPARENT, Cours de minér., 1899, p. 555). Une stupide rougeur colorait son front (G. ROY, Bonheur d'occasion, 1945, p. 16).
— Emploi pronom. Prendre (une) couleur. Ceux [les corps sapides] (...) qui sont traités à l'huile se resserrent, se colorent d'une manière plus ou moins foncée, et finissent par se charbonner (BRILLAT-SAVARIN, Physiol. du goût, 1825, p. 124). La nuit s'achève; elle s'éclaire et se colore là-bas, vers l'est, derrière les crêtes dont la ligne se découpe sur un ciel jeune, poudré d'or (R. MARTIN DU GARD, Les Thibault, L'Été 1914, 1936, p. 726) :
• 1. Chaque animal se colore suivant son domicile et ses habitudes : Les renards du Groënland sont couleur de neige; les lions, couleur de désert; les perdrix, couleur de sillon; les brigands grecs, couleur de grand chemin.
ABOUT, Le Roi des montagnes, 1857, p. 66.
♦ [En parlant d'un être humain, de son visage] Rougir sous l'effet d'une émotion. Ses pommettes se colorèrent (MAURIAC, Le Nœud de vipères, 1932, p. 250).
— Spécialement
1. B.-A. Mettre en couleur. J'ai coloré l'aquarelle du Turc qui caresse son cheval (E. DELACROIX, Journal, 1852, p. 91). M. Achille Devérie (...) savait colorer la pierre lithographique (BAUDELAIRE, Curiosités esthétiques, 1867, p. 27).
♦ Absol. [P. oppos. à dessiner] Cette peinture (...) en somme, n'est ni du dessin, quoique M. Robert Fleury dessine très spirituellement, ni de la couleur, quoiqu'il colore vigoureusement (BAUDELAIRE, Salon, 1845, p. 22).
2. BIOL. Imprégner de colorant en vue d'un examen microscopique. Elle [la fuchsine] a été couramment utilisée depuis quarante ans pour colorer noyaux cellulaires et chromosomes (M. PRIVAT DE GARILHE, Les Acides nucléiques, 1963, p. 51).
Rem. On rencontre ds la docum. le verbe couleurer : Désespérant de jamais sentir la différence trop profonde qu'il y a entre colorer et colorier, le peuple s'en tire en fabriquant couleurer qui répond à tous ses besoins dans cet ordre d'idées (GOURMONT, Esthétique de la lang. fr., 1899, p. 164).
B.— En partic. [Avec valeur intensive]
1. Donner une couleur particulière, caractéristique. En réalité, nous ne voyons le monde qu'à travers nos sens, qui le déforment et le colorent à leur gré (A. FRANCE, La Vie littéraire, t. 3, 1891, p. XII). Il y a très peu de distance entre la pire humeur et la meilleure. Il suffit quelquefois de changer l'attitude, de retenir un geste ou une parole, pour colorer autrement une journée (ALAIN, Propos, 1921, p. 342) :
• 2. ... l'émotion musicale, ce presque-rien que le passé personnel, la réfraction morale, l'éducation artistique colorent de nuances imprévisibles.
JANKÉLÉVITCH, Le Je-ne-sais-quoi et le presque-rien, 1957, p. 44.
♦ Emploi pronom. Se teinter de. Cette tendresse attentive (...) qui se colore de curiosité, de piété, de scepticisme, d'ironie, selon les heures (G. DUHAMEL, Chronique des Pasquier, Le Notaire du Havre, 1933, p. 9). La science ne peut aller aux limites d'elle-même sans se colorer de mystique et se charger de foi (TEILHARD DE CHARDIN, Le Phénomène humain, 1955, p. 316). Prendre la couleur de. Les êtres humains sont ainsi faits : les mots qui les atteignent se colorent de leurs propres sentiments, et nous n'entendons jamais que nous-même, quand un autre nous parle (ESTAUNIÉ, Madame Clapain, 1932, p. 252).
— Spéc., MUS. Le timbre dramatique, c'est la qualité que possède la voix humaine de colorer très différemment un même son selon le caractère du mot prononcé pour exprimer les sentiments divers (J. ARGER, Initiation à l'art du chant, 1924, p. 53).
♦ Emploi pronom. Le flot des voix et de l'orchestre se précipite et se colore de saisissantes modulations (R. ROLLAND, Beethoven, t. 2, 1928, p. 356).
2. Donner des couleurs éclatantes, embellir :
• 3. Il y eut pour moi, dans ces quarante jours de bonheur, des souvenirs à colorer toute une vie...
BALZAC, Le Médecin de campagne, 1833, p. 225.
— Spéc., dans les domaines de l'expr. artistique :
• 4. ... les écrivains français ont besoin d'animer et de colorer leur style par toutes les hardiesses qu'un sentiment naturel peut leur inspirer...
Mme DE STAËL, De l'Allemagne, t. 2, 1810, p. 98.
♦ Emploi pronom. Prendre de l'éclat :
• 5. Ce bonheur était peu vif quand je le possédais, aujourd'hui il se colore par mon imagination...
E. DELACROIX, Journal, 1852, p. 23.
3. Péj. Farder, dissimuler. Elle ne savait plus comment colorer mon éloignement sans cause aux yeux de mon père et de mes oncles. Il fallut revenir (LAMARTINE, Nouvelles Confidences, 1851, p. 12). Tout ce qui peut colorer une infamie, croyez-vous que je ne me le sois pas dit à moi-même (BLOY, La Femme pauvre, 1897, p. 89). De quelques belles paroles qu'il colorât toutes ses haines (PROUST, Le Côté de Guermantes 2, 1921, p. 555) :
• 6. Donne-moi le songe qui colore les noirs chagrins. Mens, n'aie pas de scrupules. Tu n'ajouterais qu'une illusion à l'illusion de l'amour et de la beauté.
A. FRANCE, Le Lys rouge, 1894, p. 266.
— Locutions
♦ Colorer d'un prétexte. On ne cherchait même pas à colorer la chose d'un prétexte (LARBAUD, A. O. Barnabooth, 1913, p. 208) :
• 7. « ... ne parlez pas de justice, ne colorez pas d'un prétexte de justice les résolutions que vous croirez devoir prendre, car tout cela n'a rien à faire avec la justice, puisque c'en est la négation, tout simplement. »
CLEMENCEAU, Vers la réparation, 1899, p. 21.
♦ (Servir de) un prétexte pour colorer. Son extrême jeunesse servit de prétexte pour colorer, aux yeux de la société de Rome, cette réserve du vieux prince (LAMARTINE, Nouvelles confidences, 1851, p. 173).
Prononc. et Orth. :[], (je) colore []. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. [1er tiers XIIe s. franco-prov. colorad « qui a de la couleur » (ALBERIC DE PISANCON, Alexandre, 68 ds BARTSCH Chrestomathie, pièce 7)]; 1er tiers XIIe s. (Gormont et Isembart, éd. A. Bayot, 482 : la chere bele e culuree); 1690 colorant adj. (FUR.); 2. a) 1260-1344 au fig. « embellir (pour falsifier la vérité) » (Cron. Lond., p. 4 ds GDF. Compl.); b) 1549 au fig. « orner, embellir » (DU BELLAY, Deffense et Illustration de la Langue Françoyse, éd. H. Chamard ds IGLF : ces fleurs et ces fruits colorez de cette grande eloquence). Dér. de couleur avec infl. ultérieure du lat. class. colorare « colorer » attesté au fig. au sens de « embellir, falsifier » en lat. impérial. Fréq. abs. littér. :600. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 1 240, b) 643; XXe s. : a) 742, b) 701.
DÉR. 1. Colorable, adj. Qui peut être coloré. Glycogène colorable par l'iode (J. VERNE, La Vie cellulaire hors de l'organisme, 1937, p. 94). La structure colorable du chromosome (R. HUSSON, F. GRAF, Manuel de biol. gén., 1965, p. 94). Au fig. (cf. colorer B 1). Ce n'est que cela, Mme de Guermantes! (...) je contemplais cette image qui naturellement n'avait aucun rapport avec celles qui, sous le même nom de Mme de Guermantes, étaient apparues tant de fois dans mes songes, puisque, elle, elle (...) n'était pas de la même nature, n'était pas colorable à volonté comme elles qui se laissaient imbiber de la teinte orangée d'une syllabe, mais était si réelle que tout, jusqu'à ce petit bouton qui s'enflammait au coin du nez, certifiait son assujettissement aux lois de la vie (PROUST, Du côté de chez Swann, 1913, p. 175). Rem. On rencontre ds la docum. colorabilité, subst. fém. Caractère de ce qui est colorable, faculté de prendre une coloration. Faible colorabilité (E. BRUMPT, Précis de parasitologie, 1910, p. 53). Une mince calotte que sa texture et sa colorabilité différencient du banal protoplasme environnant (J. ROSTAND, La Vie et ses problèmes, 1939, p. 44). — []. — 1re attest. 1873 matières colorables (A. WURTZ, Dict. de chim. pure et appl., t. 2, 1er vol., p. 653); de colorer, suff. -able. — Fréq. abs. littér. : 1. 2. Colorage, subst. masc. Synon. de teinturerie. Atelier de colorage (MICHELET, Journal, 1842, p. 475). — []. — 1re attest. 1842 id.; de colorer, suff. -age. — Fréq. abs. littér. : 1.
BBG. — DUCH. Beauté. 1960, p. 86.
colorer [kɔlɔʀe] v. tr.
ÉTYM. 1160; dér. anc. de couleur, refait sur le lat. colorare.
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1 Revêtir de couleur; donner une certaine teinte à (qqch.). ⇒ Teindre, teinter; bleuir, brunir, jaunir, rougir, verdir. || Le soleil colore le couchant. || L'hémoglobine colore le sang. || Colorer qqch. en bleu, en rouge… avec des colorants, avec de la peinture. ⇒ Colorier, peindre. || Colorer en brun doré (⇒ Mordorer), en gris (⇒ Cendrer)… || Colorer avec du nitrate d'argent (⇒ Nitrater). || Colorer un produit alimentaire. || Colorer une matière plastique, du verre, un tissu. — Absolt (→ ci-dessous, cit. 3). — Pron. || Les raisins commencent à se colorer. || Ses joues se coloraient légèrement (⇒ Rosir). → ci-dessous, cit. 2 et 4.
1 Colorer, c'est donner une couleur naturelle ou artificielle, mais sans autre intention que cette couleur même. Colorier, c'est apposer avec art des couleurs sur quelque chose. Un verre coloré est un verre qui a une teinte de couleur quelconque comme un verre bleu, un verre rouge, et en général les vitraux de nos églises; un verre colorié est un verre qui représente quelque dessin qu'on a tracé dessus (…)
Littré, Dict., art. Colorer.
2 (…) sa joue tout à coup se colore, ses beaux yeux errent et se troublent, un flot de vie a monté, et comblé son jeune sein. Elle est femme (…)
Michelet, la Femme, p. 183.
3 A peu d'exceptions près, on peut établir comme règle que l'orange colore, le vert neutralise, le violet ombre.
Henri Guerlin, l'Art enseigné par les maîtres, p. 91.
4 (…) de légers nuages passaient sur elle (la mer), mais ils se coloraient alors de nuances bleues dont la pâleur était profonde comme la gelée d'une méduse ou le cœur d'une opale.
Proust, les Plaisirs et les Jours, p. 194.
2 (Surtout pron.). Abstrait. Donner un aspect particulier, caractéristique à (qqch.). ⇒ Empreindre.
5 La passion colore et empoisonne les moindres mouvements de l'âme.
G. Duhamel, Entretiens dans le tumulte, I.
6 (…) cette tendresse attentive que je voue naturellement aux objets de mon étude et qui se colore de curiosité, de piété, de scepticisme, d'ironie, selon les heures.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier, I, I.
3 (XIIIe). Littér. Donner une belle apparence à (qqch.), présenter sous un jour, sous un aspect favorable. || Colorer une action par une explication, une excuse. — Vx (langue class.). || Colorer un acte d'une excuse, d'un prétexte. — (Sans compl. second). || Colorer une faute, un mensonge, une lâcheté. ⇒ Farder, orner, revêtir.
7 L'ingrat, d'un faux respect colorant son injure (…)
Racine, Britannicus, I, 1.
8 Quelle excuse pouvons-nous trouver pour colorer nos rébellions ?
Bossuet, Purification, 2.
9 On y apprend à plaider avec art la cause du mensonge, à ébranler à force de philosophie tous les principes de la vertu, à colorer de sophismes subtils ses passions et ses préjugés, et à donner à l'erreur un certain tour à la mode selon les maximes du jour.
Rousseau, Julie ou la Nouvelle Héloïse, II, Lettre XIV, p. 228.
⇒ Embellir. || L'imagination colore tout. — Rare (avec un compl. indirect). || L'imagination lui colorait tout en rose. — Colorer son style, lui donner de la couleur, de la force, de l'éclat, le rendre vivant. || Colorer un récit.
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coloré, ée p. p. adj.
1 Qui présente de vives couleurs, de la couleur. || Horizon coloré par l'aurore. — Avoir le teint coloré, rouge et vermeil. ⇒ Enluminé, poupin. — Vin coloré, très rouge; d'un rouge noir.
10 Le peintre dispose sur un plan des pâtes colorées dont les lignes de séparation, les épaisseurs, les fusions et les heurts doivent lui servir à s'exprimer.
Valéry, Variété I, p. 238.
2 Fig. || Coloré de… ⇒ Empreint.
11 Le sourire froid, détaché, railleur, le sourire qui m'a, si longtemps, donné du malaise, est soudain coloré d'une sorte de tendresse.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier, III, V.
3 Fig. Animé, expressif. || Conversation colorée, pittoresque. || Style coloré. || Récit coloré, abondant en expressions vivantes, imagées. ⇒ Imagé, vivant.
12 Lors même que la pensée est colorée par l'imagination ou animée par le sentiment, elle nous frappe d'autant plus qu'elle est plus spirituelle, c'est-à-dire plus vive, plus finement saisie, et d'une combinaison à la fois plus juste et plus nouvelle dans ses rapports.
Marmontel, Œuvres, t. IX, p. 416.
13 (…) il bourrait une pipette de bois, qu'il (A. Daudet) fumait en animant de sa parole colorée et pittoresque, aux intonations tour à tour gaies, tendres, la conversation.
Georges Lecomte, Ma traversée, p. 273.
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CONTR. Décolorer. — Pâle.
DÉR. Colorable, colorage, colorant, coloration.
COMP. Décolorer, recolorer.
Encyclopédie Universelle. 2012.