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dédaigner

dédaigner [ dedeɲe ] v. tr. <conjug. : 1>
• déb. XIIe; de dé- et daigner
1Considérer avec dédain; repousser, rejeter avec mépris. mépriser. Par ext. Négliger (cf. Faire fi, faire bon marché de). « il ne faut dédaigner personne. Il ne faut jamais rien dédaigner. Les petites gens, les petits profits » (A. Gide). Il ne dédaigne pas un bon repas (cf. fam. Il ne crache pas sur...). Ce n'est pas à dédaigner. Dédaigner les injures, les menaces, n'en pas tenir compte. ⇒ ignorer. Dédaigner une offre. décliner, 1. repousser. Dédaigner les honneurs. Des cadeaux dédaignés.
2Trans. ind. Littér. DÉDAIGNER DE(et l'inf.). Il dédaigne de répondre : il ne daigne pas répondre. « Ils se voyaient condamnés pour ce qu'ils avaient omis ou dédaigné d'écrire » (Caillois).
⊗ CONTR. Apprécier, 1. cas (faire cas de), considérer, désirer, estimer.

dédaigner verbe transitif (de daigner) Considérer, traiter quelqu'un, quelque chose avec dédain, les mépriser : Dédaigner les injures. Refuser quelque chose avec mépris, le rejeter comme indigne de soi : Dédaigner de répondre à une lettre d'insulte.dédaigner (difficultés) verbe transitif (de daigner) Conjugaison Attention au groupe -gni- aux première et deuxième personnes du pluriel, à l'indicatif imparfait et au subjonctif présent : (que) nous dédaignions, (que) vous dédaigniez. Construction et registre 1. Dédaigner qqch, qqn : elle dédaigne les succès trop faciles ; il dédaigne ceux qui ne sont pas de son milieu. Construction courante dans tous les registres. 2. Dédaigner de (+ infinitif) : il a dédaigné de poursuivre cette conversation qui l'ennuyait. Cette construction appartient au registre soutenu. Remarque 1. Ne pas confondre la construction de dédaigner et celle de daigner, que l'on peut faire suivre d'un infinitif sans préposition. 2. Avec un infinitif, dédaigneux, euse, adj., se construit comme le verbe dédaigner : il est dédaigneux de plaire (tour littéraire). ● dédaigner (expressions) verbe transitif (de daigner) Ne pas dédaigner, bien aimer : Il ne dédaigne pas d'assister à ce spectacle populaire.dédaigner (synonymes) verbe transitif (de daigner) Considérer, traiter quelqu'un, quelque chose avec dédain, les mépriser
Synonymes :
- faire fi de
- mépriser
Contraires :
- admirer
- adorer
- aimer
- apprécier
- chérir
- estimer
- goûter
- respecter
- s'engouer de
- vénérer
Refuser quelque chose avec mépris, le rejeter comme indigne de soi
Synonymes :
- décliner
- rejeter
- repousser
Contraires :
- accepter
- convoiter
- désirer

dédaigner
v. tr.
d1./d Traiter avec dédain, marquer du dédain à l'égard de. Dédaigner le pouvoir.
d2./d Négliger, rejeter comme sans intérêt, ou indigne de soi. Dédaigner les compliments.

⇒DÉDAIGNER, verbe.
[Suj. animé]
I.— Trans. dir.
A.— Considérer quelque chose ou quelqu'un, par orgueil, par fierté ou par dignité, comme indigne d'attention ou d'intérêt.
1. [Le suj. désigne une pers. ou un ensemble de pers.] Dédaigner son adversaire, ses proches; dédaigner les honneurs, les compliments, l'argent. Synon. mépriser; anton. estimer, respecter, vénérer. Si les générations actuelles dédaignent les générations vieillies, elles perdent les frais de leur mépris en ce qui me touche (CHATEAUBR., Mém., t. 2, 1848, p. 580). Je ne suis point du tout de ceux qui dédaignent un peu ces premières fables de La Fontaine (GIDE, Journal, 1943, p. 243) :
1. L'évêque était d'autre carrure. Non seulement il dédaignait l'opinion qu'on pouvait avoir de lui, (...) mais il bravait délibérément l'opinion.
BILLY, Introïbo, 1939, p. 56.
Emploi factitif. La connaissance du voilier te doit faire chérir et non dédaigner tes planches et tes clous (SAINT-EXUP., Citad., 1944, p. 908).
En partic., dans le lang. de l'amour. — Vous n'avez pas changé, vous êtes toujours charmante! — Oh! reprit-elle [Emma] amèrement, ce sont de tristes charmes, mon ami, puisque vous les avez dédaignés (FLAUB., Mme Bovary, t. 2, 1857, p. 164). Violante était éprise, elle fut dédaignée (PROUST, Plais. et jours, 1896, p. 57).
Emploi abs. (p. ell. d'un compl. facile à suppléer), rare. Est-ce que je ne suis pas (...) haï, déchiré (...) Je dédaigne (...) Le dédain protège et écrase (HUGO, Choses vues, 1885, p. 72).
2. Littéraire
a) [Le suj. désigne une abstraction personnifiée] Les petites passions se firent entendre, la vanité fut seule écoutée, l'opulence dédaigna la médiocrité (MARAT, Pamphlets, Appel Nation, 1790, p. 160). Mes rêves palpitants, prêts à prendre leur vol, Tournoyaient dans les airs et dédaignaient le sol (GAUTIER, Poés., 1872, p. 257) :
2. Or, cet enchantement [du théâtre], personne au monde n'en exploite mieux les ressources que Christian Bérard, lorsqu'il oppose au réalisme et aux stylisations, ce sens de la vérité en soi, d'une vérité qui dédaigne la réalité, méthode inimitable n'ayant d'autre objectif que de mettre dans le mille à chaque coup.
COCTEAU, La Machine infernale, 1934, p. 138.
b) Dédaigner jusqu'à, dédaigner même. La longue figure d'un contemplateur qui dédaigne jusqu'aux méditations (BARRÈS, Barbares, 1888, p. 74). Il me faut bien vous en informer, puisque vous ne me faites pas l'honneur de vous en apercevoir : vous dédaignez jusqu'à mon indifférence (MONTHERL., Lépreuses, 1939, p. 1380).
c) P. litote, constr. négative. Ne pas dédaigner. Aimer assez, beaucoup. Au cas où votre famille ne se chargerait pas de l'établissement de Calyste, la fortune de mademoiselle de Pen-Hoël n'est pas à dédaigner (BALZAC, Béatrix, 1839-45, p. 49). Je ne dédaigne pas totalement ce petit jeu (H. BAZIN, Vipère, 1948, p. 146).
d) Emploi pronom. réfl. ou réciproque. Il y a des sociétés qui se dédaignent et ne se voient point entre elles (CHATEAUBR., Mém., t. 1, 1848, p. 353).
Dans un cont. de spiritualité. J'ai compris que Dieu est si grand qu'il faut nous dédaigner devant lui en riant (JAMMES, Angélus, 1898, p. 128). Répondez-moi! Dois-je me dédaigner? Parlez-moi franchement : que suis-je? (ROSTAND, Aiglon, 1900, II, p. 80).
B.— P. ext.
1. Ne pas voir l'importance de quelque chose, ne pas tenir compte de quelque chose ou quelqu'un. Dédaigner les acquis, les conseils, l'effort. Synon. ignorer, négliger; anton. apprécier, faire cas.
a) [Le suj. est un n. de pers.] Après la Marne, nous avons vu ce qu'il nous en cuisait d'avoir dédaigné les fortifications de campagne (BLOCH, Dest. du S., 1931, p. 180). Le reste, dédaignant le taux des sages placements de M. Thibault, il l'avait converti en valeurs russes, aujourd'hui tombées à zéro (MARTIN DU G., Thib., Épil., 1940, p. 818) :
3. Les Carrache, hommes très supérieurs, on ne peut le nier, hommes savants et doués d'un grand sentiment de l'art, se sont dit un jour qu'il fallait reprendre pour leur compte ce qui avait échappé à ces devanciers illustres [Michel-Ange et Raphaël] ou plutôt ce qu'ils avaient dédaigné.
DELACROIX, Journal, 1860, p. 269.
b) Littér. [Le suj. est un n. de chose personnifiée] Nos voitures sans frein dévalèrent d'un train de chute dédaignant les lacets, coupant court au gré des périlleux raccourcis (GIDE, Journal, 1914, p. 407). Tous les tutus se haussent; les pieds dédaignent leurs articulations merveilleuses (MORAND, Rococo, 1933, p. 8).
2. [En oppos. virtuelle avec prendre] Ne pas prendre, laisser de côté. Dédaigner un taxi, la porte; dédaigner l'avion et prendre le bateau. Ils dédaignaient nos haches, nos étoffes et tous nos autres articles de traite (Voy. La Pérouse, t. 3, 1797, p. 186). Dédaignant la porte, elles ont sauté la grille du jardin (COLETTE, Mais. Cl., 1922, p. 33) :
4. Elle passait le bras devant moi et le touchait, dédaignant salières et huiliers que tous les délégués des environs s'empressaient alors de lui tendre.
GIRAUDOUX, Siegfried et le Limousin, 1922, p. 220.
II.— [Compl. verbal à l'inf. introd. par de]
A.— Refuser de faire une chose parce qu'on juge qu'elle ne vaut pas la peine d'être accomplie; refuser par dédain. Dédaigner de parler, de s'asseoir, de se justifier. (Quasi-) synon. s'abstenir, refuser. Dîner chez Villot (...) Les domestiques servant pitoyablement et à leur fantaisie des morceaux de hasard, en un mot ce qu'ils dédaignent de se conserver pour eux-mêmes (DELACROIX, Journal, 1852, p. 456). Nadine se pensait laide et c'est surtout par dépit qu'elle dédaignait de se féminiser (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 348) :
5. Les mathématiciens peuvent dédaigner de jeter les yeux sur tout mémoire qui a pour objet la quadrature du cercle ou le mouvement perpétuel; ...
J. ROSTAND, La Genèse de la vie, 1943, p. 162.
B.— P. litote, constr. négative, usuel. Ne pas craindre de, aimer, faire volontiers. Ce qui a déjà prodigieusement vieilli, ce sont les ornements, c'est la parure indiscrète qu'un magnifique génie [Rossini] ne dédaignait pas d'ajouter à ses heureuses conceptions (DELACROIX, Journal, 1854, p. 157). Elle ne dédaignait pas de s'encanailler (J. BOUSQUET, Trad. du silence, 1935-36, p. 69). Un tout Paris qui ne dédaignait pas de mettre la main à la pâte (FARGUE, Piéton Paris, 1939, p. 50) :
6. Il [M. de Seigneulles] s'y installait souvent pendant des semaines entières, longeant dans un galetas à peine meublé, mangeant avec les fermiers et ne dédaignant pas de pousser lui-même la charrue ou de brandir le fléau.
THEURIET, Le Mariage de Gérard, 1875, p. 109.
Prononc. et Orth. :[] ou, par harmonisation vocalique, []. Pour cette dernière transcr. cf. Pt. ROB. et, à titre de var. cour., WARN. 1968. Cette prononc. est déjà donnée ds GATTEL 1841. Conjug. (je) dédaigne []. Cf. daigner. Le verbe est admis ds Ac. 1694 et 1718 sous l'anc. forme desdaigner; ds Ac. 1740-1932 sous la forme moderne. Étymol. et Hist. 1. 1re moitié XIIe s. « s'indigner » part. prés. desdeinanz (Psautier Cambridge, éd. Fr. Michel, VII, 6); 2. 1165-76 « repousser, mépriser » (CHRÉTIEN DE TROYES, Cligès, éd. M. Roques, 676); 3. 1579 dedagner de « refuser de » (R. GARNIER, La Troade, 425 ds HUG.). Dér. de daigner; préf. dé-. Fréq. abs. littér. : 1 659. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 3 019, b) 2 261; XXe s. : a) 1 991, b) 2 065.
DÉR. Dédaignable, adj. Qui mérite d'être dédaigné. Anton. estimable. Cela s'ajoute d'ailleurs à cette ignorance et à ce dédain si dédaignable que notre monde observe à l'égard des efforts autres que les siens (VALÉRY, Corresp. [avec Gide], 1899, p. 355). Au négatif. Avantage non dédaignable. [Les six sonates pour piano, avec accompagnement de violon] Elles sont si peu dédaignables que Beethoven en personne les a étudiées de près (GHÉON, Prom. Mozart, 1932, p. 87). []. 1res attest. a) av. 1270 desdaignable « qui témoigne du mépris » (Livre de Jean d'Abelin ds Assises de Jérusalem, éd. Beugnot, ch. LXIIIbis 1), b) 1588 membres desdaignables « qui mérite le dédain » (MONTAIGNE, Essais, éd. A. Thibaudet, livre II, chap. XII, p. 677); de dédaigner, suff. -able. Fréq. abs. littér. : 1.

dédaigner [dedeɲe] v. tr.
ÉTYM. V. 1160; de 1. dé-, et daigner.
1 Considérer avec dédain; repousser, rejeter avec mépris. Mépriser.Par ext. Négliger (→ Faire fi, faire bon marché de…). || Dédaigner un rival. || Il ne dédaigne pas un bon repas (→ Il ne crache pas dessus, sur…). || Dédaigner ce que l'on ne peut obtenir (→ Les raisins sont trop verts). || Ce n'est pas à dédaigner. Dédaignable. || Dédaigner les injures, les menaces, n'en pas tenir compte. || Dédaigner les humbles, les pauvres. || Dédaigner les honneurs (→ Brillant, cit. 11), même les honneurs, jusqu'aux honneurs.
1 Ô Dieu ! tu ne dédaignes pas un cœur brisé et contrit.
Bible (Segond), Psaumes, 51, 19.
2 Hermione, Seigneur, au moins en apparence,
Semble de son amant dédaigner l'inconstance,
Et croit que trop heureux de fléchir sa rigueur,
Il la viendra presser de reprendre son cœur.
Racine, Andromaque, I, 1.
3 Nous n'avons pas assez d'amour-propre pour dédaigner le mépris d'autrui.
Vauvenargues, Maximes, 549.
4 La calomnie, monsieur ! Vous ne savez guère ce que vous dédaignez (…)
Beaumarchais, le Barbier de Séville, II, 8 (→ Calomnie, cit. 5).
5 Le bourgeois de Paris rit du bourgeois d'une petite ville; le noble de cour se moque du noble de province; l'homme connu dédaigne l'homme ignoré, sans songer que le temps fait également justice de leurs prétentions, et qu'ils sont tous également ridicules ou indifférents aux yeux des générations qui se succèdent.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. I, p. 74.
6 En amour, notre vanité dédaigne une victoire trop facile, et, dans tous les genres, l'homme n'est pas sujet à s'exagérer le prix de ce qu'on lui offre.
Stendhal, in Adolphe Ricard, l'Amour, les Femmes et le Mariage.
7 Les hommes du moyen âge n'étaient pas assez vertueux pour dédaigner l'argent, mais ils méprisaient les hommes d'argent.
Bernanos, les Grands Cimetières sous la lune, p. 41.
8 D'abord, il ne faut dédaigner personne. Il ne faut jamais rien dédaigner. Les petites gens, les petits profits, les petites choses… (…) C'est toujours une erreur de dédaigner ce qui peut encore servir.
Gide, Robert ou l'intérêt général, I, 10.
2 Trans. ind. Littér. || Dédaigner de (suivi de l'inf.). || Il dédaigne de répondre. || Dédaigner d'obéir à un ordre.
9 Et pour tout autre objet ton âme indifférente
Dédaignait de brûler d'une flamme innocente.
Racine, Phèdre, IV, 2.
10 On dédaigne, on méprise, on est au-dessus de ça, on ne se soucie pas, on se moque de. Il est rare qu'on se serve derrière ces expressions de subordonnées introduites par que, on dit dédaigner de faire. Cf. Cependant : je me moque qu'il soit ou non content.
F. Brunot, la Pensée et la Langue, III, XII, IV, VIII, p. 552.
——————
dédaigné, ée p. p. adj.
|| Femme dédaignée, dédaignée des hommes. || Dédaigné et abandonné. Disgracié, paria. || Chose dédaignée, mise au rebut.
CONTR. Admirer, aimer, apprécier, cas (faire), considérer, convoiter, désirer, estimer, respecter, soucier (se), vénérer.
DÉR. Dédaignable, dédaigneux, dédain.

Encyclopédie Universelle. 2012.