dupe [ dyp ] n. f. et adj.
• duppe 1426; emploi plaisant de dupe « huppe », oiseau d'apparence stupide
1 ♦ Personne que l'on trompe sans qu'elle en ait le moindre soupçon. ⇒ dindon, pigeon. Prendre qqn pour dupe. ⇒ duper. Être la dupe de qqn (cf. fam. Se faire avoir). « Les femmes sont constamment les dupes ou les victimes de leur excessive sensibilité » (Balzac).
♢ Loc. C'est un jeu, un marché de dupes, se dit d'un marché, d'un contrat où l'on a été abusé. « tout le monde fait des bénéfices, sauf vous; c'est un jeu de dupes » (Romains). Hist. La journée des Dupes : le 10 novembre 1630, jour où Louis XIII renouvelle sa confiance à Richelieu que l'on croyait disgracié. Par ext. Événement qui tourne à la confusion de ceux qui s'en réjouissaient.
2 ♦ Adj. « Comme on serait meilleur sans la crainte d'être dupe ! » (Renard). Il me ment, mais je ne suis pas dupe, je le sais. ⇒ crédule, naïf. « Ne me crois pas dupe, et crédule à ce point » (Molière). « Les hommes sont facilement dupes de ce qui flatte leur orgueil et leurs désirs » (R. Rolland).
● dupe nom féminin (de huppe, en raison de l'aspect stupide de cet oiseau) Personne trompée, ou facile à tromper : Être la dupe d'un escroc. ● dupe (citations) nom féminin (de huppe, en raison de l'aspect stupide de cet oiseau) Jean Dutourd Paris 1920 Académie française, 1978 Une dupe, c'est un homme trompé, bien sûr, mais non pas tant trompé par les autres que par lui-même. Les Dupes Gallimard ● dupe (difficultés) nom féminin (de huppe, en raison de l'aspect stupide de cet oiseau) Genre Le nom est toujours féminin, même pour désigner un homme : il a été la dupe d'un associé indélicat. Orthographe 1. Jeu de dupes, marché de dupes. Toujours au pluriel. 2. La journée des Dupes. Toujours avec une majuscule. Remarque La journée des Dupes est la journée du 10 novembre 1630, où Richelieu, sur le point d'être écarté du pouvoir par ses adversaires, parvint à regagner la confiance de Louis XIII. ● dupe (expressions) nom féminin (de huppe, en raison de l'aspect stupide de cet oiseau) Jeu, marché de dupe(s), situation, accord, contrat où quelqu'un est trompé. ● dupe (synonymes) nom féminin (de huppe, en raison de l'aspect stupide de cet oiseau) Personne trompée, ou facile à tromper
Synonymes :
- dindon (familier)
- gobe-mouches (familier)
- gogo (familier)
- pigeon (familier)
● dupe
adjectif
Être dupe de, Être trompé par quelqu'un, quelque chose, ne pas s'apercevoir d'une supercherie : Être dupe d'un beau parleur.
Ne pas être dupe, ne pas se laisser tromper ; savoir exactement ce qu'il en est : Je ne suis pas dupe de ses manœuvres.
● dupe (expressions)
adjectif
Être dupe de, Être trompé par quelqu'un, quelque chose, ne pas s'apercevoir d'une supercherie : Être dupe d'un beau parleur.
Ne pas être dupe, ne pas se laisser tromper ; savoir exactement ce qu'il en est : Je ne suis pas dupe de ses manœuvres.
dupe
n. f. et adj.
d1./d n. f. Personne trompée ou facile à tromper. Faire des dupes. être la dupe de tout le monde.
|| Un jeu de dupes, un marché de dupes: une affaire où l'on a été trompé, où l'on risque de l'être.
d2./d adj. être dupe, être dupe de (qqn, qqch).
⇒DUPE, subst. fém. et adj.
A.— Personne qu'on a trompée intentionnellement et facilement ou qui se laisse facilement abuser. Jouer dans une affaire un rôle de dupe; être la dupe des escrocs :
• 1. Si je ne tue pas ma femme, et que je la chasse avec ignominie, elle a sa tante à Besançon, qui lui donnera de la main à la main toute sa fortune. Ma femme ira vivre à Paris avec Julien; on le saura à Verrières, et je serai encore pris pour dupe.
STENDHAL, Le Rouge et le Noir, 1830, p. 126.
• 2. Ce sont vos ennemis autant que le sont aujourd'hui ces soldats allemands qui gisent ici entre vous, et qui ne sont que de pauvres dupes odieusement trompées et abruties, des animaux domestiques...
BARBUSSE, Le Feu, 1916, p. 376.
1. P. allus. hist. La journée des dupes. Jour où Richelieu que ses ennemis croyaient disgracié reprit son autorité auprès du roi Louis XIII. Assuré de l'appui de Louis XIII après la « Journée des dupes », Richelieu n'en eut pas moins à combattre les intrigues et les cabales auxquelles le frère du roi se prêtait (BAINVILLE, Hist. Fr., t. 1, 1924, p. 208).
2. Loc. usuelles
♦ Un jeu de dupes. Situation où quelqu'un est trompé.
♦ Un marché de dupe(s). Marché, contrat où quelqu'un est trompé. Faire un marché de dupes :
• 3. Monsieur tenait à madame qui avait l'argent, madame se cramponnait à monsieur qui avait le nom et le titre. Mais, comme, dans le fond, ils se détestaient, en raison même de ce marché de dupe qui les liait, ils éprouvaient le besoin de se le dire, de temps à autre, ...
MIRBEAU, Le Journal d'une femme de chambre, 1900, p. 348.
♦ Un métier de dupe. Une activité où l'on est trompé. Il fut conclu, à l'unanimité, (...) que payer la mort par l'honneur dans une bataille était un véritable métier de dupe (JANIN, Âne mort, 1829, p. 125).
♦ Faire des dupes. Abuser sciemment de la crédulité d'un certain nombre de personnes pour les tromper, leur soutirer de l'argent, etc. :
• 4. ... les charlatans de tout acabit, fabricants de fausse monnaie, illuminés, empoisonneurs, escrocs et faux alchimistes foisonnèrent pendant des siècles. Surgissant brusquement dans un pays, ils en disparaissaient pour reparaître ailleurs, faisant des dupes et abusant les crédules de la manière la plus éhontée.
CARON, HUTIN, Les Alchimistes, 1959, p. 47.
3. Loc. invar. [Avec un compl. exprimant un aspect de la personne humaine] Être la dupe de. Être la dupe de la flatterie, des belles paroles; être la dupe de son cœur, de sa bonne foi. Être facilement trompé par la flatterie, etc. Puis à la fin, oh! Bien à la fin toujours, lorsque, après avoir eu beau nous mettre de triples bandeaux sur les yeux, nous nous apercevons que nous sommes nous-mêmes la dupe de nos erreurs, nous chassons la misérable qui la veille a été notre idole (MURGER, Scènes vie boh., 1851, p. 262).
— Spéc. Être la dupe de soi-même. Je suis dangereuse, et d'autant plus perverse que c'est avec bonne foi. La vérité de ma nature est d'être fausse. Je suis ma première dupe (GOBINEAU, Pléiades, 1874, p. 224).
Rem. ,,Dupe, bien que se rapportant à un nom ou à un pronom au plur. reste au sing. quand il s'agit d'un seul et même moyen employé pour tromper. Nous fûmes la dupe de son stratagème. Il se met au plur. quand il s'agit de duperies successives. Nous fûmes les dupes de ses stratagèmes`` (LITTRÉ). Cette règle, difficile d'ailleurs à vérifier, ne paraît pas toujours respectée. Les auteurs de confessions ou de souvenirs ou de journaux intimes sont invariablement les dupes de leur espoir de choquer; et nous, dupes de ces dupes (VALÉRY, Variété II, 1929, p. 105). Il semble que la règle soit celle-ci : être la dupe de reste invariable quand on l'emploie avec sa valeur de locution stéréotypée, et de ce fait d'expressivité atténuée; dès que dupe reprend la vigueur d'un subst. à sens plein, il s'accorde en nombre avec le suj. de la phrase (cf. VALÉRY, loc. cit.).
B.— Emploi adj. [Uniquement dans la fonction d'attribut]
1. Être dupe
a) de qqn :
• 5. Enjôleuse, comme elle savait l'être, elle n'eut pas de peine à faire parler Olivier. Personne n'était plus clairvoyant que lui et moins dupe des gens, quand il en était loin; personne ne montrait plus de confiance naïve, quand il se trouvait en présence de deux aimables yeux.
ROLLAND, Jean-Christophe, Dans la maison, 1909, p. 1013.
b) de qqc. Être dupe d'un mensonge, de belles paroles, d'une promesse, d'une ruse. Les hommes sont facilement dupes de ce qui flatte leur orgueil et leurs désirs; et un artiste est deux fois plus dupe qu'un autre homme, parce qu'il a plus d'imagination (ROLLAND, La Révolte, 1907, p. 427).
2. Emploi abs. Il n'est pas si dupe que vous pensez (Ac. 1835-78). Il se renseigne minutieusement sur les prix. Il n'entend ni être dupe ni duper (PESQUIDOUX, Chez nous, 1923, p. 219).
Prononc. et Orth. :[dyp]. Ds Ac. 1694-1932. Ds les éd. de 1694 et 1718 également s.v. duppe. Étymol. et Hist. 1426 duppe « personne qui se laisse facilement tromper » (A. N. JJ 173, pièce 456 ds DU CANGE, s.v. duplicitas); 1656 être dupe (PASCAL, 2e Provinciale, éd. L. Lafuma, Œuvres complètes, p. 376a). Emploi de dupe « huppe » (RABELAIS, II, 12 ds HUG. et dès le XVe s. [« plumage de huppe » (Cartulaire de Flines, p. 918, Hautecœur ds GDF.)] en raison de l'aspect stupide de cet oiseau; dupe est formé de huppe (lat. upupa d'orig. onomatopéique) et de d d'orig. également onomatopéique (v. H. Schuchardt ds Z. rom. Philol., t. 15, p. 99). Fréq. abs. littér. :1 227. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 1 938, b) 1 301; XXe s. : a) 1 660, b) 1867. Bbg. DARM. Vie 1932, p. 156. — DAUZAT Ling. fr. 1946, p. 293, 299. — GOHIN 1903, p. 335. — HORNING (A.). Zur Wortgeschichte. Z. rom. Philol. 1897, t. 21, p. 454. — SAIN. Arg. 1972 [1907], p. 106, 147, 258, 276. — SAIN. Sources t. 1 1972 [1925], p. 335, 364.
dupe [dyp] n. f. et adj.
ÉTYM. 1426, duppe; d'abord terme de jargon; emploi plaisant de dupe « huppe », oiseau d'apparence stupide; selon Guiraud, de dé-hupper « enlever la huppe » (symbole de prestige), comme on plume : le dupé est un plumé.
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1 Littér. ou style soutenu. Personne qui a été trompée ou qu'il est facile de tromper. ⇒ Pigeon, pigeonneau (→ Bonard, dindon de la farce, gogo). || C'est une dupe, une bonne (cit. 59) dupe. || Être la dupe de qqn, de sa flatterie, de ses charmes (→ Animal, cit. 12). || Prendre qqn pour dupe. ⇒ Duper. || Faire des dupes.
1 Les hommes ne vivraient pas longtemps en société, s'ils n'étaient les dupes les uns des autres.
La Rochefoucauld, Maximes, 87.
2 (…) ceux que l'on sait même agir de bonne foi là-dessus (…) sont toujours les dupes des autres; ils donnent hautement dans le panneau des grimaciers, et appuient aveuglément les singes de leurs actions.
Molière, Dom Juan, V, 2.
3 Une des meilleures raisons qu'on puisse avoir de ne se marier jamais, c'est qu'on n'est pas tout à fait la dupe d'une femme tant qu'elle n'est point la vôtre.
Chamfort, Maximes, Sur les femmes et le mariage, XXX.
4 L'avare se moque du prodigue, le prodigue de l'avare; l'incrédule du dévot, le dévot de l'incrédule; ils se prennent réciproquement pour des dupes.
Rivarol, Notes, pensées et maximes, II, p. 12.
5 (…) les femmes ne sont pas plus des dupes des comédies que jouent les hommes que des leurs.
Balzac, le Cabinet des antiques, Pl., t. IV, p. 386.
6 (…) l'amour-propre est un escroc qui ne manque jamais sa dupe (…)
Balzac, la Vieille Fille, Pl., t. IV, p. 233.
♦ Être la dupe d'une affaire, d'un marché, n'y pas trouver son compte, y perdre. ⇒ Avoir (se faire avoir). — Plus cour. ☑ C'est un marché de dupes, nous avons été volés. ☑ Un métier de dupes : activité sans profit personnel.
♦ ☑ Être la dupe de sa bonne foi, de sa sincérité, de son cœur : se tromper soi-même. || Être la dupe de soi-même, de ses propres mensonges.
7 J'admire comme notre esprit est véritablement la dupe de notre cœur (…)
Mme de Sévigné, 540, 24 mai 1676 (→ Cœur, cit. 145, La Rochefoucauld).
8 Les femmes sont constamment les dupes ou les victimes de leur excessive sensibilité (…)
Balzac, Physiologie du mariage, Pl., t. X, p. 852.
♦ ☑ Loc. C'est un jeu de dupes, en parlant d'un marché, d'un contrat où l'on a été abusé.
9 (…) tout le monde fait des bénéfices, sauf vous; c'est un jeu de dupes.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. V, XXII, p. 182.
♦ La journée des dupes : le 10 novembre 1630, jour où le cardinal de Richelieu, que l'on croyait disgracié, reprit son autorité auprès du roi Louis XIII.
10 Le royaume pacifié, le temps était-il venu d'entreprendre la lutte contre la Maison d'Autriche ? La question fut débattue pendant toute l'année 1630, et décidée lors de la fameuse journée des dupes (10 novembre) qui assura le triomphe de Richelieu sur ses adversaires.
Pierre Gaxotte, Hist. des Français, t. II, p. 76.
♦ Par ext. Événement qui tourne à la confusion de ceux qui s'en réjouissaient.
10.1 Le 13 mai (1958) ou la journée des dupes. Nous devons convenir que certaines de ces dupes ont quelques raisons d'enrager.
F. Mauriac, le Nouveau Bloc-notes, 1958-1960, p. 172.
2 Adj. (Uniquement comme attribut, absolument ou avec un complément nom de personne ou de chose). || Être dupe de qqn, de qqch. (→ Commencer, cit. 17; complice, cit. 3; déchiqueter, cit. 3). || Il n'est pas dupe de vos mensonges. || Se croire dupe de qqn. — (Sans compl.). ⇒ Crédule, naïf. || Ne soyez pas dupe. || Être dupe. → Se faire avoir, posséder.
11 Ne me crois pas dupe, et crédule à ce point.
Molière, les Fâcheux, III, 4.
11.1 Chétive créature, me dit-elle en colère, t'imagines-tu que les hommes sont assez dupes pour faire l'aumône à de petites filles comme toi, sans exiger l'intérêt de leur argent ?
Sade, Justine…, t. I, p. 24.
12 (…) il chercha à expliquer, par des exemples pittoresques, qui amusaient les enfants, ce que c'était qu'être dupe.
Je comprends, dit Stanislas, c'est le corbeau qui a la sottise de laisser tomber son fromage, que prend le renard, qui était un flatteur (…)
Stendhal, le Rouge et le Noir, I, XXII, p. 144.
13 Comme on serait meilleur sans la crainte d'être dupe
J. Renard, Journal, 18 janv. 1896.
14 Les hommes sont facilement dupes de ce qui flatte leur orgueil et leurs désirs; et un artiste est deux fois plus dupe qu'un autre homme, parce qu'il a plus d'imagination.
R. Rolland, Jean-Christophe, IV, p. 74.
15 J'ai une preuve de ta traîtrise, ajoutait Marthe. Elle ne me reverrait jamais. Sans doute souffrirait-elle, mais elle préférerait souffrir que d'être dupe.
R. Radiguet, le Diable au corps, p. 143.
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DÉR. Duper.
Encyclopédie Universelle. 2012.