genre [ ʒɑ̃r ] n. m. I ♦ Vx Race. — Mod. Le genre humain : l'ensemble des hommes. ⇒ espèce; humanité. Histoire du genre humain. Ennemi (⇒ misanthrope) , bienfaiteur (⇒ philanthrope) du genre humain. II ♦
1 ♦ (XIVe) Didact. Idée générale d'un groupe d'êtres ou d'objets présentant des caractères communs. ⇒ concept. Caractères communs à tout un genre. ⇒ 1. générique.
2 ♦ Didact. Sc. nat. Subdivision de la classification (taxinomie) des êtres vivants, située au-dessous de la famille. Les organismes appartenant au même genre portent le même nom latin, suivi d'un adjectif qui les subdivise en espèces. Toutes les roses appartiennent au genre rosa.
3 ♦ Catégorie d'œuvres, définie par la tradition (d'après le sujet, le ton, le style). « nous recourrons à tous les genres littéraires pour familiariser le lecteur avec nos conceptions » (Sartre). Genres en vers : lyrisme, épopée, drame, poésie didactique, bucolique. Genres en prose : éloquence, philosophie, histoire, critique, correspondance (genre épistolaire), science, roman, nouvelle, essai. Genre oratoire. Genre dramatique, grave, comique, genre anecdotique.
♢ Arts Classe ou nature du sujet traité par l'artiste. Le genre (du) portrait, (du) paysage. Tableau, peinture de genre : jusqu'au XVIII e s., tout ce qui n'était pas peinture d'histoire (ou de style); mod. les tableaux d'intérieurs, natures mortes, peintures d'animaux. Un peintre de genre.
III ♦ (1245) Gramm., ling. Catégorie exprimant parfois l'appartenance au sexe masculin, au sexe féminin ou aux choses (neutre). En français, Catégorie de certains mots (nom, pronom, adjectif, article, participe passé) qui est soit le masculin, soit le féminin, et qui est exprimée soit par leur propre forme (au féminin, elle, la, recouverte, son amie), soit par la forme de leur entourage, par l'accord (le sort, la mort, des manches longues, une dentiste, l'acrobate brune). De quel genre est ce mot ? Mot du genre masculin, du genre féminin. Mot qui varie en genre et en nombre. Mot invariable en genre. ⇒ épicène. Accord en genre. Genre marqué : le féminin. Le mot amour change de genre au pluriel.
IV ♦ (v. 1400) Cour.
1 ♦ ⇒ espèce, sorte, type. Quel genre de chapeau, de costume désirez-vous ? Elle apprécie ce genre d'esprit (⇒ forme) . « si j'avais voulu, j'aurais eu des centaines d'occasions de ce genre » (Sartre). Chaussures en tout genre, en tous genres. C'est ce qu'on fait de mieux dans le genre. Du même genre : de même espèce, de même famille. Voici un autre modèle du même genre. Dans son genre, en son genre, dans le genre dont fait partie la personne ou la chose en question. Dans son genre, il a du charme. Unique en son genre. Il n'est pas du genre à se laisser faire, ce n'est pas dans son caractère.
2 ♦ (XVIIe) GENRE DE VIE : façon de vivre, ensemble des habitudes d'un individu ou d'un groupe d'individus. ⇒ façon, manière, 2. mode. Se faire à un nouveau genre de vie. ⇒ style.
3 ♦ Façons de s'habiller, de se comporter. ⇒ allure, attitude, fam. look, manières, tenue. Je n'aime pas son genre. Elle a un mauvais genre, un drôle de genre, l'air vulgaire. Ça fait mauvais genre. Avoir bon genre : être bien élevé, élégant, distingué. Adj. Il est très bon genre. Péj. Bon chic, bon genre. ⇒ B. C. B. G. — C'est un genre qu'il se donne. Ce n'est pas le genre de la maison. C'est un nouveau genre. « ses cheveux rouges sont un peu excentriques, mais c'est un genre qui lui va » (Le Clézio). — Suivi d'un nom ou d'un adjectif en apposition Le genre bohème, le genre artiste. Fam. C'est un type (du) genre homme d'affaires. Dans le genre pénible, il est champion !
♢ Absolt Faire du genre, se donner du genre : affecter certaines manières. ⇒ 2. affectation.
♢ Ce n'est pas mon genre : ce n'est pas de mon goût, ce n'est pas dans mes goûts. ⇒ style. « une femme qui ne me plaisait pas, qui n'était pas mon genre ! » (Proust). Ce n'est pas son genre de partir sans rien dire, ce n'est pas dans ses habitudes. C'est bien son genre ! c'est tout lui.
● genre nom masculin (latin genus, -eris) Ensemble de traits communs à des êtres ou à des choses caractérisant et constituant un type, un groupe, un ensemble ; sorte, espèce : Aimez-vous ce genre de spectacle, ce genre de filles ? Manière d'être de quelqu'un ; comportement, attitude ; allure de quelque chose : Il a un genre bizarre. Avoir le genre artiste. Catégorie d'œuvres littéraires ou artistiques définie par un ensemble de règles et de caractères communs ; style, ton d'un ouvrage : Le genre oratoire. Biologie Ensemble d'êtres vivants, situé, dans la classification, entre la famille et l'espèce, et groupant des espèces très voisines désignées par le même nom latin : nom générique suivi d'un nom spécifique, propre à l'espèce. (Exemple : le genre canis renferme l'espèce Canis lupus [le loup], l'espèce C. vulpes [le renard] et l'espèce C. familiaris [le chien].) Beaux-arts Catégorie définie par la nature du sujet traité par l'artiste. Linguistique Catégorie grammaticale fondée sur la répartition des noms en deux ou trois classes (masculin, féminin, neutre) selon un certain nombre de propriétés formelles (genre grammatical) auxquelles on associe le plus souvent des critères sémantiques relevant de la représentation des objets du monde (genre naturel). Philosophie Dans la philosophie d'Aristote, caractère commun à tous les objets d'une science, ou classe de ces objets. ● genre (citations) nom masculin (latin genus, -eris) Victor Hugo Besançon 1802-Paris 1885 Qu'est-ce que le genre humain depuis l'origine des siècles ? C'est un liseur. Il a longtemps épelé, il épelle encore ; bientôt il lira. William Shakespeare Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière Paris 1622-Paris 1673 Je veux qu'on me distingue ; et pour le trancher net, L'ami du genre humain n'est point du tout mon fait. Le Misanthrope, I, 1, Alceste Charles de Secondat, baron de La Brède et de Montesquieu château de La Brède, près de Bordeaux, 1689-Paris 1755 Si je savais quelque chose qui me fût utile et qui fût préjudiciable à ma famille, je le rejetterais de mon esprit. Si je savais quelque chose utile à ma famille et qui ne le fût pas à ma patrie, je chercherais à l'oublier. Si je savais quelque chose utile à ma patrie et qui fût préjudiciable à l'Europe, ou bien qui fût utile à l'Europe et préjudiciable au genre humain, je la regarderais comme un crime. Mes pensées Roger Nimier Paris 1925-Garches 1962 Un homme sans projets est l'ennemi du genre humain. Amour et néant Gallimard Jean Paulhan Nîmes 1884-Neuilly-sur-Seine 1968 Académie française, 1963 Si les règles et les genres ont jamais été imaginés, c'était pour assurer à l'esprit humain sa pleine liberté, pour lui permettre les cris, et la surprise, et le chant profond. La Rhétorique renaît de ses cendres Cercle du livre précieux François Marie Arouet, dit Voltaire Paris 1694-Paris 1778 Tous les genres sont bons, hors le genre ennuyeux. L'Enfant prodigue, Préface Lucain, en latin Marcus Annaeus Lucanus Cordoue 39 après J.-C.-Rome 65 Le genre humain vit grâce à quelques hommes. Humanum paucis vivit genus. Pharsale, V, 343 ● genre (difficultés) nom masculin (latin genus, -eris) Accord 1. En ou de tout genre, en ou de tous genres : les deux orthographes sont admises. La vente rassemble des amateurs de tout genre. Dubois et fils, pièces mécaniques en tous genres. 2. Genre de (+ nom) : le nom qui suit genre est au singulier ou au pluriel selon que l'on met en relief un être déterminé ou la catégorie à laquelle il appartient. Ce genre d'individu ne m'intéresse pas (= un individu de ce genre). J'aime ce genre de jardins à l'anglaise (= j'aime les jardins de ce genre) ; en revanche, le verbe est toujours au singulier : ce genre de jardins a un charme secret (et non : ce genre de jardins ont un charme secret). Genre des noms Voir grammaire. ● genre (expressions) nom masculin (latin genus, -eris) Un genre de, une sorte de (indiquant une analogie, une ressemblance, une approximation) : Ce chapeau était un genre de bonnet. Avoir bon genre, mauvais genre, avoir un drôle de genre, avoir une allure distinguée, vulgaire ; avoir une allure bizarre ; être bien, mal élevé. C'est, ce n'est pas mon genre, c'est, ce n'est pas dans mes habitudes, dans mes goûts : Ce n'est pas son genre d'être en retard. Dans (en) son genre, dans la catégorie dont fait partie quelqu'un ou quelque chose ; à sa façon : Il est unique en son genre. En tout genre, en tous genres, de toute(s) sorte(s). Faire du genre, avoir des manières affectées, de l'affectation. Genre humain, ensemble des hommes, humanité. Mélanger les genres, mêler des tons, des styles différents ; faire interférer dans un problème des considérations qui ne conviennent pas au style de la discussion. Grand genre ou genre historique, le genre noble, la peinture d'histoire. Peinture de genre, catégorie picturale comprenant les scènes de caractère anecdotique, familier, intime ou populaire. Genre de vie, combinaison de pratiques culturelles et techniques, consolidées par la tradition, caractérisant le mode d'existence d'un groupe humain individualisé dans un cadre spatial donné. Genre musical, ensemble de formes de même caractère, réunies par leur destination (exemple musique de chambre) ou par leur fonction (exemple musique sacrée). ● genre (synonymes) nom masculin (latin genus, -eris) Ensemble de traits communs à des êtres ou à des...
Synonymes :
- forme
- nature
- type
Manière d'être de quelqu'un ; comportement, attitude ; allure de quelque chose
Synonymes :
- air
- allure
- attitude
- façons
- manières
- tenue
Catégorie d'œuvres littéraires ou artistiques définie par un ensemble de...
Synonymes :
- écriture
- manière
Beaux-arts. Peinture de genre
Synonymes :
- scène de moeurs
genre
n. m.
rI./r
d1./d Ensemble d'éléments présentant des caractères communs; espèce, sorte. Personne unique en son genre. Travaux en tout (tous) genre(s).
|| Le genre humain: l'ensemble des êtres humains, l'espèce humaine.
d2./d BIOL Unité de taxinomie inférieure à la famille et supérieure à l'espèce. Le chat domestique, famille des félidés, genre Felis, espèce domesticus. Le nom courant "genévrier" désigne plusieurs espèces du genre Juniperus.
d3./d LITTER, BX-A Sorte d'oeuvres caractérisées par leur sujet, leur style, etc. Genre épique, épistolaire, dramatique.
|| Tableaux de genre, représentant une scène de la vie familière, une nature morte, un animal.
d4./d Genre de vie: ensemble des comportements d'une personne ou d'un groupe social.
d5./d Façon de se tenir, de se comporter, de s'habiller; manières. Avoir bon genre, mauvais genre.
— Ce garçon n'est pas mon genre, ne me plaît pas.
— Agir ainsi n'est pas mon genre, n'est pas dans mes habitudes.
|| Faire du genre: avoir des manières affectées.
rII./r LING Classification morphologique de certaines catégories grammaticales (nom, pronom, etc.) réparties, en français, en masculin et féminin. Accord en genre et en nombre.
⇒GENRE, subst. masc.
A. — Langue abstraite et cultivée; langage technique Ensemble d'êtres ou d'objets ayant la même origine ou liés par la similitude d'un ou de plusieurs caractères. Appartenir à, rentrer dans un genre :
• 1. Les Anciens (...) ne se sont pas demandé pourquoi la nature se soumet à des lois, mais pourquoi elle s'ordonne selon des genres. L'idée de genre correspond surtout à une réalité objective dans le domaine de la vie, où elle traduit un fait incontestable, l'hérédité.
BERGSON, Évol. créatr., 1907, p. 229.
1. En partic. Le genre humain. Ensemble des êtres humains sans distinction. Synon. l'homme, l'humanité. S'étendre à, régner sur tout le genre humain; se déclarer l'ennemi du genre humain; faire confiance au genre humain. La Thénardier n'était mère que jusqu'à ses filles. Sa maternité finissait là. Sa haine du genre humain commençait à ses garçons (HUGO, Misér., t. 2, 1862, p. 142). C'est seulement à travers Dieu, en Dieu, que la religion convie l'homme à aimer le genre humain (BERGSON, Deux sources, 1932, p. 28) :
• 2. Il semble, messieurs, qu'au siècle où nous vivons, siècle où les idées d'égalité et de fraternité exercent un empire général, s'il est un dogme qui dût échapper à la négation, c'était le dogme qui ramène à l'unité tous les peuples dont se compose le genre humain.
LACORD., Conf. N.-D., 1848, p. 217.
SYNT. a) Berceau, enfance, histoire, marche, multiplication, progrès du genre humain; connaissance, lois, unité du genre humain. b) Délices, destinée(s), dignité, fraternité, misère, salut du genre humain; condamnation, corruption, décadence, destruction, exécration du genre humain. c) Ami, bienfaiteur, libérateur, père, sauveur du genre humain; fléau, honte, rebut du genre humain. d) Constituer, diviser, menacer, perpétuer, racheter, servir le genre humain; bien mériter du genre humain.
2. Spécialement
a) PHILOS. (logique classique), LING. Idée générale ou classe d'êtres ou d'objets qui possèdent un ou plusieurs caractères communs. Genre éloigné, suprême; genre prochain et différence spécifique. Quand deux termes généraux sont contenus l'un dans l'autre, le plus grand en extension s'appelle genre, le plus petit s'appelle espèce. En compréhension, le genre est plus petit que l'espèce. Le genre s'étend à plusieurs espèces, tandis que l'espèce comprend les attributs du genre (GOBLOT, 1920). [Dans la logique aristotélicienne] L'universelle affirmative (...) peut être regardée comme énonçant la subsomption du sujet sous le prédicat ou comme l'inclusion de l'espèce dans le genre (R. BLANCHÉ, La Logique et son histoire, Paris, Armand Colin, 1970, p. 44) :
• 3. La différence est ce qui s'ajoute à l'idée du genre [it. ds le texte] pour constituer l'idée de l'espèce subordonnée (...). Dans cette définition : l'homme est un animal raisonnable, l'animalité est le genre, l'humanité l'espèce, la raison la différence.
COURNOT, Fond. connaiss., 1851, p. 338.
b) TAXINOMIE, BIOLOGIE ANIMALE et VÉGÉTALE. Niveau de la classification des êtres vivants, placé sous la famille au-dessus des espèces; p. ext. classe, espèce. Échelle, évolution, harmonie, hiérarchie, multiplicité des genres et des espèces; genre primitif, secondaire, supérieur; genres et sous-genres. V. espèce II A ex. 3 :
• 4. ... c'est à Charles de Linné, savant suédois, que l'on doit d'avoir mis de l'ordre dans l'énorme matériel zoologique et botanique que l'on possédait à son époque; répartissant le monde animé en classes, ordres, genres et espèces, il aboutit à un rangement plutôt qu'à une véritable classification, mais qui rendait les recherches plus faciles. La dénomination de chaque être vivant par deux termes latins, le premier désignant le genre, l'autre l'espèce, fut acceptée dès le début et sert encore à l'heure actuelle.
Hist. sc., 1957, p. 1356.
c) LITT. et B.-A. Classe d'œuvres ou de sujets artistiques ou littéraires, définis par des caractères communs déterminant le choix des moyens. Genres littéraires, musicaux, picturaux; genre inférieur, mineur; mélange des genres. Pour pouvoir comparer avec fruit la littérature ancienne et la littérature moderne, il faut prendre les deux extrêmes des deux genres, la poésie pastorale pour le genre familier, la poésie épique pour le genre héroïque (BONALD, Législ. primit., t. 2, 1802, p. 211). Les erreurs révoltantes où sont tombés « presque tous » les grands maîtres en traitant ce genre difficile [la musique d'église] (BERLIOZ, À travers chants, 1862, p. 263). La souplesse et la variété de talent de ce peintre [M. Caillebotte]. Il exhibe, au panorama, des échantillons de tous les genres : des intérieurs, des paysages de terre et de mer, des natures mortes (HUYSMANS, Art mod., 1883, p. 287) :
• 5. Les états de conscience qui, les premiers dans l'histoire humaine, reçurent une forme littéraire furent des stupeurs, des terreurs, des extases, des joies, des tristesses, des haines, des fureurs, des amours; ils ne furent pas des positions de l'esprit. Et, de fait, les genres par lesquels débutent toutes les littératures, l'épopée, l'ode, l'élégie, la tragédie, le conte (...) expriment des émotions, soit de l'auteur, soit de ses personnages.
BENDA, Fr. byz., 1945, p. 153.
SYNT. a) Abandonner, apprécier, réhabiliter, renouveler un genre; exceller dans un genre. b) Genres littéraires : genre oratoire, poétique; genre en prose; genre démonstratif, délibératif, judiciaire; genre épique, dramatique, lyrique; genre didactique, épistolaire, historique, romanesque. c) Genres picturaux : genre historique; genre du paysage, du portrait.
— Manière, style propres à un artiste, à un écrivain. Ce tableau est dans le genre du Corrège (Ac.). Il faut que notre conte de fées soit dans un genre rabelaisien — idéal, l'histoire et la satire ailée, mordante et fantaisiste de tout l'homme du XIXe siècle (GONCOURT, Journal, 1857, p. 358).
— En partic.
♦ MUS. Division du tétracorde correspondant à la place occupée par les sons mobiles qui le composent. Un troisième genre naît de la succession de certaines notes, telles que do dièse et ré bémol (...) dont l'intonation est presque identique (...) : c'est le genre enharmonique (E. DURAND, Traité harm., s.d., p. 2) :
• 6. Le système grec le plus ancien avait une très petite étendue. Il était renfermé dans les limites d'une quarte dont les deux sons extrêmes restaient fixes, tandis que les sons intermédiaires étaient mobiles, et constituaient par leur position les trois genres : diatonique, chromatique, enharmonique.
SAVARD, Harm., t. 1, 1853, p. 25.
♦ PEINT. Peintre, peinture de genre. Peintre, peinture dont les sujets sont (ou tableau qui représente) des scènes de la vie quotidienne, des animaux, des natures mortes. Au XVIIIe siècle, l'excellent peintre de genre, Chardin, semble avoir voulu renouer à eux [les Le Nain] pour les scènes d'intérieur et la représentation des objets naturels (SAINTE-BEUVE, Nouv. lundis, t. 4, 1863, p. 127) :
• 7. Les scènes de cabaret et les kermesses de la peinture flamande, les « bambochades », les intérieurs à la Le Nain, bref, tous les tableaux dont les sujets, anecdotiques ou narratifs, s'opposent au style noble des compositions religieuses ou mythologiques, appartiennent à la peinture de genre dont la vogue cessa en 1914.
P. CABANNE, Dict. internat. des arts, Paris, Bordas, t. 1, 1979, s.v.
Scène de genre. Scène de la vie quotidienne :
• 8. ... tel Meissonier avec ses petits personnages XVIIIe siècle, tel Roybet avec ses mousquetaires. Ces peintres confirment dans l'esprit du public la conviction qu'il sait goûter Pieter de Hoogh, Franz Hals, les scènes de genre hollandaises. En fait, le public ne goûte pas les scènes de genre hollandaises, car celles-ci, c'était la vie.
CASSOU, Arts plast. contemp., 1960, p. 16.
Le genre. Étudier le genre (Ac. 1835, 1878). Il est assez difficile, en tout état de choses, de dire exactement où finit la grande peinture, où commence ce qu'on est convenu d'appeler le genre. On ne peut se régler ni sur le choix des sujets, ni sur la dimension des toiles, ni d'après les habitudes variables du peintre (E. FROMENTIN, Salon ds Revue organique des départements de l'Ouest, La Rochelle, 1845, pp. 262-263).
P. anal. Chanson, musique de genre. Chanson, musique dont les sujets sont d'inspiration populaire, pris dans la vie quotidienne. [Au café-concert] Ce soir, débuts de Mademoiselle Amanda, chanteuse de genre (ZOLA, Assommoir, 1877, p. 629) :
• 9. ... une divette de music-hall [la Sainte-Ygraine], qui, après s'être exhibée avec succès dans des petits théâtres de genre, avait été prise de l'ambition, commune à beaucoup de ses pareilles, de se faire entendre sur une scène plus digne de son talent.
ROLLAND, J.-Chr., Foire, 1908, p. 780.
♦ RHÉT., vieilli. Style, ton particuliers dans lesquels sont traités un sujet ou les parties d'une œuvre littéraire. Genre sublime, tempéré ou médiocre ou orné ou fleuri; genre badin, burlesque, sérieux. Le genre simple présente les objets sans les revêtir d'aucun ornement recherché (DOMAIRON, Rhétorique française, Paris, Deterville, 1804, p. 149).
d) GRAMM. Catégorie reposant, selon les langues et les systèmes, sur la distinction naturelle entre les sexes ou sur des critères formels. Genre naturel, grammatical; genre animé, inanimé; genre féminin, masculin, neutre; genre épicène; adjectif, substantif des deux genres :
• 10. L'article — défini et indéfini — est le principal réactif du genre en français. C'est essentiellement par l'article que la conscience du genre entre chez l'enfant, pour qui il ne s'agit pas d'une notion abstraite, mais d'associations mnémoniques. Pendant longtemps il ignore si pied, main est masculin ou féminin, mais ce qu'il sait de bonne heure, c'est qu'on se moque de lui s'il dit la pied ou le main; il a groupé inconsciemment dans sa mémoire les mots à le (et un) et les mots à la (et une).
A. DAUZAT, Le Genre en fr. mod. ds Ét. de ling. fr., Paris, d'Artrey, 1946, pp. 42-43.
— Forme donnée au pronom, adjectif ou participe correspondant au genre du nom représenté, ou avec lequel il s'accorde. Quand un participe s'accorde en genres, en nombres, et en cas, avec le nom auquel il sert d'adjectif, il est tout aussi défini qu'un tems de l'indicatif, et qui s'accorde avec son sujet en nombre et en personne (DESTUTT DE TR., Idéol. 2, 1803, p. 196) :
• 11. Dans beaucoup de langues, il s'opère une fusion complète entre le genre et le nombre, si bien qu'on ne peut distinguer ce qui appartient à l'un ou à l'autre, ni analyser sûrement le conglomérat. Au singulier, d'ailleurs, le nombre n'a généralement pas d'expression, la rencontre n'a lieu qu'au duel et au pluriel.
R. DE LA GRANERIE, De la Catégorie du Genre, Paris, E. Leroux, 1906, pp. 232-233.
e) MATHÉMATIQUE
♦ Genre d'une surface. ,,Nombre maximum de courbes simples fermées sans points communs que l'on peut tracer sur cette surface sans la morceler`` (A. BOUVIER, M. GEORGE, Dict. des math., Paris, P.U.F., 1979).
Genre d'un graphe. Genre le plus petit d'une surface orientable sur laquelle le graphe puisse être représenté (A. BOUVIER, M. GEORGE, Dict. des math., Paris, P.U.F., 1979ibid.).
♦ Genre d'un nœud. Moitié du nombre d'anses nécessaires pour obtenir une surface se séparant en deux parties par section suivant le nœud (A. BOUVIER, M. GEORGE, Dict. des math., Paris, P.U.F., 1979ibid.).
Rem. Quelques dict. gén. enregistrent le sens vx en physiol. ,,ensemble des nerfs, sensibilité physique`` (LITTRÉ), synon. de système nerveux. L'irritation du genre nerveux. Cette odeur attaque le genre nerveux (Ac. 1835, 1878).
B. — P. ext. [Souvent avec une valeur d'approximation] Langage courant
1. [L'accent est mis sur l'ensemble et sur l'appartenance d'un être ou d'un objet à l'ensemble] Catégorie, espèce, sorte, type. J'allais jusqu'à dire à Brigitte qu'elle devait la prendre pour modèle, et que c'était là tout à fait le genre de femmes qui me plaisait (MUSSET, Confess. enf. s., 1836, p. 245). Il y eut encore une scène de révolte et d'emportement qui fut tout ce qu'il est possible d'imaginer en ce genre de plus puéril et de plus charmant (SANDEAU, Mlle de La Seiglière, 1848, p. 145). Toute discussion politique contre un libéral, un républicain et tout genre de philanthrope et d'utopiste (GONCOURT, Journal, 1863, p. 1278). Attends encore un peu, je te prie. Veux-tu prendre un café-crème ou quelque chose de ce genre? (DUHAMEL, Cécile, 1938, p. 158) :
• 12. La juste douleur d'une mère, la satisfaction de savoir le crime vengé, c'est le genre de jouissances qu'on aime à savourer seule, ne trouvez-vous pas?
CAMUS, Requiem, 1956, 1re part., 2e tabl., p. 829.
♦ Fam. Être le genre de qqn. Correspondre à son type, à son idéal. Elle est tout à fait mon genre :
• 13. Il y avait eu un temps où Swann lui avait plu, justement celui où elle n'était pas « son genre ». À vrai dire, « son genre », même plus tard, elle ne l'avait jamais été.
PROUST, Temps retr., 1922, p. 1021.
SYNT. a) Genre d'activité, d'exercice, d'occupation, de travail; genre de chose(s); genre d'argument; genre de beauté, de plaisir, de sentiment; (je n'ai aucun goût pour, j'ai horreur de, je déteste ce) genre de conversation, de discussion, d'esprit, de plaisanterie; (je ne fréquente pas ce) genre d'endroit(s); (j'aime, je connais bien ce) genre de caractère, d'hommes, de personnes, de type (fam.). b) Un modèle de (en) ce genre; constituer, être, rester, être considéré comme (le) un modèle, un spécimen, le type, l'idéal, le sublime du genre.
— Loc. diverses
♦ Du même genre. En Europe centrale, entre 1919 et 1939, des mouvements agraires du même genre [libéralisme agraire] ont pris naissance, assez proches quelquefois du socialisme (par exemple en Bulgarie) (Traité sociol., 1968, p. 39).
♦ De tous (les) genres, de tout genre. Les progrès de tous genres que le christianisme a fait faire à la société (CHATEAUBR., Mém., t. 1, 1848, p. 632). J'avais 10 000 francs et un tas d'avantages de tous les genres (GONCOURT, Journal, 1891, p. 41). La vie de Gaston — si féconde pourtant en triomphes de tout genre (DU BOS, Journal, 1925, p. 321).
♦ En tout genre, en tous genres. Ces deux ruelles, ainsi disposées, contiennent une trentaine de maisons à six et sept étages, dont les cours intérieures, dont tous les appartements contiennent des magasins, des industries, des fabriques en tout genre (BALZAC, Cous. Pons, 1847, p. 311). Un grand panier de babas, d'éclairs et gaufrettes! des « Saint-Honorés » en tous genres (CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 608).
♦ Dans tous les genres, dans le genre. Lorsque l'objet même de l'enseignement force de se borner dans tous les genres à des connaissances élémentaires (CONDORCET, Organ. instr. publ., 1792, p. 472). Une vraie maison, tout ce qu'on fait de plus chouette dans le genre (ROMAINS, Copains, 1913, p. 270).
♦ Dans, en + adj. poss. + genre. Un livre, une personne, un succès unique en son genre. Les villes des Pays-Bas sont en leur genre aussi pittoresques que celles de l'Italie (TAINE, Philos. art, t. 1, 1865, p. 262). Mlle Pz. et Miss Pauline M. (...) toutes deux modestes, jolies, l'une musicienne, l'autre dessinatrice, la première plus vive, la seconde plus douce, mignonnes chacune dans leur genre (AMIEL, Journal, 1866, p. 101). Des garçonnets dans son genre, c'est tout autant malicieux que des filles (BERNANOS, Crime, 1935, p. 815). Les gringalets dans son genre, c'est pas tout à fait mon type d'homme (AYMÉ, Cléramb., 1950, p. 168).
♦ Dans le genre de. Un colossal fragment de cathédrale inachevée en granit, par Herrera, dans le genre de St Pierre de Rome (GAUTIER, Tra los montes, 1843, p. 63). J'ai eu un accident de chemin de fer : très peu de chose : un coup près de l'œil, dans le genre du tien (VILLIERS DE L'I.-A., Corresp., 1870, p. 161).
♦ De + adj. poss. + genre. Les pilotins de ton genre, semi-dignitaires municipaux en retraite, je les emmerde (MALRAUX, Espoir, 1937, p. 671). Les hommes de son genre s'accoutument à tout, même à la mort (H. BAZIN, Vipère, 1948, p. 92).
♦ Du genre de + subst., du genre + adj. ou subst. Mille histoires du genre affolant (VALÉRY, Corresp. [avec Gide], 1894, p. 216). Les unes [les demoiselles] sont du genre volaille, les autres du genre petite singesse (MONTHERL., Pte Inf. Castille, 1929, p. 602). En France, à part quelques braves loufoques du genre de Déroulède, qui est-ce qui rêve encore de gloire militaire, ou de revanche? (MARTIN DU G., Thib., Été 14, 1936, p. 131). Études trop historiques ou énumératives du genre catalogue et fausse synthèse (Colloque géogr. appl., 1962, p. 64).
2. [L'accent est mis sur le ou les caractères commun(s) aux éléments de l'ensemble] Façon, manière d'être d'un être ou d'un objet.
a) Genre de vie. Ensemble des habitudes propres à un individu ou à un groupe d'individus. Synon. conditions, mode de vie, façon(s) de vivre. Genre de vie de l'ouvrier, des marins, des nomades. Le nomadisme n'est pas seulement le fait du genre de vie pastoral (BRUNHES, Géogr. hum., 1942, p. 199) :
• 14. J'ai continué à me lever de très bonne heure et à m'occuper avec un intérêt exclusif du même sujet [la rédaction de mon article] : c'est encore le genre de vie le meilleur qu'on puisse avoir; la vie est plus une; on est moins tourmenté par les événements et toutes les choses de la vie extérieure...
MAINE DE BIRAN, Journal, 1817, p. 58.
SYNT. a) Genre de vie nouveau, particulier; genre de vie agité, austère, casanier, hasardeux; genre de vie forestier, urbain; genre de vie américain, oriental. b) S'accoutumer, s'adapter, être attaché à un genre de vie; changer de, choisir, mener un genre de vie; observer les (différents) genres de vie.
b) Manière d'être, caractère, nature de quelqu'un ou, par analogie, de quelque chose. Adopter, se donner un genre; changer de genre, avoir un certain genre, un petit genre, un genre à part, un drôle de genre (fam.); ce n'est pas dans le genre de la maison; avoir le genre maison. J'aime bien Laurence comme ma sœur; je ne voudrais pas d'une femme comme elle, j'aime mieux ton genre (BALZAC, Corresp., 1821, p. 115). En cuisinière distinguée, dont le genre n'était pas de se quereller chez les maîtres, [elle] avait accepté ses huit jours (ZOLA, Pot-Bouille, 1882, p. 380) :
• 15. Quelques-uns de ces messieurs étaient mariés et nous amenaient leurs femmes. Il fallait voir le genre de ces personnes-là!
A. DAUDET, Femmes d'artistes, 1874, p. 104.
— Fam. Qqc. est, c'est + adj. poss. + genre; qqc. est, c'est dans/de + adj. poss. + genre. Quelque chose est, c'est en harmonie avec (+ adj. poss.) façon d'être, de penser, d'apprécier. C'est bien son genre; ce n'est pas mon genre. Cette idée me frappa, elle était dans mon genre (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 827). Tous ces tripotages-là ne sont pas de mon genre. Passe encore de se faire recommander par les amis; mais par des dames, c'est un peu canaille, un peu trop pour moi (FLAUB., Corresp., 1843, p. 142). — Je ne prise plus, dit Olivier froidement. Non. — Parole? Et d'ailleurs, ça ne m'étonnerait pas, ce serait assez dans votre genre (BERNANOS, Mauv. rêve, 1948, p. 886) :
• 16. — Te rappelles-tu la petite Marie de chez nous? Elle vient d'entrer au couvent des clarisses, impasse de Saxe (...). Augustin ressentit un léger choc d'émotion et d'étonnement. Un ordre contemplatif? Ce n'était pas son genre...Enfin!... Encore une heureuse...
MALÈGUE, Augustin, t. 1, 1933, p. 258.
— Bon, mauvais genre. Bonnes, mauvaises manières; bon(ne), mauvais(e) aspect, allure. Avoir mauvais genre; qqc. ou qqn (de) très, trop bon genre; être, faire bon genre. C'était « le bon genre » de recevoir l'éducation chez les dominicaines, en compagnie de jeunes personnes « nées » (ADAM, Enf. Aust., 1902, p. 285). Pour se donner mauvais genre, elle mettait son chapeau de travers et croisait haut les jambes (BEAUVOIR, Mém. j. fille, 1958, p. 270). V. gomorrhéen B 1 citat. de PROUST :
• 17. Mon père, sans doute, fut séduit par cet acte distingué de manger des huîtres sur un navire en marche. Il trouva cela bon genre, raffiné, supérieur...
MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Oncle Jules, 1883, p. 417.
SYNT. a) Faire qqc. par bon genre; trouver mauvais genre à qqn; être (reconnu) bon genre. b) Une éducation, des idées, un journal, une voiture (très) bon genre.
♦ Bon chic, bon genre. L'apport de la Balance, signe de distinction et de mesure, rehaussé par la présence lunaire précise le côté bon chic, bon genre de notre virginien (Michel Drucker) toujours tiré à quatre épingles, impeccable sans extravagance. Le voilà bien « le charme discret » de la Vierge (Astres, n° 390, oct. 1980, p. 196).
— [Suivi d'un adj. ou d'un subst.] Affecter, avoir, prendre le (un) genre artiste; donner dans le genre désinvolte. La gueule de travers, je te dis! Encore plus que ça! Et l'œil désossé! Et le tremblement dans la ganache! Un petit genre Chaliapine, quoi! (COLETTE, Vagab., 1910, p. 152). Il s'était complètement défait du genre aviateur, tapageur, beau gosse, que je lui avais connu dix ans plus tôt, après la grande guerre (MORAND, Champions du monde, 1930, p. 180) :
• 18. M. de Chasteller avait de la fortune. Il paraissait plus âgé qu'il ne l'était, parce qu'il manquait tout à fait de cheveux; mais il avait une vivacité étonnante et portait la grâce dans les manières jusqu'au genre doucereux.
STENDHAL, L. Leuwen, t. 1, 1835, p. 270.
SYNT. Genre anarchiste, bourgeois; genre américain, parisien, provincial; genre bigot, cérémonieux, folâtre, gâteux, pimbêche, sérieux, sévère, snob, tourmenté.
♦ [Placé en appos. ou en incise] Façon, type. Un horrible bavard, genre puritain (BLOY, Journal, 1892, p. 68). Un petit salon, genre boudoir (TRIOLET, Prem. accroc, 1945, p. 143).
— Vieilli. Élégance, chic. Avoir du, manquer de genre. La jaquette américaine en drap noir, ornée sévèrement de tresses et de boutons; elle est pratique, mais n'a pas de genre (Journal des Ouvrages de Dames, Paris, F. Tedesco, 1909, p. 230).
— Désir de se distinguer en affectant certaines manières :
• 19. Les rares familles bourgeoises de Montigny envoient, par genre, leurs enfants en pension au chef-lieu, de sorte que l'école ne compte guère pour élèves que des filles d'épiciers, de cultivateurs, de gendarmes et d'ouvriers surtout; tout ça assez mal lavé.
COLETTE, Cl. école, 1900, p. 12.
♦ Se donner, faire du genre. La pompe de cette cérémonie, cette file noire qui arrêtait la circulation sur son passage, les voitures drapées, le petit coupé des Risler que Sidonie avait envoyé pour faire du genre, tout cela la flattait, l'exaltait, quoi qu'il en eût (A. DAUDET, Fromont jeune, 1874, p. 273).
REM. Genreux, -euse, adj. et subst., fam., vx. a) Emploi adj. [En parlant d'une pers. ou d'un groupe de pers.]. Synon. de affecté (supra B 2 b faire du genre). Une histoire scandaleuse, dont potine à cette heure tout le Paris genreux (GILL, La Petite lune, 1878-79, n° 28, p. 2). Ces femmes, ou brunettes ou blondinettes et généralement gentillettes, ont une distinction, mais pas une distinction de grande dame : une distinction bourgeoise de demoiselle de magasin suprêmement chic. C'est mignon, c'est genreux, et ça papote dans les coins, en grignotant des petits fours avec d'élégants froufrous et un caquetage d'oiseaux (GONCOURT, Journal, 1887, p. 680). P. anal. [En parlant d'une chose]. La pipe est devenue genreuse (Nouv. Lar. ill.). Je m'appelle « Tompin », imaginez-vous que ces animaux-là, ne trouvant pas mon nom suffisamment « genreux », ont inventé de m'anoblir et de m'ajouter un « y » (GYP, Mar. civil, 1892, p. 298). b) Emploi subst. Celui, celle qui a des manières affectées. Un tas de genreux, de femmes maquillées (demi-mondaines ou mondaines tout entières), de théâtreuses indiscrètes et cramponnes (COLETTE, Cl. ménage, 1902, p. 84).
Prononc. et Orth. : []. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. A. 1121-34 gendre lang. commune « sorte, type » (PH. DE THAON, Bestiaire, 868 ds T.-L.). B. 1. Ca 1200 « sexe » (Dial. Grégoire, 144, 3, ibid. : ... nïent ke il despitoit lo genre [non quia aspernabatur sexum]); 2. ca 1245 gramm. (H. D'ANDELI, IV, 386, ibid.). C. 1. Début XIIIe s. humaine genre (La Venjance del mort nostre Seigneur, Brit. Mus., Egerton 613, fol. 18 r° ds GDF. Compl.); 2. ca 1300 philos. « ensemble des caractères essentiels d'une chose » (Gl. Bruxelles, 9543 ds T.-L. : genrre : si com estre d'une nature); cf. ca 1380 ne chiet en espece ne en gendre (J. LEFÈVRE, Vieille, 109, ibid.); 3. 1654, 17 oct. litt. (RACAN, Œuvres, éd. Tenant de Latour, I, 357 : si l'on veut acquérir la réputation en ce genre d'écrire [le théâtre]). Empr. au lat. genus, -eris « origine, extraction, naissance » qui recouvre l'ensemble des sens de l'a.fr. : « race, nation; espèce, genre [humanum genus]; sorte, type, manière », philos. : pars subjecta generi [l'espèce]. La forme a.fr. gendre s'explique prob. par l'infl. du verbe a.fr. gendrer (lat. class. generare « engendrer ») « engendrer » (v. DEAF s.v. 465, 27). Fréq. abs. littér. : 10 185. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 23 860, b) 10 669; XXe s. : a) 7 760, b) 12 571. Bbg. DAUZAT Ling. fr. 1946, p. 9, 15. - KLEIN (J.R.). Le Vocab. des mœurs de la Vie parisienne sous le Second Empire. Louvain, 1976, p. 53 (s.v. genreux). - LAUNAY (M.). Le Vocab. pol. de Jean-Jacques Rousseau. Genève-Paris, 1977, p. 110.
genre [ʒɑ̃ʀ] n. m.
ÉTYM. Fin XIIe, « sexe », aussi gerre, gendre (1121 - XVIe); du lat. genus, generis « origine, naissance ».
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1 Vx. Race.
1 Je te salue roi, de Mars victorieux,
Et vous, vaillants Hectors, heureux genre des dieux.
2 (V. 1360). Mod. || Le genre humain : l'ensemble des hommes considérés indépendamment de toute notion de sexe, de race, de pays, etc. ⇒ Espèce, race; homme, humanité (→ Créature, cit. 7). || Bienfaiteurs (cit. 6) du genre humain. || Fléau du genre humain (→ Émigration, cit. 1). || Servir le genre humain (→ Bienfaiteur, cit. 8). || Ami (cit. 23) du genre humain. ⇒ Philanthrope. || Ennemi du genre humain. ⇒ Misanthrope. || Un crime (cit. 6) contre le genre humain.
2 Je n'y puis plus tenir, j'enrage, et mon dessein
Est de rompre en visière à tout le genre humain.
Molière, le Misanthrope, I, 1.
3 (…) il y a longtemps que le genre humain ne serait plus si sa conservation n'eût dépendu que des raisonnements de ceux qui le composent.
Rousseau, De l'inégalité parmi les hommes, I.
4 (…) Le genre humain, considéré comme un grand individu collectif accomplissant d'époque en époque une série d'actes sur la terre, a deux aspects, l'aspect historique et l'aspect légendaire (…) l'auteur, en racontant le genre humain, ne l'isole pas de son entourage terrestre (…) L'épanouissement du genre humain de siècle en siècle, l'homme montant des ténèbres à l'idéal (…) l'éclosion lente et suprême de la liberté (…) voilà ce que sera, terminé, ce poème dans son ensemble (…)
Hugo, la Légende des siècles, préf. 1re série (1857).
5 Après ne pas vivre avec ceux qu'on aime, le plus grand supplice est de vivre avec ceux que l'on n'aime pas, c'est-à-dire avec plus des trois quarts du genre humain.
Flaubert, Correspondance, 204, t. II, p. 50.
♦ ☑ Par plais. Don Juan, l'épouseur du genre humain, de toutes les femmes.
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II
1 (1361). Didact. Idées générales d'un groupe d'êtres ou d'objets présentant des caractères communs (⇒ Concept); « groupe fictif dans lequel tous les individus, en nombre indéfini, ayant certains caractères communs, sont idéalement rassemblés » (Goblot). || Caractères communs à tout un genre. ⇒ Générique.
6 Les deux mots genre et concept se distinguent par une nuance assez délicate, mais presque toujours observée : le genre est l'idée générale envisagée surtout au point de vue de son extension; le concept, l'idée générale envisagée surtout au point de vue de sa compréhension. Ainsi on dit plutôt le genre homme, si on songe aux individus en nombre indéfini auxquels ce mot peut être attribué; on dit plutôt le concept d'homme, si on songe aux qualités qui sont communes à tous les hommes.
Goblot, Voc. de la philosophie, art. Concept.
♦ Genre et espèce. ⇒ Classe, espèce (cit. 25).
7 Pour consumer sa vie à pointiller sans cesse
Sur le genre et l'espèce (…)
Corneille, Imitation de J.-C., I, 3.
8 Un genre s'étend à plusieurs espèces; un genre suprême n'en a point au-dessus de lui; une espèce infime n'en a point au-dessous d'elle.
Diderot, Opinion des anciens philosophes, Stoïcisme.
9 Quand deux termes généraux sont contenus l'un dans l'autre, le plus grand en extension s'appelle genre, le plus petit s'appelle espèce. En compréhension, le genre est plus petit que l'espèce. Le genre s'étend à plusieurs espèces, tandis que l'espèce comprend les attributs du genre.
Goblot, Voc. de la philosophie, art. Genre.
2 (Mil. XVIIIe, Buffon). Subdivision de la famille. (En botanique, zoologie, microbiologie, → Taxinomie). ⇒ Famille (cit. 37). || Plusieurs espèces (cit. 26 et 30) voisines forment un genre.
10 Comme je l'ai déjà fait sentir, la nature n'a ni classes ni genres, elle ne comprend que des individus.
Buffon, Hist. nat. des animaux, 11.
11 Une espèce est désignée (nomenclature binaire) par le nom de genre suivi du nom spécial à l'espèce. Le Chat, le Lion, le Tigre, le Couguar appartiennent au genre Felis et sont respectivement appelés Felis domesticus, Felis leo, Felis tigris, Felis concolor.
P. Poiré, Dict. des sciences, art. Genre.
3 (1654). Littér. Catégorie d'œuvres définie par la tradition (d'après le sujet, le ton, le style). || Le genre de la prose, de la poésie. || Genres en vers, dans la littérature classique : lyrisme, épopée (cit. 1), drame, poésie didactique, bucolique… || Genres en prose : éloquence, philosophie, histoire, critique, correspondance (genre épistolaire), science, roman, nouvelle, essai. || Genre oratoire, comprenant les genres démonstratif, délibératif, judiciaire. || L'évolution des genres dans l'histoire de la littérature, ouvrage de Brunetière. — Genre noble, genre bas (anciennt). || Lois, règles d'un genre. || Genre simple, genre mixte. || Le drame est un genre mixte entre la tragédie et la comédie. || Genre principal, secondaire. — Genres de composition littéraire (description, portrait, caractère, narration, dissertation, discours, dialogue, analyse, lettre…). — (Du point de vue du ton, du style). || Genre classique, romantique; genre sérieux, merveilleux, héroïque; genre dramatique, grave, comique (→ Comédie, cit. 18), héroï-comique, larmoyant; genre badin, burlesque, grotesque; genre anecdotique, élégiaque, emphatique (cit. 2). || Conte (cit. 7) du genre philosophique. || La fable (cit. 14), genre naturel. || Le genre polémique (→ Exceller, cit. 4). || Genre vague (→ Esquisser, cit. 3), fleuri (→ Fleurir, cit. 28). || Le genre ennuyeux (cit. 9, Voltaire).
12 J'irais plus haut peut-être au temple de Mémoire,
Si, dans un genre seul, j'avais usé mes jours.
La Fontaine, Poésies mêlées, LXIX.
13 Il ne faut donner l'exclusion à aucun genre; et si l'on me demandait quel genre est le meilleur, je répondrais : Celui qui est le mieux traité.
Voltaire, l'Enfant prodigue (Préface de 1737).
14 La langue poétique (au début du XIXe s.) comprenait plusieurs tons (ou styles), suivant les divers genres. La distribution en genres était une distribution essentielle, à laquelle les théoriciens néo-classiques attachaient une importance primordiale (…) Parmi ces genres, les uns étaient « réguliers ». Boileau avait fixé les règles de l'élégie; d'autres théoriciens avaient achevé et complété son œuvre. Mais la fable restait « libre ». Des genres peuvent être provisoirement délaissés; d'autres, comme le poème épique, étaient florissants, sinon par la qualité des œuvres, au moins par leur abondance. Un genre nouveau, la poésie descriptive, avait toute la faveur des auteurs et du public. Il existait aussi de petits genres et de grands genres : Népomucène Lemercier, le dernier législateur du Parnasse, avait consacré un volume à la tragédie, un volume à la comédie, deux volumes à l'épopée. C'étaient là les grands genres.
15 (…) nous recourrons à tous les genres littéraires pour familiariser le lecteur avec nos conceptions : un poème, un roman d'imagination, s'ils s'en inspirent, pourront, plus qu'un écrit théorique, créer le climat favorable à leur développement.
Sartre, Situations II, p. 28.
4 Classe ou nature du sujet traité par un artiste. || Chaque genre a ses beautés (→ Artiste, cit. 1). || Le genre (du) portrait, (du) paysage. || Le genre nature morte. || Le genre tableau d'histoire. — ☑ Loc. (1765, Diderot). Tableau, peinture de genre : (jusqu'au XVIIIe) tout ce qui n'était pas peinture d'histoire (ou de style); (depuis le XIXe) tableau d'intérieur, nature morte ou peinture d'animaux. || Greuze, Chardin, Téniers sont des peintres de genre.
16 La peinture se divise en technique et idéale, et l'une et l'autre se sous-divise en peinture de portrait, peinture de genre et peinture historique.
Diderot, Salon de 1765, t. XIII, p. 325.
17 Tous les genres d'architectures sont réunis à la cathédrale de Séville. Le gothique sévère, le style de la renaissance, celui que les Espagnols appellent plateresco ou d'orfèvrerie, et qui se distingue par une folie d'ornements et d'arabesques incroyables, le rococo, le grec et le romain, rien n'y manque (…)
Th. Gautier, Voyage en Espagne, p. 253.
18 (…) la peinture d'histoire, après avoir été en art ce que le poème épique et la tragédie étaient en poésie, a beaucoup perdu de son importance. Les meilleurs élèves de l'École abandonnent ce « genre noble » (…) Après s'être montré habile dans tous les genres, Aimé Morot se contente d'être un excellent portraitiste (…)
L. Hourticq, Encycl. des beaux-arts, art. France.
19 Puvis de Chavannes a créé, pour ainsi dire, un genre, la décoration des péristyles de musées (…)
L. Hourticq, Encycl. des beaux-arts, art. France.
5 (1690, Furetière). Mus. Division du tétracorde, considéré dans les intervalles des quatre sons qui le composaient : genre diatonique, chromatique, enharmonique.
6 Math. || Genre d'une surface : « nombre maximum de courbes simples fermées sans points communs que l'on peut tracer sur cette surface sans la morceler » (Bouvier et George, Dict. des mathématiques). — || Genre d'un graphe (Bouvier et George, Dict. des mathématiques).
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III (1245). Gramm., ling. Chacune des catégories grammaticales, opposées les unes aux autres par un ensemble de traits morphologiques, syntaxiques et sémantiques (en proportions variables) dans lesquelles de nombreuses langues répartissent les noms, généralement sur le modèle d'oppositions naturelles (sexe) ou culturelles, et corrélativement d'autres parties du discours (ex. : articles, formes pronominales, adjectivales, verbales). — REM. On dit aussi genre grammatical, genre formel. — Langues sans genres (chinois, turc, hongrois…), à deux genres (français, hébreu, hindī…), à trois genres (allemand, latin, grec…), ou davantage (bantou, langues du Caucase…). || Le genre masculin, féminin, neutre. || Genre animé, inanimé de certaines langues. || Genre comportant des sous-genres (dans certaines langues slaves). — Le genre masculin, en français, inclut une classe neutre. || Tout substantif, en français, a un genre. || Nom du genre, de genre masculin, féminin : nom masculin, féminin. || Le genre du nom est codé (lexicalisé) dans le système de la langue. || Nom dont le genre est douteux. || Hésitation sur le genre d'un mot nouveau, en l'absence de critères morphologiques (ex. : enzyme; → aussi cit. 26). || Genre d'un prénom, d'un nom propre.
REM. 1. En français, un grand nombre de substantifs ont changé de genre au cours de l'histoire (ex. : automne, effluve, épiderme, épithète, équivoque, œuvre, ombre, phalène, steppe).
2. Certains noms ont deux genres suivant qu'ils sont employés au singulier ou au pluriel (ex. : amour, délice, orgue). D'autres ont les deux genres, mais avec des sens différents (ex. : aide, aigle, couple, critique, faune, garde, guide, légume, manche, manœuvre, mémoire, mode, œuvre, parallèle, pendule, période, solde, voile, etc.).
3. Les motifs qui déterminent l'attribution d'un genre à un nom peuvent être d'ordre sémantique (expression du genre naturel par le genre grammatical; classes sémantiques; ellipse et autres figures de style; motivations psychologiques, etc.) ou formel (séries analogiques). La catégorie du genre est fictive quand elle ne peut correspondre aux qualités réelles de l'objet désigné (c'est le cas en français pour les noms d'inanimés); mais elle n'est pas immotivée.
4. L'opposition des genres, en français, peut exprimer une autre opposition que celle des sexes (ex. : pèlerin, animé / pèlerine, objet). L'opposition des sexes peut être exprimée par l'opposition des genres (ex. : cousin/cousine), par une opposition lexicale généralement avec opposition des genres (ex. : oncle/tante), ou par d'autres procédés lexicaux (ex. : gazelle mâle/gazelle femelle; peintre/femme peintre). C'est à de tels procédés que recourent les langues sans genres. — Pour les parties du discours autres que le substantif (pronoms, articles, adjectifs, participes) c'est un paradigme formel correspondant aux différents genres qui est codé dans la langue, le locuteur sélectionnant la bonne forme en fonction du genre du nom. — Variation en genre de l'article, du pronom. L'adjectif qualificatif s'accorde en genre et en nombre avec le nom qu'il qualifie. L'adjectif attribut prend le genre et le nombre du nom sujet. Adjectif employé à un seul genre (ex. : grégeois, primipare).
♦ Marques (morphologiques) du genre. ⇒ Affixe, désinence, suffixe; déclinaison, flexion, paradigme (flexionnel). || En français, le suffixe -euse indique le genre féminin. || Marques phoniques et marques graphiques du genre (ex. : de joyeux élèves [dəʒwajøzelɛv]; de joyeuses élèves [dəʒwajøzzelɛv]), ou seulement graphiques (ex. : e de amie, parfois rappelé dans la langue parlée : « ami-i ou ami-e ? » [amiiuamiə]). || Adjectifs dont le genre n'est pas formellement marqué. ⇒ Épicène.
♦ Marques contextuelles du genre (ex. : accord de l'article, de l'adjectif, du participe; forme du pronom qui se substitue au nom, quand la référence à l'être désigné n'interfère pas).
♦ Didact. || Genre marqué : genre dont la plupart des éléments dérivent morphologiquement (par dérivation, désinence flexionnelle…) d'éléments correspondants d'un autre genre (comme ogresse<ogre ou chienne<chien), lequel est dit non marqué. || Le genre non marqué est pris, quand il existe, comme base de description linguistique. || En sanskrit, le féminin est un genre marqué par rapport au masculin.
♦ Genre commun ou (locution préférable) double genre : propriété formelle :
a Des noms qui, sans changer de forme, peuvent s'employer au masculin pour désigner un être mâle et au féminin pour désigner un être femelle, la différence entre les signifiés se réduisant aux caractères de sexe (ex. : artiste, camarade, élève, garde, etc.);
b Des pronoms qui peuvent remplacer un mot de n'importe quel genre, ou désigner un être de n'importe quel sexe (ex. : je, tu, nous…);
c Des adjectifs qui n'ont qu'une forme pour les deux genres (ex. : agile, chic, large, nécessaire, sage, utile, etc.).
REM. 1. Les mots qui ont un double genre sont dits épicènes, de même que les noms d'animés dont le genre est fixe quel que soit le sexe de l'être qu'ils désignent (ex. : aigle, panthère, putois, serpent, souris, etc.).
2. La marque du genre n'étant pour ces mots que contextuelle, elle n'apparaît pas toujours au pluriel. Ex. : ces acrobates sont très agiles.
♦ Spécialt. || Genre grammatical (ou formel) d'un nom, d'un pronom, son genre, tel que le font apparaître les seuls critères morphologiques et syntaxiques (opposé à genre naturel; → Infra).
♦ Par anal. || Genre naturel : catégorie sémantique, définie en fonction d'oppositions naturelles et culturelles (les mêmes en partie que pour le genre grammatical; ex. : mâle/femelle; animé/inanimé), dans laquelle on range un nom, un pronom selon les qualités de l'être qu'il désigne (opposé à genre grammatical). || Genre neutre naturel (opposé à neutre formel). || Genre naturel en accord avec le genre grammatical (ex. : père, n. m., qui désigne un être mâle), ou en conflit avec lui (ex. : sentinelle, n. f., vigie, n f., qui désignent un être mâle). || La corrélation entre le genre grammatical et le genre naturel est plus forte en français pour les noms de personnes que pour les noms d'animaux. || Pour les noms à double genre, l'accord de l'adjectif et de l'article se fait selon le genre naturel.
REM. 1. Le genre naturel du nom peut être lexicalisé (ex. : père, n. m., qui désigne toujours un être mâle) ou non (ex. : auteur, professeur, n. m., qui peuvent désigner un homme ou une femme; ou encore chien, zèbre, n. m. qui peuvent désigner un mâle ou une femelle de l'espèce).2. Il arrive que le pronom et moins souvent l'attribut suivent non pas le genre grammatical de l'antécédent, mais son genre naturel. Le premier violon est excellent, elle est nouvelle. Le premier violon est une virtuose.
♦ (Abstrait). || Catégorisation en genres. || Fonctions syntaxique (plus grande clarté du message grâce aux règles d'accord de l'adj., etc., aux règles de substitution du pronom…), distinctive (ex. : le manche/la manche) du genre.
20 (…) Le genre masculin étant le plus noble, doit prédominer toutes les fois que le masculin et le féminin se trouvent ensemble.
Vaugelas, Remarques sur la langue franç., p. 83.
21 Du langage français bizarre hermaphrodite,
De quel genre te faire, équivoque maudite,
Ou maudit ? car sans peine aux rimeurs hasardeux
L'usage encor, je crois, laisse le choix des deux.
Boileau, Satires, XII.
22 (Les avocats) n'ont jamais su combien la déclamation est l'opposé de l'éloquence, et combien les adjectifs affaiblissent les substantifs, quoiqu'ils s'accordent en genre, en nombre, et en cas (…)
Voltaire, Lettre à d'Alembert, 159, 25 mars 1765.
22.1 L'institution des genres paroît utile pour rendre plus sensible la correlation des noms et des adjectifs, surtout lorsqu'ils sont éloignés l'un de l'autre : cette correlation seroit difficilement apperçue dans les langues transpositives, sans la concordance des genres, qui, indépendamment de celle des nombres et des cas, y produit, pour la satisfaction de l'oreille, une grande variété de sons.
Abbé Fromant, Réflexions sur les fondements de l'art de parler, in Arnauld et Nicole, Grammaire générale et raisonnée, Paris 1780, p. 433.
23 La catégorie grammaticale du genre s'entend de l'ensemble des phénomènes par lesquels se manifeste dans le langage un concept ontologique primitif qui est la division, en plusieurs classes, de la masse des noms représentant les divers êtres. On distingue : dans telle langue, un genre animé, et un genre inanimé, parce qu'à l'origine, les êtres ont été classés par tel groupe humain en vivants et en non-vivants; dans telle autre langue, un genre andrique et un genre métandrique, parce que tel groupe a réparti primitivement les êtres en deux classes dont l'une comprend les hommes, tandis que l'autre se composait des femmes, des animaux des deux sexes et des choses proprement dites; dans une troisième langue, un genre masculin, un genre féminin et un genre neutre, parce que les ancêtres ont partagé les êtres en trois classes : les êtres mâles, les êtres femelles, les êtres sans sexe.
L. Adam, le Genre dans les diverses langues (1883).
23.1 « Tous les arts sont frères » : dans cette phrase le mot « frère » est pris métaphoriquement pour désigner une ressemblance plus ou moins profonde. Et le mot est si souvent employé ainsi que nous ne pensons plus, en l'entendant, à la relation concrète et matérielle qu'une parenté implique (…) qu'on attire violemment notre attention sur la matérialité de l'image en choisissant une relation de parenté incompatible avec le genre des termes que cette parenté doit unir : vous aurez un effet risible. C'est le mot bien connu, attribué encore à M. Prudhomme : « Tous les arts sont sœurs. »
H. Bergson, le Rire, p. 88.
24 Notre genre grammatical est si peu apte à l'expression du genre naturel que les trois quarts du temps en français nous n'avons aucun moyen d'exprimer par le genre grammatical la différence des sexes.
J. Vendryes, le Langage, p. 109.
25 Il est impossible (…) de ne pas donner aux noms leur genre, et les formes correspondantes aux mots qui accompagnent le nom. Quoique table et tableau n'aient pas de sexe, il est impossible de dire un table, une tableau. La notion linguistique de genre est donc fort souvent à part de la notion de sexe, elle a une tout autre valeur et une tout autre importance.
F. Brunot, la Pensée et la Langue, p. 86.
26 Dans les noms de choses qui ont été formés, ce ne sont point des considérations de sexe qui ont déterminé la répartition dans un genre ou dans l'autre, mais des analogies et des raisons de forme. Pendant des années, on a hésité entre un automobile et une automobile.
F. Brunot, la Pensée et la Langue, p. 87.
27 GENRE. Catégorie fondée en principe sur la distinction des sexes, un nom pouvant être masculin, féminin ou neutre suivant qu'il désigne un être ou un objet conçu comme mâle (all. der Mann), femelle (die Frau), ou indifférent à l'égard du sexe… (das Wesen). C'est là le genre naturel (…) qui suppose une correspondance, rarement réalisée, entre la grammaire et la nature; par suite des changements de sens et de forme, il arrive dans l'histoire des langues que la notion de genre naturel s'abolit et est remplacée par celle de genre grammatical ou formel (…) lequel n'est défini que par des caractéristiques grammaticales (…)
Marouzeau, Lexique de la terminologie linguistique, p. 100.
28 Il y a des bizarreries dans le genre des noms de personnes. Les féminins clarinette, estafette, flûte, ordonnance, recrue, vigie peuvent par ellipse, désigner des hommes. En revanche, les masculins bas-bleu, laideron, mannequin, tendron, trottin désignent des femmes.
R. Georgin, Difficultés et Finesses de notre langue, p. 135.
28.1 C'est du côté des phénomènes de substitution qu'il faut chercher, en anglais moderne, pour repérer des différences dans la catégorie du genre : celle-ci n'y a finalement de pertinence proprement linguistique que par l'existence de pronoms personnels différenciés (…) et de formes qui leur sont apparentées (…) Cela dit, il est vrai que le genre est, pour l'essentiel, du type « naturel » (et non « genre grammatical »). En effet commutent généralement avec he (et sont donc masculins) les noms qui ont pour signifié « être mâle », avec she (donc féminins) les noms qui réfèrent à un « être femelle », avec it (donc neutre) les noms qui renvoient à un « inanimé ».
André Tellier, Grammaire de l'anglais, p. 22-23.
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IV (V. 1400, Bloch).
1 (Déb. XVe). || Genre de… ⇒ Espèce, sorte, type. || Quel genre de chapeau, de costume désirez-vous ? || Ce genre de livres se vend beaucoup. || Les images de ce genre (→ Aurore, cit. 20). || Il goûte fort ce genre d'esprit (⇒ Forme). || Il excelle en ce genre d'exercice. || Menuiserie en tout genre.
29 L'air spirituel est dans les hommes ce que la régularité est dans les femmes : c'est le genre de beauté où les plus vains puissent aspirer (…)
La Bruyère, les Caractères, XII, 32.
30 (…) il fut jugé à mort unanimement, sans que l'arrêt prononçât le genre du supplice.
Voltaire, Hist. de Russie, II, 10.
31 (…) vous avez reçu comme moi ce genre d'éducation qui développe le cœur et la sensibilité.
Loti, Aziyadé, II, X.
32 (…) elle était apparue à Swann non pas certes sans beauté, mais d'un genre de beauté qui lui était indifférent, qui ne lui inspirait aucun désir (…)
Proust, À la recherche du temps perdu, t. I, p. 265.
♦ De (tel ou tel) genre.
33 Le digne homme n'imagine pas combien il peut raser les élèves avec des propos de ce genre (…)
Gide, les Faux-monnayeurs, I, XII.
34 Je vous dirai que, si j'avais voulu, j'aurais eu des centaines d'occasions de ce genre.
Sartre, la Nausée, p. 158.
♦ Du même genre : de même espèce, de même famille. ⇒ Congénère.
♦ Par ext. || Dans tous les genres : dans tous les domaines (→ Essai, cit. 18). ⇒ Domaine (II., 1.). ☑ Dans son genre, en son genre : dans le genre dont fait partie la personne ou la chose en question (→ Archétype, cit. 4). || Il est parfait en son genre (→ 1. Bien, cit. 1). || Ce spectacle est unique en son genre. || Dans son genre, cette villa est très originale.
35 C'est un personnage illustre dans son genre, et qui a porté le talent de se bien nourrir jusqu'où il pouvait aller : on ne reverra plus un homme qui mange tant et qui mange si bien (…)
La Bruyère, les Caractères, XI, 122.
36 (…) un artiste, quelque parfait qu'il soit dans son genre, s'il n'a point d'invention, s'il n'est point original, n'est point réputé génie (…)
Voltaire, Dict. philosophique, Génie, 1.
37 On fait en tout genre des découvertes subites dans le caractère des Italiens (…)
Mme de Staël, Corinne, IX, 1.
38 Haut (…) 12o Grand, excellent, distingué dans son genre (…) 15o En mauvaise part, excessif en son genre.
Littré, Dict., art. Haut.
39 L'Europe va-t-elle garder sa prééminence dans tous les genres ?
Valéry, Crise de l'esprit, 1919 (→ Cap, cit. 4).
2 (1690, Furetière). || Genre de vie : façon de vivre, ensemble des habitudes d'un individu ou d'un groupe d'individus. ⇒ Façon, manière, mode; → Biographie, cit. 2; état, cit. 112. || Ce genre de vie a dû vous dépayser. || Le genre de vie américain (cf. The american way of life).
3 (1837, Balzac : bon, mauvais genre). Manières, habitudes, façons de s'habiller, de parler, de se comporter. ⇒ Allure, attitude, manière(s); tenue. || Le genre de quelqu'un. || Je n'aime pas son genre. ☑ Elle a un mauvais genre, un drôle de genre : elle ne sait pas se conduire en société, elle a de mauvaises manières. ☑ Avoir bon genre : être bien élevé, élégant, distingué. ⇒ Façon (III.). || Donner mauvais genre à quelqu'un (→ Moins, cit. 48). ☑ Loc. fam. Bon chic bon genre (abrév. fam. : B. C. B. G.). ⇒ Chic (II., 4.). — C'est un genre qu'il se donne. || Le genre de la maison me déplaît. || Le genre bas. ⇒ Étage (de bas étage). — Suivi d'un nom ou d'un adjectif en apposition. || Le genre bohème, le genre artiste. Fam. || Un type distingué, genre homme d'affaires. || Le genre hippy, le genre punk. || Le genre anglais. || Le genre boulevardier, distingué, précieux, prétentieux, snob. || Un genre douteux.
40 Tu peux rendre des services, être nommé pair de France, épouser une femme riche. Sois ultra. D'ailleurs, c'est bon genre, ajouta-t-elle en lançant le mot qui pour elle était la raison suprême.
Balzac, Illusions perdues, Pl., t. IV, p. 817.
41 (…) l'élégance était scandinave et calédonienne, le genre anglais pur ne devait prévaloir que plus tard (…)
Hugo, les Misérables, I, III, II.
42 (…) Mme Bovary mère semblait prévenue contre sa bru. Elle lui trouvait un genre trop relevé pour leur position de fortune (…)
Flaubert, Mme Bovary, I, VII.
43 (…) d'abord Charles n'avait point écouté ses conseils pour l'interdiction des romans, puis le genre de la maison lui déplaisait.
Flaubert, Mme Bovary, II, XII.
43.1 Le chic actuel d'une femme est le mauvais genre distingué.
Ed. et J. de Goncourt, Journal, III, p. 64.
44 C'est peut-être ce qui a achevé de me dégoûter du genre miteux en affaires.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. II, VI, p. 56.
44.1 — Bien sûr, madame, tout cela n'est pas drôle. Vous m'avez dit, tout à l'heure, qu'elle recevait aussi des hommes ?
— Je pense bien ! Spécialement un qu'elle ne connaît pas depuis très longtemps : un grand brun avec des cheveux bouclés dans le cou, très jeune, vingt-cinq ans, qui n'a pas bon genre. Quand il vient, c'est presque toujours tard la nuit, car je ne le vois pas monter… mais je le vois descendre vers 11 heures du matin.
René Floriot, La vérité tient à un fil, p. 59.
44.2 La société n'arrive que vers les huit heures et demie; c'est trop tard pour des personnes qui veulent se retirer à onze heures. Mais on se figure que c'est bon genre; et c'est à qui n'arrivera pas le premier.
Ch. Paul de Kock, la Grande Ville, t. I, p. 69 (1842).
♦ Le genre (suivi d'un nom). || Il n'a pas le genre maison, de la maison.
44.3 Il avait une tête en forme de poire, pointe en haut, le crâne chauve et rouge sous la casquette bariolée de vert et de marron, genre commando.
J.-P. Manchette, Fatale, p. 10.
♦ Absolt. Élégance qui se fait remarquer socialement. ⇒ Chic. || Il a du genre. ⇒ Genreux (vx). || Cette femme manque de genre.
45 Nous avions l'habitude, en entrant en classe, de jeter nos casquettes par terre (…) il fallait, dès le seuil de la porte, les lancer sous le banc, de façon à frapper contre la muraille, en faisant beaucoup de poussière; c'était là le genre.
Flaubert, Mme Bovary, I, I.
46 Ce qu'il y a de certain, c'est qu'elle n'était pas Parisienne, qu'elle arrivait d'un chef-lieu quelconque dont elle gardait encore l'accent, ne savait rien de Paris et manquait absolument de genre, au dire de mademoiselle Constant, sa femme de chambre.
Alphonse Daudet, Jack, I, I, p. 15.
♦ ☑ Loc. (1907, Larousse). Faire du genre, se donner du genre; (1845) se donner un genre : affecter certaines manières. ⇒ Affectation (II.). — Vieilli (→ cit. 47). || Faire genre (même sens).
46.1 La pompe de cette cérémonie, cette file noire qui arrêtait la circulation sur son passage, les voitures drapées, le petit coupé des Risler que Sinonie avait envoyé pour faire du genre, tout cela le flattait, l'exaltait, quoi qu'il en eût.
Alphonse Daudet, Fromont jeune et Risler aîné, p. 273.
47 La maîtresse de maison, pour faire « genre », recevait devant la porte.
R. Radiguet, le Diable au corps, p. 109.
♦ Le genre de qqn, son genre. || Ce bonhomme n'est pas du tout mon genre, il ne me plaît pas. ☑ Ce n'est pas mon genre : ce n'est pas de mon goût, ce n'est pas dans mes goûts.
48 (…) c'est une maison que j'aime beaucoup, où l'on n'est pas gêné et qui est tout à fait dans mon genre.
Flaubert, Correspondance, 73, fin janv. 1843.
49 Moi l'inversion c'était pas mon genre…
Céline, Voyage au bout de la nuit, p. 419.
50 Dire que j'ai gâché des années de ma vie, que j'ai voulu mourir, que j'ai eu mon plus grand amour, pour une femme qui ne me plaisait pas, qui n'était pas mon genre !
Proust, À la recherche du temps perdu, t. II, p. 219.
51 Si nous songeons combien est forte dans la vie des hommes la proportion des souffrances par des femmes « qui n'étaient pas leur genre ». Peut-être cela tient-il à bien des causes; d'abord, parce qu'elles ne sont pas « votre genre » on se laisse d'abord aimer sans aimer, par là on laisse prendre sur sa vie une habitude qui n'aurait pas eu lieu avec une femme qui eût été « notre genre » et qui, se sentant désirée, se fût disputée, ne nous aurait accordé que des rares rendez-vous, n'eût pas pris dans notre vie cette installation dans toutes nos heures qui plus tard, si l'amour vient et qu'elle vienne à nous manquer, pour une brouille, pour un voyage où on nous laisse sans nouvelles, ne nous arrache pas un seul lien mais mille.
Proust, le Temps retrouvé, Pl., t. III, p. 1022.
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DÉR. (De IV.) Genreux.
COMP. Sous-genre.
Encyclopédie Universelle. 2012.