entamer [ ɑ̃tame ] v. tr. <conjug. : 1> I ♦
1 ♦ Couper en incisant. ⇒ blesser, égratigner, entailler, inciser, ouvrir. Entamer la peau, la chair. Le coup lui entama l'os. S'entamer la joue en se rasant.
2 ♦ (XIIIe) Couper en enlevant une partie à (qqch. dont on n'a encore rien pris). Entamer un pain, un pâté (⇒ entame) . Entamer à belles dents une tartine. Entamer une pièce de drap. P. p. adj. Pain entamé.
3 ♦ Par ext. Diminuer (un tout dont on n'a encore rien pris) en utilisant une partie. Entamer un sac de bonbons, un litre de vin. Entamer son capital, son patrimoine. ⇒ ébrécher, écorner. « achever au bureau une journée à demi entamée déjà » (Courteline). — Spécialt (cartes) Entamer une couleur, en prendre la première carte pour l'abattre.
4 ♦ (Choses) Couper, pénétrer (la matière). Matière tendre que la lime peut entamer. ⇒ mordre. La rouille entame le fer. ⇒ attaquer, corroder, 1. manger, ronger . « Le feu n'a pu encore entamer le vieil arbre » (Fromentin). — Milit. ⇒ percer. Les blindés réussirent à entamer la première ligne de résistance. — Fig. « La première espérance suffit à détruire ce que la peur et le désespoir n'avaient pu entamer » (Camus). ⇒ ébranler.
5 ♦ ENTAMER QQN. Vx Atteindre dans sa réputation. — Vieilli Commencer à convaincre. « Les abominables calomnies qu'on lui fait entendre sur moi l'ont entamé » (A. Gide ).
II ♦ (1283; de I, 3o) Commencer, se mettre à faire. ⇒ commencer, entreprendre. Entamer un dialogue, un discours. ⇒ aborder, attaquer. Entamer des négociations, des poursuites. ⇒ amorcer, ouvrir. Entamer une partie. ⇒ engager.
⊗ CONTR. Achever, terminer.
● entamer verbe transitif (bas latin intaminare, souiller, du latin classique tangere, toucher) Couper, inciser ou attaquer une matière ; inciser, blesser en coupant, en écorchant la peau : La lame avait entamé l'os. Couper un premier morceau d'un ensemble, en prélever une première partie : Entamer une bouteille de vin. Diminuer un ensemble en en utilisant une partie : Entamer ses économies, son patrimoine. Commencer à passer une durée, un temps : Elle entame sa dixième année dans l'entreprise. Commencer à exécuter une action, à faire quelque chose : Entamer des négociations. Porter atteinte à quelque chose, l'ébranler, en parlant d'un état, d'un sentiment, le détruire en partie ; le réfuter, en parlant d'un argument, d'une théorie : Une bonne conscience que rien ne saurait entamer. Réduire la résistance de quelqu'un, désorganiser en partie un groupe, commencer à le vaincre : Les blindés ont entamé les premières lignes ennemies. Ébranler quelqu'un dans ses convictions, ses certitudes, etc. : Les critiques ont fini par l'entamer. ● entamer (expressions) verbe transitif (bas latin intaminare, souiller, du latin classique tangere, toucher) Entamer une couleur, jouer la première carte de cette couleur. ● entamer (synonymes) verbe transitif (bas latin intaminare, souiller, du latin classique tangere, toucher) Couper, inciser ou attaquer une matière ; inciser, blesser en coupant...
Synonymes :
- balafrer
- inciser
Diminuer un ensemble en en utilisant une partie
Synonymes :
Commencer à exécuter une action, à faire quelque chose
Synonymes :
- amorcer
- engager
- ouvrir
Porter atteinte à quelque chose, l'ébranler, en parlant d'un état, d'un...
Synonymes :
- altérer
- diminuer
- ébranler
- ruiner
Réduire la résistance de quelqu'un, désorganiser en partie un groupe...
Synonymes :
- enfoncer
- percer
entamer
v. tr.
rI./r
d1./d Faire une incision, une coupure à. Entamer la peau.
d2./d Couper un premier morceau dans. Entamer un rôti.
|| Commencer d'employer ou de consommer. Entamer son capital.
d3./d Commencer à détruire ou à désorganiser; ébranler. Entamer la résistance d'un ennemi.
|| Fig. Entamer la résolution, l'assurance, les convictions de qqn.
d4./d (Choses) Couper, attaquer, pénétrer dans. L'acide entame certains métaux.
|| Fig. Porter atteinte à. Ces rumeurs finiront par entamer son crédit.
rII./r Commencer, entreprendre. Entamer un débat, un procès.
|| Absol. Au jeu de cartes, être le premier à jouer.
rIII/r Pp. adj. Un sachet de bonbons entamé.
⇒ENTAMER, verbe trans.
I.— [Avec l'idée de couper, de creuser, de pénétrer, d'attaquer]
A.— [Le compl. désigne une chose]
1. [Le compl. désigne la peau, la chair, une partie du corps] Couper en faisant une incision. Entamer l'épaule, la joue, la mâchoire, l'os :
• 1. ... un grand matelot américain, armé de deux fragments de disque ramassés sur le pavé et tranchants comme des rasoirs, faisait des moulinets avec ses longs bras, tailladait des visages, fendait des nez, entamait des joues, coupait des oreilles. Le sang pissait de ces vilaines balafres.
CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 265.
— Emploi pronom. réfl. Se faire une plaie superficielle. Il faudra me mettre un morceau de saindoux pour me graisser les pieds (...). Je peux par marcher une heure sans m'entamer (GIONO, Gd troupeau, 1931, p. 72).
♦ Emploi pronom. indir. On ne peut quelquefois empêcher l'excoriation et l'ulcération; pour lors, (...) on couvre l'endroit entamé de cérat de saturne (GEOFFROY, Méd. prat., 1800, p. 38). La lame (...) se replie sur la virole qui a cédé, et il s'entame deux doigts (FRANCE, Dieux ont soif, 1912, p. 296).
2. [Le compl. désigne une chose considérée comme un ensemble, un tout intégral, intact dont on enlève, supprime ou utilise une partie]
a) Enlever une partie en coupant. Entamer un gâteau, un jambon, un pâté. Entamer une pièce de drap (Ac.). Quand sa lame entamait Gruyère ou Roquefort, Je la voyais peser sur elle avec effort (ROLLINAT, Névroses, 1883, p. 73).
b) Diminuer en utilisant, en faisant disparaître une partie. Entamer des provisions, un stock. L'artillerie française, qui ne voulait pas trop entamer ses réserves de projectiles, laissait le tir s'espacer, s'égrener (ROMAINS, Hommes bonne vol., 1938, p. 45).
— En partic.
) [Le compl. désigne de l'argent] (Quasi-)synon. écorner. Il s'était juré de ne pas entamer son gain de la veille (ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 401). Il songea tout aussitôt à l'entamer, ce billet (QUENEAU, Pierrot, 1942, p. 122) :
• 2. Son notaire, son agent de change s'effrayaient de le voir entamer, avec tant d'appétit, cette fortune, lentement acquise et prudemment gérée par deux générations de grands bourgeois.
MARTIN DU GARD, Les Thibault, L'Été 1914, 1936, p. 120.
) [Le compl. désigne un mets, un aliment] Fam. Commencer à manger, à boire. Entamer une bouteille, le dîner. Nous entamions l'immanquable « conserve de tomates » (CÉLINE, Voyage, 1932, p. 198).
) Fréq. au part. passé. [Le compl. désigne une période de temps] Le mois de juin se trouvait bien entamé (ARAGON, Beaux quart., 1936 p. 381). Desmarais se désolait fort qu'elle restât fille, la trentaine entamée (GUÈVREMONT, Survenant, 1945, p. 28). Il faut vivre, et vivre c'est chaque jour entamer l'avenir (DE GAULLE, Mém. guerre, 1956, p. 557).
Rem. Les dict. gén. enregistrent un emploi spéc., en terme de jeu de cartes entamer une couleur. Jouer la première carte de cette couleur.
3. P. ext. [Le compl. désigne la matière, un objet concr., un espace] Couper, pénétrer, attaquer.
a) [Le suj. désigne un agent d'érosion, le compl. une roche, un terrain] La Méditerranée entame le Roussillon (BOULE, Conf. géol., 1907, p. 168). Un océan terrible (...) entame les craies dures de la Saintonge (VIDAL DE LA BL., Tabl. géogr. Fr., 1908, p. 46). Le fleuve (...) a rencontré ici le roc et, ne l'ayant point entamé, en a épousé le contour (SAINT-EXUP., Citad., 1944, p. 677).
b) [Le suj. désigne une pers. ou un outil] Il faut retirer le fer [du rabot] de plus en plus, afin qu'il soit moins saillant et entame moins le bois (NOSBAN, Manuel menuisier, 1857, p. 135). Ils [les faucheurs] entamaient à pleine lame ce dessous de l'herbe ombreux et vert (GIONO, Que ma joie demeure, 1935, p. 300). D'un commun accord, Didace et Venant ajustèrent la scie. Les dents d'acier entamèrent la plane (GUÈVREMONT, Survenant, 1945 p. 37).
— En partic.
) [Le suj. désigne un animé ou un véhicule en mouvement, le compl. un espace à parcourir] Commencer à parcourir. La voiture entame la pente. L'un était à cheval, l'autre à pied. Ils n'avaient pas encore entamé le raidillon abrupt qui menait à l'école, bâtie au flanc d'une colline (CAMUS, Exil et Roy., 1957, p. 1609).
) Dans le domaine milit. [Le compl. désigne une troupe, une armée, etc.] Commencer à percer. Entamer une ligne de défense. L'armée franque, hérissée et compacte, refusa le combat sans se laisser entamer (GROUSSET, Croisades, 1939, p. 227).
Rem. La docum. atteste a) Qq. emplois pronom. à sens passif. Le granit ne s'entame pas (FAURE, Hist. art, 1909, p. 40). b) Qq. emplois p. anal. Une mince flamme battue par le vent fait glisser lentement sur eux-mêmes, sans les entamer, tous les plans d'ombre (BERNANOS, M. Ouine, 1943, p. 1506).
4. Au fig.
a) [Le compl. désigne un état de chose] (Quasi-) synon. altérer, attaquer, diminuer. Cela n'eût sans doute pas entamé mon bonheur (GIDE, Journal, 1935, p. 1221). Non seulement le silence était profond, mais il ne semblait pas que quelque chose pût l'« entamer », pût le réduire (JOUVE, Scène capit., 1935, p. 146).
b) [Le compl. désigne une pensée, une croyance, des principes, etc.] (Quasi-)synon. porter atteinte à. Que votre foi ne se laisse pas entamer, vous serez toujours heureux dans l'Église (AYMÉ, Jument, 1933, p. 112). Nous aimons que le loyalisme monarchique dont a toujours fait preuve Pierre Corneille (...) n'ait rien entamé chez lui des devoirs de l'amitié et de la fidélité (BRASILLACH, Corneille, 1938, p. 390) :
• 3. Le proverbe est une sorte de court poème, souvent rimé, toujours rythmé d'une certaine manière, de façon que la mémoire machinale ne le déforme pas aisément. Ainsi il se fait notre importun compagnon. L'agitation même de notre esprit fait surnager le proverbe; nos folles pensées ne peuvent l'entamer.
ALAIN, Propos, 1933, p. 1162.
c) [Le compl. désigne les sentiments, les facultés, les qualités, etc. d'une pers.] (Quasi-)synon. altérer, détruire partiellement, ruiner. Entamer la santé morale, la sérénité de qqn; entamer le crédit, la réputation de qqn. Je ne pense pas que même l'amour parvienne plus tard à entamer sa suffisance (GIDE, Journal, 1942, p. 157). La réalité terrible n'avait pu entamer mon sang-froid (BOSCO, Mas Théot., 1945, p. 220). Le maître du Kremlin plongé aux abîmes de l'angoisse, mais sans que rien n'entamât sa lucidité, son âpreté, sa ruse (DE GAULLE, Mém. guerre, 1954, p. 213).
B.— [Le compl. désigne une pers.] Réduire les réactions, les résistances, commencer à convaincre. Heureux celui qui entend ces paroles, et sur qui elles coulent sans l'entamer! (MONTHERL., Reine morte, 1942, III, 4, p. 212). Comme Ferdinand était le digne fils de son père, mon éloquence finit par l'entamer (H. BAZIN, Vipère, 1948, p. 169). Dubreuilh ne s'interrogeait plus : il écrivait. Il continua à écrire chaque jour. Dans ce domaine-là, rien ne pouvait l'entamer (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 224) :
• 4. Certainement il n'a pas compris combien sa lettre pouvait m'être cruelle. Les abominables calomnies qu'on lui fait entendre sur moi l'ont entamé, et comme il croit, d'après ce qu'on lui dit, que je suis un être fourbe et sans cœur, il n'a pas à craindre de me faire souffrir.
GIDE, Journal, 1929, p. 943.
II.— P. ext. [Le compl. d'obj. désigne une action, une œuvre, des négociations, une discussion] Commencer, engager. Entamer un procès. C'est l'artillerie qui entame le combat (FOCH, Princ. guerre, 1911, p. 317). Il entama en mots obscurs (...) une hargneuse histoire de succession, entre son frère et lui (MALÈGUE, Augustin, t. 2, 1933, p. 249). Démarches indirectes, tentées auprès de Wilson par le nouveau cabinet allemand, pour entamer des négociations (MARTIN DU G., Thib., Épil., 1940, p. 998).
SYNT. Entamer le chapitre, le sujet; entamer la lutte, la partie; entamer des démarches.
— Emploi pronom. à sens passif, rare. La partie diplomatique qui s'entame (SAINTE-BEUVE, Nouv. lundis, t. 11, 1863-69, p. 94).
Rem. 1. On rencontre ds la docum. un emploi abs. Il tenta de se remettre les sens en buvant chopine sans rien dire, tournant dans sa tête le discours qu'il allait faire à sa femme et ne sachant par quel bout entamer (SAND, F. le Champi, 1850, p. 76). 2. La docum. atteste a) Entamable, adj. Qui peut être entamé (supra I A 3 a). Rencontrer des couches [de terrain] plus entamables (VIDAL DE LA BL., Tabl. géogr. Fr., 1908, p. 66). b) Entameur, subst. masc. Personne qui entame (supra II A). Des brouilleurs d'affaires, des entameurs de procès (MUSSET, Le Temps, 1831, p. 26).
Prononc. et Orth. :[], (j')entame []. Selon ROUSS.-LACL. 1927, p. 124, dans ce mot : voyelle ouverte de timbre ,,moyen``; le caractère en cause, sous cette appellation, pourrait être de l'ordre de la durée, puisqu'il est lié, d'une façon apparemment non bi-univoque, il est vrai (,,les voyelles toniques suivies, dans la prononciation, d'une des consonnes sonores l, g, d, b, , n, m, sont en général moyennes`` [souligné par nous]), à l'identité de la consonne suivante, et que les consonnes en cause sont l, g, d, b, , n, m. Enq. : // (il) entame. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1120-50 « porter atteinte, toucher à quelque chose d'intact » (Gd mal fit Adam, I, 1 ds T.-L. : Grant mal fist Adam Quant por le sathan Entamat le fruit); 2. ca 1245 « commencer, entreprendre » (Ph. MOUSKET, Chron., 13, ibid.). Du b. lat. intaminare « souiller, profaner », se rattachant prob. à tangere « toucher », v. ERN.-MEILLET, s.v. contaminare. Fréq. abs. littér. :1 283. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 1 423, b) 2 293; XXe s. : a) 1 893, b) 1 871.
DÉR. Entamure, subst. fém., vieilli. Coupure, écorchure. Des plaies ou entamures. Dans les endroits où la peau est plus épaisse (...) le virus ne peut pas pénétrer, à moins qu'il n'y ait quelque entamure ou écorchure (GEOFFROY, Méd. prat., 1800, p. 535). Les dict. gén. et techn. attestent l'emploi, dans le domaine des carr. : entamure (d'une carrière). Extraction des premières pierres d'une carrière, ensemble des premières pierres extraites d'une carrière. — []. Ds Ac. 1694-1878. — 1res attest. a) XIVe s. « blessure, coupure » (JEH. DE LE MOTE, li regret Guillaume, 1606, éd. Scheler ds DELB.), b) 1669 entameure de pain (WIDERHOLD Fr.-all.); de entamer, suff. -ure. — Fréq. abs. littér. : 1.
BBG. — BRÜCH (J.). Etymologisches : ... Frz. entamer. Z. rom. Philol. 1925, t. 45, pp. 70-83; 712-714. — MAHN. Über die Provenzalische Sprache... Arch. St. n. Spr. 1976, t. 55, p. 88. — THURNEYSEN 1884, p. 99.
entamer [ɑ̃tame] v. tr.
❖
———
1 Couper (quelque chose d'intact) en en retranchant une partie. || Entamer un pain, un pâté. ⇒ Entame. || Entamer une tartine à belles dents. || Entamer une pièce de drap. || Entamer une étoffe dans le bord. ⇒ Échancrer. — Au p. p. || Pain, gigot entamé (contr. : intact, entier).
2 (V. 1155). Le compl. désigne la chair, une partie du corps. Couper en incisant. ⇒ Blesser, égratigner, inciser, ouvrir. || Entamer la peau, la chair. || Le coup lui entama l'os. || S'entamer la joue en se rasant. || S'entamer les doigts (→ Couteau, cit. 13). ⇒ Piquer. || Gerçures qui entament les lèvres.
1 Le dieu qui fait aimer prit son temps; il tira
Deux traits de son carquois : de l'un il entama
Le soldat jusqu'au vif; l'autre effleura la dame.
La Fontaine, Contes, V, VI, « La matrone d'Éphèse ».
2 Les sabres du Japon n'entament pas leur peau (aux rhinocéros), les javelots et les lances ne peuvent la percer, elle résiste même aux balles du mousquet.
Buffon, Hist. nat. des animaux. Rhinocéros, t. III.
3 (…) une barbe comme la mienne, je parie qu'ils usent tout un paquet de lames avant de m'avoir entamé un poil.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. II, VI, p. 70.
3 (1580). Diminuer (un tout dont on n'a encore rien pris) en retranchant une partie. || Entamer un sac de bonbons, un litre de vin. || Entamer ses provisions. || Entamer son capital, son patrimoine. ⇒ Amoindrir, ébrécher, écorner. — (Le compl. désigne une période de temps). || Entamer sa journée, l'année en faisant quelque chose, par une activité. — Au p. p. || La journée est déjà bien entamée.
4 Il n'entama point le fonds de son patrimoine qu'il conserva pour ses héritiers naturels.
5 Devant la porte du cimetière, les ronds-de-cuir tinrent un grave conciliabule sur le point de savoir si, véritablement, il y avait nécessité d'aller achever au bureau une journée à demi entamée déjà.
Courteline, Messieurs les ronds-de-cuir, 6e tableau, II, p. 227.
♦ Spécialt (cartes). || Entamer une couleur, en prendre la première carte pour l'abattre.
4 (XXe). Le compl. désigne une chose concrète. Couper, pénétrer en portant atteinte à l'intégrité de. (Le sujet désigne le plus souvent une chose : outil, substance…). || Une matière tendre que la lime peut entamer. ⇒ Mordre. || La rouille entame le fer. ⇒ Attaquer, corroder, manger, ronger. || Le diamant entame le verre. ⇒ Rayer. || L'incendie a entamé un pan de mur. ⇒ Détruire. || Obus qui entame un retranchement. ⇒ 1. Brèche (ouvrir une brèche).
6 Le feu n'a pu encore entamer le vieil arbre; il pousse droit le long du mur et couvre à moitié ce petit préau sinistre d'un large éventail de feuilles jaunies.
E. Fromentin, Un été dans le Sahara, p. 116.
♦ (V. 1460). Spécialt. || Entamer le front des armées ennemies. ⇒ Percer. || Les blindés réussirent à entamer la première ligne de résistance.
5 (V. 1190). Abstrait. || Doutes qui entament une foi, une croyance. ⇒ Ébranler (→ Croire, cit. 55). || Une argumentation que rien ne peut entamer. || La jalousie entama leur amitié. || Rien n'a entamé son crédit, sa réputation. ⇒ Effleurer, égratigner.
7 Dès ce moment il dut entrevoir la perte de son crédit; car, dès que la confiance est entamée, elle est bientôt détruite.
8 (…) la première espérance suffit à détruire ce que la peur et le désespoir n'avaient pu entamer.
Camus, la Peste, p. 293.
♦ Entamer l'équilibre, la santé morale de qqn. ⇒ Compromettre, détruire. || Rien n'entame sa volonté, son calme, son équilibre.
6 (V. 1460). || Entamer (qqn). Vx. Atteindre (qqn) dans sa réputation. ⇒ Attaquer, blesser (→ Chantage, cit. 1).
9 (…) cette confiance le rend moins précautionné, et les mauvais plaisants l'entament par cet endroit.
La Bruyère, les Caractères, II, 36.
♦ Mod. Commencer à convaincre, diminuer les réactions, les résistances de (qqn). ⇒ Ébranler. → Prendre de l'ascendant (cit. 6) sur. || Entamer qqn dans sa confiance, dans ses droits. ⇒ Empiéter (sur).
10 Les abominables calomnies qu'on lui fait entendre sur moi l'ont entamé et, comme il croit, d'après ce qu'on lui dit, que je suis un être fourbe et sans cœur, il n'a pas à craindre de me faire souffrir.
Gide, Journal, 17 oct. 1929.
10.1 (…) toi, tu es déjà insatisfait. Tu n'as pas pour un sou de vanité. Tu domines toutes les situations… Rien ne peut t'entamer…
N. Sarraute, le Planétarium, p. 114.
———
II (V. 1283). Faire le début de, se mettre à faire (qqch.). ⇒ Commencer, entreprendre. || Entamer une affaire, un discours (→ Déclamation, cit. 6), un sujet. ⇒ Aborder, attaquer. || Entamer une œuvre. ⇒ Ébaucher. || Entamer une conversation, des relations. ⇒ Amorcer. || Entamer des négociations, une discussion, des poursuites. ⇒ Ouvrir. || Entamer une partie. ⇒ Engager. || L'affaire a été mal entamée. ⇒ Emmancher, engrener. || Entamer une chose par les deux bouts, l'entreprendre sans s'arrêter à une méthode, en commençant par plusieurs côtés à la fois. — Pron. (passif). → ci-dessous, cit. 12.
11 (…) quelques affreux périls qu'il commence à prévoir dans la suite de son entreprise, il faut qu'il l'entame (…)
La Bruyère, les Caractères, XII, 115.
12 Là fut mise en délibération une mesure d'où devait dépendre le sort futur de la monarchie. La discussion s'entama : je soutins seul avec M. Beugnot, qu'en aucun cas Louis XVIII ne devait admettre dans ses conseils M. Fouché.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. IV, p. 37.
13 (…) tournant dans sa tête le discours qu'il allait faire à sa femme et ne sachant par quel bout entamer.
G. Sand, François le Champi, IX, p. 77.
14 Puis, le sextuor qui occupait la tribune entama son morceau final.
Martin du Gard, les Thibault, t. IV, p. 265.
♦ Absolt. || Il ne se décide pas à entamer. ⇒ Commencer, débuter.
♦ Spécialt (manège). || Entamer le chemin (en parlant du cheval), se mettre en marche. — Absolt. || Entamer du pied droit, du pied gauche.
15 Les chevaux entament le chemin, en galopant, par la jambe droite de devant, qui est plus avancée que la gauche.
Buffon, Hist. nat. des animaux, « Le cheval ».
——————
entamé, ée p. p. adj.
♦ Voir ci-dessus à l'article.
❖
CONTR. V. Achever, finir. — (Du p. p.). Inentamé.
DÉR. Entame, entamure.
COMP. Inentamable, inentamé.
Encyclopédie Universelle. 2012.