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éprouver

éprouver [ epruve ] v. tr. <conjug. : 1>
esprover « mettre (qqn) à l'épreuve » 1080; de é- et prouver
1(XIIe) Essayer (qqch.) pour en vérifier la valeur, la qualité. expérimenter, 2. tester. Éprouver la résistance d'un matériau, la solidité d'un pont. Éprouver la valeur d'une théorie. Éprouver diverses manières de vivre, différentes façons de procéder. essayer, tâter (de).Éprouver les qualités, la valeur de qqn, de qqch., mettre à l'épreuve. Éprouver la fidélité d'un ami. « Sans doute qu'il voulait éprouver votre zèle » (Racine). « Va contre un arrogant éprouver ton courage ! » (P. Corneille). hasarder, risquer.
Vieilli Éprouver qqn, le mettre à l'épreuve. « Je crois que vous voulez m'éprouver et vous jouer de moi » (Claudel). Soumettre à la tentation ( tenter). Dieu l'a éprouvé.
2(Sujet chose) Faire subir une épreuve (I, 1o), des souffrances à (qqn). La perte de son père l'a bien éprouvé. atteindre, frapper, marquer. La guerre a durement éprouvé ce pays.
3Littér. Apprécier, connaître par une expérience personnelle. connaître, constater, réaliser, reconnaître. Il éprouva, à ses dépens, qu'on ne pouvait se fier à eux. « Rodrigue, as-tu du cœur ? — Tout autre que mon père l'éprouverait sur l'heure » (P. Corneille). — ÉPROUVER SI... vérifier, voir (si). « je veux éprouver avec mon épée si c'est un corps ou un esprit » (Molière).
4(XIIIe) Avoir (une sensation, un sentiment). ressentir. Éprouver un sentiment, un désir, une impression. Éprouver le besoin d'agir, de comprendre. Éprouver de la tendresse, de l'affection, de l'amour pour qqn. concevoir. Éprouver de la honte, un regret. N'éprouver aucun remords. « J'éprouvais ses plaisirs, ses peines, ses goûts, ses aversions » (Diderot). partager. « les sentiments que nous feignons, nous finissons par les éprouver » (B. Constant). « elle professait que, pour exprimer fortement une passion, il faut l'éprouver » (France). « L'amour que j'éprouvais se confondait avec celui que j'inspirais » (F. Mauriac).
Éprouver une sensation physique. percevoir, ressentir. Éprouver une vive douleur au poignet droit. « Il éprouve un léger serrement de tête, une pression derrière les globes oculaires, une nervosité générale » (Romains).
5Subir. Éprouver des désagréments. Éprouver des difficultés à faire un travail.

éprouver verbe transitif (de prouver) Soumettre quelque chose à certaines expériences pour vérifier sa valeur, sa résistance ; mettre à l'épreuve : Éprouver la résistance d'un matériau. Juger de la valeur intellectuelle ou morale de quelqu'un, de la réalité d'une qualité, d'un sentiment au moyen de quelque chose, d'un critère ; tester : Éprouver la bonne foi de son contradicteur. Littéraire. Constater quelque chose par soi-même, en faire l'expérience : Vous éprouverez bientôt ce que je vous ai dit. Avoir, ressentir une sensation, concevoir un sentiment : Éprouver une vive douleur à la jambe gauche. En parlant d'un mal, frapper quelqu'un, un groupe, les atteindre durement : Le gel a fortement éprouvé les récoltes. Subir un dommage, une difficulté, etc. : Éprouver des difficultés à faire son travail.éprouver (citations) verbe transitif (de prouver) Benjamin Constant de Rebecque Lausanne 1767-Paris 1830 Nous sommes des créatures tellement mobiles que les sentiments que nous feignons, nous finissons par les éprouver. Adolphe éprouver (synonymes) verbe transitif (de prouver) Soumettre quelque chose à certaines expériences pour vérifier sa valeur, sa...
Synonymes :
- essayer
- expérimenter
Littéraire. Constater quelque chose par soi-même, en faire l'expérience
Synonymes :
- constater
- réaliser
- se rendre compte
Avoir, ressentir une sensation, concevoir un sentiment
Synonymes :
- endurer
- percevoir
- sentir
Subir un dommage, une difficulté, etc.
Synonymes :
- essuyer
- rencontrer
- souffrir
- subir

éprouver
v. tr.
d1./d Essayer (qqch) pour s'assurer de ses qualités. éprouver un remède. éprouver la fidélité d'un ami.
d2./d Soumettre à une épreuve pénible. La guerre a éprouvé ces régions.
d3./d Ressentir, connaître par expérience. éprouver une sensation agréable. éprouver de la joie. éprouver de l'amour pour qqn.
d4./d éprouver que: découvrir que. Il éprouva vite qu'on essayait de le tromper.

⇒ÉPROUVER, verbe trans.
A.— Emploi factitif. [Avec l'idée de faire subir qqc. à qqn ou à qqc.]
1. Soumettre une (ou la) qualité d'une personne ou d'une chose à une expérience susceptible d'établir la valeur positive de cette qualité.
a) [Le compl. d'obj. exprimant la qualité est un subst. abstr. suivi d'un compl. prép. introd. par de]
[La qualité est celle d'une chose concr. ou abstr.] Éprouver la robustesse d'un appareil, l'efficacité d'une arme à feu; éprouver la valeur d'une théorie. Toutes ces formules et ces pratiques avaient été léguées par les ancêtres qui en avaient éprouvé l'efficacité (FUSTEL DE COUL., Cité antique, 1864, p. 213). J'allai à la fenêtre, (...) et éprouvai la solidité des barreaux auxquels on n'avait pas touché (G. LEROUX, Parfum, 1908, p. 103).
[La qualité est celle d'une pers.] Éprouver la fidélité d'un ami, les capacités d'un ouvrier, l'amour d'une femme. Vous n'avez donc jamais éprouvé l'obéissance des nouveaux serviteurs? (VOGÜÉ, Morts, 1899, p. 221). Il conduisit son examen, moins pour éprouver la force du candidat qu'afin de cribler de sarcasmes son gros confrère (FRANCE, Vie fleur, 1922, p. 434).
b) [P. méton. du compl. d'obj.; le compl. d'obj. désigne directement la chose ou l'être dont on examine la qualité] La machine à éprouver les cordages (MICHELET, Journal, 1835, p. 172). Il n'employait à ses besognes (...) que des gens qu'il avait tâtés, éprouvés, flairés (MAUPASS., Bel-Ami, 1885, p. 125).
En partic. [L'épreuve porte sur la valeur religieuse d'une pers.] Écoute : Dieu parfois veut éprouver nos cœurs; Et, lorsque de l'épreuve ils sont sortis vainqueurs, Sa colère fait place à la miséricorde (DUMAS père, Charles VII, 1831, IV, 6, p. 295) :
1. Mais alors Dieu les éprouva, comme disent les chroniqueurs arabes chaque fois que se produit en Islam un fâcheux retour de la fortune. La peste se mit parmi eux.
THARAUD, Mille et un jours, II, 1938, p. 8.
[Avec expression d'une circonstance particulière de l'épreuve] :
2. [Jacques]. Ma conscience ne me reprocherait rien, monsieur le marquis, si je rapportais à des gens éprouvés au feu, comme monseigneur Rodriguez et vous, la dépêche au cardinal Cordova.
FABRE, Roi Ramire, 1884, p. 169.
Emploi pronom. réciproque ou réfl. Leur amour allait croissant parce qu'il était vrai. Ils [Luigi et Ginevra] s'étaient éprouvés en peu de jours (BALZAC, Vendetta, 1830, p. 208). La sœur [Philomène] regarda [le mort] : elle resta, pour s'éprouver, longtemps à regarder (GONCOURT, Sœur Philom., 1861, p. 121).
2. Faire subir à quelqu'un une expérience pénible.
a) [Le suj. agent désigne un être puissamment agissant ou des accidents à forte charge affective] Le malheur nous éprouve (Ac. 1932). Ne reprochez pas à la destinée de vous avoir éprouvés trop rudement (SAND, Hist. vie, t. 4, 1855, p. 178). Mais pourquoi Malherbe traite-t-il d'injurieux ami ce pauvre monsieur Duperrier déjà si éprouvé par la perte de sa fille? (FRANCE, Bonnard, 1881, p. 239). Vous qui avez souffert, résistez [.] Populations civiles éprouvées par les expéditions terroristes des Boches (TRIOLET, Prem. accroc, 1945, p. 410).
b) [Le suj. désigne un phénomène naturel, en particulier une force de la nature] En arrivant à Paris, il y a un mois, le changement de climat l'avait un peu éprouvé [le Nabab] (A. DAUDET, Nabab, 1877, p. 8). D'autre part, les surfaces éprouvées par un mauvais écoulement des eaux réclamaient de coûteux travaux de desséchement (VIDAL DE LA BL., Princ. géogr. hum., 1921, p. 84). — Julie va bien? — Elle sera contente de vous voir. La chaleur l'éprouve, dit Paul d'un ton résolu (CHARDONNE, Dest. sent. II, 1934, p. 236).
B.— Emploi non factitif. Faire sur soi-même l'expérience, généralement forte ou profonde, d'une chose.
1. [L'obj. désigne une action, un événement] Synon. subir.
a) [Le suj. désigne une pers. ou une entité] Si, à diverses époques, elles [les opinions des hommes] avaient éprouvé des modifications (PROUDHON, Propriété, 1840, p. 144). [L'art politique] pourra éprouver une transformation analogue à celle qui s'accomplit aujourd'hui pour l'art médical (COMTE, Philos. posit., t. 4, 1839-42, p. 324).
En partic., vieilli : [Avec une idée de changement important]
3. ... après un temps quelconque, ces mêmes individus ayant subi les influences des lieux d'habitation et des habitudes diverses qu'on leur a fait contracter dans chaque pays, (...) ont éprouvé des changements remarquables, et ont formé différentes races particulières.
LAMARCK, Philos. zool., t. 1, 1809, p. 229.
4. « La ville et la paroisse de Halifax, (...) ont vu, depuis quarante ans, quadrupler le nombre de leurs habitans; et plusieurs villes sujettes aux corporations ont éprouvé des diminutions sensibles... etc. »
SAY, Écon. pol., 1832, p. 194.
♦ [L'obj. désigne qqc. de pénible] Subir un dommage. Éprouver des revers, des désastres, une perte immense.
Vieilli. [D'ordre financier ou écon.] La perte éprouvée par le créancier (Code civil, 1804, art. 1151, p. 208). Le fisc éprouve un déficit (SAY, Écon. pol., 1832, p. 513). Le système [bancaire] français a éprouvé quelques mécomptes et a connu des crises (LESOURD, GÉRARD, Hist. écon., 1968, p. 78).
[D'ordre physique] Depuis six mois que nous sommes dans l'île, j'ai éprouvé toute espèce de privations (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 491). J'avais alors dix-neuf ans; je n'avais éprouvé aucun malheur ni aucune maladie (MUSSET, Confess. enf. s., 1836, p. 27) :
5. ... nous parvînmes au district de Camille, (...) non sans avoir éprouvé tous les inconvéniens qui résultent de la nécessité de coucher dans les bois, ...
CRÈVECŒUR, Voyage, t. 3, 1801, p. 130.
[D'ordre moral] Que de malheurs il [le marquis] a éprouvés! De combien de scènes d'horreur il a été spectateur! (SÉNAC DE MEILHAN, Émigré, 1797, p. 1599).
b) P. ext., plus rare. [Le suj. désigne une valeur physique ou un obj.] Il y en [des produits] a néanmoins dont le prix a éprouvé des baisses prodigieuses (SAY, Écon. pol., 1832, p. 331). Mes vins emmagasinés éprouvent en ce moment la baisse ruineuse que causent l'abondance et la qualité de vos récoltes (BALZAC, E. Grandet, 1834, p. 63).
En partic. [Le compl. d'obj. indique un changement important] En cas que l'immeuble ou les immeubles présens, assujettis à l'hypothèque, eussent péri, ou éprouvé des dégradations (Code civil, 1804, art. 2131, p. 386).
2. [L'obj. désigne une sensation ou un sentiment] Synon. sentir, ressentir fortement.
a) [Une sensation physique]
[Le suj. désigne une pers. ou une partie du corps] J'éprouve maintenant comme un soulagement physique à vous savoir affranchie de toute angoisse (FLAUB., Corresp., 1872, p. 66). Léopold prit entre ses mains le petit corps de bronze, et il en éprouvait une chaleur secrète, une sorte d'enthousiasme (BARRÈS, Colline insp., 1913, p. 286) :
6. Ils eussent éprouvé un bien-être complet, si le bien-être pouvait jamais exister pour qui est loin de ses semblables et sans communication possible avec eux!
VERNE, Île myst., 1874, p. 316.
En partic. [Une sensation désagréable] Éprouver une douleur, des convulsions, des courbatures, des spasmes, de la fatigue, une détente, un soulagement. Le froid qu'éprouve une accouchée, les premiers jours de sa couche (GEOFFROY, Méd. prat., 1800, p. 894). Il [Daudet] me dit qu'il a éprouvé des souffrances intolérables cette nuit (GONCOURT, Journal, 1885, p. 479) :
7. Ces auteurs se sont soumis volontairement à un régime alimentaire déchloruré pendant onze jours, en s'exposant quotidiennement à une forte sudation qui leur faisait perdre du sel. Ils ont éprouvé de l'inappétence, la perte de l'odorat, la désaffection de la cigarette, de l'apathie intellectuelle, puis des nausées et des crampes.
STOCKER, Sel, 1949, p. 85.
♦ [Le suj. désigne une partie du corps] Quelquefois même le cuisant prurit qu'éprouve la peau, se communique à tout le système nerveux (CABANIS, Rapp. phys. et mor., t. 2, 1808, p. 419).
P. anal. [Le suj. désigne un objet en mouvement] Au même instant la gondole éprouva une secousse violente, comme si elle avait été touchée par une autre (NODIER, J. Sbogar, 1818, p. 160).
b) [Un sentiment] Éprouver une angoisse, une émotion, de l'impatience, de la joie, de la peine, du plaisir. Je voulais la [Albertine] distraire. À supposer qu'elle eût éprouvé du bonheur à passer les après-midi rien qu'avec moi (PROUST, Sodome, 1922, p. 855).
Rare. Éprouver qqc. de + nom de pers. Il faudrait que je fusse un harmoniste surhumain (...) pour mêler dans un cantique juste les sympathies et les déplaisirs que j'éprouve d'Antigone (BARRÈS, Voy. Sparte, 1906, p. 93).
En partic.
♦ [Un sentiment de manque] J'ai éprouvé le besoin de m'expliquer avec vous (SIMENON, Vac. Maigret, 1948, p. 55).
♦ [Un sentiment désagréable] Elle a voulu que son fils lui amenât la personne qu'il va épouser, pour pardonner aussi les peines qu'elle a éprouvées de ce côté (BOURGET, Actes suivent, 1926, p. 168).
3. [L'obj. désigne une chose qui procure une connaissance] Arriver à connaître par l'expérience, constater l'existence de quelque chose après expérience faite. Les sentiments factices sont assommants, mais les naturels jouissent quelquefois de ce privilège. J'ai éprouvé aujourd'hui la justesse de cette maxime (FLAUB., Corresp., 1846, p. 364). Cette passion des savants en quête d'illumination, je la connais, je l'éprouve, je l'ai durement éprouvée (DUHAMEL, Terre promise, 1934, p. 94).
a) Vieilli. Ses détracteurs, les bons confrères, qui tant de fois avaient éprouvé la verdeur de son bras et celle d'un bras encore plus écrasant que le sien (CLADEL, Ompdrailles, 1879, p. 57).
b) Éprouver que, combien. J'ai si souvent éprouvé que la solitude est un bien à qui possède une belle âme (BALZAC, Corresp., 1831, p. 619). J'ai souvent éprouvé combien une obligation facilite en moi le bonheur (GIDE, Journal, 1931, p. 1042).
c) Emploi pronom.
à sens passif. Vous affirmez que la connaissance est pure quand elle est privée de tout ce qui se voit, s'ouït, se touche et généralement s'éprouve (FRANCE, Puits ste Claire, 1895, p. 20).
réfl. + attribut de l'obj. Maintenant qu'en fait je ne lui [à la vie] demande plus rien, je m'éprouve plus désarçonné, plus dénué que jamais (DU BOS, Journal, 1927, p. 344).
Prononc. et Orth. :[], (j')éprouve []. Enq. : // (il) éprouve. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. Ca 1100 « éprouver », part. passé « qui a fait ses preuves » de vasselage est esprovet (Roland, éd. J. Bédier, 3163); 2. 1155 esprover « vérifier, constater (quelque chose) » (WACE, St Nicolas, éd. E. Ronsjö 423). Dér. de prouver; préf. é-. Fréq. abs. littér. : 10 473. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 18 079, b) 11 915; XXe s. : a) 12 008, b) 15 507.

éprouver [epʀuve] v. tr.
ÉTYM. 1080, esprover « mettre (qqn) à l'épreuve »; de é-, et prouver.
1 (XIIe). Essayer (qqch.) pour vérifier quelle est la valeur, la qualité. Expérimenter. || Éprouver la résistance de matériaux en les soumettant à des expériences. Essayer. || Éprouver une arme à feu, une plaque de blindage. || Éprouver un métal au feu. || Éprouver l'or, l'argent au creuset, à la pierre de touche. || Éprouver un pont, un viaduc. || L'expert a éprouvé la qualité du vin. || C'est un remède que j'ai éprouvé (Littré). || Éprouver diverses manières de vivre (→ Assister, cit. 1), différentes façons de procéder. Essayer, tâter (de); pratique (mettre en).
1 J'ai cent fois éprouvé les remèdes d'Ovide, Cent fois je les éprouve encore tous les jours (…)
Ronsard, Pièces retranchées, « Les amours ».
2 Je ferai passer ces derniers par le feu, où je les épurerai comme on épure l'argent, et je les éprouverai comme on éprouve l'or.
Bible (Sacy), Zacharie, XIII, 9.
3 (…) on les analyse actuellement (les crimes) (…) on les éprouve au creuset, afin de voir ce qu'on peut en tirer d'utile, comme la chimie trouve des ingrédients dans les voiries.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. VI, p. 321.
Éprouver les qualités, la valeur de qqn, de qqch. Épreuve (mettre à l'épreuve). || Éprouver l'honnêteté, le courage, la fidélité, le zèle de qqn. || L'absence (cit. 10) éprouve les liens de l'amitié. || Éprouver la mémoire, les connaissances, la science d'un candidat en l'interrogeant. || Éprouver la valeur d'une hypothèse, la vérité d'une assertion. || Éprouver qqch. par l'analyse. Soumettre (à).
4 Si je pouvais, je vous donnerais la foi (…) je ne puis le faire, ni partant éprouver la vérité de ce que vous dites. Mais vous pouvez bien quitter les plaisirs et éprouver si ce que je dis est vrai.
Pascal, Pensées, III, 240.
5 Sans doute qu'il voulait éprouver votre zèle.
Racine, Esther, I, 3.
Éprouver son adresse (cit. 2), sa force. || Éprouver son courage contre qqn (→ Arrogant, cit. 6). Hasarder, risquer.
6 Et qu'en me réduisant à la nécessité D'éprouver contre lui ma faible autorité (…)
Racine, Britannicus, I, 2.
Vieilli. || Éprouver qqn (syn. mod. : mettre à l'épreuve).
7 (Théophraste) avait coutume de dire qu'il ne faut pas aimer ses amis pour les éprouver, mais les éprouver pour les aimer (…)
La Bruyère, Discours sur Théophraste.
8 Je crois que vous voulez m'éprouver et vous jouer de moi qui suis un homme simple et rude.
Claudel, l'Annonce faite à Marie, II, 3.
S'éprouver : se mettre à l'épreuve, être éprouvé.
9 (…) l'or et l'argent s'épurent par le feu, et les hommes que Dieu veut recevoir au nombre des siens s'éprouvent dans le fourneau de l'humiliation.
Bible (Sacy), Ecclésiastique de Jésus, II, 5.
10 Saint Paul ordonnait aux fidèles de s'éprouver avant que de venir manger le pain de vie.
Massillon, Carême, Parole.
(XIIIe). Relig. Soumettre à la tentation ( Tenter). || Dieu a voulu éprouver la foi, la vertu de cette personne. || Dieu l'a éprouvé. En style biblique : || Dieu sonde les cœurs (cit. 118) et éprouve les reins.
11 Dieu veut éprouver ses élus et leur donner occasion de lui marquer par leur constance leur fidélité.
Bourdaloue, Affliction des justes, I.
2 (1718). Sujet n. de chose. Faire subir des épreuves, des souffrances, des peines, des malheurs à (qqn). || La perte de son père l'a bien éprouvé. Frapper. || La guerre a durement éprouvé ce pays. Passif et p. p. || Il a été cruellement éprouvé dans sa vie.
3 (V. 1175). Apprécier, connaître par une expérience personnelle; se rendre compte de. Constater, réaliser, reconnaître. || Éprouver qqch. || Éprouver ce que peut signifier un mot. → Dépouille, cit. 3. || Éprouver que… || Il éprouva, à ses dépens, qu'on ne pouvait se fier à eux. || J'ai déjà éprouvé qu'il est plein de dévouement (→ Absolu, cit. 12). || J'avais éprouvé combien il nous est supérieur (→ Céder, cit. 7).Éprouver la douceur d'un climat, l'agrément d'un pays. Ressentir.
12 — Rodrigue, as-tu du cœur ? — Tout autre que mon père
L'éprouverait sur l'heure (…)
Corneille, le Cid, I, 5.
13 (…) j'éprouve que pour gagner les hommes, il n'est point de meilleure voie que de (…)
Molière, l'Avare, I, 1.
14 J'éprouvai à l'âge de huit ans que bienheureux est celui qui, cessant de penser et de comprendre, s'abîme dans la contemplation de la beauté.
France, le Petit Pierre, XXIX, p. 206.
15 C'est alors que j'éprouvai la singulière disposition de mon esprit à se laisser griser par le sublime.
Gide, Si le grain ne meurt, II, II, p. 368.
16 Vous n'êtes pas certainement sans avoir éprouvé ce que peut être le souci financier pour un journal de doctrine ?
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. III, XXII, p. 289.
Littér. || Éprouver si… Vérifier, voir (si). || Éprouver si un objet est résistant, si un ami est dévoué.
17 Vous pourriez éprouver, sans beaucoup de longueur, Si mon bras sait encor montrer quelque vigueur.
Molière, Sganarelle, I, I.
18 (…) je veux éprouver avec mon épée si c'est un corps ou un esprit.
Molière, Dom Juan, V, 5.
4 (1273). Ressentir, sentir (une sensation, un sentiment). || Éprouver un besoin, éprouver le besoin de… || Éprouver un désir, du désir ( Convoiter), une impression, un sentiment. || Les sentiments que le cœur éprouve. || Éprouver de la tendresse, de l'affection, de l'amour, de l'attrait (cit. 24) pour qqn, pour qqch. Concevoir, prendre (se prendre). || Éprouver de l'attendrissement (cit. 1), de la compassion, de la pitié. || Éprouver un apaisement (cit. 1 et 7), un assouvissement (cit. 6), un soulagement. || Éprouver de la curiosité, de l'étonnement, des inquiétudes, une déception, une déconvenue, de la crainte, de la peur. || Éprouver de l'agacement (cit. 2), du dégoût (cit. 22), de la répugnance, de la contrariété, un désespoir, une désillusion, de la douleur (→ Déchirant, cit. 2), de la mélancolie, de la peine. Endurer, souffrir, subir, supporter. || Éprouver un affront, une humiliation. || Éprouver de la honte, de la gêne, un regret, un remords. || Éprouver de la joie, du plaisir. Goûter. || Éprouver du bien-être (cit. 3). Trouver (se trouver bien).Éprouver les joies, les peines de qqn. Partager, participer (à). || Cacher ce que l'on éprouve. || Blâmer, condamner ce que l'on n'éprouve pas (→ Blâmable, cit. 4). || Blasé (cit. 7) qui n'éprouve rien. || Analyser (cit. 1) tout ce qu'on éprouve.
19 Pensez-vous avoir seul éprouvé des alarmes ?
Racine, Andromaque, II, 2.
20 J'éprouvais ses plaisirs, ses peines, ses goûts, ses aversions (…)
Diderot, Règnes de Claude et de Néron, II, I.
21 (…) les sentiments que nous feignons, nous finissons par les éprouver.
B. Constant, Adolphe, VI, p. 55 (→ Créature, cit. 9).
22 Sans me piquer d'une dévotion bien fervente, je ne suis jamais entré dans une cathédrale gothique sans éprouver un sentiment mystérieux et profond, une émotion extraordinaire (…)
Th. Gautier, Voyage en Espagne, p. 93.
23 (…) elle disait, en effet, qu'on ne joue bien qu'en jouant avec son cœur (…) elle professait que pour exprimer fortement une passion, il faut l'éprouver, et qu'il est nécessaire de sentir les impressions qu'on doit rendre.
France, Histoire comique, 31, in F. Brunot, la Pensée et la Langue, p. 435.
24 L'analyse psychologique a perdu pour moi tout intérêt du jour où je me suis avisé que l'homme éprouve ce qu'il s'imagine éprouver.
Gide, les Faux-monnayeurs, I, VIII, p. 94.
25 L'amour que j'éprouvais se confondait avec celui que j'inspirais, que je croyais inspirer.
F. Mauriac, le Nœud de vipères, III, p. 38.
Éprouver un besoin. → Acidulé, cit. 2 (Colette), affirmer, cit. 7 (Loti), allègement, cit. 3 (Duhamel), altération, cit. 4 (Proust), assurer, cit. 57 (Duhamel), certitude, cit. 9 (Romains), cinéma, cit. 2 (Romains), confiance, cit. 6 (France), dramatiser, cit. 1 (Sand). — Éprouver un sentiment. → Affection, cit. 9 (Joubert), âme, cit. 57 (Bergson), analogue, cit. 5 (Taine), arborer, cit. 6 (Duhamel), arrière, cit. 14 (Renan), cœur, cit. 26 (Cl. Bernard), disparaître, cit. 18 (Baudelaire).
Éprouver une sensation physique. Percevoir, ressentir. || Éprouver un spasme, un vertige. || Dites au médecin ce que vous éprouvez. || Éprouver tous les symptômes d'une maladie.
26 Il éprouve un léger serrement de tête, une pression derrière les globes oculaires, une nervosité générale (…)
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. III, XVII, p. 229.
Absolt (littér.). || Faculté d'éprouver. Sens, sensibilité. || Personne capable, susceptible d'éprouver. Sensible.
27 Ta véritable passion est celle de connaître et d'éprouver. Elle n'a jamais été satisfaite.
Stendhal, Journal, p. 303.
28 (…) pour les garçons de ton milieu (…) la notion de certaines choses, de certains sentiments, devance l'expérience. Ils connaissent, en esprit, par l'imagination, une foule de sensations dont ils n'ont aucune pratique personnelle, directe. Ils ne s'en avisent pas : ils confondent savoir et éprouver. Ils croient éprouver des sentiments, des besoins, qu'ils savent seulement qu'on éprouve (…)
Martin du Gard, les Thibault, t. IX, p. 198.
(Fin XIXe). Fam. (argot). Jouir (R. Dorgelès, in Cellard et Rey).
Vx. || Éprouver qqn, qqch. (suivi d'un adj.). Trouver.
29 Quoi qu'il en soit, depuis que je vous vois chez elle, Toujours de plus en plus je l'éprouve cruelle (…)
Corneille, l'Illusion comique, II, 7.
5 (Sujet n. de personne ou de chose). Subir (une action nuisible ou violente). Subir. || Éprouver des difficultés, le contrecoup de la guerre, des pertes, des revers. || L'entreprise éprouva de nombreuses vicissitudes. || Éprouver les cruautés du sort (→ Augmenter, cit. 1).La forme du gouvernement éprouva de grandes altérations (Littré). || Mots qui éprouvent des altérations dans le cours du temps. || La pression barométrique éprouve des hauts et des bas, des variations continuelles.
30 Son amour éprouvait quelque destin contraire (…)
Molière, le Misanthrope, IV, 1.
31 Zadig marchait inquiet, agité, l'esprit tout occupé (…) de tous les contretemps et de toutes les infortunes qu'il avait éprouvés.
Voltaire, Zadig, XVI.
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éprouvé, ée p. p. adj.
1 Dont on a vérifié la qualité. || Métal, matériau éprouvé.
32 (…) c'est comme un argent éprouvé au feu, purifié dans la terre, et raffiné jusqu'à sept fois.
Bible (Sacy), Psaumes, XI, 7.
2 (XIIe). Qui est confirmé, certain. Sûr. || Un courage éprouvé (→ Alarmer, cit. 5). || Des qualités, des vertus éprouvées.Ami éprouvé. Fidèle, sûr. || Soldat éprouvé. Expérimenté. || Un dégustateur éprouvé. Expert.
33 (…) un vieux gentilhomme, éprouvé en divers hasards, et vrai routier de guerre (…)
Rabelais, Gargantua, XXXIII.
34 Quelques gens éprouvés dont le zèle est habile.
M.-J. de Chénier, Tibère, V, 1.
35 Avec de la santé, de la raison et des amis éprouvés, ce que vous avez sauvé des griffes de la chicane vous doit suffire pour être heureuse.
P.-L. Courier, Lettres de France et d'Italie, LXI, 25 mai 1807, Pl., p. 745.
36 (…) on aimait mieux donner pour soutien, à une jeunesse, un homme raisonnable et d'un courage bien éprouvé qu'un jeune gars qui peut se déranger, et, de bon sujet qu'on le croyait, devenir un mauvais garnement.
G. Sand, la Mare au diable, XI, p. 93.
3 (1787). Frappé, touché par des épreuves, des malheurs. Malheureux. || C'est un homme très éprouvé, qui a beaucoup souffert.Santé éprouvée. Affaibli, ébranlé.
37 Mes études médicales allaient un train normal et c'est un sujet sur lequel je reviendrai bientôt. Ma santé se trouvait éprouvée par des efforts non certes discordants, mais divers.
G. Duhamel, le Temps de la recherche, VII, p. 86.
4 Ressenti, subi. || Sentiment sincèrement éprouvé.
38 (…) c'est (la justice) le respect, spontanément éprouvé et réciproquement garanti, de la dignité humaine (…)
Proudhon, De la justice…, in Thamin et Lapie, Lectures morales, p. 417.
Fin. (vx). || Déficit éprouvé, perte éprouvée par un organisme financier.
CONTR. Appliquer, employer, utiliser. — Consoler, rasséréner, réjouir. — Causer, infliger. — Inspirer (un sentiment).(Du p. p.) Inéprouvé.
DÉR. Épreuve, éprouvant, éprouvette. — REM. On trouve chez le poète P.-J. Jouve le dér. rare éprouvement, n. m. V. Épreuve.

Encyclopédie Universelle. 2012.