lyrique [ lirik ] adj. et n.
• 1495; lat. lyricus, gr. lurikos, de lura → lyre
I ♦
1 ♦ Antiq. Destiné à être chanté avec accompagnement de musique (lyre, flûte, etc.) et souvent de danse. Genres, poèmes lyriques grecs. — Poète lyrique : auteur de poèmes lyriques.
2 ♦ (XVIe -XVIIIe) Hist. littér. Propre aux genres issus de la poésie grecque, tels que l'ode (opposé à épique et dramatique).
3 ♦ (1755) Mod. Se dit de la poésie qui exprime des sentiments intimes au moyen de rythmes et d'images propres à communiquer au lecteur l'émotion du poète, et de ce qui appartient à ce genre de poésie. Poésie lyrique. Thèmes lyriques. « Le monde lyrique » (Baudelaire). — Un style, des envolées lyriques. ⇒ 1. poétique.
4 ♦ (1810) Plein d'un enthousiasme, d'une exaltation de poète. ⇒ passionné. « Révolté lyrique » (Maurois).
5 ♦ N. (fém. rare) Un lyrique : un poète lyrique. « l'impudeur naturelle au lyrique moderne » (Lanson). — N. f. Didact. La lyrique : la poésie lyrique (1o, 2o, 3o). « une lyrique de la femme » (Barthes).
II ♦ (XVIIIe) Destiné à être mis en musique et chanté avec accompagnement, joué sur une scène. Drame lyrique : opéra, oratorio. Comédie lyrique : opéra-comique, opérette.
♢ L'art lyrique, où interviennent la musique et le chant. Théâtre lyrique, où sont donnés les opéras, les opérettes. Artiste lyrique : chanteur, chanteuse d'opéra, d'opérette. Soprano lyrique.
⊗ CONTR. Prosaïque .
⊗ HOM. Lyric.
● lyrique adjectif (latin lyricus, du grec lurikos) Se disait dans l'Antiquité grecque de la poésie chantée avec accompagnement de la lyre. Se dit d'un genre poétique inspiré de la lyrique grecque (odes, hymnes), par opposition à la poésie épique ou dramatique. Se dit d'une œuvre poétique, littéraire ou artistique où s'expriment avec une certaine passion les sentiments personnels de l'auteur. Qui est plein d'un enthousiasme, d'une exaltation qui peuvent être excessifs : Quand il parle de son voyage, il devient lyrique. ● lyrique (expressions) adjectif (latin lyricus, du grec lurikos) Abstraction lyrique, tendance de l'art abstrait qui s'est épanouie, notamment en France, à partir de 1945. (Projection libre et plus ou moins spontanée de l'affectivité de l'artiste, elle a pris des formes variées : peinture gestuelle, tachisme, matiérisme, informel, calligraphie, nuagisme, une part du paysagisme abstrait.) Art lyrique, art où interviennent le chant et la musique, par opposition à l'art dramatique. Artiste lyrique, acteur ou actrice qui chante. Théâtre lyrique, théâtre où l'on joue des œuvres mises en musique, des opérettes ou opéras. ● lyrique (homonymes) adjectif (latin lyricus, du grec lurikos) lyric nom masculin ● lyrique (synonymes) adjectif (latin lyricus, du grec lurikos) Qui est plein d'un enthousiasme, d'une exaltation qui peuvent être...
Synonymes :
- exalté
- passionné
● lyrique
nom
Poète lyrique.
● lyrique
nom féminin
Poésie lyrique, genre lyrique.
lyrique
adj. et n. m.
d1./d ANTIQ Chanté avec un accompagnement de lyre. Poème lyrique.
|| Poète lyrique: auteur de poèmes lyriques.
d2./d Mis en musique pour être chanté sur scène. Théâtre lyrique, où l'on représente des ouvrages mis en musique. Drame lyrique: opéra, oratorio.
— Artiste lyrique: chanteur, chanteuse d'opéra ou d'opéra-comique.
d3./d D'inspiration ou de forme analogue à celle de la poésie lyrique antique. Genre lyrique (par oppos. à épique).
— n. m. Le lyrique: le genre lyrique.
d4./d Qui laisse libre cours à l'expression des sentiments personnels souvent sous forme d'images évocatrices. Un style lyrique.
⇒LYRIQUE, adj. et subst.
I. —Adjectif
A. —LITTÉRATURE
1. HIST. LITTÉR.
a) Genre, poésie lyrique. Genre poétique caractérisé par l'expression de sentiments ou d'émotions liés à des thèmes religieux ou existentiels dans des formes rythmiques permettant le chant ou la déclamation avec accompagnement musical. Dans le genre lyrique, les Hébreux sont fort supérieurs aux autres peuples de l'Antiquité (CHATEAUBR., Génie, t. 2, 1803, p. 288). Il y eut une poésie lyrique, admirable dans le Sud [de la France], la poésie des troubadours (Dict. des lettres fr. Moy. Âge, 1964, p. 475).
— En partic.
♦[En parlant des formes strophiques de la poésie gr. anc.; p. oppos. à épique, dramatique] Il n'y avait à l'origine que de petites pièces de 4 à 8 vers. Par leur objet, ces pièces étaient ou des formules magiques, ou des prières, ou des vers funéraires, ou peut-être des vers chorégiques [vers choragiques], toutes choses qui tombent (...) dans notre classification «lyrique» (SAUSSURE ds J. STAROBINSKI, Les Mots sous les mots, Paris, Gallimard, 1971, p. 60).
♦P. anal. [En parlant des formes poét. sav. imitées de la poésie gr. (dithyrambe, hymne, ode, stances, etc.) ou de la poésie médiév.] Ronsard retrouvait la lyre de Pindare, et fondait, aidé de sa pléiade, la grande école lyrique française (MURGER, Scène vie boh., 1851, p. 4). La poésie lyrique (...) s'enferme dans les formes fixes, en particulier ballades, virelais et rondeaux, qui suivent des formes métriques complexes (Dict. des lettres fr. Moy. Âge, 1964, p. 478).
b) Caractéristique du genre lyrique. À l'origine, la quantité n'était pas autre chose qu'une mesure musicale, puisque les vers lyriques étaient marchés, dansés, chantés, accompagnés d'un ou plusieurs instruments (SOUZA, Rythme fr., 1912, p. 79). De l'alexandrin mêlé de la stance lyrique aux autres vers, Ronsard s'est servi avec une maîtrise égale (THIBAUDET, Réflex. litt., 1936, p. 25).
♦Coupe lyrique. ,,Coupe (...) qui consiste à «couper» le rythme du vers après l'e atone précédant une consonne initiale de mot à l'intérieur du vers`` (MORIER 1975). Synon. coupe féminine. Comme elle entraîne un déplacement de la tonique, qui se trouve anticipée d'une syllabe sur le moment prévu, la coupe lyrique provoque un phénomène de déséquilibre, qui ne peut être compensé que par un accent plus vigoureux, c'est l'accent de syncope (MORIER 1975).
c) Qui s'adonne au genre lyrique. C'était lui [Malherbe], poète lyrique, lui qui reprochait à Régnier d'avoir représenté (...) la France sous les traits d'une nymphe éplorée (SAINTE-BEUVE, Tabl. poés. fr., 1828, p. 142). J'ai vu le lyrique Pindare, L'élève divin de Myrtis (BANVILLE, Cariat., 1842, p. 136).
— [P. méton.] Les temps primitifs sont lyriques, les temps antiques sont épiques, les temps modernes sont dramatiques (HUGO, Préf. Cromwell, 1827, p. 15).
2. a) (Poésie, poème) lyrique. (Poésie, poème) qui privilégie l'expression plus ou moins vive de la subjectivité ou de thèmes existentiels au moyen des ressources de musicalité, de rythme, d'évocation visuelle ou affective propres au langage. La poésie lyrique ne raconte rien, ne s'astreint en rien à la succession des temps, ni aux limites des lieux; elle plane sur les pays et sur les siècles (STAËL, Allemagne, t. 2, 1810, p. 119). Il n'y a pas de poésie lyrique sans le moi (HUGO, Corresp., 1852, p. 134):
• 1. Le langage poétique ne se reconnaît pas seulement par les éléments formels qui soustraient la poésie au contexte réel de la parole; le contenu lui-même de la poésie lyrique a quelque chose d'ésotérique comparé au langage banal de tous les jours. En lisant (...):
Voici venir les temps où vibrant sur sa tige
Chaque fleur s'évapore ainsi qu'un encensoir...
nous savons aussitôt que nous avons affaire à un fragment lyrique bien qu'il n'y ait pas de première personne.
Termes littér. 1973, p. 83.
b) Caractéristique du lyrisme, empreint de lyrisme.
— [En parlant de la forme, du contenu, de la genèse d'une oeuvre poét. et, p. ext., littér.] Mouvement, rythme, style, thème lyrique; élan, souffle lyrique; prose lyrique. Oh! le vide, oh! le creux des vers! Et que les transports lyriques sont en général prudhommesques! (GONCOURT, Journal, 1892, p. 308). La coulée du drame romantique est constamment ralentie ou interrompue par des tirades lyriques plus ou moins plaquées (Arts et litt., 1936, p. 30-2):
• 2. ... Vigny (...) repousse la forme lyrique de l'expérience romantique. Ses fiertés, ses déceptions, ses dédains, ses rancunes, et d'abord son amour fiévreux et douloureux pour Marie Dorval, eussent pu nourrir une poésie personnelle. Il s'y refuse.
Hist. des litt., t. 3, 1967, p. 906 (Encyclop. de la Pléiade).
— [En parlant de la forme, du contenu, de la genèse de toute oeuvre d'art] En obligeant la peinture de se faire lyrique, comme la poésie et la musique, Delacroix a tenté une entreprise paradoxale (HOURTICQ, Hist. art, Fr., 1914, p. 340). Ils [les mobiles de Calder] sont à la fois des inventions lyriques, des combinaisons techniques presque mathématiques (SARTRE, Sit. III, 1949, p. 311):
• 3. ... Schoenberg assouplit la rigueur du principe dodécaphonique et compose avec son opus 30 une partition très lyrique, d'une extrême tension. Le jaillissement du lyrisme schoenbergien n'est pas entravé par les préoccupations formelles rigoureuses, qui ne sont jamais abandonnées.
SAMUEL, Art mus. contemp., 1962, p. 195.
♦Abstraction lyrique. Mouvement pictural de la seconde moitié du XXe siècle privilégiant l'expression directe de l'émotion individuelle dans un langage plastique non figuratif. Avant-gardes et arrière-gardes marquaient leurs territoires [dans les années 50]: d'un côté le formalisme de l'abstraction mécanicienne, de l'autre le dogmatisme du réalisme socialiste. Il y avait aussi l'abstraction lyrique et le surréalisme (Le Monde, 7 mars 1981, p. 31, col. 1).
— Emploi subst. masc. sing. à valeur de neutre. Carus tente d'échapper à ce qui reste, dans les idées romantiques, d'imprécis, de lyrique, de non dirigé (BÉGUIN, Âme romant., 1939, p. 130).
c) [En parlant d'une pers.]
— Qui a une pratique lyrique de son art. Ce peintre lyrique [Delacroix] aimait la couleur pour sa puissance sentimentale (HOURTICQ, Hist. art, Fr., 1914p. 338). Boris Pasternak, poète lyrique (...) par ses associations d'images et ses rythmes (Arts et litt., 1936, p. 84-6).
— P. méton. [En parlant d'un trait psychol.] Qui porte à l'exaltation, à l'effusion de sentiments dans l'expression ou l'expérience artistique. Nature lyrique. Il s'agit d'aller de l'état lyrique du poète à l'état lyrique du lecteur. Quelle est la voie? (BARRÈS, Cahiers, t. 13, 1921, p. 94). L'âme lyrique en lui [Goethe] alterne avec l'âme tranquille et patiente d'un botaniste (VALÉRY, Variété IV, 1938, p. 118).
B. —P. anal., usuel. [Avec, selon le cont., une nuance péj. ou iron.] Qu'un état d'exaltation porte à un comportement exubérant et parfois à l'effusion de sentiments. Notre patriote lyrique se construisait une légende, ayant «vomi le régime sous lequel nous croupissions» depuis 1879 (BLANCHE, Modèles, 1928, p. 21). La Grèce elle-même dérive quelque part en moi, au bord de ma mémoire, inlassablement... Eh! là, je dérive, moi aussi, je deviens lyrique! Arrêtez-moi, mon cher, je vous en prie (CAMUS, Chute, 1956, p. 1523).
♦[En parlant d'un état psychol., d'un comportement] Le grand-père, en pleine effusion lyrique, s'écoutait lui-même (HUGO, Misér., t. 2, 1862, p. 618). On lui fit un accueil lyrique (DUHAMEL, Désert Bièvres, 1937, p. 98).
[En parlant de propos, d'un comportement langagier] Un groupe de Français n'avaient pas de termes assez lyriques pour exalter le génie de Wagner (BARRÈS, Cahiers, t. 9, 1911, p. 195):
• 4. Il avait su faire admettre par l'Université, non seulement ses cours, qui étaient de longues improvisations lyriques, pleines de vues hardies, de digressions, de brusques confidences, de mots crus, — mais encore ses boutades...
MARTIN DU G., Thib., Sorell., 1928, p. 1232.
♦Rare. [En parlant d'un trait physique] Bafouillant soudain, la bouche pleine de salive, la mèche lyrique, il me saisissait alors par le revers ou par un bouton de mon paletot (DUHAMEL, Désert Bièvres, 1937, p. 57).
— Lyrique à propos de, sur, etc. (qqn/qqc.). Banville, d'ordinaire très lyrique à l'endroit de ses amis (GONCOURT, Journal, 1874, p. 974). Parapine lui qui pourtant n'était pas des plus lyriques sur ces sujets d'attirance s'en souriait à lui-même une fois qu'elle était sortie (CÉLINE, Voyage, 1932, p. 585).
C. —MUSIQUE
1. Qui est mis en musique pour être chanté, joué sur une scène. Œuvre, ouvrage, spectacle lyrique. Dîner, bal, tombola, concert... sans compter la scène lyrique que Fondreton a promise et qu'on attend (PAILLERON, Âge ingrat, 1879, II, 6, p. 65). Je viens d'entendre la Damoiselle élue, poème lyrique de Debussy, sur des vers de D. G. Rosetti (RIVIÈRE, Corresp. [avec Alain-Fournier], 1907, p. 47).
— Art lyrique. Chant. Drame, théâtre lyrique. Synon. de opéra. Les jeunes générations (...) semblent se désintéresser du théâtre lyrique (Arts et litt., 1936, p. 80-11). Homme de théâtre avant tout, Verdi a exercé une influence aussi profonde que durable sur l'art lyrique (DUMESNIL, Hist. théâtre lyr., 1953, p. 161):
• 5. ... les divertissements dansés gardent une belle place; cet usage continuera jusqu'à la naissance du moderne drame lyrique: les opéras célèbres du
XIXe siècle (de la Juive à Roméo et Juliette, et au delà) comprendront toujours au moins un grand divertissement qui forme un véritable ballet...
BRILLANT, Probl. danse, 1953, p. 198.
— Comédie lyrique. Synon. opérette, opéra-comique. On se souvient du Corsaire, de Mina, de Sargines, de la Pauvre femme, opéras-comiques ou comédies lyriques (PESQUIDOUX, Livre raison, 1925, p. 127).
— Théâtre, scène lyrique. Théâtre où sont représentés les opéras, les opérettes. En vain vos deux scènes lyriques déploient-elles tout ce que la musique des Gluck, des Grétry, des Chérubini, et des Méhul a de puissance et de charmes (JOUY, Hermite, t. 2, 1812, p. 26). Quelques théâtres lyriques de province se maintiennent au prix d'un vigoureux effort (Arts et litt., 1936, p. 80-7).
2. En partic.
a) Qui est propre à l'opéra. La déclamation lyrique a renoncé à tous les éléments de la mélodie (Arts et litt., 1935, p. 36-2).
b) Qui est relatif à l'opéra. L'État octroierait à une ville «une subvention annuelle d'au moins douze millions, au titre de la décentralisation lyrique» (Théâtres nat. Fr., 1954, p. 33).
c) [En parlant de pers.] Qui chante des opéras, des opérettes. C'est en 1893 que Victor Maurel, tragédien lyrique, a établi les trois qualités de la voix: la hauteur, l'intensité, le timbre (Arts et litt., 1935, p. 36-8). L'interprète lyrique se trouve devant une difficulté que le comédien ne connaît pas (Arts et litt., 1936, p. 60-7). Artiste lyrique. Artiste qui chante au théâtre ou au concert. (Cl. RENARD, Journal, 1897, p. 380).
♦Soprano lyrique. Soprano qui ,,possède une tessiture aiguë ou moyenne, avec un timbre qui prend de la puissance dans la force`` (Mus. 1976). Le soprano lyrique léger (Manon) (...) peut se borner au contre-ré (J. LORCEY, Maria Callas, Paris, P.A.C., 1977, p. 28).
II. —Substantif
A. —[Désigne une pers.] Poète lyrique (supra A 1 et 2), artiste lyrique (supra A 2). Il sentait avec délicatesse la poésie des lyriques grecs. Il touchait d'une main légère et sûre au texte fatigué de Théocrite (A. FRANCE, Bergeret, 1901, p. 59). Le jour où Fromentin découvrit en Rubens un lyrique, tous les Flamands (...) furent définis du même coup (TOULET, Notes art, 1920, p. 109):
• 6. La poésie française, toujours retenue par les digues d'une forme trop rigide a fini par refluer dans la prose. C'est ce qui fait que nous avons de grands lyriques comme Bossuet, Chateaubriand, Lautréamont...
GREEN, Journal, 1951, p. 122.
B. —Subst. masc., rare. Le genre lyrique (supra A 1).Les deux sentiments les plus opposés qui se développèrent au sein de la fraternité première peuvent se rapporter au lyrique d'une part et au dramatique de l'autre (SAINTE-BEUVE, Portr. contemp., II, p. 95 ds ROB.).
C. —Subst. fém. La poésie lyrique. La lyrique chorale dont Pindare et Bacchylide sont les plus illustres représentants (Encyclop. univ. t. 7 1970, p. 1044, col. 1).
REM. 1. Lyrico-, élém. de compos. représentant l'adj. lyrique. Lyrico-comique, adj., hapax. Si Boileau a qualifié son poème d'«héroï-comique», l'épithète de «lyrico-comiques» ne conviendrait pas mal aux Odes funambulesques (LEMAITRE, Contemp., 1885, p. 12). 2. Lyrifier, lyriser, verbe trans., rare. Rendre lyrique. La plupart des poètes, quand ils ne sont pas un tant soit peu lyrifiés par la forme métrique, ont un style d'une platitude, qu'un seul mot peut rendre: un style de portier (GONCOURT, Journal, 1875, p. 1043). Tous les ouvrages de puériculture elle les avait lus et surtout ceux qui lyrisent à en pâmer les maternités (CÉLINE, Voyage, 1932, p. 272). 3. Lyriquement, adv. D'une manière lyrique. a) [Correspond à I A 1 et 2 supra] Verrochio, le maître de Léonard, est (...) un des premiers artistes italiens qui exaltèrent lyriquement la beauté des muscles (GILLES DE LA TOURETTE, L. de Vinci, 1932, p. 36). Les psaumes (...) participent de l'hymne et de l'élégie, combinaison qui accomplit une alliance remarquable des sentiments collectifs lyriquement exprimés, avec ceux qui procèdent du plus intime de la personne et de sa foi (VALÉRY, Variété V, 1944, p. 171). b)[Correspond à I B supra] Il (...) les complimentait [des femmes] lyriquement sur le crédit du protecteur qu'elles traînaient à la suite (CARCO, Montmartre, 1938, p. 213).
Prononc. et Orth.: []. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. 1. a) 1495 [éd.] «dans l'Antiquité se dit de poètes qui composaient des poèmes déclamés avec accompagnement de lyre» (J. DE VIGNAY, Mir. histor., 1er vol., f° 174 v° ds GDF. Compl.); fin XVe s. subst. (Chron. et hist. sacree et prof., Ars. 5079, f° 162a, ibid.); b) fin XVe s. -déb. XVIe s. [ms.] «destiné à être chanté avec accompagnement de lyre» chantz liriques (OCT. DE SAINT-GEL., Ep. d'Ov., Ars. 5108, f°186 r°, ibid.); p. ext. 1550 en parlant de la poésie française «qui appartient aux genres issus des genres lyriques de l'Antiquité» ma ... lirique Muse (RONSARD, Ode, XVIII, 34 ds Œuvres, éd. P. Laumonier, t.2, p.50); 2. a) 1755 «se dit des poésies qui expriment les sentiments intimes du poète» (BATTEUX, Principes de littérature, III, 7 ds FEW t.5, p.484); b) 1862 [1re publ. ds la Presse, 26 août] «se dit d'une oeuvre littéraire, même en prose, de style poétique» prose lyrique (BAUDEL., Poèmes prose, À Arsène Houssaye, p.8); 3. 1801 «inspiré par un enthousiasme excessif, déplacé ou ridicule» (M. J. CHÉN., Les Nouveaux saints ds LITTRÉ). II. 1. a) 1751 «se dit d'une oeuvre mise en scène et chantée sur une scène de théâtre» (VOLT., Louis XIV, Ecriv., ibid.); 1831, 18 avr. drame lyrique (MUSSET ds Le Temps, p.99); b) 1812 scène lyrique (JOUY, Hermite, t.2, p.198); 2. 1897, 6 janv. artiste lyrique «artiste qui chante par profession au théâtre ou au concert» (RENARD, loc. cit.); 3. 1920 art lyrique (PROUST, Guermantes 1, p.39). Empr. au lat. d'époque impériale lyricus «relatif à la lyre, de lyre» (gr. de mêmes sens), lui-même dér. de lyra, v. lyre. Fréq. abs. littér.: 760. Fréq. rel. littér.: XIXe s.: a) 617, b) 1024; XXe s.: a) 1173, b)1450 Bbg. FRANÇON (M.). Deux notes d'un seiziémiste. 1. Sur le Journal du Voyage de Montaigne. 2. Lyrisme et techn. poét. Fr. St. 1968, t.22, pp. 99-105.
lyrique [liʀik] adj. et n.
ÉTYM. 1495; lat. lyricus, grec lurikos, de lura. → Lyre.
❖
———
1 Hist. littér. Destiné à être chanté, déclamé avec un accompagnement musical (lyre, flûte, etc.) et souvent de danse (en parlant de poésie antique). || Genre, poèmes lyriques grecs. ⇒ Chœur, dithyrambe, hymne, iambe, idylle, ode. || Les psaumes, poèmes lyriques hébreux. — Par ext. || Poète lyrique, qui compose une telle poésie.
2 (XVIe, XVIIIe). Hist. littér. Qui est destiné à être chanté (⇒ Chanson, cit. 4, Rousseau; chant, 3.); qui appartient aux genres issus de la poésie lyrique grecque, tels que l'ode (opposé à épique, dramatique). ⇒ Dithyrambe, hymne, ode, stance. — Par ext. || « Horace est le prince des poètes lyriques latins, Malherbe des Français » (Furetière, Dict., 1690).
1 (…) toute sorte de Poésie a l'argument propre (…) à son sujet (…) la Lyrique, l'amour, le vin, les banquets dissolus, les danses, masques, chevaux victorieux, escrime, joutes et tournois, et peu souvent quelque argument de Philosophie.
Ronsard, Œuvres en prose, Les odes, Au lecteur.
3 (1755). Mod. Se dit de la poésie qui exprime des émotions, des sentiments intimes, au moyen de rythmes, d'images propres à communiquer au lecteur l'émotion du poète. ⇒ Lyrisme, poésie. || La notion de poésie lyrique, « personnelle en son fond ou dans son expression » (Brunetière), s'est répandue avec l'individualisme et le romantisme, au XIXe siècle. — Par ext. || Poète lyrique. ⇒ Barde (dans l'usage romantique); → ci-dessous, 5., n. m.
2 On pourra (…) définir la Poésie lyrique, celle qui exprime le sentiment. Qu'on y ajoute une forme de versification qui soit chantante elle aura tout ce dont elle a besoin pour être parfaite.
3 La poésie lyrique s'exprime au nom de l'auteur même; ce n'est plus dans un personnage qu'il se transporte, c'est en lui-même qu'il trouve les divers mouvements dont il est animé : J.-B. Rousseau dans ses Odes religieuses, Racine dans Athalie, se sont montrés poètes lyriques (…)
Mme de Staël, De l'Allemagne, II, X.
4 La poésie lyrique est l'expression des sentiments personnels du poète traduits en des rythmes analogues à la nature de son émotion; vifs et rapides comme la joie, languissants comme la tristesse, ardents comme la passion (…)
F. Brunetière, l'Évolution de la poésie lyrique…, t. I, p. 154-155.
♦ Qui appartient à la poésie lyrique. || Mouvement, rythme lyrique (→ Enfiévrer, cit. 5; iambe, cit. 3). || L'élément bouffon et l'élément lyrique d'un poème (→ Funambulesque, cit. 2). || Style lyrique (→ Inexprimable, cit. 8). || La nature, l'amour, la mort, thèmes lyriques. — Renouveau lyrique. ⇒ Poétique.
5 Il y a (…) une manière lyrique de sentir. Les hommes les plus disgraciés de la nature (…) ont connu quelquefois ces sortes d'impressions, si riches, que l'âme en est comme illuminée, si vives qu'elle en est comme soulevée (…) Tout poète lyrique, en vertu de sa nature, opère fatalement un retour vers l'Éden perdu. Tout, hommes, paysages, palais, dans le monde lyrique, est pour ainsi dire apothéose.
Baudelaire, l'Art romantique, XXII, VII.
6 (…) les vrais thèmes lyriques, ce sont ceux qui comportent, sur une même donnée, très générale, autant de variations qu'il y a de sensibilités pour en être diversement affectées.
F. Brunetière, l'Évolution de la poésie lyrique…, t. I, p. 125.
♦ N. f. || La lyrique : la poésie lyrique. || La lyrique monodique et la lyrique chorale des Grecs (→ Iambe, cit. 2).
♦ Par ext. Qui a un caractère poétique, personnel, émotif (en parlant de l'expression littéraire). || Les envolées (cit. 3) lyriques, le débit lyrique et inspiré (cit. 17) de Michelet. || La langue, la prose, le style lyrique de Chateaubriand, des lettres de Hugo (→ Galanterie, cit. 11), du « Chatterton » de Vigny (→ Jaculatoire, cit. 2). || Discours, improvisation (cit. 4) lyrique.
6.1 Des enfants
De ce monde ou bien de l'autre
Chantaient de ces rondes
Aux paroles absurdes et lyriques
Qui sans doute sont les restes
Des plus anciens monuments poétiques
De l'humanité (…)
Apollinaire, Alcools, p. 47.
♦ (En parlant d'autres arts). || Musique lyrique (opposée à musique descriptive, imitative…). → Créateur, cit. 8. — Conception lyrique de la vision chez un peintre (→ Impressionnisme, cit. 1).
4 (1810). Fig. Plein d'un enthousiasme, d'une exaltation semblables à ceux qu'on prête au poète lyrique. ⇒ Lyrisme. || Un révolté lyrique (→ Bipolaire, cit. 1). Iron. || Quand il parle de son projet, il s'emballe, il devient lyrique ! — État, transport, exaltation, enthousiasme lyrique (→ Blanc, cit. 20; ivresse, cit. 19). || Effusions lyriques. ⇒ Passionné.
5 N. m. || Un lyrique : un poète lyrique (aux sens 1 ou 2). || Les grands lyriques grecs. || Le lyrique moderne (→ Généraliser, cit. 6). || Le lyrique rêveur des « Voix intérieures » (→ Intimiste, cit. 2). — REM. Dans cet emploi, le fém. serait normal.
7 Un jour, quelqu'un m'apprit que le lyrisme est enthousiasme, et que les odes des grands lyriques furent écrites sans retour, à la vitesse de la voix du délire et du vent de l'esprit soufflant en tempête (…)
Valéry, Variété V, p. 159.
♦ Le lyrique : le genre lyrique (aux sens 1, 2).
8 Les deux sentiments les plus opposés qui se développèrent au sein de la fraternité première peuvent se rapporter au lyrique d'une part et au dramatique de l'autre.
Sainte-Beuve, Portraits contemporains, II, p. 95.
6 N. f. Poésie, attitude poétique.
8.1 Le visage de Garbo représente ce moment fragile, où le cinéma va extraire une beauté existentielle d'une beauté essentielle, où l'archétype va s'infléchir vers la fascination de figures périssables, où la clarté des essences charnelles va faire place à une lyrique de la femme.
R. Barthes, Mythologies, p. 71.
———
II (XVIIIe). Spécialt.
1 Mus. Destiné à être mis en musique et chanté, joué sur une scène. || Drame lyrique; ouvrage lyrique. ⇒ Opéra. || Tragédie lyrique. || Scène lyrique de caractère religieux (⇒ Cantate, oratorio). || Comédie lyrique (opéra comique, opérette).
9 (…) Prométhée, vaste composition doublement lyrique, dont les paroles, écrites jadis par Herder, ont été mises en musique par Liszt.
Nerval, Lorely, Souvenirs de Thuringe, IV.
2 (1835). || Théâtre lyrique, réservé à la musique dramatique. || La Gaieté-Lyrique, nom d'un théâtre parisien. || Les grandes scènes lyriques. — Art lyrique; déclamation lyrique. ⇒ Chant.
10 C'est quand on est en possession d'une articulation, d'une prononciation parfaites, que l'on peut se préoccuper de ce qui offre le véritable intérêt de la déclamation lyrique, c'est-à-dire de l'expression (…)
Initiation à la musique, p. 143.
♦ Artiste lyrique : chanteur, chanteuse d'opéra, d'opérette.
♦ Soprano lyrique (opposé à soprano léger et à soprano dramatique).
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DÉR. Lyriquement, lyrisme.
HOM. Lyric.
Encyclopédie Universelle. 2012.