maudire [ modir ] v. tr. <conjug. : 2; sauf inf. et p. p. maudit, maudite>
• maldire 1080 « dire du mal de »; lat. maledicere
1 ♦ Vouer au malheur; appeler sur (qqn) la malédiction, la colère divine. ⇒ anathématiser.
♢ Par exagér. Vouer à l'exécration (une personne, une chose dont on a lieu de se plaindre, que l'on hait, méprise). ⇒ abhorrer, abominer, exécrer, haïr, pester (contre). Maudire la guerre. Je maudis le jour où je l'ai rencontré. « Je maudis ce sacré métier de romancier » (Goncourt).
2 ♦ Vouer à la damnation éternelle. ⇒ condamner, réprouver. Caïn a été maudit de Dieu, par Dieu.
⊗ CONTR. Adorer, bénir.
● maudire verbe transitif (latin maledicere, de male, mal, et dicere, dire) Littéraire. Vouer quelqu'un à la damnation éternelle : Dieu a maudit Caïn. Littéraire. Appeler sur quelqu'un, sur quelque chose la malédiction, le malheur, la colère divine : Le vieillard, dans sa détresse, maudit toute sa descendance. Vouer quelqu'un, quelque chose à l'exécration : Je maudis le jour où je l'ai rencontré. Manifester à l'égard de quelqu'un ou de quelque chose sa colère, son exaspération : Il maudissait le jury de l'avoir recalé. ● maudire (citations) verbe transitif (latin maledicere, de male, mal, et dicere, dire) Jean Giraudoux Bellac 1882-Paris 1944 Dieu n'a pas encore trouvé d'autre moyen de choisir un peuple ou un être que de le maudire. Judith, II, 7, Judith Grasset Arthur Rimbaud Charleville 1854-Marseille 1891 Le chant des cieux, la marche des peuples ! Esclaves, ne maudissons pas la vie. Une saison en enfer, Matin Bible Maudit soit le jour où je suis né ! le jour où ma mère m'enfanta, qu'il ne soit pas béni ! Ancien Testament, Jérémie XX, 14 Commentaire Citation empruntée à la « Bible de Jérusalem ». Talmud Sois plutôt le maudit que celui qui maudit. Talmud, 49a William Shakespeare Stratford on Avon, Warwickshire, 1564-Stratford on Avon, Warwickshire, 1616 Tu m'as enseigné le langage, et le seul profit que j'en ai tiré, c'est de savoir maudire. You taught me language, and my profit on't Is, I know to curse. La Tempête, I, 2, Caliban ● maudire (difficultés) verbe transitif (latin maledicere, de male, mal, et dicere, dire) Conjugaison Attention à la deuxième personne du pluriel de l'indicatif présent : vous maudissez (alors qu'on dit vous dites et vous médisez). ● maudire (synonymes) verbe transitif (latin maledicere, de male, mal, et dicere, dire) Littéraire. Vouer quelqu'un à la damnation éternelle
Synonymes :
- réprouver
Contraires :
- bénir
Littéraire. Appeler sur quelqu'un, sur quelque chose la malédiction, le malheur, la...
Synonymes :
- anathématiser
Vouer quelqu'un, quelque chose à l'exécration
Synonymes :
- abhorrer
- abominer
- exécrer
- haïr
Contraires :
- adorer
- aimer
- apprécier
Manifester à l'égard de quelqu'un ou de quelque chose sa colère...
Synonymes :
- fulminer
- s'emporter contre
- tempêter contre
- tonner
Contraires :
- exalter
maudire
v. tr.
d1./d Vouer (qqn) au malheur; prononcer des imprécations contre (qqn, qqch). Maudire sa pauvreté.
|| (Afr. subsah.) Envoûter. Il ne peut se marier, on l'a maudit.
d2./d RELIG Condamner à la damnation. Dieu a maudit ces pécheurs.
⇒MAUDIRE, verbe trans.
Réprouver en proférant des paroles de malédiction.
A. — [La réprobation est hum.]
1. [au nom d'un sentiment relig.] Vouer une personne au malheur en appelant sur elle la malédiction divine:
• 1. ... les démocrates semi-chrétiens me maudissent comme ennemi de Dieu, par conséquent traître à la république, lorsque je cherche le sens et le contenu de l'idée de Dieu...
PROUDHON, Syst. contrad. écon., t.1, 1846, p.25.
2. [sous l'effet de la colère, de l'exaspération, etc.] Vouer quelqu'un au malheur en proférant à son sujet des imprécations. Tous les personnages finissent par un choeur où ils maudissent Mandrin, l'auteur d'un vol aussi audacieux (L. SCHNEIDER, Maîtres opérette fr., Lecocq, 1924, p.199). Les vexations, les cruautés auxquelles le nouveau roi est entraîné par son goût du luxe et des fêtes le font maudire de ses sujets (FARAL, Vie temps St Louis, 1942, p.217).
— Emploi pronom. Se réprouver. Son repentir était sincère; depuis le départ de la Belcredi, il n'avait pas vécu un jour, sans penser à elle, et sans se maudire (BOURGES, Crépusc. dieux, 1884, p.276). Je me maudis de t'avoir donné le jour! (ARAGON, Beaux quart., 1936, p.53).
— P. anal. Dire sur quelque chose tout le mal possible par haine ou par mépris. Synon. détester, exécrer. Maudire une guerre. Tout en maudissant l'amour et les soupçons jaloux qui faisaient de ma vie un supplice, il n'était rien au monde que je redoutasse tant qu'une découverte de trahison qui m'eût peut-être à jamais délivré de mes tourments (MILOSZ, Amour. initiation, 1910, p.190). Les parlementaires maudissaient le régime qu'ils avaient eux-mêmes institué (DE GAULLE, Mém. guerre, 1956, p.36). La grande majorité maudissait la Révolution sans en rien excepter (LEFEBVRE, Révol. fr., 1963, p.623):
• 2. ... je maudis ce sacré métier de romancier où l'on passe sa vie à se fâcher, à se refroidir avec l'humanité que l'on approche; je maudis ce métier où il y a toujours dans l'air des duels ou des poursuites...
GONCOURT, Journal, 1882, p.144.
P. exagér. Maudire le mauvais temps, un contretemps.
3. En partic. Blasphémer. Anton. bénir. On célébrait, en maudissant le pain et le vin, la messe noire, sur le dos d'une femme, à quatre pattes, dont la croupe nue et constamment souillée servait d'autel (HUYSMANS, À rebours, 1884, p.213). Soumis à la volonté du Seigneur, qui lui reprenait les biens qu'il lui avait donnés, le vertueux Job, loin de s'irriter contre Dieu, bénit son nom au milieu de ses afflictions malgré les reproches de sa femme, qui le poussait à maudire Dieu, auteur de ces maux (Théol. cath. t.4, 1 1920, p.980).
B. — [La réprobation est divine] Vouer une personne à la malédiction, à la damnation éternelle. Si les prêtres ne s'appliquent pas de coeur à leurs obligations, Jahvé les maudira et les châtiera (Théol. cath. t.4, 1 1920, p.1004).
Prononc. et Orth.:[], (il) maudit [modi]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1100 maldire «vouer quelqu'un à la malédiction de Dieu» (Roland, éd. J. Bédier, 2579); 2. ca 1100 «en parlant de Dieu, vouer à la réprobation, à la damnation éternelle» (ibid., 1659: Tere Major, Mahummet te maldie); 1170 maudir (CHRÉTIEN DE TROYES, Erec et Enide, éd. M. Roques, 5660); 3. ca 1180 «manifester de la colère contre quelqu'un, l'injurier» (MARIE DE FRANCE, Fables, 2, 18 ds T.-L.); d'où ca 1590 «exprimer le mécontentement, la contrariété que l'on éprouve contre quelqu'un ou quelque chose» (MONTAIGNE, Essais, éd. Villey-Saulnier, I, xx, p.96). Empr. au lat. chrét. maledicere «maudire» (en lat. class. «dire du mal»), de male «mal», adv. et de dicere «dire», v. ce mot; a éliminé l'a. fr. maleir «maudire», 1re moitié XIIe s. maleeit «maudit» (Psautier Cambridge, 36, 23) formé différemment à partir de maledicere. Fréq. abs. littér.:876. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 1614, b) 2000; XXe s.: a) 1030, b) 655.
DÉR. 1. Maudissement, subst. masc. Exécration. Maudissement de la guerre (GONCOURT, Journal, 1863, p.1282). — []. — 1res attest. ca 1515 mauldissement (FOSSETIER, Cron. Marg., ms. Brux. 10512, VIII, II, 24 ds GDF., s.v. maldissement), 1559 [éd.] maudissement (M. DE CASTELNAU, Façons et coust. dans anc. Gaull., f°100 r°, ibid.), attest. isolées, à nouv. au XIXe s. 1863 (GONCOURT, loc. cit.); du rad. du part. prés. de maudire, suff. -(e)ment1. 2. Maudisseur, -euse, adj. Qui maudit (cf. ce mot A 2 a). Alfred de Vigny maudisseur du chemin de fer (Arts et litt., 1935, p.64-2). — [], fém. [-ø:z]. — 1res attest. ca 1200 maldisor (Dialogue Gregoire, 140, 2 ds T.-L., s.v. maudisëor), ca 1515 mauldisseur (FOSSETIER, op. cit., I, f° 157 r° ds GDF., s.v. maldisseur), à nouv. au XIXe s. 1876 (SAND, Quest. arts et litt., p.314); du rad. maudiss- de maudire, suff. -eur2.
maudire [modiʀ] v. tr.
CONJUG. Je maudis, tu maudis, il maudit, nous maudissons, vous maudissez, ils maudissent; je maudissais, nous maudissions; je maudis, nous maudîmes; je maudirai, nous maudirons; je maudirais, nous maudirions; maudis, maudissons, maudissez; que je maudisse; maudissant; maudit, ite.
ÉTYM. V. 1175; maldire, 1080, Chanson de Roland, « dire du mal de »; du lat. maledicere « dire du mal de » de male et dicere.
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1 Vouer (qqn) au malheur; appeler sur (qqn) la malédiction, la colère divine. ⇒ Détester (vx). || Bénissez ceux qui vous maudissent (→ Haïr, cit. 1). || Le clergé catholique maudissait jadis les protestants. ⇒ Anathématiser (→ Fonction, cit. 7).
1 Qui maudit son père et sa mère verra s'éteindre sa lampe au cœur des ténèbres.
Bible (Jérusalem), Proverbes de Salomon, 20, 20.
2 Sérapion lui dit : — Si ton nom est Satan,
Démon, chien, réprouvé, je te maudis ! Va-t'en !
Leconte de Lisle, Poèmes barbares, « Le corbeau ».
3 Lorsque, huit mois plus tard, enceinte, elle vint au lit de mort de sa mère, celle-ci la déshérita et la maudit (…)
Zola, le Rêve, I.
♦ Maudire Dieu. ⇒ Blasphémer. || Damnés qui grinceront des dents en maudissant Dieu (→ Fin, cit. 8).
♦ Par exagér. Vouer à l'exécration (une personne, une chose que l'on hait, méprise…). ⇒ Abominer, exécrer, haïr, injurier; diable (envoyer au); emporter (s'), indigner (s'), pester (contre). || Mendiants qui maudissent les passants s'ils n'en reçoivent point d'aumône (cit. 8). || Maudire le jeu et les joueurs (→ Carte, cit. 5), un ennemi, la guerre (cit. 15). || Je maudis cette fichue idée que j'ai eue (→ Ficher, cit. 16).
4 Pestant fort contre vous dans ce fâcheux martyre,
Et maudissant vingt fois l'ordre dont vous parlez.
Molière, Amphitryon, II, 1.
5 Que je maudis mon incroyable bêtise, qui m'a si souvent donné l'air vil et coupable, quand je n'étais que sot et embarrassé !
Rousseau, les Confessions, X.
6 Puis elle se mettait à crier, horriblement. Elle maudissait le poison, l'invectivait, le suppliait de se hâter (…)
Flaubert, Mme Bovary, III, VIII.
7 Il s'arrêta pour avaler la moitié de son grog, maudit le soldat Brommit qui l'avait fait trop léger (…)
A. Maurois, les Discours du Dr O'Grady, IV.
2 (En parlant de Dieu). Vouer à la damnation éternelle. ⇒ Condamner, réprouver. || « Caïn a été maudit de Dieu » (Académie), par Dieu.
8 (…) la simplicité de l'Esprit de Dieu, qui maudit ceux qui sont doubles de cœur, et qui se préparent deux voies (…)
Pascal, les Provinciales, XIII.
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maudit, ite p. p. adj.
ÉTYM. (1080, maldit).
1 Qui est rejeté par Dieu ou condamné, repoussé par les hommes, la société. ⇒ Réprouvé (→ Féroce, cit. 4). || La guerre (cit. 7) est maudite de Dieu et des hommes. — Les poètes maudits (1885), essai de Verlaine. — Vx. || L'amour maudit, contre nature. — Par métonymie. || Lépreux (cit. 2) qui traîne sa vie maudite (⇒ Infortuné), porte le costume maudit.
9 Alors il (le Fils de l'homme) dira encore à ceux de gauche : Allez, loin de moi, maudits, dans le feu éternel qui a été préparé pour le Diable et ses anges.
Bible (Jérusalem), Évangile selon saint Matthieu, 26, 41.
10 (…) j'ai été chassé, traqué, poursuivi, persécuté, noirci, raillé, conspué, maudit, proscrit. Depuis bien des années déjà, avec mes cheveux blancs, je sens que beaucoup de gens se croient sur moi le droit de mépris; j'ai pour la pauvre foule ignorante visage de damné (…)
Hugo, les Misérables, I, I, X.
11 (…) elle était comme ces poètes qui savent que la vraie poésie est chose « maudite », mais qui, malgré leur certitude, souffrent parfois de ne pas obtenir les suffrages qu'ils méprisent.
R. Radiguet, le Diable au corps, p. 107.
♦ Spécialt. Littér. (En manière d'imprécation et souvent par hyperb.). || Maudit qui brise (cit. 13) une femme… || Que maudit soit le jour où… (→ Grigou, cit. 1).
12 Maudite soit d'abord la haute opinion dont l'esprit s'enivre lui-même ! Maudite soit la splendeur des vaines apparences qui assiègent nos sens ! Maudit soit ce qui nous séduit dans nos rêves, illusions de gloire et d'immortalité ! Maudits soient tous les objets dont la possession nous flatte, femme ou enfant, valet ou charrue ! Maudit soit Mammon, quand, par l'appât de ses trésors, il nous pousse à des entreprises audacieuses, ou quand, par des jouissances oisives, il nous entoure de voluptueux coussins ! Maudite soit toute exaltation de l'amour ! Maudite soit l'espérance ! Maudite la foi, et maudite, avant tout, la patience !
Nerval, Trad. Goethe, Faust, I, p. 69.
13 Oh ! sois maudit, maudit, maudit, et sois maudit,
Ratbert, empereur, roi, césar, escroc, bandit !
Ô grand vainqueur d'enfants de cinq ans ! maudits soient
Les pas que font tes pieds, les jours que tes yeux voient (…)
Hugo, la Légende des siècles, XVIII, Confessions du marquis Fabrice, XIV.
2 Par exagér. (Avant le nom). Dont on a sujet de se plaindre. ⇒ Détestable, exécrable, haïssable; et fam. damné, fichu, sacré, sale, satané. || Maudit espion (cit. 1). || Maudit animal (→ Galeux, cit. 4; jambe, cit. 28). || Maudite cohue (→ Grommeler, cit. 1), engeance (→ Gâter, cit. 1). || Maudit moment à passer. ⇒ Désagréable, mauvais (→ Dehors, cit. 3). || Cette maudite histoire le tracasse beaucoup. ⇒ Malheureux. — REM. En ce sens atténué, maudit se place presque toujours avant le substantif (→ par exception Crainte, cit. 2, La Fontaine).
14 (La vertu) dans ce maudit siècle est toujours poursuivie.
Molière, l'Étourdi, III, 4.
15 Sans mon maudit amour pour les arts qui me rend trop difficile sur le beau dans tous les genres (…)
Stendhal, Journal, p. 418.
♦ Vx. (En manière d'apostrophe). || Te tairas-tu, maudit ?
16 Je ne sais qui me tient, maudite, que je ne vous fende la tête (…)
Molière, le Bourgeois gentilhomme, IV, 2.
REM. Cet emploi reste très vivant au Québec, où le mot a des emplois familiers. Comme adj., maudit s'emploie traditionnellement dans l'expression : maudits Français.
3 N. Vx. || Les maudits : les damnés (→ Grandir, cit. 1 et ci-dessus cit. 9). || Le Maudit : le démon.
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CONTR. Adorer, bénir. — Béni, bienheureux.
DÉR. Maudissable, maudissement, maudisseur, maudisson.
Encyclopédie Universelle. 2012.