médiocrité [ medjɔkrite ] n. f.
• 1314; lat. mediocritas
♦ État de ce qui est médiocre; chose médiocre.
1 ♦ Vx Position, situation moyenne; modération, juste milieu. « Cette médiocrité tempérée en laquelle la vertu consiste » (Bossuet).
2 ♦ (XVIe) Mod. Insuffisance de qualité, de valeur, de mérite. La médiocrité des résultats. Médiocrité d'une œuvre. ⇒ faiblesse, platitude. « ils parlèrent de la médiocrité provinciale, des existences qu'elle étouffait » (Flaubert). Vivre dans la médiocrité. Refuser la médiocrité.
3 ♦ Personne médiocre. « L'Institut, livré aux médiocrités » (Hugo).
⊗ CONTR. Excellence, grandeur, importance; génie.
● médiocrité nom féminin (latin mediocritas, -atis) Insuffisance dans la qualité, la valeur de quelqu'un, de quelque chose : Un travail qui ne souffre pas la médiocrité. Insuffisance dans la quantité de quelque chose : La médiocrité de ses ressources. Personne médiocre. ● médiocrité (citations) nom féminin (latin mediocritas, -atis) Abel Bonnard Poitiers 1883-Madrid 1968 Académie française, 1932 La richesse illumine la médiocrité. L'Argent Hachette René Tardiveau, dit René Boylesve La Haye-Descartes 1867-Paris 1926 Académie française, 1918 Il faut savoir faire la part du médiocre. Feuilles tombées Schiffrin Sébastien Roch Nicolas, dit Nicolas de Chamfort près de Clermont-Ferrand 1740-Paris 1794 Académie française, 1781 Ce qui fait le succès de quantité d'ouvrages est le rapport qui se trouve entre la médiocrité des idées de l'auteur et la médiocrité des idées du public. Maximes et pensées François de Salignac de La Mothe-Fénelon château de Fénelon, Périgord, 1651-Cambrai 1715 Presque tous les hommes sont médiocres et superficiels pour le mal comme pour le bien. Lettre à l'Académie André Gide Paris 1869-Paris 1951 De combien d'hommes ne peut-on penser que c'est par médiocrité qu'ils sont sages ? Journal Gallimard Jean de La Bruyère Paris 1645-Versailles 1696 Il y a dans quelques hommes une certaine médiocrité d'esprit qui contribue à les rendre sages. Les Caractères, De l'homme Jean de La Bruyère Paris 1645-Versailles 1696 Il y a un goût dans la pure amitié où ne peuvent atteindre ceux qui sont nés médiocres. Les Caractères, Du cœur Roger Martin du Gard Neuilly-sur-Seine, 1881-Sérigny, Orne, 1958 C'est toujours l'inlassable médiocrité de la femme qui l'emporte. Un taciturne Gallimard François Mauriac Bordeaux 1885-Paris 1970 Académie française, 1933 Le christianisme ne souffre pas les cœurs médiocres. L'entre-deux ne vaut rien. Dieu et Mammon Le Capitole Charles de Secondat, baron de La Brède et de Montesquieu château de La Brède, près de Bordeaux, 1689-Paris 1755 La médiocrité est un garde-fou. Mes pensées Gérard Labrunie, dit Gérard de Nerval Paris 1808-Paris 1855 Il est dangereux de passer trop tôt pour un écrivain de bon sens : c'est le privilège des médiocrités mûres. La Bohème galante Ernest Renan Tréguier 1823-Paris 1892 N'est pas médiocre qui veut. La Réforme intellectuelle et morale de la France, I Lévy Jean-Paul Sartre Paris 1905-Paris 1980 La médiocrité ne s'imite pas. Nekrassov Gallimard Luc de Clapiers, marquis de Vauvenargues Aix-en-Provence 1715-Paris 1747 C'est un grand signe de médiocrité de louer toujours modérément. Réflexions et Maximes Luc de Clapiers, marquis de Vauvenargues Aix-en-Provence 1715-Paris 1747 La modération des faibles est médiocrité. Réflexions et Maximes ● médiocrité (synonymes) nom féminin (latin mediocritas, -atis) Insuffisance dans la qualité, la valeur de quelqu'un, de quelque chose
Synonymes :
- banalité
Contraires :
Insuffisance dans la quantité de quelque chose
Synonymes :
- modicité
- pauvreté
Contraires :
Personne médiocre.
Contraires :
- génie
médiocrité
n. f.
d1./d état, caractère de ce qui est médiocre. La médiocrité de sa fortune.
d2./d Personne médiocre. Nous sommes entourés de médiocrités.
⇒MÉDIOCRITÉ, subst. fém.
A. —Vx ou littér. État de ce qui se situe dans la moyenne:
• 1. ... l'aptitude au bonheur n'est pas égale pour tous les hommes. Elle est plus forte, autant qu'il me semble, chez les médiocres que chez les hommes supérieurs et chez les imbéciles. Il faut souhaiter aux êtres qu'on aime la médiocrité de la condition, toutes les médiocrités.
A. FRANCE, Vie fleur, 1922, p.543.
— En partic. Condition, position sociale moyenne, état de fortune moyen. Je suis peut-être au nombre des hommes capables d'user bien de ce qu'on appelle une grande fortune, ou même d'une médiocrité facile (SENANCOUR, Obermann, t.2, 1840, p.97). Il plaida de temps à autre, gagnant maigrement sa vie, sans paraître s'élever au-dessus d'une honnête médiocrité (ZOLA, Fortune Rougon, 1871, p.62):
• 2. ... une grande armoire en noyer, le carreau bien frotté, bien reluisant de propreté, tout cela sans un grain de poussière, mais plein de tons froids, (...) un papier jadis bleuâtre et passé au ton de lin (...). Le baron embrassa tout d'un coup d'œil, vit la signature de la médiocrité dans chaque chose, depuis le poële en fonte jusqu'aux ustensiles de ménage, et il fut pris d'une nausée en se disant à lui-même: — Voilà donc la vertu!
BALZAC, Cous. Bette, 1846, p.88.
B. —État de celui ou de ce qui se situe en-dessous de la moyenne.
1. Insuffisance d'une chose
a) quant à la quantité. Médiocrité du revenu. L'incurie du gouvernement sur l'exportation immodérée des grains, et la médiocrité de la dernière récolte, menaçaient d'une disette prochaine (MARAT, Pamphlets, Dénonc. Necker, 1790, p.84). Ce qui fait la mauvaise compagnie n'est nullement la médiocrité de la fortune, mais (...) la vulgarité personnelle (AMIEL, Journal, 1866, p.191).
b) quant à la qualité, à la valeur, à l'intensité. Médiocrité des idées, des propos, d'un sentiment; médiocrité de caractère, de coeur; médiocrité de l'énergie; médiocrité du bonheur; médiocrité d'une existence, d'une vie; oeuvre d'une grande médiocrité. Heureux qui bat la campagne par l'effet d'une passion! et mille fois heureux qui déraisonne par amour, dans ce siècle où l'on ne déraisonne que par impuissance et médiocrité d'esprit! (STENDHAL, L. Leuwen, t.2, 1836, p.333). S'il est une chose évidente pour un Français ayant habité le Danemark c'est l'impossibilité absolue de surmonter la médiocrité d'esprit et la médiocrité d'âme du monde scandinave (BLOY, Journal, 1899, p.298). Ce qui abat, ce qui accable, ce qui détruit irrémédiablement l'âme, c'est la médiocrité de la douleur et de la joie (ROLLAND, J.-Chr., Foire, 1908, p.648).
— En partic., absol. Manque d'élévation, de talents, d'aptitudes. Synon. platitude, pauvreté. J'éprouve depuis hier au soir un sentiment amer de médiocrité, d'impuissance, presque de nullité intellectuelle. Il me semble que je suis au-dessous de tout et au niveau de rien (AMIEL, Journal, 1866, p.164). Il sent la médiocrité l'envahir; mais qu'y faire? Il ne lutte plus; se sacrifie, replie au fond de lui ses ambitions, ses rêves, ses espoirs (GIDE, Journal, 1927, p.850). Je sais combien la formation du séminaire nivelle les caractères, et souvent, hélas! jusqu'à les confondre dans une commune médiocrité (BERNANOS, Journal curé camp., 1936, p.1173).
— P. méton. Chose médiocre. Il dit son pessimisme, les médiocrités et les avortements de l'existence (ZOLA, Bonh. dames, 1883, p.451). Les vices, les mensonges, les médiocrités surtout de la société actuelle (...) sont dénoncés avec des exemples à l'appui, tirés des événements publics, de la littérature, des procès (BOURGET, Actes suivent, 1926, p.66).
2. Insuffisance d'une pers. quant à la valeur, aux capacités, aux résultats; manque d'élévation morale ou intellectuelle. L'Américain a remplacé les opérations intellectuelles par les opérations positives; ne lui imputez point à infériorité sa médiocrité dans les arts, car ce n'est pas de ce côté qu'il a porté son attention (CHATEAUBR., Mém., t.1, 1848, p.345). Ils prenaient plaisir à souligner les défaillances qu'ils voyaient autour d'eux, la médiocrité d'écrivains et d'hommes d'État en vue, l'encrassement du peuple dans sa routine (ARLAND, Ordre, 1929, p.132):
• 3. ... je voulais devenir quelqu'un, faire quelque chose (...); il me fallait donc m'arracher aux ornières, aux routines: mais je croyais possible de dépasser la médiocrité bourgeoise sans quitter la bourgeoisie.
BEAUVOIR, Mém. j. fille, 1958, p.188.
— P. méton. Personne médiocre; ensemble de personnes médiocres. Nous avons reçu de notre académie de Rome des tableaux et de la sculpture qui n'ont eu guère à lutter ensemble que d'insignifiance et de pauvreté. On se lassera peut-être quelque jour de tant dépenser pour n'avoir ainsi en Italie de pensionnaires que les médiocrités (MUSSET ds R. des Deux Mondes, 1832, p.779). Cette vie de bohème, mal connue des puritains du monde, décriée par les puritains de l'art, insultée par toutes les médiocrités craintives et jalouses (MURGER, Scènes vie boh., 1851, 13):
• 4. Il est des jours où je me demande si ces monstrueux succès, les Thiers et les Scribe, cela n'est pas fait avec la conviction intime d'un chacun, de moyenne intelligence, qui les lit ou les écoute, que s'il se mettait à faire une pièce ou à écrire l'histoire, il ferait la pièce de M. Scribe, il écrirait l'histoire comme M. Thiers. Ne pas humilier le public, voilà le grand secret de ces médiocrités fortunées et comblées.
GONCOURT, Journal, 1860, p.724.
Prononc. et Orth.: []. Ac. 1694 et 1718: me-;1740: me- en vedette, mé- dans l'art.: dep. 1762: mé-. Étymol. et Hist. 1. 1314 mediocrité de dureté «état moyen» (Chirurgie d'Henri de Mondeville, éd. A. Bos, 65); 2. 1669 «insuffisance de talent (d'une personne)» (J. CHAPELAIN, Correspondance ds HUNTER); 1674 «état d'insuffisance dans la qualité ou la quantité d'une chose» (BOILEAU, Art poétique, éd. C. H. Boudhors, chant IV, vers 114); 3. 1762 «personnes médiocres» (CHEVRIER, L'Observateur des spectacles, n°4 (I, 169) ds Fr. mod. t.37, p.128). Empr. au lat. mediocritas «état moyen, juste milieu», «infériorité, médiocrité, insignifiance». Fréq. abs. littér.: 848. Fréq. rel. littér.: XIXE S.: A) 1240, B) 865; XXE S.: A) 1781, B) 1012. Bbg. HENSCHEL (B.). Qq. dat. nouv. du 18e s. Fr. mod. 1969, t.37, p.128.
médiocrité [medjɔkʀite] n. f.
ÉTYM. 1314; lat. mediocritas, de mediocris. → Médiocre.
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♦ État de ce qui est médiocre; chose médiocre.
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I (La médiocrité).
1 a Vx. Position, situation moyenne; modération, juste milieu. || « Cette médiocrité tempérée en laquelle la vertu consiste » (Bossuet, Sermon pour la Visitation, 3). || « Il faut garder la médiocrité en toutes choses » (Fénelon, Solon). || Médiocrité dorée (lat. aurea mediocritas, Horace), heureuse. || Vivre dans la médiocrité. ⇒ Modestie, obscurité.
1 L'extrême esprit est accusé de folie, comme l'extrême défaut; rien que la médiocrité n'est bon.
Pascal, Pensées, VI, 378.
2 Puis-je n'être, ô Dieu, des grands ni des petits !
La médiocrité fait la personne heureuse.
Ronsard, Pièces retranchées, « Livret de folastries », Traductions.
3 Retirez-vous, trésors, fuyez; et toi, déesse,
Mère du bon esprit, compagne du repos,
Ô Médiocrité, reviens vite.
La Fontaine, Fables, VII, 6.
4 Si l'on pouvait dans la médiocrité n'être ni glorieux, ni timide, ni envieux, ni flatteur, ni préoccupé des besoins et des soins de son état (…) Mais qui peut soutenir son esprit et son cœur au-dessus de sa condition ? qui peut se sauver des faiblesses que la médiocrité traîne avec soi ?
Vauvenargues, Réflexions et Maximes, 8.
2 (XVIe). Mod. Insuffisance quant à la qualité, à la valeur, au mérite… ⇒ Imperfection, mesquinerie, pauvreté, petitesse. || Médiocrité d'une existence. || Médiocrité d'un sentiment (→ Accabler, cit. 15), du bonheur (→ 1. Goûter, cit. 8). || Médiocrité d'une œuvre. ⇒ Faiblesse, imperfection, platitude. || La médiocrité en art, en littérature… (→ 2. Critique, cit. 5). — Médiocrité de l'esprit (→ Conter, cit. 3). || La médiocrité d'un artiste. || Signe de médiocrité (→ Impraticable, cit. 3; louer, cit. 10). || Irritante (cit. 3) médiocrité.
5 Il y a de certaines choses dont la médiocrité est insupportable : la poésie, la musique, la peinture, le discours public.
La Bruyère, les Caractères, I, 7.
6 En ce genre comme en littérature, le succès, le grand succès est assuré à la médiocrité, l'heureuse médiocrité qui met le spectateur et l'artiste commun de niveau.
7 Waterloo m'est plus odieux que Crécy. Ce n'est pas seulement la victoire de l'Europe sur la France, c'est le triomphe complet, absolu, éclatant, incontestable, définitif, souverain de la médiocrité sur le génie.
Hugo, France et Belgique, « Belgique », XIII.
8 Alors ils parlèrent de la médiocrité provinciale, des existences qu'elle étouffait, des illusions qui s'y perdaient.
Flaubert, Mme Bovary, II, VIII.
3 Insuffisance quantitative. || La médiocrité de leurs moyens.
9 (…) un de ces petits rentiers dont toutes les dépenses sont si nettement déterminées par la médiocrité du revenu, qu'une vitre cassée, un habit déchiré, ou la peste philanthropique d'une quête, suppriment leurs menus plaisirs pendant un mois.
Balzac, le Cousin Pons, Pl., t. VI, p. 528.
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II (Une, des médiocrités).
1 (1762). Personne médiocre (→ Humilier, cit. 25). || Association de médiocrités (→ Coterie, cit. 2). — || « L'Institut, livré aux médiocrités » (→ Académie, cit. 6, Hugo).
10 Aujourd'hui, comme autrefois, les Médiocrités jalouses laissent mourir de misère les penseurs, les grands médecins politiques qui ont étudié les plaies de la France, et qui s'opposent à l'esprit de leur siècle.
Balzac, le Curé de village, Pl., t. VIII, p. 717.
2 Rare. Chose, œuvre médiocre (→ 2. Entonner, cit. 6).
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CONTR. Excellence, grandeur, importance. — Génie.
Encyclopédie Universelle. 2012.