rabaisser [ rabese ] v. tr. <conjug. : 1>
1 ♦ Rare Baisser, rabattre. « Il lui rabaisse ses jupons » (Diderot). — Rabaisser le caquet à qqn.
2 ♦ Fig. Ramener à un état ou à un degré inférieur. ⇒ abaisser, ravaler. « Leur manque rabaisse au second rang une œuvre de grand homme » (Taine). Rabaisser les prétentions, les mérites de qqn.
♢ Estimer ou mettre très au-dessous de la valeur réelle. ⇒ déprécier; dénigrer, mépriser. « L'homme n'est pas si simple qu'il suffise de le rabaisser pour le connaître » (Valéry). Chercher à rabaisser qqn devant des tiers. ⇒ humilier. — Pronom. « Se rabaisser en parlant humblement de soi » (Martin du Gard). ⇒ s'humilier.
⊗ CONTR. Relever. Exalter, honorer.
● rabaisser verbe transitif (de abaisser) Littéraire. Faire revenir à sa position basse ce qui a été relevé : Elle rabaisse sa voilette. Abaisser de tant le prix de quelque chose. Littéraire. Amener quelqu'un, quelque chose à un niveau, à un rang inférieurs : Des instincts qui rabaissent l'homme au niveau de la bête. Faire régresser quelqu'un ou quelque chose dans l'échelle des valeurs ; ramener quelqu'un à un niveau moral inférieur : Cet acte rabaisse son mérite à nos yeux. Estimer quelqu'un, quelque chose au-dessous de leur valeur : Rabaisser le mérite d'autrui. ● rabaisser (citations) verbe transitif (de abaisser) Hérodote Halicarnasse vers 484-Thourioi vers 420 avant J.-C. La divinité aime rabaisser tout ce qui s'élève. Histoires, VII, 10 (traduction Legrand) ● rabaisser (expressions) verbe transitif (de abaisser) Littéraire. Rabaisser l'orgueil, les prétentions de quelqu'un, les diminuer, les modérer. ● rabaisser (synonymes) verbe transitif (de abaisser) Littéraire. Faire revenir à sa position basse ce qui a été...
Synonymes :
- baisser
Contraires :
- monter
- remonter
Littéraire. Amener quelqu'un, quelque chose à un niveau, à un rang inférieurs
Synonymes :
- abaisser
- dégrader
- humilier
- ravaler
Contraires :
- élever
- ennoblir
- grandir
- idéaliser
- sublimer
Estimer quelqu'un, quelque chose au-dessous de leur valeur
Synonymes :
- déconsidérer
- dénigrer
- méjuger
- mépriser
- mésestimer
Contraires :
- apprécier
- porter aux nues
- priser
Littéraire. Rabaisser l'orgueil, les prétentions de quelqu'un
Synonymes :
- rabattre
- réduire
Contraires :
- enfler
- exalter
rabaisser
v.
rI./r v. tr.
d1./d Mettre plus bas, placer au-dessous (surtout au fig.). Rabaisser l'orgueil de qqn.
d2./d Diminuer, déprécier. Rabaisser le taux de l'escompte.
rII./r v. Pron. S'humilier, s'avilir.
⇒RABAISSER, verbe trans.
I. A. — Placer quelque chose plus bas, à un niveau inférieur. Ce tableau est trop haut, il faut un peu le rabaisser (Ac.). Rabaissant ses lunettes et rendant les papiers au préfet (MÉRIMÉE, Colomba, 1840, p. 114). Il est sur le balcon, il rabaisse son feutre sur ses yeux, (...) puis se penche et regarde au dehors (ROSTAND, Cyrano, 1898, III, 10, p. 140):
• 1. Quand elle renversait un peu la tête, le visage d'Alban se trouvait posé sur ses cheveux, et il aspirait leur odeur, et, quand elle rabaissait la tête, la bouche avait fait parmi les cheveux un petit épi.
MONTHERL., Bestiaires, 1926, p. 474.
♦ Empl. pronom. Quand les dents tombent, l'angle postérieur redevient plus obtus, parce qu'il n'est plus repoussé en arrière par les dents, et le condyle se rabaisse par rapport à l'apophyse (CUVIER, Anat. comp., t. 3, 1805, p. 134).
— Rabattre. Un vieux monsieur, qui rabaissa son strapontin en la suivant des yeux (CHARDONNE, Épithal., 1921, p. 186).
B. — Diminuer, réduire la hauteur, les dimensions, l'intensité de quelque chose. Les gaz recueillis sont stockés dans des gazomètres d'où ils passent dans un compresseur à deux étages l'amenant à une pression de 20 kg. Un réfrigérant rabaisse leur température (CHARTROU, Pétroles natur. et artif., 1931, p. 101).
— Spécialement
♦ AGRIC. ,,Diminuer la hauteur d'un arbre en coupant les branches supérieures`` (Forest. 1946).
♦ RELIURE, vx. ,,Couper avec la pointe le carton à la hauteur convenable pour que les châssis n'excèdent pas trop la tranche du livre`` (MAIRE, Manuel biblioth., 1896, p. 387).
II. — Au fig.
A. — Réduire à une valeur moindre, ramener à un degré moindre. Synon. amoindrir, minorer. Rabaisser les prétentions, l'orgueil de qqn; rabaisser les mérites, les talents de qqn. C'est rabaisser la science que de la tirer du grand milieu de l'humanité pour en faire une vanité de cour ou de salon (RENAN, Avenir sc., 1890, p. 122). On dira que nous rabaissons les problèmes par notre esprit terre à terre (Colloque géogr. appl., 1962, p. 159).
— Rabaisser à. Le critique qui s'acharne à rabaisser à sa taille les grands hommes et les grandes pensées (ROLLAND, J.-Chr., Adolesc., 1905, p. 343). Rabaisser à des proportions humaines les caprices dont je lui faisais jadis des titres de souveraineté (J. BOUSQUET, Trad. du sil., 1936, p. 196).
♦ Rabaisser au niveau, au rang de. Chaque petit esprit tend à tout rabaisser à son niveau, à tout comprendre dans sa petite capacité (MAINE DE BIRAN, Journal, 1820, p. 280). C'est rabaisser l'hymen au niveau d'un plaisir, Que d'en faire le but d'un amoureux désir (PONSARD, Honn. et argent, 1853, III, 1, p. 59).
— Vieilli. Rabaisser le caquet de qqn, à qqn. Synon. de rabattre le caquet.
— Empl. abs. Où siège-t-elle, cette prudence anonyme qui renonce et choisit, qui élève et rabaisse, qui de tant d'ouvrières pourrait faire tant de reines et qui de tant de mères fait un peuple de vierges? (MAETERL., Vie abeilles, 1901, p. 85).
B. — Estimer quelqu'un, quelque chose au-dessous de sa valeur, déprécier. Rabaisser les grands, les puissants. Elmire rabaissait malignement leur famille (POURRAT, Gaspard, 1925, p. 94). L'historien peut toujours exalter ou rabaisser son héros (MARROU, Connaiss. hist., 1954, p. 189):
• 2. On accuse l'Évangile de rabaisser la nature humaine: déclarer l'homme perdu et incapable de se relever, lui offrir comme unique refuge un salut qui n'est pas son œuvre, dont il doit s'avouer indigne et qu'il doit recevoir humblement comme une grâce de l'amour divin, n'est-ce point, a-t-on dit, porter atteinte à son indépendance et à sa grandeur morale?
MONOD, Sermons, 1911, p. 292.
— Empl. pronom. réfl. Il rabaisse la femme, mais ne le fait que parce que d'abord il s'est rabaissé soi-même (MONTHERL., J. filles, 1936, p. 944).
REM. 1. Rabaissant, -ante, part. prés. en empl. adj. Elle me donnait des ordres sur un ton cassant... rabaissant (MIRBEAU, Journal femme ch., 1900, p. 247). 2. Rabaisseur, -euse, adj. Qui rabaisse, déprécie. Mon caractère moqueur, rabaisseur, même de mes propres sentiments (LÉAUTAUD, Journal littér., 1, 1905, p. 204).
Prononc. et Orth.:[], [--], (il) rabaisse [-]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1175 « amener quelque chose à un degré moindre » (BENOÎT DE STE-MAURE, Chronique des Ducs de Normandie, éd. C. Fahlin, 41280); ca 1200 verbe pronom. « se déprécier » (Moralités sur Job, 308, 42 ds T.-L.); 1866 empl. abs. (AMIEL, Journal, p. 430: La science ne rabaisse jamais et grandit toujours en charme et en douceur); 2. a) déb. XIIIe s. « placer quelque chose à un niveau moins élevé que celui où il était » (2e Continuation de Perceval, éd. W. Roach vol. IV, 30579); 1690 empl. abs. (FUR.: la riviere rabaisse a veuë d'œil); 1805 verbe pronom. (COTTIN, Mathilde, t. 2, p. 280: La voûte de la grotte se rabaisse à tel point, qu'il faut pour ainsi dire, ramper sur la terre humide); b) 1688 terme de man. verbe pronom. « s'abaisser » (RICH. t. 2); c) 1718 rabaisser la voix (Ac.); 3. 1283 « amener à une valeur moindre » (PHILIPPE DE BEAUMANOIR, Coutumes de Beauvaisis, éd. Am. Salmon, 774); 4. a) 1752 terme de reliure « raccourcir » (Trév. Suppl.); b) 1875 « raccourcir un arbre » (Lar. 19e). Dér. de abaisser; préf. re-. Fréq. abs. littér.:265. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 407, b) 325; XXe s.: a) 324, b) 407.
rabaisser [ʀabese] v. tr.
ÉTYM. V. 1160, rabaissier, fig.; de re-, et abaisser.
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1 (V. 1175). Rare. Baisser davantage, mettre à un niveau moins élevé. ⇒ Abaisser, baisser. || « Ce tableau est trop haut, il faut un peu le rabaisser » (Académie).
♦ Baisser, rabattre. || Rabaisser ses jupons (→ Prendre, cit. 35).
1 Elles rabaissent toutes deux leurs coiffes.
Corneille, la Suite du Menteur, III, 3, variante.
2 Ici l'attention de Boissaux redoubla; il prit l'air morne et la bouche de brochet, c'est-à-dire, à coins rabaissés, du marchand qui perd.
Stendhal, Romans et nouvelles, « Féder », VI.
♦ Techn. Couper à la bonne dimension. || Rabaisser les cartons (de la couverture d'un livre).
2 (V. 1160). Rendre moins élevé, moins fort. || Rabaisser les exigences, les prétentions, l'orgueil de qqn (→ Humilier, cit. 7). ⇒ Abattre, rabattre. — ☑ Loc. Rabaisser le ton (→ Haut, cit. 112), fam., le caquet (cit. 3), rare, la chanterelle, la crête de qqn.
3 Je lui promis d'employer toute mon industrie et toute l'autorité qu'il lui plaisait me donner pour ruiner le Parti Huguenot, rabaisser l'orgueil des grands, réduire tous les sujets en leur devoir, et relever son nom dans les Nations étrangères, au point où il devait être.
Richelieu, Testament politique, I.
3 (1667). Ramener à un état ou à un degré inférieur. ⇒ Abaisser, amoindrir, diminuer, réduire, restreindre. || Rabaisser l'homme au niveau de la brute. ⇒ Ravaler; dégrader (→ Exalter, cit. 12.1).
4 Vous voyez, par cette double expérience, l'importance des caractères profonds et durables, puisque leur manque rabaisse au second rang une œuvre de grand homme, et que leur présence élève l'œuvre d'un talent moindre au premier rang.
Taine, Philosophie de l'art, t. II, p. 263.
♦ Ramener à une valeur ou à un prix inférieur. || Rabaisser le taux de crédit.
5 Le tout (…) valant loyalement plus de quatre mille cinq cents livres, et rabaissé à la valeur de mille écus, par la discrétion du prêteur.
Molière, l'Avare, II, 1.
4 (XVIIe). Estimer ou mettre (qqn, qqch.) très au-dessous de sa valeur réelle. ⇒ Déprécier; dénigrer. || Envieux qui cherchent à rabaisser les mérites d'autrui. ⇒ Détracter, écraser. || « L'homme n'est pas si simple qu'il suffise de le rabaisser pour le connaître ». ⇒ Avilir, humilier (→ 3. Mal, cit. 35, Valéry). || Des générations méconnues et rabaissées (→ Honorer, cit. 8). || Rabaisser qqn en l'insultant (cit. 3). → Mettre plus bas (1. Bas) que terre.
6 Détestant ses rigueurs, rabaissant ses attraits,
Je défiais ses yeux de me troubler jamais.
Racine, Andromaque, I, 1 (1667).
7 (…) il s'occupait avec toute la méchanceté d'un ennemi à se les exagérer (ses fautes), et avec tout l'esprit d'un jaloux à rabaisser le prix de ses vertus par un examen rigoureux des motifs qui l'avaient peut-être déterminé à son insu.
Diderot, Jacques le fataliste, Pl., p. 544.
8 Ce que j'en dis n'est point pour rabaisser la majesté des institutions divines et humaines : vous m'entendez bien.
France, Pierre Nozière, p. 159.
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se rabaisser v. pron.
ÉTYM. (Fin XIIe).
♦ (Réfléchi). || « Plus nous nous rabaissons extérieurement… » (cit. Racine). || Se rabaisser en parlant humblement de soi (→ Feinte, cit. 7). ⇒ Humilier (s').
9 Différent génie, différent goût : ce n'est pas toujours par jalousie que réciproquement on se rabaisse.
Vauvenargues, Réflexions et maximes, 208.
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CONTR. Exhausser, rehausser, relever. — Diviniser, enorgueillir, exalter, glorifier, honorer, idéaliser, vanter.
DÉR. Rabais, rabaissant, rabaissement, rabaisseur.
Encyclopédie Universelle. 2012.