supposition [ sypozisjɔ̃ ] n. f.
• 1370; « soumission » dr. 1291; lat. suppositio, de supponere → supposer
I ♦ Action de supposer; ce qu'on suppose (I).
1 ♦ Littér. Hypothèse de l'esprit. « Un point géométrique est une supposition, une abstraction de l'esprit » (Voltaire). Dans cette supposition : en supposant...
♢ Ellipt, pop. UNE SUPPOSITION (QUE)... : supposons (que)... « une supposition qu'on lui aurait donné une chiquenaude, à coup sûr, il ne se serait pas relevé » (Zola).
2 ♦ Cour. Conjecture de l'esprit qui suppose (I, 2o) sans pouvoir affirmer. Ce n'est pas une supposition gratuite, une simple supposition. « Une supposition très vraisemblable me traversa l'esprit; celle qu'un de mes amis était venu pour me voir » (Maupassant). « la jalousie, qui passe son temps à faire des petites suppositions dans le faux, a peu d'imagination quand il s'agit de découvrir le vrai » (Proust).
II ♦ (déb. XVIIe) Vx Action de supposer (III); substitution frauduleuse (du faux à l'authentique). ⇒ fraude. Supposition de testament. — Mod. Dr. Supposition d'enfant ou de part : attribution à une femme d'un enfant dont elle n'est pas accouchée. Supposition de nom. ⇒ usurpation.
● supposition nom féminin (latin suppositio) Action de supposer, d'admettre quelque chose par hypothèse ; l'hypothèse, la conjecture elle-même : Faire une supposition. ● supposition (difficultés) nom féminin (latin suppositio) Emploi Les tournures une supposition que, supposition que appartiennent à l'expression orale relâchée. Recommandation Préférer supposons que ou à supposer que : supposons qu'il arrive ce soir. ● supposition (expressions) nom féminin (latin suppositio) Supposition d'enfant (ou de part), atteinte à l'état civil, infraction consistant à attribuer un enfant à une femme qui n'est pas sa mère. (Le nouveau Code pénal remplace cette infraction par celles de simulation ou de dissimulation. La femme qui reçoit l'enfant simule, la mère biologique dissimule sa grossesse à l'égard de l'état civil.) ● supposition (synonymes) nom féminin (latin suppositio) Action de supposer, d'admettre quelque chose par hypothèse ; l'hypothèse, la conjecture...
Synonymes :
- hypothèse
supposition
n. f.
d1./d Opinion reposant sur de simples probabilités. Supposition gratuite, non fondée.
d2./d DR Supposition d'enfant: attribution d'un enfant à une femme qui ne l'a pas mis au monde.
⇒SUPPOSITION, subst. fém.
A. — 1. Proposition que l'on considère comme vraie afin d'en tirer quelque conséquence ou déduction; hypothèse, fiction servant de base à un raisonnement, à une argumentation, à une démonstration. Faire une/des supposition(s); un point géométrique est une supposition. Il s'occupa des inscriptions phéniciennes et fit une supposition très ingénieuse, qui depuis a été confirmée (RENAN, Souv. enf., 1883, p. 275):
• J'admets la supposition folle d'un dieu hypothétique, et j'admets encore que les lois de l'univers puissent être injustes ou cruelles à notre égard sans qu'elles aient d'auteur intelligent; ce qui est cependant le comble de l'extravagance: qu'en résultera-t-il contre l'existence de Dieu? Rien du tout.
J. DE MAISTRE, Soirées St-Pétersb., t. 2, 1821, p. 125.
♦ Par supposition. Car s'il était vrai que les choses se passassent comme nous venons de l'établir par supposition, les hommes seraient absolument incapables de recevoir aucune éducation quelconque (CABANIS, Rapp. phys. et mor., t. 2, 1808, p. 143).
♦ Dans la supposition que. Il se présente une autre manière de nous réunir, toujours dans la supposition que je serai employé sur la frontière d'Espagne: vous pouvez vous rendre la première en Touraine, et moi m'y rendre d'ici (COURIER, Lettres Fr. et Ital., 1793, p. 648). Maintenant, dans la supposition que mon nom laisse quelque trace, je le devrai au « Génie du christianisme » (CHATEAUBR., Mém., t. 2, 1848, p. 52).
— P. ell., fam.
♦ Une supposition. Supposons ceci comme exemple, admettons cette éventualité. J'insistai. — Et si elle allait te dénoncer Madelon, une supposition, pour l'affaire de la mère Henrouille?... C'est toi-même qui me l'as dit, qu'elle en était bien capable... — Alors tant pis! qu'il a répondu. Elle fera comme elle voudra (CÉLINE, Voyage, 1932, p. 578).
♦ Une supposition que (+ subj., parfois ind. ou cond.). Supposons que. Une supposition que j'ai menti: l'histoire du passe-boules, (...) c'est une bonne histoire, une histoire crevante (BERNANOS, Imposture, 1927, p. 469). Tenez, une supposition que ce garçon ait eu l'idée d'écrire tous les jours une petite lettre à son père, un petit mot, pour dire: « Je me porte bien (...) » (PAGNOL, Fanny, 1932, I, 1er tabl., 9, p. 37).
2. Proposition non vérifiée, conjecture avancée à titre d'explication plausible. Supposition gratuite, possible; suppositions au sujet de qqn, de qqc.; suppositions injurieuses, désobligeantes; faire d'ingénieuses suppositions. Le curé, Bongrand et Savinien se perdaient en conjectures et en suppositions (BALZAC, U. Mirouët, 1841, p. 220). Un long mouvement avait agité la foule, qui sentait que l'enquête était finie, et qu'un besoin de commentaires tourmentait: tout de suite des suppositions circulèrent, chacun avait une histoire (ZOLA, Bête hum., 1890, p. 69).
3. GRAMM. Phrase, subordonnée de supposition. Il en est d'autres [phrases] qui, sans contenir cette conjonction [si], sont cependant des phrases de supposition (LE BIDOIS 1967,1591).
B. — DROIT
1. Vieilli
a) Allégation mensongère; production d'une pièce que l'on sait être fausse, substitution frauduleuse d'une pièce authentique. Supposition de testament; supposition d'un contrat, d'un titre. Une supposition de lettre est atroce, s'écria le chevalier. Aimez-vous votre neveu avec une affection assez vive pour que la fin puisse justifier les moyens? (STENDHAL, Armance, 1827, pp. 286-287).
b) Supposition de nom, de personne. ,,Action de mettre un nom, une personne à la place d'une autre`` (Ac. 1835-1935). Il avait rencontré, l'année précédente, le dit marquis aux eaux d'Ems, d'où il avait été chassé honteusement autant pour escroquerie que pour supposition de noms et qualités (SAND, Mlle Merquem, 1868, p. 178). Catherine Mique dénonce son oncle, comme ayant accusé son père de désertion, de supposition de personne, de bigamie (E. DE GONCOURT, Mais. artiste, t. 1, 1881, p. 281).
2. DR. PÉNAL. Supposition d'enfant/de part. ,,Infraction consistant à attribuer à une femme un enfant dont elle n'est pas accouchée, soit que la fraude émane de la femme elle-même, soit qu'elle émane d'un tiers, cela, même si l'enfant supposé ou la mère désignée est imaginaire`` (CAP. 1936).
REM. Suppositif, -ive, adj. a) Rare. Qui se rapporte à une supposition, qui tient de la supposition (Dict. XIXe et XXe s.). b) Gramm., vx. ) Mode suppositif ou, absol., suppositif, subst. masc. Mode conditionnel. L'idée d'hypothèse et de supposition, qui distingue de tous les autres le mode suppositif, s'accorde très-bien avec toutes les manières d'envisager les Temps; rien n'y répugne (Gramm. t. 2 1789, p. 516). ) Proposition suppositive. Proposition hypothétique. (Dict. XXe s.).
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) 1370-72 « proposition supposée comme vraie ou possible » (ORESME, Ethiques, éd. A. D. Menut, p. 274: par supposicion); b) 1690 (FUR.: Supposition, se dit aussi des fausses allegations et accusations (...) une calomnie et une pure supposicion); c) 1825 une supposition (en incise) (MÉRIMÉE, Théâtre C. Gazul, p. 324); 1837 une supposition que (BALZAC, C. Birotteau, p. 14); 2. 1562 dr. supposition de personne, de nom (J. PAPON, Recueil d'arrestz notables, livre XXII, p. 599). Dér. de supposer; suff. -ion; le lat. suppositio est att. à l'époque class. au sens de « mettre sous » et « action d'attribuer frauduleusement un enfant à une famille », tandis qu'en lat. médiév. on trouve suppositatio (dér. de suppositum, supin de supponere, v. supposer) au sens de « hypothèse » (XIIIe s.) et « hypostase » (1344, v. LATHAM). En a. fr. supposition est att. aux XIIIe-XIVe s. au sens de « soumission » terme de dr. (v. GDF.). Fréq. abs. littér.:929. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 2 063, b) 1 246; XXe s.: a) 805, b) 1 038. Bbg. QUEM. DDL t. 32.
supposition [sypozisjɔ̃] n. f.
ÉTYM. 1370; « soumission », t. de dr., 1291; lat. suppositio, de supponere. → Supposer.
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1 Littér. Hypothèse de l'esprit qui suppose (I., 1.) sans juger. || Un point (cit. 9 et 11) géométrique est une supposition. ⇒ Abstraction. || La chimère de ma supposition (→ Récrier, cit. 1). || Les plus extravagantes suppositions des sceptiques. ⇒ Position (→ Être, cit. 3, Descartes). — Par supposition : par hypothèse. ⇒ Censément. || Dans cette supposition : si on fait cette supposition.
1 Il me prend donc envie de vous le montrer par une étrange supposition. Je dirai donc quand Dieu ne nous soutiendrait pas par une providence particulière (…)
Pascal, Pensées, XIV, 956.
2 (…) une supposition : on me raconterait que monsieur (…) n'aime pas quelqu'un, je ne le croirais pas (…)
É. Estaunié, l'Ascension de M. Baslèvre, I, IV.
3 Le flair de Buteau l'avertissait que le père Fouan mourrait le premier : une supposition qu'on lui aurait donné une chiquenaude, à coup sûr, il ne se serait pas relevé.
Zola, la Terre, V, II.
♦ Gramm. ⇒ Hypothèse; et aussi condition. || Subordonnées de suppositions. ⇒ Hypothétique, suppositif. || Les diverses expressions grammaticales de la supposition. ⇒ Si.
4 (…) il en est d'autres (phrases) qui, sans contenir cette conjonction (si), sont cependant des phrases de supposition (…) Ce n'est point à un signe grammatical, à quelque chose de formel, que se reconnaît sûrement la phrase hypothétique, mais (…) à la relation idéologique qui unit ensemble les membres du système.
G. et R. Le Bidois, Syntaxe du franç. moderne, §1591.
2 Conjecture de l'esprit qui suppose (I., 2.) sans pouvoir affirmer. ⇒ Hypothèse. || Ce n'est pas une supposition précaire ou gratuite (cit. 4), une simple supposition. || Faire d'ingénieuses suppositions (→ Reconnaître, cit. 12). || Suppositions au sujet de qqn, de qqch., portant sur qqch. || Suppositions injurieuses, désobligeantes, charitables (→ Lazzi, cit. 2). || Préférer les explications (cit. 6) simples aux suppositions romanesques. || Les faits repoussent une semblable supposition (→ Équipement, cit. 1).
5 J'entrai (…) j'aperçus quelqu'un assis dans mon fauteuil, et qui se chauffait les pieds en me tournant le dos. Je n'eus pas peur, oh ! non, pas le moins du monde. Une supposition très vraisemblable me traversa l'esprit; celle qu'un de mes amis était venu pour me voir.
Maupassant, les Sœurs Rondoli, « Lui ? ».
6 Ç'avait été, dans le déchirement atroce de sa révélation à Balbec (…) la chose que dans mes pires suppositions je n'aurais jamais été assez audacieux pour imaginer (c'est étonnant comme la jalousie, qui passe son temps à faire des petites suppositions dans le faux, a peu d'imagination quand il s'agit de découvrir le vrai).
Proust, la Fugitive, Pl., t. III, p. 434, note.
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II (V. 1556). Vx. Action de supposer (III.); substitution frauduleuse (du faux à l'authentique), fausse attribution. ⇒ Fraude. || Supposition de testament. || Supposition de nom. ⇒ Usurpation. — Mod., dr. || Supposition d'enfant ou de part : attribution à une femme d'un enfant dont elle n'est pas accouchée.
7 Ce chapitre neuvième du Testament politique (de Richelieu) porte à chaque page les preuves les plus évidentes de la supposition la plus maladroite : c'est là que tout est faux, réflexions, faits, et calculs (…)
Voltaire, Mélanges historiques, Des mensonges imprimés, Testament politique de Richelieu, XIX.
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CONTR. (Du II.) Authenticité.
DÉR. Suppositif.
COMP. Présupposition.
Encyclopédie Universelle. 2012.