vagabond, onde [ vagabɔ̃, ɔ̃d ] adj. et n.
• 1382; bas lat. vagabundus, de vagari « errer » → vaguer
I ♦ Adj.
1 ♦ Littér. Qui mène une vie errante. Peuples vagabonds. ⇒ nomade.
♢ Par ext. Une vie, une existence vagabonde, où l'on se déplace, où l'on voyage constamment.
2 ♦ (XIVe « instable ») Fig. Qui change sans cesse, n'est pas tenu par une règle ou par une disposition naturelle. Imagination vagabonde. ⇒ désordonné, 2. errant, flottant. « Humeur inquiète et vagabonde » (Gautier).
II ♦ N. (1530)
1 ♦ Littér. Personne qui se déplace sans cesse, qui erre de par le monde. ⇒ aventurier, voyageur . « La Vagabonde », roman de Colette.
2 ♦ Cour. Personne sans domicile fixe et sans ressources avouables, qui erre, traîne à l'aventure. ⇒ clochard, rôdeur, S. D. F.; vx chemineau, galvaudeux, trimardeur . « Sans papiers et sans domicile, il n'était qu'un vagabond pour la police » (Aragon). Vagabonds et mendiants. — Dr. Jeune vagabond : mineur coupable du délit de vagabondage.
● vagabond nom masculin Personne qui n'a ni domicile ni ressources fixes, qui est en état de vagabondage. (Aujourd'hui, expressions usitées : S.D.F. [sans domicile fixe], sans-abri.) ● vagabond, vagabonde adjectif (bas latin vagabundus, du latin classique vagari, errer) Littéraire Se dit d'un animal domestique qui erre : Des chiens vagabonds. Qui mène une vie errante, nomade : Tribus vagabondes. Qui va sans cesse d'un objet à l'autre, à l'aventure : Imagination vagabonde.
vagabond, onde
adj. et n.
d1./d adj. Litt. Qui voyage sans cesse, qui n'a pas de lieu de résidence fixe. Syn. nomade.
|| Avoir une existence vagabonde. Syn. errant.
|| Fig., litt. Qui ne se fixe pas sur un objet, en parlant des pensées, de l'imagination. Imagination vagabonde.
d2./d n. Personne sans domicile ni ressources fixes, qui vit d'expédients. Syn. clochard.
⇒VAGABOND, -ONDE, subst. et adj.
A. — Subst. et adj.
1. a) (Celui, celle) qui se déplace sans cesse, qui mène une vie nomade, errante. Synon. chemineau, trimardeur (dér. s.v. trimarder; pop.). Vagabond de nuit; asile pour vagabonds. Les deux enfants considéraient avec un respect craintif et stupéfait cet être intrépide et inventif, vagabond comme eux, isolé comme eux, chétif comme eux, qui avait quelque chose de misérable (HUGO, Misér., t. 2, 1862, p. 165). Le curé devenait inquiet. Quand un vagabond sonnait à la porte de la cure, il lui donnait un morceau de pain et, s'excusant sur ce qu'il n'avait pas de place, lui indiquait la maison d'Honoré où il l'assurait de trouver un gîte (AYMÉ, Jument, 1933, p. 70).
b) (Celui, celle) qui, par goût ou par nécessité, se déplace, voyage. Artisan, chevalier, chanteur, curé, moine vagabond. On évacue, dit-on, les populations. Ce n'est déjà plus vrai. Elles s'évacuent d'elles-mêmes. Il est une contagion démente dans cet exode. Car où vont-ils, ces vagabonds? Ils se mettent en marche vers le Sud, comme s'il était, là-bas, des logements et des aliments (...) pour les accueillir (SAINT-EXUP., Pilote guerre, 1942, p. 316). Il faut croire que ce métier de musiciens vagabonds couvrait largement leurs frais de voyage car nous avons fait bombance jusqu'au milieu de la nuit (T'SERSTEVENS, Itinér. esp., 1963, p. 269).
c) P. anal. ou au fig. (Celui, celle) qui mène une vie sans ordre, sans but, qui ne se fixe pas sur un projet, une idée. Vagabond de l'art. Ils étaient bien, l'un et l'autre, de la race aventureuse des vagabonds de la vie, de ces vagabonds mondains qui ressemblent fort (...) aux bohèmes des grandes routes (MAUPASS., Bel-Ami, 1885, p. 298). Disraëli avait vécu en vagabond scolaire et politique. Il avait connu les demeures des usuriers avant celles des ministres et des évêques (MAUROIS, Disraëli, 1927, p. 207).
2. DROIT
a) (Personne) coupable du délit de vagabondage. Tout ouvrier qui voyagerait sans être muni d'un livret ainsi visé sera réputé vagabond, et pourra être arrêté et puni comme tel (Arrêté instituant le livret ouvrier, 1803 ds Doc. hist. contemp., p. 116). Il ne connaissait pas trop ses droits, mais il n'ignorait pas que, sans papiers et sans domicile, il n'était qu'un vagabond pour la police (ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 354).
b) (Enfant, adolescent mineur) qui fait l'école buissonnière, qui fait des fugues, qui rompt les liens familiaux et sociaux pour errer seul ou avec une bande organisée. Pour les mineurs délinquants et les vagabonds, une enquête est prescrite concernant la situation matérielle et morale de la famille et les antécédents de l'enfant, et une mesure éducative est prise (Encyclop. éduc., 1960, p. 202).
3. PATHOL. Maladie des vagabonds. État de la peau caractérisé par un épaississement et une pigmentation prononcée dus au manque de soin et à la vie errante. Synon. mélanodermie. Une affection actuellement rare, autrefois semble-t-il assez fréquente, la maladie des vagabonds, associe les parasitoses cutanées, l'état de dénutrition et d'avitaminose et comporte une hyperpigmentation (QUILLET Méd. 1965, p. 300).
B. — Adjectif
1. [En parlant d'un peuple, d'un groupe hum.]
a) Qui a l'habitude de vivre en nomade. Je passai en Afrique, je traversai pacifiquement ce grand désert jaune et calme, où errent des chameaux, des gazelles et des Arabes vagabonds (MAUPASS., Contes et nouv., t. 2, Qui sait? 1890, p. 1193). Il faut saisir l'insaisissable, essayer de discipliner ce qui n'accepte aucune loi, maintenir au désert ces foules vagabondes qui, d'un bout de l'année à l'autre, pérégrinent dans les solitudes et que l'été ramène sur les bords de l'Oronte (THARAUD, Chemin de Damas, 1923, p. 191).
b) Qui est poussé à l'errance, à l'exode par des événements politiques, climatiques. Ainsi il ne s'agit pas d'un prolétariat vagabond, mais de groupes formés, cohérents, dont femmes, enfants et vieillards font partie (VIDAL DE LA BL., Princ. géogr. hum., 1921, p. 44). Là comme en Russie, à côté des paysans fermiers sédentaires, il y avait une forte proportion d'ouvriers agricoles: « l'immense Chine vagabonde », comme il y avait une immense Russie vagabonde (LESOURD, GÉRARD, Hist. écon., 1966, p. 317).
2. P. anal. [En parlant d'un animal]
a) Qui se déplace beaucoup, qui voyage, qui migre. La chèvre s'accommode bien des maigres ressources que la petite économie paysanne méditerranéenne met à sa disposition; vagabonde, elle se nourrit fréquemment aux dépens des récoltes d'autrui ou des forêts (WOLKOWITSCH, Élev., 1966, p. 36).
b) Qui erre, divague en quête de nourriture, d'abri. Synon. errant. Chien vagabond. Il commençait de recueillir et d'héberger (...) des animaux vagabonds (DUHAMEL, Journal Salav., 1927, p. 119).
3. P. anal., littér.
a) [En parlant d'un végétal] Qui se répand, qui envahit un territoire, un lieu. Une forte odeur de résine s'échappait de la chambre unique qui remplissait, avec une étable en appentis à plusieurs divisions, toute cette pauvre masure, couverte de mousse et de plantes vagabondes (SAND, Jeanne, 1844, p. 61). Un vrai jardin doucement abandonné et qui semble promettre la perpétuité du repos de la tombe sous les branches de ses rosiers vagabonds (GONCOURT, Journal, 1869, p. 505).
b) [En parlant d'un corps céleste] Qui semble avoir une course aléatoire. Planète vagabonde. Le précepteur des enfans (...) commençait à effrayer ces dames, en leur démontrant, à sa manière, qu'un jour ou l'autre notre terre ne pouvait manquer d'être mise en poudre par le choc d'un de ces astres vagabonds (JOUY, Hermite, t. 1, 1811, p. 52). P. ell., empl. subst. Savons-nous ce que font toutes ces vagabondes Qui courent dans nos cieux? (HUGO, Contempl., t. 3, 1856, p. 282).
c) [En parlant d'une route, d'un cours d'eau] Dont le tracé est changeant, sinueux. Rivière, route vagabonde. Un de ces sentiers qui montent, descendent, tournent et reviennent (...), ayant tour à tour des cailloux, des marguerites et des orties, sentiers vagabonds faits pour les pensées flâneuses (FLAUB., Champs et grèves, 1848, p. 288). Il faut vous dire que la Durance est un fleuve de montagne, vagabond, pillard, coléreux et qu'il a un lit de cailloux de plus de 2 kilomètres de large (GIONO, Eau vive, 1943, p. 34).
4. ÉLECTR. Courant vagabond. Courant électrique libre, non canalisé. Le voisinage des rails de tramways est d'ailleurs néfaste à la conservation des conduites, à cause de la présence des « courants vagabonds » qui se produisent au voisinage des rails (QUÉRET, Industr. gaz, 1923, p. 202).
5. [P. méton.]
a) Qui est propre aux personnes, aux animaux qui mènent une vie errante, qui se déplacent sans cesse. Instincts vagabonds; vie, course vagabonde; habitudes vagabondes. J'ai compris que ma destinée était à jamais marquée d'un sceau fatal, et je me suis résigné à continuer cette existence errante et vagabonde sans souvenir de la veille, sans espoir du lendemain (PONSON DU TERR., Rocambole, t. 1, 1859, p. 662). Encore aujourd'hui l'habitant de l'Argonne a conservé l'humeur vagabonde, errante: il circule, émigre en été, exerce des métiers roulants, va louer ses bras au dehors (VIDAL DE LA BL., Tabl. géogr. Fr., 1908, p. 121).
b) Qui passe sans cesse d'un objet à l'autre, qui ne peut se fixer, s'arrêter sur quelque chose. Synon. inconstant, instable. Méditation, conversation, causerie, lettre vagabonde; esprit vagabond. Ma vagabonde imagination brisait les entraves, arrangeait les événements de la vie à ma guise, et me plongeait dans les délices d'un amour heureux (BALZAC, Peau chagr., 1831, p. 145). Je me rappelais bien certains regards bleus et vagabonds de la duchesse de Guermantes dans la nef de Combray (PROUST, Temps retr., 1922, p. 1023).
Prononc. et Orth.:[], fém. [-]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) 1382 adj. vagabonde « qui mène une vie errante » (Choix de pièces inédites relatives au règne de Charles VI, éd. L. Douët d'Arcq, t. 2, 1864, p. 197); 1391 id. vacabond (Registre criminel du Châtelet, Paris, éd. de la Sté des Bibliophiles fr., t. 2, 1864, p. 166); fin XVe s. [ms.] id. vagabond et fugitif (RAOUL DE PRESLES, Cité de Dieu ds DELB. Notes mss); 1502 subst. tous vaccabons oysifs (Ord. de pol. de Bourges, VIII, Boyer ds GDF. Compl.); b) 1561 adj. « qui est caractérisé par le changement continuel de lieu, l'errance » vie vagabonde (J. GRÉVIN, César ds Théâtre compl., éd. L. Pinvert, p. 43); 1635 course vagabonde (ROTROU, Bagne de l'oubli, V, 1, p. 155 ds IGLF); c) 1747 « propre aux êtres animés qui mènent une vie errante ou aiment à se déplacer sans cesse » humeur vagabonde (GRESSET, Le Méchant, p. 158); 2. a) 4e quart XIVe s. « qui fait preuve d'inconstance » justice y est vacabonde (EUSTACHE DESCHAMPS, Ballade, MCCCCXXIV, 5 ds Œuvres compl., éd. G. Raynaud, t. 8, p. 79); b) 1541 « qui passe sans cesse d'un objet à un autre et n'obéit qu'à sa fantaisie » conception... vagabonde et erronnée (CALVIN, Institution chrétienne, I, IV, § 3, éd. J. D. Benoît, t. 1, p. 65); 3. 1750 « se dit des animaux domestiques errants » (FOUGERET DE MONBRON, Le Cosmopolite, p. 22). Empr. au b. lat. vagabundus « vagabond, errant », dér. du lat. class. « aller çà et là, errer », v. aussi vaguer. Fréq. abs. littér.:766. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 1 146, b) 1 166; XXe s.: a) 1 342, b) 846.
vagabond, onde [vagabɔ̃, ɔ̃d] adj. et n.
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I Adj.
1 Vx ou littér. Qui erre (cit. 9), se déplace sans cesse; qui mène une vie errante. || Tribus vagabondes de bohémiens, de romanichels. || Peuples vagabonds. ⇒ Nomade (→ Delà, cit. 8). — (Animaux). || Oiseaux vagabonds, migrateurs, de passage. || Troupes vagabondes d'animaux. || Chatte vagabonde (→ Papier, cit. 5).
0.1 Nous sommes revenus à la nuit à Scutari. — Mon compagnon, avec un grand fouet de poste, frappait les chiens, dans les villages où nous passions. Toute la meute vagabonde hurlait effroyablement. Nos chevaux continuaient leur train insensé.
Flaubert, À Louis Bouilhet, 19 déc. 1850, in Correspondance, Pl., t. I, p. 728.
♦ Par ext. (Choses). || Course, errance vagabonde. || Une vie, une existence vagabonde, où l'on se déplace, où l'on voyage constamment. || Si notre vie est vagabonde, notre mémoire est sédentaire (→ Casanier, cit. 2). || « Sa mise déréglée, en ses vers vagabonds… » (→ Bond, cit. 3, Boileau).
1 Il bavardait depuis plus d'une heure que j'en étais encore à chercher les desseins de cet entretien vagabond.
G. Duhamel, Récits des temps de guerre, V, Mémorial de Cauchois.
♦ Par ext. Qui aime à errer, à se déplacer sans cesse. || Il est assez vagabond. — Humeur vagabonde de la chèvre (→ Caprice, cit. 11).
2 (XIVe, « instable »). Fig. Qui change sans cesse, n'est pas fixé, tenu par une règle ou par une disposition naturelle. || Âmes errantes et vagabondes. ⇒ Déréglé, fugitif (→ Conducteur, cit. 2). — (En parlant des faits psychologiques, et souvent par métaphore du sens 1). ⇒ Errant (II., 2.), flottant (4.). || Imagination vagabonde (→ Errer, cit. 21). || Pensées vagabondes. || Allure vagabonde de l'esprit (→ Repli, cit. 2). || Humeur inquiète et vagabonde (→ Fantasque, cit. 3). || Sa folie, d'abord hésitante, vagabonde (→ Grandissant, cit. 2).
2 Ils ignorent ces agitations de l'âme, ces violences des sentiments comprimés, qui impriment au style un accent tragique, et cette fantaisie vagabonde (…)
Taine, Philosophie de l'art, t. I, p. 252.
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II N. (1530; vaccabond, 1502).
1 Littér. Personne qui se déplace sans cesse, qui erre de par le monde. ⇒ Aventurier, voyageur. || La Vagabonde, roman de Colette. — Par métaphore. || « Mon esprit est un vagabond qui se plaît à s'égarer » (cit. 13, Descartes).
3 Il faut, — se dit-il, — que ma pensée soit une grande vagabonde pour aller chercher si loin ce qui est si près de moi.
Baudelaire, le Spleen de Paris, XXIV.
4 Mais quoi ! je sens qu'il faut à ce cœur de vagabond
La trépidation des trains et des navires (…)
Valery Larbaud, A. O. Barnabooth, Poésies, II, V.
2 Cour. Personne sans domicile fixe et sans ressources avouables, qui erre, traîne à l'aventure. ⇒ Ambulant (vx), chemineau, clochard, coureur (de routes), galvaudeux (vx), rôdeur (→ Maraud, cit. 2). || Des vagabonds sans feu ni lieu. || Vagabond misérable, en haillons, qui mendie (⇒ Gueux, mendiant), vit de rapines. || Les vagabonds nocturnes (→ Fureter, cit. 9). || Cette vagabonde, cette rouleuse (cit. 3). || Jusqu'à la loi du 27 décembre 1917, les souteneurs étaient assimilés par la loi aux vagabonds. ⇒ Vagabondage (spécialt). — Dr. || Jeune vagabond : mineur coupable du délit de vagabondage (J. Chazal, l'Enfance délinquante, p. 7).
5 La loi anglaise (…) tolérait le vagabond à état, devenu un sujet. On n'inquiétait ni le saltimbanque, ni le barbier ambulant, ni le physicien, ni le colporteur, ni le savant en plein vent, attendu qu'ils ont un métier pour vivre. Hors de là, et à ces exceptions près, l'espèce d'homme libre qu'il y a dans l'homme errant faisait peur à la loi.
Hugo, l'Homme qui rit, I, II, VI.
6 De loin s'avançait une ligne sombre. Quelqu'un, près d'Armand, expliqua : « La rafle ! » Armand avait sommeil. Dans quoi tombait-il ? Il ne connaissait pas trop ses droits, mais il n'ignorait pas que, sans papiers et sans domicile, il n'était qu'un vagabond pour la police.
Aragon, les Beaux Quartiers, II, XXXI.
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DÉR. Vagabonder.
Encyclopédie Universelle. 2012.