INJURE
INJURE
«Toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait est une injure.»
Infraction juridiquement très proche de la diffamation, l’injure requiert, ainsi qu’en dispose la loi française du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, une intention coupable, une publicité et une victime, personne ou corps. Comme en matière de diffamation, l’intention coupable est présumée; la publicité est un des éléments constitutifs du délit. S’entend par publicité, au sens de l’article 23 de la loi précitée, les «discours, cris ou menaces proférés dans des lieux de réunions publics, [...] les écrits, imprimés, dessins, gravures, peintures, emblèmes, images ou tout autre support de l’écrit, de la parole ou de l’image, vendus ou distribués, mis en vente ou exposés dans des lieux ou réunions publics, [...] les placards ou les affiches exposés au regard du public». Et l’article 27 de la même loi prévoit plus loin que le délit peut être constitué par «la publication, la diffusion ou la reproduction par quelque moyen que ce soit». Si la publicité fait défaut, le délit d’injure n’est pas constitué, mais il subsiste une contravention de la première classe d’injure non publique (article R. 621-2 du Code pénal).
La loi fait, quant aux victimes, les mêmes distinctions en matière d’injure qu’en matière de diffamation. Mais, outre ces éléments constitutifs communs, l’injure requiert un élément constitutif supplémentaire: l’absence d’imputation d’un fait précis. Cet élément fait la plupart du temps la véritable différence entre la diffamation et l’injure. Quoique appréciée par les juges du fond, la qualification du fait délictueux est étroitement contrôlée par la Cour de cassation.
La notion d’injure est une notion essentiellement subjective. Ainsi, le 22 octobre 1936, la Cour d’appel de Chambéry arrêtait que «le mot fasciste , pris en lui-même, n’est pas à considérer comme injurieux s’il envisage les citoyens soumis à un régime qu’on est d’usage de qualifier de cette manière, mais qu’il revêt un caractère nettement injurieux lorsque son auteur a voulu lui imprimer une signification de mépris, comme dans l’espèce». Quelques années plus tard, le 18 décembre 1946, le tribunal correctionnel de la Seine disposait par contre que «dans les circonstances actuelles, l’épithète de fasciste s’applique dans l’esprit d’un nombreux public aux adeptes d’une doctrine réputée criminelle et aux partisans de gouvernements ennemis de la France ou de politiciens considérés comme auteurs responsables du conflit mondial». Ces deux arrêts montrent aussi l’imprécision de la limite entre diffamation et injure, puisque, dans le premier cas, la jurisprudence avait décidé qu’il s’agissait d’une injure, dans le second cas, d’une diffamation.
On peut se demander si l’existence d’un préjudice est un élément constitutif de l’infraction puisque l’article 29 (loi du 29 juillet 1881), alinéa 2 relatif à l’injure n’en fait pas mention, alors que l’alinéa 1 du même article, relatif à la diffamation, exige «un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé». En fait, la profération de l’injure entraîne automatiquement un préjudice pour la victime; seule l’évaluation de ce préjudice est difficile: il pourra être réparé aussi bien par des dommages-intérêts que par la publication du jugement. L’injure admet une excuse absolutoire en raison de la provocation: s’il y a eu excuse de provocation, l’auteur de l’injure est affranchi de toute peine. Encore faut-il que la provocation soit en relation directe et médiate avec l’acte.
Comment, suivant les sanctions actuellement applicables, l’injure est-elle réprimée? L’injure peut être soit un délit, soit une contravention de police. Est une contravention de la première classe l’injure non publique. Est un délit, l’injure publique. La peine encourue pour l’injure-délit dépend alors de la qualité de la victime: l’injure envers un particulier est passible d’un emprisonnement de deux mois et/ou d’une amende de 80 000 F. L’injure envers une personne ou un corps représentant l’autorité publique est punie d’un emprisonnement de trois mois et/ou d’une amende de 80 000 F. Un maximum de six mois d’emprisonnement et de 150 000 F d’amende sont prévus si l’injure a été commise envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine, de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée. Les règles particulières de procédure sont identiques en matière de diffamation et en matière d’injure. Comme en matière de diffamation, la loi a prévu, en outre, trois cas spéciaux d’injures: l’injure contre la mémoire des morts, l’injure par correspondance et l’injure qui vise à exciter la haine.
injure [ ɛ̃ʒyr ] n. f.
• 1174 injurie; lat. injuria « injustice, tort »
1 ♦ Vx Injustice, traitement injuste. Faire injure à qqn, traiter injustement, faire tort.
2 ♦ (XIIIe) Littér. Dommage causé par les éléments, le temps. L'injure des ans, du sort.
3 ♦ Vieilli Offense grave et délibérée. ⇒ affront, avanie, insulte, outrage. « en amour, une faveur qui n'est pas exclusive est une injure » (Rousseau). Venger une injure. Mépris des injures. Faire injure à qqn. ⇒ offenser, outrager. « vous me faites injure en en doutant » (Artaud). Faire à qqn l'injure de (et l'inf.). Je ne vous ferai pas l'injure de vérifier vos dires. — Dr. civ. Injures entre époux : toute faute grave commise par l'un au préjudice de l'autre et constituant une cause de divorce.
4 ♦ (XIIIe) Cour. Parole offensante. ⇒ attaque, calomnie , insolence, insulte, invective, sottise. Dire, adresser, proférer des injures. « il recommença à l'accabler d'injures atroces et dignes d'un cocher de fiacre » (Stendhal). ⇒ injurier. En venir aux injures. Agonir qqn d'injures. Chapelet, bordée, torrent d'injures. Injures grossières. ⇒ mot (gros), ordure. Injures racistes.
♢ Dr. Délit consistant à proférer à l'encontre de quelqu'un un terme de mépris. ⇒ outrage. Injure à agent. Injure et diffamation.
⊗ CONTR. Compliment, éloge, louange.
● injure nom féminin (latin injuria, injustice) Parole qui blesse d'une manière grave et consciente : Couvrir quelqu'un d'injures. Littéraire. Action, procédé qui offense : Il m'a fait l'injure de refuser mon invitation. Littéraire. Dommage causé par le temps, les années : Braver les injures du temps. Expression outrageante qui ne renferme l'imputation d'aucun fait précis. (L'injure est un délit si elle est publique, sinon c'est une contravention.) ● injure (citations) nom féminin (latin injuria, injustice) Machiavel, en italien Niccolo Machiavelli Florence 1469-Florence 1527 Celui qui pense que, chez les grands personnages, les nouveaux bénéfices font oublier les vieilles injures, il s'abuse. Chi crede che ne' personaggi grandi i benefizii nuovi faccino dimenticare le iniurie vecchie, s'inganna. Le Prince, VII Alessandro Manzoni Milan 1785-Milan 1873 Les injures ont un grand avantage sur les raisonnements : celui d'être admises sans preuves par une multitude de lecteurs. Le ingiurie hanno un gran vantaggio sui ragionamenti, ed è quello di essere ammesse senza prova da una moltitudine di lettori. Œuvres inédites et rares, II, 482 ● injure (synonymes) nom féminin (latin injuria, injustice) Parole qui blesse d'une manière grave et consciente
Synonymes :
- grossièreté
- insulte
Contraires :
- louange
Littéraire. Action, procédé qui offense
Synonymes :
- affront
- avanie
- camouflet (littéraire)
- offense
- outrage
injure
n. f.
d1./d Litt. Dommage causé par le temps, le sort, les éléments, etc. L'injure du temps.
d2./d Parole offensante.
|| DR Expression outrageante qui ne renferme l'imputation d'aucun fait.
⇒INJURE, subst. fém.
A. — Geste, procédé, parole ou écrit adressés directement et délibérément à une personne pour l'offenser. Synon. affront, offense. Injure atroce; faire une injure à qqn; venger une injure. Injure faite à l'honneur (Ac. 1798-1935). Endurer le mépris, l'injure et les vexations de toute espèce (SIEYÈS, Tiers-État? 1789, p. 33). Il me paraît homme à n'oublier ni une injure ni un bienfait (ZOLA, Conquête Plassans, 1874, p. 1137). Le revendicateur prend la justice faite aux autres pour une injure personnelle, il la nomme injustice quand elle favorise son ennemi (MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 547). V. champ ex. 11 :
• 1. ROBERT ESPRELS : Tu lui infliges la plus sanglante injure qui se puisse infliger à une femme...
COURPIÈRE : Qui est?
ROBERT ESPRELS : Qui est de lui exprimer en paroles, et de lui prouver en action, qu'on la respecte.
HERMANT, M. de Courpière, 1907, II, 4, p. 16.
♦ Pardon des injures. Il y a, outre la loi divine, une loi fatale qui nous prescrit le pardon des injures et l'oubli des souffrances personnelles (SAND, Hist. vie, t. 3, 1855, p. 403).
♦ DR. Injure grave. ,,Acte, attitude ou parole d'une personne mariée constituant une offense outrageante pour son conjoint et, à ce titre, admise par la loi comme une cause de divorce`` (CAP. 1936).
SYNT. Injure blessante, cruelle, intolérable, irréparable, mortelle, odieuse; oubli, mépris, ressentiment d'une injure; mépriser, oublier, pardonner, subir, supporter une injure.
— Loc. et expr.
♦ Faire injure à
Vieilli. Faire du tort à. Il les épousa [les cinquante filles] toutes la même nuit, si bien que le lendemain matin elles se trouvèrent toutes femmes bien satisfaites et instruites. Car il n'avait fait injure à aucune (FRANCE, Contes Tournebroche, 1908, p. 9).
Formuler un jugement injuste envers quelqu'un. Le pire, c'est qu'il court de mauvais bruits sur M. Sarrien. Je veux croire qu'on fait injure à M. le Ministre de la Justice (CLEMENCEAU, Vers réparation, 1899, p. 253).
♦ Faire l'injure de + verbe. [Dans un sens atténué avec le verbe au cond. ou à la forme négative] Déconsidérer, offenser. Tu ne me feras certainement pas l'injure de croire que je puis mêler quelque idée d'amour-propre personnel à des réflexions aussi générales (HUGO, Lettres fiancée, 1821, p. 64). Je me demandai (...) pourquoi je ferais cette injure à la nature de faire regarder comme faux et imaginaire ce qu'elle avait créé si réel et si digne de souvenir (VIGNY, Mém. inéd., 1863, p. 37) :
• 2. Vous pensez bien, monsieur le président, dit Joseph avec rondeur, que nous ne vous faisons pas l'injure de douter un seul instant de votre bienveillance, puisqu'il s'agit d'améliorer le sort des masses laborieuses...
DUHAMEL, Nuit St-Jean, 1935, p. 23.
♦ Vieilli. Imputer, prendre à injure. Il impute cela à injure (Ac. 1798-1878). Il n'est personne non plus qui ne prît à grosse injure l'accusation de gloutonnerie (BRILLAT-SAV., Physiol. goût, 1825, p. 311).
B. — En partic., souvent au plur. Parole offensante, qualification ressentie comme outrageante ou interjection grossière adressée à quelqu'un. Synon. invective, insulte, gros mot, quolibet. Injure grossière; de grosses injures; dire des injures à qqn. Il recommença à l'accabler d'injures atroces et dignes d'un cocher de fiacre (STENDHAL, Rouge et Noir, 1830, p. 434). Ils se jettent du matin au soir à la tête des hottées d'injures et de reproches (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Homme-fille, 1883, p. 614). Égrener le chapelet des injures qui ont cours dans les mauvais lieux (COSTON, A.B.C. journ., 1952, p. 134). V. affront ex. 3 :
• 3. Alors Athénaïs vomit les plus sales injures, les invectives les plus obscènes sur les magistrats et les grenadiers, qui croyaient sentir se vider sur leurs têtes toutes les cuvettes du Palais-Royal et de la rue Fromenteau.
FRANCE, Dieux ont soif, 1912, p. 218.
♦ DR. Expression outrageante, terme de mépris ou invective ne renfermant l'imputation d'aucun fait (d'apr. RÉAU-ROND. 1951). Seules les offenses envers le Président de la République, les diffamations et injures envers les ministres, les injures envers les témoins, les jurés peuvent être poursuivies d'office en l'absence de plainte préalable (Civilis. écr., 1939, p. 44-15). Délit d'injure publique, contravention d'injure (RÉAU-ROND. 1951).
SYNT. Injure obscène; avalanche, bordée, débordement d'injures; dictionnaire d'injures; cracher, échanger, hurler, jeter, lancer, proférer des injures; abreuver, écraser qqn d'injures; se dire des injures; recevoir une lettre d'injures; répondre injure pour injure.
— Expressions
♦ Vieilli et pop. Se chanter mille injures (Ac. 1798-1935).
♦ Avoir l'injure à la bouche. Ne parler à qqn que l'injure à la bouche. Il n'a plus que l'injure à la bouche et sa rage de destruction n'épargne rien (BÉGUIN, Âme romant., 1939, p. 384).
C. — Au fig., littér. Dommage, destruction causés par les éléments, les intempéries, le temps dans sa durée. Injure de l'âge, des éléments. Il y a deux choses auxquelles il faut se faire, sous peine de trouver la vie insupportable : ce sont les injures du temps et les injustices des hommes (CHAMFORT, Max. et pens., 1794, p. 29). Cette sorte de marbre (...) ne résiste pas longtemps aux injures de l'air (DUSAULX, Voy. Barège, t. 1, 1796, p. 292) :
• 4. Évêques arborant avec des airs royaux
La crosse d'or massif et la mitre à joyaux,
Tandis que sous l'injure et l'âpreté des nues
Les ouailles sans bergers grelottent toutes nues...
LECONTE DE LISLE, Poèmes trag., 1886, p. 94.
♦ P. anal., plais. La tête basse, il subit tristement l'injure des gouttières (MUSSET ds Le Temps, 1831, p. 63).
♦ Les injures du sort. ,,Les revers, les malheurs extraordinaires et non mérités`` (Ac. 1835-1935).
Prononc. et Orth. : []. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1155 enjurie « injustice, violation du droit » (WACE, Brut, 5581 ds KELLER, p. 191b : par cruelté e par enjurie); 2. id. injuire « tort, dommage causé par violation du droit » (ID., op. cit., 13474, ibid., p. 255a); spéc. 1559 l'injure du temps (AMYOT, Péric., 27 ds LITTRÉ); 1587 l'injure de l'hiver (LANOUE, ibid.); 3. 1174-76 injurie « outrage » (G. DE PONT-STE-MAXENCE, St Thomas, 3024 ds T.-L.); 1559 « parole outrageante » (AMYOT, Péric., 8 ds LITTRÉ); spéc. dr. (Chartes de Hénaut ds Nouv. coutumier gén., éd. Bourdot de Richebourg, t. 2, p. 129b, CVII, XVIII : Action d'injure verbale ou par libel diffamatoire ...injure reelle, que l'on dit blessure et navrure). Empr. au lat. injuria, à l'époque class. « injustice; violation du droit, tort, dommage », terme de droit; cf. dans la lang. commune injuriae frigorum, oblivionis; « injure, parole blessante » à basse époque (lat. chrét.). Les formes en en- par adaptation aux formes pop., le préf. négatif in- étant encore étranger à la lang. (E. STAAFF ds St. neophilol. t. 1, p. 53). Fréq. abs. littér. : 2 022. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 3 323, b) 2 953; XXe s. : a) 3 548, b) 2 046. Bbg. PERRET (D.). Termes d'adresse et injures. Cah. Lexicol. 1968, t. 12, pp. 3-14.
injure [ɛ̃ʒyʀ] n. f.
ÉTYM. 1174, injurie; enjurie, 1155; lat. injuria « injustice, tort », de in- (→ 1. In-), et jus, juris « droit, cause ».
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1 Vx. Injustice, traitement injuste, tort immérité qu'on fait subir à qqn. — REM. L'expression faire injure à qqn, initialement employée pour « commettre une injustice à l'égard de qqn » (→ Faire tort; et aussi Encens, cit. 2) est comprise aujourd'hui au sens 2 de injure « offenser, outrager ».
1 (…) je ménage l'une et l'autre (ma santé et ma vie) comme un bien qui est à vous, et que je ne puis altérer sans vous faire une injure (…)
Mme de Sévigné, Lettres, 946, 27 déc. 1684.
2 (1559). Vieilli ou littér. Dommage causé (par les éléments, le temps…). || L'injure des ans (cit. 18), du temps (→ Équiper, cit. 3; 1. faire, cit. 238), du sort (→ Foudroyer, cit. 7), du malheur (→ Coutre, cit. 3), de l'âge. || « Cette statue est exposée aux injures de l'air » (Académie).
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II
1 (1535). Vieilli ou littér. Offense grave et délibérée, commise par une personne à l'égard d'une autre. ⇒ Affront, atteinte, avanie, coup, indignité, insulte, offense, outrage. || Une injure sanglante, atroce, irréparable. || Une injure qui ne peut se laver que dans le sang. || Endurer, souffrir, subir, avaler une injure (→ Éviter, cit. 27; honneur, cit. 23). || Oublier, pardonner (cit. 1) une injure (→ Bienfait, cit. 4; espagnolisme, cit. 2). || Le Christ a enseigné le pardon des injures. || Mépris des injures. || Faire satisfaction d'une injure (Académie). || Venger une injure. || Ressentir profondément une injure (→ Bilieux, cit. 3). || Faire injure : offenser (→ 2. Ce, cit. 15), et, spécialt, soupçonner de façon injuste et offensante.
2 (…) lorsque l'injure a une fois éclaté, notre honneur ne va point à vouloir cacher notre honte, mais à faire éclater notre vengeance (…)
Molière, Dom Juan, III, 3.
3 Il est des injures qu'il faut dissimuler pour ne pas compromettre son honneur.
Vauvenargues, Maximes et réflexions, 190.
4 (…) en amour, une faveur qui n'est pas exclusive est une injure.
Rousseau, Émile, V.
5 Ajoutez que toute doctrine qui honore l'homme dans l'universel, dans ce qui est commun à tous les hommes, est une injure personnelle pour l'artiste, dont le propre, depuis le romantisme, est précisément de se poser comme un être d'exception.
Julien Benda, la Trahison des clercs, p. 237.
♦ ☑ Loc. Faire à qqn l'injure de (et inf.); surtout négatif : je ne te ferai pas l'injure de croire, de penser que… || « Nous ne vous faisons pas l'injure de douter de votre bienveillance » (Duhamel, la Nuit de la Saint-Jean, in T. L. F.). — Vx. || Imputer qqch. à injure à qqn. || Prendre qqch. à injure. — Spécialt (dr. civ.). || Injures entre époux, toute faute grave commise par l'un au préjudice de l'autre, et constituant une cause de divorce.
2 (XIIIe). Mod. et cour. Parole offensante. ⇒ 1. Apostrophe, attaque, blasphème, calomnie, insolence, insulte, invective, irrévérence, mot (gros mot), sottise, vilenie. || Mot, expression ayant un caractère d'injure. ⇒ Injurieux. || Dire, adresser, proférer, hurler, marmonner, cracher (cit. 8), débagouler, dégorger, vomir des injures. ⇒ Injurier; → Chanter pouilles (vx). || Se dire, échanger des injures (→ Se dire ses vérités, ses quatre vérités; se dire des noms d'oiseau). || Échange d'injures. ⇒ Dispute, engueulade; → Choquer, cit. 1; graisse, cit. 9. || En venir aux injures. || Éclater (cit. 21), se répandre en injures. || Chapelet, bordée, cascade, torrent (→ Muet, cit. 6) d'injures. || Débordement (cit. 7), avalanche, bourrasque (cit. 10), pelletée d'injures. || Couvrir, accabler, abreuver, agonir qqn d'injures (→ Avanie, cit. 4). || Braver les injures de la foule. ⇒ Clameur. || Injures grossières (→ Cordialement, cit. 4), ignobles (→ Échanger, cit. 11), obscènes. ⇒ Infamie, ordure. || Un riche répertoire d'injures (ex. : Chameau, cochon, con, coquin, crétin, crevure, fumier, garce, idiot, ordure, salaud, salopard, tête [de…], vache). || Adjectifs renforçant une injure (→ Beau, grand, gros, petit, sacré, sinistre, sombre, triste, vieux…). || Injures s'adressant à un groupe (→ Bande, tas de…). || Injures racistes.
6 Et ne peut-on répondre à tout ce qui le touche
Que le feu dans les yeux et l'injure à la bouche ?
Molière, Tartuffe, IV, 3.
7 Les injures atroces n'ont jamais fait de tort qu'à ceux qui les ont dites.
Voltaire, Conseils à Louis Racine.
8 (…) il recommença à l'accabler d'injures atroces et dignes d'un cocher de fiacre. La nouveauté de ces jurons était peut-être une distraction.
Stendhal, le Rouge et le Noir, II, XXXIII.
9 Les injures prodiguées à Delacroix, à Ingres, n'ont pas moins servi leur renommée que les éloges et le fanatisme de leurs adhérents.
Balzac, Pierre Grassou, Pl., t. VI, p. 112.
10 Édouard était vite à court d'injures. Il répéta plusieurs fois, en tirant sur sa moustache : « paltoquets », « galvaudeux », chercha quelques instants et ajouta « goujats ».
G. Duhamel, Salavin, III, X.
♦ Dr. « Toute expression outrageante, terme de mépris ou invective, qui ne renferme l'imputation d'aucun fait » (loi sur la presse du 29 juil. 1881, art. 29). ⇒ Outrage. || L'injure se distingue de la diffamation. || Injure publique ou qualifiée. || Injure simple. || Injure grave.
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CONTR. Bienfait. — (Du sens II) Civilité, compliment, éloge, louange.
Encyclopédie Universelle. 2012.