debout [ d(ə)bu ] adv.
1 ♦ (Choses) Verticalement; sur l'un des bouts. ⇒ 1. droit (cf. D'aplomb). Mettre des livres debout (opposé à à plat). Un tonneau, une bouteille debout. Mettre du bois debout, dans le sens des fibres. — Loc. Mettre une affaire debout, la mettre sur pied, l'organiser.
2 ♦ (Personnes) Sur ses pieds (opposé à assis, couché). Se tenir, rester debout. « debout, planté comme un piquet, sans remuer ni pied ni patte » (Rousseau). « Elle se mit debout avec effort » (F. Mauriac). ⇒ se dresser, se lever. Les personnes debout. Voyager debout, faute de place où s'asseoir. Par ext. Places assises, places debout (dans un moyen de transport en commun).— La station debout. — Interj. Debout ! levez-vous. Debout là-dedans ! (formule milit.) :levez-vous ! Fig. « Debout les morts ! À cet appel les blessés se redressent. Ils chassent l'envahisseur » (Barrès).
♢ Pas couché, levé. Être debout à 6 heures du matin. Rester debout toute la nuit : ne pas se coucher, rester éveillé. Il va mieux, il est déjà debout, guéri, rétabli (cf. Sur pied). — Loc. Dormir debout : éprouver un violent besoin de dormir au point de s'assoupir sans être couché. Fig. Une histoire à dormir debout. — Mourir debout, en pleine activité, dans l'exercice de ses fonctions.
3 ♦ Être debout : se dresser, être en bon état (mur, construction); résister à la destruction. Cette forteresse est encore debout.
♢ TENIR DEBOUT :être solide. Le toit est pourri mais les murs tiennent debout.
♢ (Personnes) Ne pas tenir debout : être privé de force physique, être malade. Ce vieillard ne tient pas debout. — Être ivre. Après deux verres, il ne tenait plus debout. — (Choses) Argument qui ne tient pas debout, qui n'est pas cohérent, logique. Théorie qui ne tient pas debout, insoutenable. « sous le jour commercial, votre projet ne tient pas debout » (Duhamel)(cf. Tenir la route).
4 ♦ Adj. inv. Dr. Magistrature debout : le ministère public, qui parle debout (par oppos. à magistrature assise) .
5 ♦ Loc. adv. et loc. adj. VENT DEBOUT : de face, avec l'étrave tournée dans la direction d'où vient le vent. Naviguer vent debout. ⇒ contraire. Virer de bord vent debout (s'oppose à virer vent arrière; virer lof pour lof) .
⊗ CONTR. Assis, couché. Alité, malade. Détruit, renversé, ruiné.
● debout adverbe (de de et bout) Qui est en station verticale, sur ses pieds (par opposition à couché, assis, agenouillé, accroupi, etc.) : Manger debout au comptoir. Place debout. Qui est levé, éveillé, par opposition à quelqu'un qui est au lit, couché : Il est debout tous les matins à six heures. Qui est posé verticalement : Des livres rangés debout sur une étagère. Qui est encore en état, qui tient encore, qui subsiste : Le toit s'est effondré, mais les murs sont encore debout. ● debout (citations) adverbe (de de et bout) Émile Chartier, dit Alain Mortagne-au-Perche 1868-Le Vésinet 1951 La vie est un travail qu'il faut faire debout. Propos d'un Normand, tome I Gallimard Pierre Carlet de Chamblain de Marivaux Paris 1688-Paris 1763 Un homme qui se trouve bien assis, qu'a-t-il besoin de se mettre debout ? Le Prince travesti, I, 13 ● debout (difficultés) adverbe (de de et bout) Orthographe Toujours invariable : ils sont debout ; places debout. → place ● debout (expressions) adverbe (de de et bout) Debout !, ordre par lequel on invite quelqu'un à sortir du lit ou à se lever pour partir. Être debout, être rétabli après une maladie. Mettre debout un projet, le mener à bien. Mourir debout, montrer de l'activité jusqu'à sa mort ; mourir en pleine activité. Ne pas tenir debout, être très fatigué. Tenir debout, être à peu près solide, complet, sans grande détérioration ; avoir de la valeur, être cohérent, vraisemblable, etc. : Ce raisonnement ne tient pas debout. Bois debout, synonyme de bois de bout. Magistrature debout, synonyme de ministère public (par opposition à magistrature assise). Se tenir debout à la lame, lui présenter l'avant. Vent debout, vent contraire à la direction du navire. Vente du bois debout et sur pied, vente des arbres vifs, à charge par l'acheteur de les abattre et de les enlever, par opposition à la vente du bois façonné. ● debout (synonymes) adverbe (de de et bout) Industrie du bois, Gravure et lithographie. Bois debout
Synonymes :
Droit. Magistrature debout
Synonymes :
- ministère public
debout
adv. et adj.
rI./r adv.
d1./d Sur un de ses bouts, en position verticale. Poser un tonneau debout.
|| Fig. Mettre une affaire debout, la créer, l'organiser.
d2./d (Personnes) Sur ses pieds, en station verticale (par oppos. à couché, assis). Se mettre debout.
|| Debout!: Interj. par laquelle on ordonne à qqn de se lever, on l'invite à partir.
d3./d Levé, hors de son lit. être debout à 5 heures tous les matins.
— Loc. Dormir debout: être fatigué au point de s'endormir sans être couché; fig. être très fatigué.
— Fig. Une histoire à dormir debout, inimaginable, invraisemblable.
d4./d être, tenir debout: résister à la destruction, à l'usure. Cette vieille bâtisse est encore debout.
|| Fig. Tenir debout (souvent en forme nég.): être cohérent, vraisemblable (en parlant d'une théorie, d'un récit, etc.). Un raisonnement, une argumentation qui ne tient pas debout. Cette explication tient debout.
rII./r adj. inv. Vent debout, contraire à la direction suivie par le navire, l'avion. Décoller, atterrir vent debout, face au vent.
⇒DEBOUT, adv. et adj. invar.
I.— [Debout est en relation avec un inanimé]
A.— Usuel
1. [Inanimé concr.]
a) Sur un des bouts, dans le sens de la hauteur. Synon. à la verticale, d'aplomb. Mettre une colonne, un meuble, un tonneau debout (Ac. 1932). Portes fermées avec des planches mises debout (CHATEAUBR., Génie, t. 2, 1803, p. 154). Les gerbes faites de blé (...) réunies debout (RENARD, Journal, 1901, p. 681).
b) Dressé à la verticale. Son torse droit, (...) son front debout (VERHAEREN, Mult. splendeur, 1906, p. 13). À chaque extrémité [du vélodrome] les virages debout comme des murs (MORAND, Ouv. la nuit, 1922, p. 166). Les pins bleus debout sur l'horizon (GENEVOIX, Raboliot, 1925, p. 306).
c) Qui tient sur ses bases, qui n'a pas été abattu. Anton. détruit, rasé. Palmiers semblables à des minarets turcs restés debout sur la ville détruite (LAMART., Voy. Orient, t. 1, 1835, p. 133). Les blés encore debout avaient des aigrettes de flamme rose (ZOLA, Terre, 1887, p. 252) :
• 1. Le Panthéon n'existeroit plus s'il n'eût été consacré par le culte des douze apôtres, et la colonne Trajane ne seroit pas debout, si la statue de saint Pierre ne l'eût couronnée.
CHATEAUBRIAND, Génie du christianisme, t. 2, 1803, p. 535.
— Région. (Canada). Terre en bois debout. Terre sur laquelle les arbres n'ont pas été abattus, qui n'a pas été défrichée. Tout ce lot-là était encore en bois debout, et difficile à faire (HÉMON, M. Chapdelaine, 1916, p. 234; cf. Canada 1930 et BÉL. 1957).
2. Au fig. [Inanimé abstr.]
a) Qui résiste aux assauts du temps ou des hommes. Anton. abandonné, renversé. Je ne sais s'il est maintenant plus profitable de courtiser le pouvoir tombé que le pouvoir debout (MUSSET, Revue des Deux Mondes, déc. 1832, p. 103). Plus une seule vérité debout et qui ne soit entamée par le doute (GONCOURT, Journal, 1886, p. 574) :
• 2. Les hommes passent, mais l'homme reste; les empires tombent, les égoïsmes se reforment. (...) deux immenses égoïsmes pressent l'Europe et la convoitent. L'esprit de guerre, de violence et de conquête est encore debout à l'orient, l'esprit de commerce, de ruse et d'aventure est encore debout à l'occident.
HUGO, Le Rhin, 1842, p. 436.
b) Qui a de la force, de la noblesse. Anton. lâche, mou. J'aime, au fond, le style « debout » (VALÉRY, Corresp. [avec Gide], 1899, p. 347).
c) Loc. verbales
— [Debout est attribut du suj.; le suj. de la loc. désigne un inanimé abstr. : vue de l'esprit, propos tenus ou rapportés par qqn] Tenir debout. Être acceptable, cohérent, sérieux. J'avais beau compter sur mes doigts, pas un de ces vers ne semblait tenir debout (GREEN, Journal, 1933, p. 135). Le plus souvent sous la forme négative. Ne pas tenir debout. Manquer de vraisemblance, de logique, de sérieux ou de réalisme. Ton histoire ne tient pas debout (ACHARD, J. de la Lune, 1929, III, 3, p. 27). Ça ne tenait pas debout comme accusation (CÉLINE, Voyage, 1932, p. 575).
— [Debout est attribut de l'obj.; le suj. de la loc. désigne une pers.] Mettre, tenir debout. Organiser, mettre sur pied. Mettre debout l'impôt sur le revenu (ROMAINS, Hommes b. vol., 1932, p. 158) :
• 3. L'homme d'esprit sourit naturellement en même temps qu'il fait sourire; mais le comique ne rit point, mettant toute son attention, tout son mouvement et toutes ses forces à tenir debout son décor et ses personnages.
ALAIN, Système des beaux-arts, 1920, p. 158.
B.— Emplois techn.
1. MAR. De face, par le bout, par l'avant. Cette embarcation est debout à la lame, au courant, au vent (Ac. 1835-1932). D'un coup de barre, Cruz donne debout dans une vague (RENARD, Écorn., 1892, p. 216). Vaisseau dans la bourrasque qui d'instinct se présente tout debout à la lame (GRACQ, Syrtes, 1951, p. 191).
— Vent debout ou de bout (cf. bout ex. 12). Vent qui souffle face à la proue du navire. Avoir le vent debout. On se mit en route à la voile. La mer était mauvaise; le vent debout (LOTI, Mon frère Yves, 1883, p. 29).
♦ P. anal. Vent qui contrarie la marche d'un moyen de transport. La machine avait ainsi le vent debout, fouettée de face par les rafales (ZOLA, Bête hum., 1890, p. 143). [L'aviateur] ayant roulé, lentement, vent debout (SAINT-EXUP., Courr. Sud, 1928, p. 6).
♦ P. ext. Vent de face. Des femmes qui revenaient vent debout (HAMP, Marée, 1908, p. 32).
♦ P. métaph. :
• 4. Tous ces flots vent debout
Et ce vent fou
N'ont pu venir à bout
De la nature.
Tous ces flots vent debout
Et ce vent fou
N'ont pu venir à bout
De ta mâture.
PÉGUY, Quatrains, 1914, p. 540.
2. MENUIS. et GRAV. À contre-fil. Le buis (...) qui se grave debout (E. LECLERC, Nouv. manuel typogr., 1932, p. 555); cf. CARABELLI, [Lang. grav.]).
♦ Bois debout. Pièce de bois dont le côté fonctionnel est perpendiculaire au sens des fibres :
• 5. ... un « bois-debout » — ainsi l'on nomme, dans mon pays natal, l'antique billot, la rouelle de chêne au grain serré que n'entame pas le hachoir.
COLETTE, Sido, 1929, p. 100.
Rem. La var. graph. bois de bout est signalée par Lar. encyclop.
II.— [Debout est en relation avec une pers.]
A.— [En fonction d'épithète, d'appos. ou d'attribut]
1. Qui se tient sur ses pieds, en position verticale.
a) [Au sens physique] Anton. assis, couché, à genoux. Je suis las d'être debout. Est-ce qu'il n'y a pas de chaise ici? (HUGO, N.-D. Paris, 1832, p. 487). Ils [les maquisards] meurent debout, bien droits, ou couchés (DE GAULLE, Mém. guerre, 1956, p. 251) :
• 6. À cinq heures et demie, on descendait dans une salle commune où l'on faisait à genoux la prière, et ensuite on restait en méditation, soit debout, soit à genoux, soit même assis, si l'on se sentait faible. La règle générale était d'être alternativement un quart d'heure à genoux et un quart d'heure debout, ...
SAINTE-BEUVE, Volupté, t. 2, 1834, p. 213.
— DR. Magistrat debout. Avocat général qui parle debout. Je pénétrai à mon tour chez le premier magistrat debout de l'endroit (VERLAINE, Œuvres compl., t. 4, Mes pris., 1893, p. 372).
— Locutions
♦ Boire, manger debout. Boire, manger rapidement, sans prendre le temps de s'asseoir. Tous pressés, ils [les clients] avalent debout le café brûlant (DABIT, Hôtel Nord, 1929, p. 47). Des mariniers en caban qui buvaient debout, mangeaient sur le pouce (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 252).
♦ Laisser qqn debout. Ne pas l'inviter à s'asseoir (pour marquer la distance hiérarchique ou le peu de cas qu'on fait de lui) :
• 7. — Soyez assuré, cher monsieur, que monsieur votre colonel ne vous laissera plus debout quand il aura à vous parler chez lui; il sera poli du moins; quant à être bienveillant, c'est une autre affaire.
STENDHAL, Lucien Leuwen, t. 1, 1836, p. 197.
♦ Ne pas tenir debout (avec valeur de symptôme). Être sans forces, avoir une mauvaise santé. Je suis une loque. Je ne tiens pas debout (CENDRARS, Bourlinguer, 1948 p. 169).
— P. anal. [En parlant d'un animal]
♦ Qui se tient sur ses pattes. Un grand vieux sanglier (...) debout sur ses pattes minces (BOURGET, Disciple, 1889, p. 51).
♦ Qui est dressé sur ses pattes de derrière ou sur sa queue. Debout sur l'extrémité de sa queue, il [le reptile] marche dans une attitude perpendiculaire (CHATEAUBR., Génie, t. 1, 1803, p. 112). [Des lapins] tantôt assis sur le cul, tantôt entièrement debout sur leurs pattes de derrière (PERGAUD, De Goupil, 1910, p. 125).
♦ VÉN. Mettre une bête debout. Lancer une bête qui est au repos. Synon. bouter. Les chiens d'attaque (...) cherchent le cerf, le mettent debout, le lancent, le forcent à s'enfuir (VIALAR, Chasse aux hommes, Rendez-vous, 1952, p. 246).
SYNT. Demeurer, se dresser, se mettre, se planter, se tenir, rester debout; tout debout.
b) P. méton.
— [En parlant d'une situation] Qui est le fait d'une personne debout. Synon. vertical. Je ne peux plus supporter ces stations debout (PROUST, J. filles en fleurs, 1918, p. 543). Cinq heures de station debout (DU BOS, Journal, 1924, p. 73).
— [En parlant d'une place] Où l'on reste debout. Encore deux places debout, parce que c'était bondé (ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 160).
♦ P. ell. [En parlant d'un trajet, d'un travail] Qui est effectué dans la position debout. Plus d'attente de cars, de voyage debout (TRIOLET, Prem. accroc, 1945, p. 343) :
• 8. Mais cette place il [Chèbe] ne la cherchait que dans ce qu'il appelait le commerce debout, sa santé s'opposant à toute occupation assise.
A. DAUDET, Fromont jeune et Risler aîné, 1874, p. 17.
— DR. Magistrature debout (cf. supra II A 1 a). Magistrats du ministère public qui parlent debout. Anton. magistrature assise. La carrière de la magistrature debout était incertaine (BALZAC, Cab. ant., 1839, p. 136).
c) Au fig.
) Qui est en pleine activité ou lucidité.
♦ Mourir debout. Avec un peu de chance, vous mourrez debout, comme ce fameux empereur (BERNANOS, Journal curé camp., 1936, p. 1240) :
• 9. À cette magnificence seigneuriale qui faisait, dans Venise, une fête éternelle, le temps n'a rien ôté encore. C'est au milieu de cette fête que la ville a été frappée; elle est morte debout.
QUINET, Allemagne et Italie, 1836, p. 152.
• 10. — « Oui », me dit-il d'une voix mate, « j'espère bien mourir debout, c'est-à-dire en pleine lucidité. Mourir comme j'ai vécu, sans avoir peur des conséquences, sincère jusqu'au seuil de... de je ne sais quoi... — de la vie éternelle, sans aucun doute. »
MARTIN DU GARD, In memoriam, 1921, p. 575.
♦ Fam. Tomber debout (Ac. 1835-1932). Avoir assez de ressources pour se tirer avec bonheur d'une situation critique. Synon. usuel tomber, retomber sur ses pieds.
) Qui ne courbe pas la tête par dignité, fierté ou courage. Je veux régner sur des hommes debout, non sur des hommes prosternés (MONTHERL., La Reine morte, 1942, II, 1er tabl., 2, p. 176). À présent que la France est debout (DE GAULLE, Mém. guerre, 1959, p. 180) :
• 11. ... que ceux qui tenteroient de nous en priver [de nos droits] (...) nous trouvent devant eux debout, la tête haute, prêts à combattre et prêts à mourir, plutôt que d'en rien céder. Et nous ne mourrons pas! Car si le droit est de notre côté, la force y est aussi; et la lâcheté seule, la plus indigne, la plus vile lâcheté, pourroit nous perdre.
LAMENNAIS, L'Avenir, 1830-31, p. 170.
• 12. ... passez parmi ces hommes stupides de malheur, et faites retentir le grand cri : Justice! Justice! C'est assez. Tous ont frémi. Tous sont debout, debout pour la promesse sacrée, tombée miraculeusement des hauteurs, debout pour l'espérance, debout pour la volonté, pour l'effort.
CLEMENCEAU, L'Iniquité, 1899, p. 111.
2. P. ext.
a) Qui est hors du lit, levé ou non couché. Synon. sur pied, éveillé. Te trouver encore debout et nous attendant, à près de minuit (HUGO, Lettres fiancée, 1821, p. 69). Déjà debout? Tu es tombée du lit? (CAMUS, Cas intéress., 1955, 1er temps, 3e tabl., p. 629) :
• 13. ... une telle fièvre de tête que je ne puis l'attribuer qu'à l'effet du sommeil ou de la chaleur de la nuit, d'autant plus que toute cette tristesse se dissipe quand je suis debout. Depuis quatre jours, je reste au lit et je perds deux ou trois heures à réfléchir et à me livrer à un découragement vraiment fou.
CONSTANT, Journaux intimes, 1805, p. 194.
• 14. Je jure que, si je savais que cette nuit encore je ferai ce rêve, au lieu de me coucher et de m'endormir je m'enfuirais de ma maison. Je marcherais jusqu'à l'aurore, et je ne tomberais pas de fatigue, car la peur me tiendrait debout, tout suant et tout courant.
RENARD, Journal, 1896, p. 348.
— En partic. [En parlant d'un convalescent] Rétabli. Anton. alité. Me voilà debout (...) mais ne pouvant encore guère lire et point marcher (LAMART., Corresp., 1830, p. 94).
— P. anal. [En parlant d'un animal] :
• 15. J'apprends qu'il y a dans le nord de la France une croyance pleine de poésie parmi les paysans. Ils croient que le jour de Noël à minuit les moutons et les bœufs sont tous debout et réveillés dans les étables pendant une heure, sentant que c'est le moment où le Christ est né dans l'étable.
VIGNY, Le Journal d'un poète, 1847, p. 1264.
— Locutions
♦ Ne pas/plus tenir debout. Avoir fortement sommeil, tomber de sommeil ou de fatigue. Je vais me coucher (...) Je ne tiens plus debout (BERNSTEIN, Secret, 1913, III, 2, p. 33).
♦ Dormir (tout) debout. Même sens. Au fig. (Un conte, une histoire, des propos, etc.) à dormir debout. Qui manque de vraisemblance, de sérieux, de logique ou d'intérêt (cf. supra I A 2). Quasi-synon. qui ne tient pas debout. Des raisonnements philosophiques, vagues, rebattus, à dormir debout (STENDHAL, Racine et Shakspeare, 1823, p. 45). L'histoire n'est qu'une histoire à dormir debout (RENARD, Journal, 1901, p. 665).
b) Vivant. Alexandre viendra bientôt dans un certain lieu d'où il ne sortira pas debout (MUSSET, Lorenzaccio, 1834, III, 3, p. 186). Ils sont dans la fête de survivre, ils jouissent de la gloire infinie d'être debout (BARBUSSE, Feu, 1916, p. 58) :
• 16. Tous les preux étaient morts, mais aucun n'avait fui.
Il reste seul debout, Olivier près de lui;
L'Afrique sur les monts l'entoure et tremble encore.
« Roland, tu vas mourir, rends-toi, criait le More;
Tous tes pairs sont couchés dans les eaux des torrents ».
VIGNY, Poèmes antiques et modernes, Le Cor, 1837, p. 187.
B.— [En fonction d'apostrophe]
1. [Marque l'ordre donné à une ou plusieurs pers. pour les faire lever, pour le travail, pour se mettre en marche, etc.] Debout. Ordre du colonel (BENJAMIN, Gaspard, 1915, p. 26). Fam. [Ordre adressé à une chambrée de militaires] Debout, là-dedans! :
• 17. Debout, vampires, larves, spectres, harpies, terreur de nos nuits. Debout, les soldats qui moururent en blasphémant, debout les malchanceux, les humiliés, debout les morts de faim dont le cri d'agonie fut une malédiction. Voyez, les vivants sont là, les grasses proies vivantes! Debout, fondez sur eux en tourbillon et rongez-les jusqu'aux os! Debout! Debout! Debout!...
SARTRE, Les Mouches, 1943, II, tabl. 1, 2, p. 46.
— MAR. Debout au quart. Appel des matelots pour réveiller ceux qui doivent prendre la relève au quart. Les tribordais, debout au quart, debout, debout, debout! (LOTI, Mon frère Yves, 1883, p. 342).
— Expr. Debout les morts! allusion au cri qu'aurait lancé l'adjudant Péricard à ses hommes, au Bois Brûlé, le 8 avril 1915 :
• 18. C'est dans son régiment qu'au Bois Brûlé, vers Saint-Mihiel, un adjudant a crié : « Debout, les morts! »
BORDEAUX, Les Derniers jours du fort de Vaux, 1916, p. 36.
2. [Marque l'invitation à réagir, à se ressaisir] Debout, mon peuple! Trop longtemps tu dormis la face contre terre (CLAUDEL, Choéphores, 1920, p. 941). Le couplet de l'Internationale : Debout les damnés de la terre! (MARTIN DU G., Thib., Été 14, 1946, p. 449).
Rem. Les dict. gén. du XIXe et du XXe s. rangent habituellement debout dans la catégorie des adv. Qq. dict. récents (p. ex. DUB., DAVAU-COHEN 1972) donnent cependant debout comme ,,adv. ou adj. invar.``, mais sans autre précision d'emploi dans le corps de l'article; seul Lar. Lang. fr. ouvre un paragraphe distinct pour l'emploi adj. Du côté des grammairiens, certains continuent d'affirmer que debout est ,,toujours invariable, car il s'agit d'un adverbe`` (COLIN 1971). Mais la plupart indiquent l'adjectivation de debout comme un fait d'usage courant; avec bien, il s'agirait de l'adv. qui est le plus sujet à la dérivation impropre. La docum. atteste de fréq. emplois de debout comme attribut, épithète, appos. du sujet ou du compl. d'obj. dir.; dans tous ces cas, le critère de commutation avec un adj. est probant. D'autre part, même s'il est rare, l'emploi de debout avec la marque du plur. et l'emploi comme subst. (qui semble un fait plus récent) confirment que l'adjectivation de cet adv. est bien établie.
Prononc. et Orth. :[]. t final ne se prononce pas sauf dans qq. provinces (cf. MART. Comment prononce 1913, p. 328, et BUBEN 1935, § 220). La prononc. [-but], dans les expr. du domaine mar. du type vent debout, debout au vent, est recommandée par LE CLÈRE 1960 et est usuelle dans l'Ouest de la France. D'apr. LITTRÉ le t de debout se lie. Empl. comme adj. le mot est gén. inv. (cf. cependant rem. supra). Le mot est admis ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. 1155 de but « d'emblée, tout de suite » (WACE, Brut, 2084 ds KELLER, p. 340 b), seulement en a. fr.; 2. a) 1530 « (d'une pers.) sur ses pieds, hors du lit, levé » (PALSGR., p. 422); 1611 contes à dormir debout (COTGR.); 1638 exclamation (MONET); b) 1580 fig. mourir debout « en activité » (MONTAIGNE, Essais, II, XXI, éd. A. Thibaudet, p. 762); 3. 1680 « (d'une chose) qui existe encore » (RICH. : La muraille de la vile étoit encore debout); 4. 1732 emploi adj. invar. vent debout (Trév.). Agglutination de de et de bout. Fréq. abs. littér. : 8 130. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 6 667, b) 14 170; XXe s. : a) 17 033, b) 11 048. Bbg. ASAKURA (S.). Debout, adv. adjectivé. Ét. de la lang. fr. 1960, t. 25/26, pp. 6-10. — SCHMID (H.). Zur Formenbildung von dare und stare im Romanischen. Bern, 1949, 170 p. — THOMAS (A.). Nouv. Essais 1904, p. 238.
debout [d(ə)bu] adv.
ÉTYM. 1530; de bot, de but, 1155; « bout à bout », 1190; de de, et bout.
❖
1 (Choses). Verticalement; sur l'un des bouts. ⇒ Aplomb (d'), droit. || Mettre, dresser un meuble debout. || Cette chaise ne tient pas debout, elle n'est pas stable. — (Avec un n., en fonction d'adj.). || Une table, un tonneau debout.
1 Une espèce de petit balcon vers le haut, en saillie et soutenu en dessous par deux chevrons et deux poutres debout (…)
Diderot, Salon de 1767.
♦ Gravure. || Le bois se grave debout, à contre-fil.
♦ ☑ Loc. Mettre debout : dresser, redresser. (Abstrait). || Mettre une affaire debout, la mettre sur pied, l'organiser.
♦ Mar. (vx). || Debout les avirons ! (pour rendre les honneurs).
2 (Personnes). Sur ses pieds (opposé à assis [cit. 36], couché). || Il est là, debout, devant moi. || Se tenir debout. || Rester debout les bras (cit. 5) ballants. → Planté comme une borne. || Se mettre debout. ⇒ Lever (se); dresser (se). || Ne restez pas debout : asseyez-vous. || Laisser qqn debout, ne pas le faire asseoir. || L'astasie, trouble caractérisé par l'impossibilité de rester debout.
♦ (Avec un verbe exprimant une action, habituellement accomplie en position assise). || Manger debout. || Voyager debout dans le train. || Pédaler debout sur sa bicyclette. ⇒ Danseuse (en).
♦ (Construit avec un subst.). || Les personnes debout. — Par métonymie. || Place debout dans un autobus. || Faire une station debout prolongée lui est insupportable.
2 (…) debout et assis (au parterre comme aux meilleures places), on peut donner un mauvais jugement (…)
Molière, la Critique de l'École des femmes, 5.
3 Il faut que je reste là cloué sur une chaise ou debout, planté comme un piquet, sans remuer ni pied ni patte, n'osant courir, ni sauter, ni chanter, ni crier, ni gesticuler quand j'en ai envie (…)
Rousseau, les Confessions, XII.
4 Il avait toujours aimé s'étendre pour causer. « Debout ou couché », disait-il : « la position assise est pour les fonctionnaires. »
Martin du Gard, les Thibault, t. V, p. 174.
5 Dès qu'il fut parti et qu'on sut que son absence durerait un peu, les gens debout, leur verre de porto à la main, se rapprochèrent les uns des autres, firent cercle et se communiquèrent promptement leurs réflexions.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. V, p. 191.
6 Elle se mit debout avec effort, et, appuyée au bras de Bernard, gagna la pièce qu'elle occupait au-dessus du grand salon.
F. Mauriac, Thérèse Desqueyroux, p. 173.
♦ Tout debout (intensif).
6.1 (…) deux indigènes creusaient un trou très profond et peu large, ce qui nous laissa supposer qu'on ensevelit les morts verticalement, tout debout.
Gide, Voyage au Congo, in Souvenirs, Pl., p. 784.
♦ Interj. || Debout ! : ordre par lequel on invite qqn à se lever, à partir, à se mettre en route. || Debout ! là-dedans : levez-vous ! (formule militaire). || Allons, debout ! || Debout, et partons. — Mar. (dans divers commandements). || Debout au quart !, cri de matelot pour appeler la relève.
7 Debout ! les régiments sont là dans les casernes,
Sacs au dos, abrutis de vin et de fureur,
N'attendant qu'un bandit pour faire un empereur.
Hugo, les Châtiments, I, Nox.
8 Debout ! Qu'il vous souvienne des Vikings ! Assez dormi dans la vase ! Réveillez-vous : il n'est que temps; vous n'avez que trop vécu en carrassins, sous le varech et le sable.
André Suarès, Trois hommes, Ibsen, III, p. 102.
➪ tableau Principales interjections.
♦ Spécialt (personnes). Levé (alors qu'on devrait ou pourrait être couché). || Rester debout toute la nuit. || Passer la nuit debout. ⇒ Veiller.
9 Madeleine ne s'épargna pas et passa trois nuits debout au chevet de sa belle-mère, qui rendit l'esprit entre ses bras.
G. Sand, François le Champi, IV, p. 48
♦ Être debout dès le matin : se lever tôt. ⇒ Lever. || Vous êtes déjà debout !
10 Malgré l'heure matinale, Si-Chériff et son frère étaient debout pour recevoir nos adieux (…)
E. Fromentin, Un été dans le Sahara, I, p. 83.
♦ Guéri (→ ci-dessous, 3.). || Il va mieux, il est debout. || Il s'est remis debout rapidement. ⇒ Guérir, rétablir (se); → Pied (il est sur pied).
11 Monsieur, je suis ravi de vous trouver debout et de voir que vous vous portez mieux.
Molière, le Malade imaginaire, II, 2.
12 Mieux vaut goujat debout qu'empereur enterré.
La Fontaine, Contes, « La matrone d'Éphèse », VI.
♦ Par métaphore. En valeur d'adj. Dressé, fort. || « Un style debout » (Valéry, in T. L. F.). || Un peuple debout contre l'envahisseur. — ☑ Allusion hist. (interjection) :
13 Les Allemands ont envahi une tranchée et brisé toute résistance; nos soldats gisent à terre, mais soudain de cet amas de blessés et de cadavres, quelqu'un se soulève et saisissant à portée de sa main un sac de grenades, s'écrie : « Debout, les morts ! » À cet appel les blessés se redressent. Ils chassent l'envahisseur. Le mot sublime avait fait une résurrection.
14 Debout ! les damnés de la terre !
Debout ! les forçats de la faim !
Eugène Pottier, L'Internationale.
♦ ☑ Loc. Dormir debout, tout debout : éprouver un violent besoin de dormir au point de s'assoupir sans être couché. || Allez donc vous coucher, vous dormez debout.
♦ ☑ Fig. Conte, histoire à dormir debout : histoire ennuyeuse ou extravagante.
♦ ☑ Tenir debout (métaphore du sens 2 ou du sens 1 : choses). → aussi 3. || Argument qui ne tient pas debout, qui ne respecte pas les règles de la logique. || Projet qui ne tient pas debout, qui est illogique, irréalisable, peu réaliste. || Thèse, théorie qui ne tient pas debout, qui est insoutenable, qui ne résiste pas à l'examen.
15 L'Histoire universelle de Bossuet n'a plus, dans l'état actuel des études historiques, aucune partie qui tienne debout (…)
Renan, Questions contemporaines, in Œ. compl., t. I, p. 96.
16 Si l'on considère tout cela sous le jour des affaires, sous le jour commercial, votre projet ne tient pas debout.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier, V, Le désert de Bièvres, V, p. 72.
16.1 Ça ne tient pas debout, cette histoire, c'est rocambolesque, c'est du Grand-Guignol… « Tss… tss… tu perds la tête, je t'assure, c'est une simple coïncidence, je t'en réponds (…) »
N. Sarraute, le Planétarium, p. 270.
♦ ☑ Tomber, retomber debout : se tirer avec bonheur d'une situation dangereuse ou critique. → Pied (retomber sur ses pieds).
♦ ☑ Mourir debout, en pleine activité, dans l'exercice de ses fonctions.
17 Il crut qu'un évêque plus qu'un empereur devait mourir debout et dans l'exercice de sa charge (…)
Fléchier, Panégyrique, I, p. 312.
3 ☑ Être (tenir) debout, être (tenir) encore debout : se dresser, être en bon état (mur, construction); résister à la destruction. ⇒ Dresser (se). || Cette muraille est, tient toujours debout.
18 Ils vivent cependant, et leur temple est debout.
Racine, Athalie, II, 5.
18.1 (…) il ne reste pas beaucoup de maisons debout… plus ? moins qu'à Berlin ? pareil je dirais, mais plus chaud, plus en flammes, et des flammes en tourbillons… plus hautes… plus dansantes… vertes… roses… entre les murs…
Céline, Rigodon, p. 161.
♦ (Personnes). ☑ Ne pas tenir debout : être privé de force physique, être malade. || Ce vieillard ne tient pas debout. — Être ivre. || Après quelques verres je ne tiens plus debout.
18.2 C'est une femme toujours couchée, une femme qui ne tient pas debout.
J. Renard, Journal, 3 mars 1899.
♦ Fig. || Cette vieille institution tient encore debout. ☑ Ne rien laisser debout : tout détruire.
19 Le veau d'or est toujours debout;
On encense
Sa puissance
D'un bout du monde à l'autre bout.
J. Barbier et M. Carré, Faust, II, 4.
4 (Animaux). Dressé, et, spécialt, dressé sur ses pattes de derrière. Blason. Animal ainsi représenté.
♦ Chasse. || Mettre une bête debout, la forcer à se lancer.
♦ (Arbres). || Vente du bois debout, sur pied, l'acheteur se chargeant de l'abattage et de l'enlevage (opposé à façonné). — REM. Bois debout signifie aussi « coupé perpendiculairement au sens des fibres ».
5 Mar. (En parlant d'un navire). a Debout au vent, debout au courant, debout à la lame, face à eux. ⇒ Bout (I., 1. : bout au vent, à la lame…); → ci-dessous, Vent debout. || Faire route debout au courant. || Navire qui se place debout à la lame. — Vieilli. || Aborder (un navire) debout au corps, le heurter avec la proue, l'éperonner. || Aller, courir debout à la terre, se diriger vers le rivage.
b En valeur d'adj. || Vent debout, de face. || Navire qui a le vent debout. || Mer debout, dont les vagues se présentent face à l'étrave du navire.
♦ Par anal. || Coureur cycliste qui a le vent debout et qui pédale en danseuse.
c ☑ Loc. adv. et adj. Vent debout : avec l'étrave tournée dans la direction d'où vient le vent. || Virer de bord vent debout (s'oppose à virer vent arrière, ou lof pour lof). || Placer le bateau vent debout; se mettre vent debout pour mouiller.
19.1 Sur les quatre-vingt-dix milles que mesurait le périmètre de l'île, la côte sud en comptait une vingtaine depuis le port jusqu'au promontoire. De là, nécessité d'enlever ces vingt milles au plus près, car le vent était absolument debout.
J. Verne, l'Île mystérieuse, t. II, p. 573, 1874.
20 Nous avions vent debout, une brise fraîche qui augmentait toujours, comme si ce pays eût soufflé de toutes ses forces contre nous pour nous éloigner de lui.
Loti, Mme Chrysanthème, I, p. 2.
6 Adj. invar. Dr. || Magistrature debout : le ministère public, qui parle debout (par oppos. à magistrature assise). ⇒ Parquet.
21 Le désespoir de sa vie était qu'affligé d'un zézaiement un peu enfantin, il n'avait pu, dans la magistrature debout, remplir son mérite, car il se piquait d'être un grand orateur.
Zola, Paris, t. I, p. 79.
♦ Par une analogie plaisante. || « Mais cette place, il ne la cherchait que dans ce qu'il appelait le commerce debout, sa santé s'opposant à toute occupation assise » (Alphonse Daudet, Fromont jeune et Risler aîné, p. 17).
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CONTR. Assis, couché. — Malade. — Détruit, mort, renversé, ruiné.
COMP. Passe-debout.
Encyclopédie Universelle. 2012.