bout [ bu ] n. m. I ♦
1 ♦ Partie d'un objet qui le termine dans le sens de la longueur. ⇒ extrémité. Le bout d'une canne. Ciseaux à bouts ronds. Chaussures à bouts carrés. Bout aigu. ⇒ pointe. Couper le bout d'un bâton. ⇒ ébouter, raccourcir. Bout de cigarette. ⇒ mégot. Être assis au bout de la table, en bout de table. — Le bout du nez, de la langue, du doigt, de l'oreille. Bout de sein. ⇒ mamelon. À bout de bras. Tirer à bout portant (de façon que le bout de l'arme touche le but) :de très près. — Mettre bout à bout. ⇒ abouter, joindre. — Loc. Savoir qqch. sur le bout du doigt. Mener qqn par le bout du nez. Ne pas voir plus loin que le bout de son nez. Montrer le bout de son nez, de l'oreille. Manger du bout des lèvres . Du bout des dents. Avoir un mot sur le bout de la langue. Regarder par le petit bout de la lorgnette. Avoir du mal à joindre les deux bouts : parvenir difficilement à équilibrer, à boucler son budget. Brûler la chandelle par les deux bouts. Au bout du fil. — On ne sait par quel bout le prendre : il est d'une humeur difficile. Tenir le bon bout : être en passe de réussir.
2 ♦ La limite d'un espace. Le bout de la route. ⇒ 1. fin. Le bout du tunnel. « Elle vient de l'autre bout de la ville » (Duras). Le bout du monde, au bout du monde. Aller jusqu'au bout de ses idées. ⇒ jusqu'au-boutiste. Être au bout du rouleau. Au bout du compte. — De bout en bout [ d(ə)butɑ̃bu ] :d'une extrémité à l'autre. — Tout au bout : à l'extrême limite. — D'un bout à l'autre : dans toute l'étendue. « Cette architecture bizarre se répète d'un bout à l'autre avec la plus exacte symétrie » (Fromentin). — Fig. À tout bout de champ : à chaque instant, à tout propos, pour un oui pour un non. Être dérangé à tout bout de champ.
3 ♦ La fin d'une durée, de ce qui dure, s'épuise. ⇒ 1. fin, limite, terme. « Voyage au bout de la nuit », de Céline. Jusqu'au bout : jusqu'à la fin; fig. complètement.
♢ Être au bout de, à la fin de. Arriver au bout de sa carrière, de sa vie, d'un travail. ⇒ achever. Ne pas être au bout de ses peines. — AU BOUT DE... : après. Au bout d'un moment, de quelques minutes.
♢ ÊTRE À BOUT DE... : ne plus avoir de... (cf. Être à court). Être à bout de forces, de ressources, d'arguments, de nerfs, de souffle. Absolt Être à bout : n'en pouvoir plus, être épuisé. Ma patience est à bout. Pousser, mettre qqn à bout, l'exaspérer. — Venir à bout de (qqch. ou qqn),s'en débarrasser par une suite d'efforts. Venir à bout d'une difficulté, d'un adversaire. ⇒ triompher (de), vaincre. Nous en sommes venus à bout.
II ♦ (1580)
1 ♦ Partie, fragment quelconque de qqch. ⇒ morceau. Un bout de fil, de papier. Bout de pain, de fromage. Un bout de bois. — Loc. fam. En connaître un bout : être compétent (cf. En connaître un rayon). — Bouch. Bout saigneux : cou de veau, de mouton. fam. Discuter le bout de gras. — Cin. Bout d'essai.
♢ (1918; de bout de bois arg. « jambe ») Fam. Mettre les bouts : s'en aller. C'est l'heure de mettre les bouts.
2 ♦ Par anal. Ce qui est petit, incomplet, tronqué. Un bout de lettre : une lettre courte, rapide. Jouer un bout de rôle, un rôle secondaire, sans importance. Un petit bout de femme, pas grande. Un bout de chou : un petit enfant.
♢ Partie d'une étendue, d'un espace. Faire un bout de chemin. Un bout de jardin : un petit jardin. Un bout de terrain. ⇒ lopin. Fam. Faire un bout de conduite à qqn, l'accompagner une partie de sa route.
♢ Partie d'une durée. Un bon bout de temps : un temps assez long. « Il est resté là un bout de temps à rêvasser » (Genlis).
♢ Emphat. Ça fait un bout de chemin ! c'est loin. Ça fait un bout de temps qu'on ne s'est vu, longtemps.
III ♦ (On prononce [ but ] ) Mar. Cordage.
⊗ CONTR. Milieu; tout.
⊗ HOM. Boue.
● bout nom masculin (de bouter) Extrémité d'un corps ou d'un espace considérés dans le sens de la longueur ; limite d'un espace : Le bout du couteau est pointu. Le bout d'un champ. Fin d'un espace de temps, de la durée d'un état, d'une action : Le bout de l'année. Il a dormi jusqu'au bout du film. Ce qui garnit l'extrémité de certains objets : Un bout de parapluie en cuivre. Morceau, fragment de quelque chose : Un bout de fil. Quelque chose de court, de petit, d'incomplet : Écrire un bout de lettre. Partie d'une étendue, d'une durée : Faire un bout de chemin ensemble. Chaussure Extrémité antérieure de la forme ou de la chaussure. Jeux Synonyme de oudler. Marine Cordage. ● bout (expressions) nom masculin (de bouter) À bout de bras, à bras tendus ; en faisant le maximum d'efforts pour aider quelqu'un, une entreprise. À bout portant, se dit lorsqu'on tire sur quelqu'un avec une arme à feu, de très près. À bout touchant, se dit lorsqu'on tire sur quelqu'un en appuyant l'arme sur la victime. Aller jusqu'au bout (de quelque chose), persévérer dans son action, quelles que soient les difficultés. Au bout de, une fois ce temps écoulé : Au bout d'une heure. Vieux. Bas bout, haut bout, places les moins ou les plus honorables dans un banquet, les convives les plus distingués étant assis autrefois sur une sorte d'estrade. Bout à bout, les extrémités jointes l'une à l'autre ; les choses ajoutées les unes aux autres. Bout de chou, bout de zan, termes affectueux pour désigner un petit enfant assez mignon. Bout d'homme, bout de femme, personne de très petite taille. Bout du sein, mamelon. Familier. Ce n'est pas le bout du monde, ce n'est pas très difficile ; ce n'est pas loin ; ce n'est pas très coûteux, etc. De bout en bout, d'un bout à l'autre (de quelque chose), d'une extrémité à l'autre ; du début à la fin. En connaître, en savoir un bout, être expert sur une question. Être à bout, être épuisé physiquement ou nerveusement ; n'avoir plus de ressources, de patience, ne plus pouvoir résister. Être à bout de force, de courage, de souffle, etc., ne plus avoir de forces, de courage, de souffle, etc. Être à bout de nerfs, être très énervé. Être au bout de quelque chose, être sur le point d'avoir consommé entièrement quelque chose ; être près de voir la fin d'un travail, d'une peine, d'un effort, etc. Populaire. Mettre les bouts, partir, filer, s'enfuir. Ne pas savoir par quel bout prendre quelqu'un, se dit lorsque quelqu'un est peu conciliant, peu sociable, inabordable. Pousser quelqu'un à bout, l'énerver, le contrarier à un point extrême. Prendre quelque chose, quelqu'un par le bon, le mauvais bout, commencer une action, une approche de la manière la plus appropriée ou d'une manière maladroite. Familier. S'en aller par tous les bouts, par petits bouts, se détériorer, en parlant de quelque chose ; avoir une santé de plus en plus défaillante. Familier. Tenir le bon bout, être sur le chemin de la réussite, sur la bonne voie. Un (bon) bout de temps, un temps assez long. Venir à bout de quelque chose, l'épuiser, le consommer entièrement. Venir à bout d'une action, réussir à la mener à son terme après effort. Venir à bout de quelque chose, de quelqu'un, triompher d'eux, les vaincre après un effort. Voir le bout (de quelque chose), en voir la fin. Bois de bout, pièce de bois dont la surface est perpendiculaire au fil. (Le bois de bout est utilisé notamment en gravure.) [On écrit aussi bois debout.] Quai en bout, quai disposé pour le chargement en bout des wagons, à l'aide d'un pont mobile. Bout d'essai, séquence que l'on fait tourner à un comédien pour juger de son aptitude à tenir un rôle. Droite de bout, plan de bout, droite ou plan perpendiculaire au plan vertical de projection. Vent de bout, synonyme de vent debout. ● bout (homonymes) nom masculin (de bouter) boue nom féminin bous forme conjuguée du verbe bouillir bout forme conjuguée du verbe bouillir ● bout (synonymes) nom masculin (de bouter) Extrémité d'un corps ou d'un espace considérés dans le sens...
Synonymes :
- extrémité
- limite
Fin d'un espace de temps, de la durée d'un état...
Synonymes :
- achèvement
- terme
Contraires :
- milieu
Ce qui garnit l'extrémité de certains objets
Synonymes :
- pointe
Morceau, fragment de quelque chose
Synonymes :
- bribe
- fragment
- lambeau
- morceau
- parcelle
- section
- segment
- tronçon
Contraires :
- intégralité
- totalité
Marine. Vent de bout
Synonymes :
Synonymes :
- Jeux. oudler
bout
n. m.
d1./d Extrémité d'un corps; limite d'un espace. Le bout des doigts. Au bout de la ville.
— Loc. D'un bout à l'autre [doenbutalotr]. à bout portant: le bout de l'arme à feu touchant l'objectif.
|| Loc. fig. Brûler la chandelle par les deux bouts: V. chandelle.
— Manger du bout des dents, rire du bout des lèvres, de mauvaise grâce.
— Savoir qqch sur le bout du doigt, des doigts, à fond.
— Je l'ai sur le bout de la langue.
— Montrer le bout de l'oreille.
— Ne pas voir plus loin que le bout de son nez.
— On ne sait par quel bout le prendre: il est d'un caractère difficile.
— Avoir de la peine à joindre les deux bouts: manquer d'argent, boucler difficilement son budget.
— Au bout de la terre, du monde: très loin.
— Loc. fig., Fam. C'est le bout du monde: on ne peut aller plus loin dans une telle supposition, une telle possibilité.
d2./d Ce qui garnit l'extrémité de certaines choses. Mettre un bout à une canne.
d3./d Petite partie, morceau. Un bout de ruban, un bout de pain.
|| Loc. Fam. Petit bout: petit garçon, petite fille.
— Un bout d'homme: un homme très petit.
|| Un (bon) bout de chemin: une distance relativement importante.
d4./d Terme, fin. Le bout de l'année.
|| Loc. Fam. être au bout de son (ou du) rouleau.
— Il n'est pas au bout de ses peines: il n'en a pas fini avec les difficultés.
|| Au bout du compte.
|| (Québec) Fam. C'est le bout!: c'est le comble, c'est incroyable!
|| à bout: sans ressource, épuisé. être à bout.
— Pousser à bout: faire perdre patience.
|| à bout de: à la fin de.
— Loc. Venir à bout de...: réussir, vaincre.
|| à tout bout de champ.
|| Mettre bout à bout: joindre par les extrémités.
|| De bout en bout: d'une extrémité à l'autre; du début à la fin.
|| (Québec) L'auto a viré bout pour bout, a fait un tête-à-queue.
————————
bout
n. m. MAR Morceau de cordage, cordage. Passer un bout à un bateau pour le remorquer.
⇒BOUT, subst. masc.
I.— [Le plus souvent avec un compl. prép. de exprimant le tout dont le bout est partie] Portion extrême d'une chose considérée comme un continu allongé.
A.— [Le bout est celui d'un obj. gén. allongé]
1. [Le bout est considéré par rapport à la partie médiane de l'obj. : il y a deux bouts opposés]
a) [Aucun des bouts n'est valorisé] Les deux bouts de la table, les deux bouts de la lorgnette; le bout inférieur [du pieux] (Voyage de La Pérouse, t. 4, 1797, p. 31); le plus petit bout [des blocs de Carnac] (STENDHAL, Mémoires d'un touriste, t. 2, 1838, p. 14); à chaque bout [des bottes de roseau] (FLAUBERT, Correspondance, 1850, p. 167) :
• 1. Elle regardait fixement du côté de l'église, belle vierge ardente et fraternelle, tandis que ses fraîches dents carnassières mordaient dans un croûton de pain sec, d'un appétit enfantin. Augustin regardait les deux bouts libres de son foulard de laine, secoués par le vent continu.
MALÈGUE, Augustin, t. 1, 1933, p. 224.
— Loc. (sens concr. ou abstr.)
♦ [Avec art.] Les uns au bout des autres. À la suite les uns des autres. Série d'escaliers les uns au bout des autres (FLAUBERT, Correspondance, 1850, p. 194). D'un bout à l'autre. Discours improvisé d'un bout à l'autre (A. DUMAS Père, Le Chevalier de Maison-Rouge, 1847, I, p. 5).
P. métaph. Brûler la chandelle par les deux bouts. Épuiser, par des excès, ses ressources financières, ou sa santé. Var. brûler sa vie par les deux bouts. (cf. GRACQ, Un Beau ténébreux, 1945, p. 51) :
• 2. On brûlait ces chandelles sans compter, l'une succédant à l'autre à peine éteinte. Et comme on avait laissé dépasser les mèches aux deux bouts, on les brûlait tout entières, les retournant sur elles-mêmes, dès qu'elles étaient consumées jusqu'au milieu. Jamais l'expression « brûler la chandelle par les deux bouts » ne fut plus juste.
PESQUIDOUX, Le Livre de raison, 1925, p. 204.
♦ [Sans art.] Bout à bout. Les extrémités jointes l'une à l'autre. Coudre, attacher bout à bout. La tésure qui constitue le filet est formée de 200 à 400 « roies » ajustées bout à bout (A. BOYER, Les Pêches mar., 1967, p. 51). Au fig. Mettre bout à bout. Mettre ensemble plusieurs choses en les attachant par leurs extrémités. Être mis bout à bout, se toucher bout à bout; phrases qui se touchent bout à bout (STENDHAL, Napoléon, t. 1, 1842, p. 368); mettre bout à bout les éclats successifs de son talent (SAINTE-BEUVE, Pensées et maximes, 1869, p. 110) :
• 3. Le système d'égouts existant à cette époque, mis bout à bout, eût donné une longueur de onze lieues. Nous avons dit plus haut que le réseau actuel, grâce à l'activité spéciale des trente dernières années, n'a pas moins de soixante lieues.
HUGO, Les Misérables, t. 2, 1862, p. 532.
Rem. On trouve chez Cendrars l'expr. bout à boutées qui désigne des pierres assemblées bout à bout et de façon irrégulière (Moravagine, 1926, p. 79).
De bout en bout. D'une extrémité à l'autre, du commencement à la fin, entièrement. Vaste salle qui traverse le logis de bout en bout (VIOLLET-LE-DUC, Entretiens sur l'archit., t. 2, 1872, p. 373) :
• 4. Il est plus simple de paraître d'un seul bloc si quelque personnage central ne s'écarte jamais d'un vice ou d'une vertu qu'il possède et si ses comparses ne changent pas non plus leur ligne de bout en bout.
COCTEAU, Les Parents terribles, 1938, p. 179.
b) [Un des bouts est valorisé par rapport à un autre]
— [Avec art.]
♦ Le haut-bout de la table. La place regardée comme la plus honorable d'un banquet. Le bas-bout de la table. Lors d'une réunion ou d'un banquet, place la moins honorable (cf. BALZAC, Le Père Goriot, 1835, p. 64). Au fig. Tenir le haut, ou le bas-bout. Être ou non considéré dans une certaine société. Le haut bout de la société financière (BALZAC, La Maison Nucingen, 1838, p. 622).
♦ MAR. Le bon bout. La partie du câble qui reste à bord. Fig. et fam. Avoir, tenir le bon bout. Avoir des avantages assurés et être proche d'en obtenir d'autres plus importants :
• 5. À mesure que je détachais, fignolais des détails sur le cas de sa mère, je la voyais devant moi blêmir Lola, faiblir, mollir. « Ah! la garce! que je me disais moi, tiens-la bien, Ferdinand! pour une fois que t'as le bon bout! ... Ne la lâche pas la corde... T'en trouveras pas une si solide avant longtemps! ...
CÉLINE, Voyage au bout de la nuit, 1932, p. 277.
♦ Prendre une personne par le bon (ou le mauvais) bout. Tenir compte ou non de son caractère, de ses habitudes, de ses sentiments.
♦ Prendre, commencer une affaire ou un travail par le bon (ou le mauvais) bout. Débuter dans de bonnes ou de mauvaises conditions :
• 6. Il [le corps] est magique, et quelle merveille c'est, et que de richesses inouïes il contient! Mais, chaque fois que vous découvrez quelque chose, c'est « par le mauvais bout ». Vous avez cru faire une œuvre considérable en soignant votre peau; mais votre âme est couverte d'eczéma. Elle se gratte tout le temps avec ses grands ongles noirs.
GIONO, Poids du ciel, 1938, p. 11.
♦ [En parlant d'une pers. au caractère difficile, et de l'impossibilité où l'on se trouve de discuter avec elle] Ne pas savoir par quel bout la prendre :
• 7. J'ai toujours eu les cheveux plantés en plusieurs sens et les dents et les poils de la barbe. Or les nerfs et toute l'âme doivent être plantés comme cela (...) C'est ce qui déroute ceux qui pourraient me débarrasser de cette lèpre mythologique. Ils ne savent par quel bout me prendre.
COCTEAU, La Difficulté d'être, 1947, p. 6.
♦ [En parlant de la manière d'aborder une affaire par son côté le plus ou le moins important] Regarder une chose par le gros bout, ou par le petit bout de la lorgnette :
• 8. ...
C'est moi que votre prose en colère a choisi;
Cette marche du temps, qui ne sort d'une église
Que pour entrer dans l'autre, et qui se civilise;
Ces grandes questions d'art et de liberté,
Voyons-les, j'y consens, par le moindre côté,
Et par le petit bout de la lorgnette...
HUGO, Les Contemplations, t. 1, 1856, p. 49.
— P. méton. Objets placés au bout. Bouts de table. Pièces généralement exécutées en argent ou en céramique, au rôle essentiellement décoratif, et qui se plaçaient aux extrémités d'une table servie (cf. S. GRANDJEAN, L'Orfèvr. du XIXe s. en Europe, 1962, p. 50).
2. [Le bout est considéré par rapport à un point de départ : il n'y a qu'un bout qui est le point terminal opposé]
a) Portion terminale d'un objet allongé :
• 9. ...
C'est la jeune fille
...
De loin elle semble
L'abeille qui tremble
Au bout d'une fleur.
HUGO, La Esmeralda, 1836, p. 139.
• 10. Il aimait à sentir ce souple corps tout contre lui; rien n'est plus joli que le bout des bottines qui sortent de dessous la robe et s'y recachent à chaque pas. Le bout était en cuir verni, avec un éclair de soleil; parfois elle relevait sa jupe, alors on voyait la forme du pied.
RAMUZ, Aimé Pache, peintre vaudois, 1911, p. 232.
— Spécialement
♦ [En parlant du téléphone] Le bout du fil, prendre le bout du fil, avoir un interlocuteur au bout du fil :
• 11. Le plus plaisant est que le chef, qui interrogeait à l'autre bout du fil, ne demandait pas une réponse vraie mais une réponse convenable; j'en eus mille preuves dans la suite.
ALAIN, Propos, 1921, p. 219.
♦ BOUCH. Le bout saigneux. L'extrémité saignante du cou d'un veau ou d'un mouton que l'on vend en boucherie.
♦ MAR. Le bout du navire. L'avant, la proue.
• 12. À chaque instant il [Thévenant] s'arrêtait, soit que « ça montât », soit que « ça descendît », soit que le mistral soufflât « de bout », comme disent les marins.
L. DAUDET, L'Amour est un songe, 1920, p. 189.
Aborder de bout au corps. En touchant de la proue le corps d'un autre navire.
Rem. Sens cités par la plupart des dict. gén. du XIXe et du XXe siècle. Ac. Compl. 1842 et LITTRÉ notent aussi le subst. masc. bout-perdu : Extrémité d'une cheville qui ne traverse pas entièrement la muraille d'un bâtiment.
— [Avec valorisation de cette partie] Extrémité d'un objet ayant une fonction particulière. Bout en fer, en cuivre, en ivoire. Un bâton à gros bout (BALZAC, Le Médecin de campagne, 1833, p. 65) :
• 13. Ces hommes ont l'air mélancolique et résigné; ils fument leurs longues pipes à bout d'ambre. Il y a là une trentaine de bâtiments de guerre d'une belle construction, et qui semblent prêts à mettre à la voile; mais il n'y a ni officiers ni matelots, et cette flotte magnifique n'est qu'une décoration du Bosphore.
LAMARTINE, Voyage en Orient, t. 2, 1835, p. 387.
— [Avec dépréciation de cette partie] En bout de. Être assis, être placé en bout de table.
Rem. Dans ce dernier cas, l'absence d'art. devant bout et devant le compl. est en relation avec l'emploi partic. de la prép. -en, qui normalement exclut l'emploi de l'article.
— Spéc. [En parlant de l'extrémité d'une arme : fusil, épée, etc.] :
• 14. ... cette main, (...) si elle dirigeait sur votre cœur le bout d'un pistolet ou la pointe d'une épée, plomb ou acier vous irait droit au cœur! ...
A. DUMAS Père, Thérésa, 1832, V, 4, p. 229.
♦ [Sans art., expr. figées] À bout touchant (vieilli), à bout portant. De telle façon que le bout de l'arme touche la cible :
• 15. Les assaillants avaient le nombre; les insurgés avaient la position. Ils étaient au haut d'une muraille, et ils foudroyaient à bout portant les soldats trébuchant dans les morts et les blessés et empêtrés dans l'escarpement.
HUGO, Les Misérables, t. 2, 1862, p. 492.
Au fig. Lâcher une plaisanterie, une injure, donner une réponse à bout portant. En face, très directement, d'une manière instantanée :
• 16. [Fernand] : ... je suis vieux comme Mathusalem, je ne l'ignore pas, et c'est ce qui fait que réellement je tombe de surprise (...) lorsqu'il m'arrive (...) de recevoir une déclaration à bout portant...
O. FEUILLET, Scènes et proverbes, 1851, pp. 55-56.
b) En partic. [En parlant d'une partie du corps plus ou moins allongée] Bout de la langue, — du nez, — du sein (mamelon) :
• 17. Moi, j'ai eu comme sein le bout noir d'une fellah d'Égypte et je me demande jusqu'à quel point le lait d'ânesse de cette plantureuse nounou ne m'a pas incorporé le goût de la mort antique, de son culte et de ses mystères?
CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 238.
♦ Bout de sein. Désigne aussi un instrument de caoutchouc ou d'ivoire ramolli destiné à former le bout du sein et à préserver le mamelon malade.
Rem. Attesté dans la plupart des dict. gén. du XIXe et du XXe siècle.
— [La partie du corps ne fait l'obj. d'aucune valorisation partic.]
♦ [Expr. et loc. fig. avec art.] Avoir un mot, un nom sur le bout de la langue, sur le bout de la plume. Être sur le point de s'en souvenir, de l'avoir naturellement à l'esprit, ou de l'écrire. Avoir une question sur le bout de la langue (FARRÈRE, L'Homme qui assassina, 1907, p. 177); avoir une sottise au bout de la plume (MUSSET, Namouna, 1832, p. 412) :
• 18. — Ça? Attendez donc! me répond-il. Je ne me rappelle pas son nom. Il y en avait deux, vous savez bien, qui couraient dans l'herbe, la semaine dernière, l'un après l'autre. Diable de nom! Je l'ai sur le bout de la langue.
Il cherche. Nous cherchons ensemble.
— Ah! dit-il soudain, j'y suis! Je me rappelle. Eh! bien, monsieur, c'est un petit chien.
RENARD, Journal, 1896, p. 320.
♦ [Expr. et loc. fig. sans art.] À bout de bras, tenir qqc. à bout de bras. À l'extrémité de la main et en ayant du mal à porter l'objet. Boucliers portés à bout de bras (GIDE, Le Retour du Tchad, 1928, p. 967). Au fig. Soutenir qqn ou qqc. à bout de bras. Faire tout son possible pour qu'une situation demeure la même, faire le maximum pour aider une personne se trouvant dans la misère physique ou morale (cf. MONTHERLANT, Les Lépreuses, 1939, p. 1468).
— [La partie du corps est valorisée]
♦ Montrer le bout du nez. Se faire voir, se faire remarquer dans une conversation; dévoiler ses intentions (cf. L. SCHNEIDER, Les Maîtres de l'opérette fr., Charles Lecocq, 1924, p. 233).
♦ Toucher la vérité du bout des doigts. Approcher de la solution.
♦ Avoir une qualité (ou un défaut) au bout des doigts ou jusqu'au bout des ongles. En avoir beaucoup (cf. BALZAC, Eugénie Grandet, 1834, p. 141). Var. Avoir de l'honneur jusqu'au bout des cheveux (BALZAC, Eugénie Grandet, 1834, p. 141).
♦ Connaître, posséder son métier jusqu'au bout des ongles. Le savoir à fond (cf. SAINTE-BEUVE, Pensées et maximes, 1868, p. 102).
♦ Savoir qqc. sur le bout des doigts. Par cœur :
• 19. Il paraît certain qu'il est né en Italie, dans la Capitanate, et qu'il a été élevé en Espagne. Il se prétend allié à une grande famille espagnole. Lord Clinton sait cela sur le bout du doigt.
HUGO, Marie Tudor, 1833, journée I, 1, p. 7.
♦ Connaître qqc. ou qqn sur le bout du doigt :
• 20. Oh! je les connais sur le bout du doigt, les Rougon; je les ai suivis. Ce sont des gens très forts! Ils avaient une rage d'appétits à jouer du couteau au coin d'un bois. Le coup d'État les a aidés à satisfaire un rêve de jouissances qui les torturait depuis quarante ans.
ZOLA, La Conquête de Plassans, 1874, p. 951.
— [Avec dépréciation de la partie du corps]
♦ Ne pas voir plus loin que le bout de son nez. Avoir peu de prévoyance :
• 21. — C'est tout ce que vous leur reprochez? une erreur de calcul? demanda Scriassine avec sévérité.
— Je leur reproche de ne pas y voir plus loin que le bout de leur nez.
Dubreuilh haussa les épaules : « La reconstruction, c'est très joli : mais pas par n'importe quel moyen. »
S. DE BEAUVOIR, Les Mandarins, 1954, p. 110.
♦ Mener qqn par le bout du nez. Lui faire exécuter tous ses caprices :
• 22. Vous viendrez vous installer ici. Et dès aujourd'hui. Ou vous aurez affaire à Cosette. Elle entend nous mener tous par le bout du nez, je vous en préviens.
HUGO, Les Misérables, t. 2, 1862, p. 658.
♦ Cela lui pend au bout du nez, voilà ce qui lui pend au bout du nez (FLAUBERT, Correspondance, 1863, p. 320).
♦ Manger du bout des dents, du bout des lèvres. [Manger] sans appétit et avec une sorte de dégoût (cf. T. GAUTIER, Le Capitaine Fracasse, 1863, p. 239).
♦ Sourire du bout des dents, sourire du bout des lèvres (A. DUMAS Père, Le Comte de Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 341).
♦ Remercier du bout des lèvres. Remercier sans trop ouvrir la bouche, et plus figurément, sans franchise (cf. STENDHAL, La Chartreuse de Parme, 1839, p. 302).
♦ Ne pas remuer le bout du petit doigt. Ne pas bouger, ne rien faire pour quelqu'un :
• 23. Dire que si, en votre qualité d'ange, vous vouliez seulement, remuer le bout de votre petit doigt, vous forceriez, tout bonnement, — en dépit de la niaiserie et de l'injustice des objections possibles, — ...
VILLIERS DE L'ISLE-ADAM, Correspondance, 1884, p. 56.
♦ Montrer le bout de l'oreille. Faire une courte apparition, donner son avis dans une discussion, et p. ext. se trahir (cf. BREMOND, Hist. littér. du sentiment relig. en France, t. 4, 1920, p. 477).
♦ Se faire tirer le bout de l'oreille. Se faire prier longuement avant de se décider.
♦ Repousser qqn ou qqc. du bout du pied (BILLY, Introïbo, 1939, p. 54).
♦ Le bout de nous-mêmes (rare). Le plus profond de nous, notre propre limite (cf. TEILHARD DE CHARDIN, Le Phénomène humain, 1955, p. 292).
B.— [Le bout est celui d'un espace d'une certaine étendue, qu'on peut parcourir en marchant droit devant soi]
1. [Il y a deux bouts à raison d'un bout pour chacun des deux sens de la marche] D'un bout à l'autre du pays, de la pièce (CLAUDEL, Le Ravissement de Scapin, 1952, p. 1345); aux deux bouts de la terre (MUSSET, La Confession d'un enfant du siècle, 1836, p. 357).
— P. ext. Point cardinal, direction de marche. Aux quatre bouts de l'Europe (PESQUIDOUX, Le Livre de raison, 1925, p. 11).
2. [Le bout est considéré par rapport à un seul point de départ : il n'y a qu'un bout, celui qui est en fin de parcours] Point terminal. Bout du chemin, d'une route, etc. :
• 24. ... dans ce pays peu ravagé par les Parisiens, il était certain d'être à l'abri; la difficulté des communications mal assurées par un ridicule chemin de fer, situé au bout de la ville, et par de petits tramways, partant et marchant à leur guise, le rassurait.
HUYSMANS, À rebours, 1884, p. 11.
♦ À tout bout de champ (littéralement). À chaque fois que la charrue arrive au bout du champ. Au fig. Sans arrêt (cf. MUSSET, Lettres de Dupuis et Cotonet, 1836-37, p. 666).
— P. ext. et souvent péj. Le point le plus éloigné. Le bout de la terre, le bout du monde (Voyage de La Pérouse, t. 3, 1797, p. 137).
♦ Au fig. [Pour désigner la limite des appréciations possibles] C'est le bout du monde, ce n'est pas le bout du monde :
• 25. C'est tout le bout du monde s'il [le jeune Marseillais] va passer une heure au théâtre (...) et encore cette heure il la passe dans les coulisses...
STENDHAL, Mémoires d'un touriste, t. 2, 1838, p. 406.
— Loc. Au bout de. Au bout du jardin (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 142); au bout d'un parc (SARTRE, La Mort dans l'âme, 1949, p. 279).
— Expr. proverbiale. Au bout du fossé la culbute. Se dit d'une personne trop aventureuse qui risque de payer les conséquences de sa témérité.
— P. métaph. Être au bout du rouleau. Être à la limite de ses forces.
Rem. Attesté dans la plupart des dict. gén. du XIXe et du XXe siècle.
C.— Portion extrême d'un espace de temps, d'une durée, d'une certaine étendue.
1. [Il y a deux bouts, le temps étant considéré comme un espace dont on considère le début et la fin]
— Loc. fig. Joindre les deux bouts (de l'an). Ne pas dépenser plus que le revenu dont on dispose d'un bout de l'année à l'autre. Avoir du mal à joindre les deux bouts. Avoir tout juste de quoi subsister :
• 26. Le cinéma français est également touché par la crise. Les deux piliers de l'industrie cinématographique, Pathé et Gaumont, s'écroulent. L'insécurité, l'incertitude, la crainte, la difficulté de joindre les deux bouts caractérisent alors la condition ouvrière.
B. CACÉRÈS, Hist. de l'éduc. pop., 1964, p. 88.
2. [Il n'y a qu'un bout, le temps étant considéré comme une marche irréversible vers son terme]
a) [La durée est celle du mouvement diurne ou annuel de la terre] Au bout de vingt-quatre heures; au bout de la nuit; au bout d'un an, au bout de trente ans; au bout d'un siècle et demi (TAINE, Philos. de l'art, t. 1, 1865, p. 6). Les moules sont consommables au bout de deux ou trois ans (A. BOYER, Les Pêches mar., 1967, p. 82). Mettre les jours au bout les uns des autres (A. DUMAS Père, Le Comte de Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 162).
— Loc. Au bout de l'an. P. méton., bout de l'an, service du bout de l'an. Service que l'on fait solennellement pour un mort à l'époque anniversaire de son décès (cf. SAINTE-BEUVE, Port-Royal, t. 5, 1859, p. 98). Au bout de. À l'expiration d'un délai de... Au bout de cinq à six semaines, les vivres vinrent à manquer (Le Petit navire, chanson pop.). Au bout du compte. Après tout, tout considéré (cf. GREEN, Journal, 1934, p. 174).
b) [La durée est celle de la vie, d'une tranche de vie] Au bout de l'enfance, de l'adolescence; au bout de la vie (LAMARTINE, Harmonies, 1830, p. 425).
— En partic. en bonne ou en mauvaise part [La durée est celle d'un effort physique ou moral, d'une épreuve pénible, etc.]
♦ Au bout de + art. déf. (ou adj. possessif, etc.) + subst. Aller jusqu'au bout d'une affaire. Jusqu'à sa conclusion. Aller (jusqu')au bout. Jusqu'à la limite du possible. P. anal. Être au bout de ses économies, de ses provisions, de ses munitions, etc. Voir (ou non) le bout de ses déboires, être (ou non) au bout de ses peines, de ses ennuis. En avoir terminé (ou non) avec eux. Le bout de leur misère (ZOLA, La Débâcle, 1892, p. 399) :
• 27. Les forts n'hésitent pas. Ils s'attablent, ils sueront. Ils iront au bout. Ils épuiseront l'encre, ils useront le papier.
RENARD, Journal, 1887-1910, p. 2.
• 28. Nos regards prirent la direction qu'indiquait le bras de notre ami, et nous aperçûmes le chevreuil qui gravissait lentement comme un voyageur au bout de ses peines, les pentes douces des prairies dont je viens de parler.
LA HÉTRAIE, La Chasse, vén., fauconn., 1945, p. 179.
♦ À bout de + subst. art. ou déterminatif
[Désigne la fin d'une chose ou d'une opération] Être à bout d'arguments; être à bout de raisonnement (STENDHAL, Lucien Leuwen, t. 1, 1836, p. 171); être à bout de course (MAURIAC, Les Mal Aimés, 1945, p. 104). Venir à bout de qqn ou de qqc. (ennemi, dessein, difficulté, travail). Espérer venir à bout d'obstacles (FROMENTIN, Dominique, 1863, p. 103); venir à bout de tout (STENDHAL, Correspondance, t. 1, 1842, p. 43) :
• 29. ... ces terres fortes donnent lieu à des sentiers boueux aux ornières profondes. Longtemps la circulation y a été difficile. Il faut l'effort vigoureux des grands bœufs gascons pour venir à bout des charrois et des labours.
VIDAL DE LA BLACHE, Tabl. de la géogr. de la France, 1908, p. 366.
• 30. Le 17e sur leurs talons se jette dans Crosten, mais, bientôt assailli lui-même par les Prussiens reformés, surtout par le régiment de l'électeur qui n'a pas souffert et qui attaque en flanc, le 17e, à bout de cartouches, perd Crosten, se retire sur Beulwitz, où il est d'ailleurs relevé par le 64e; il passe en réserve.
FOCH, Des Principes de la guerre, 1911, p. 300.
[Désigne une partie du corps ou un état psychol.] Être à bout de forces. À la limite de ces dernières. Fig. et pop. Être à bout de nerfs, de patience :
• 31. ... tout cela nous a fait lâches comme des enfants. Nous étions à bout de forces, à bout d'efforts, à bout de tension nerveuse. Quand la porte s'est ouverte, nous avons dit : « Nous enverrons quelqu'un », et nous nous sommes sauvés.
E. et J. DE GONCOURT, Journal, 1862, p. 1115.
• 32. Calé sur le bureau, la tête dans la main gauche, il dicte ou donne des ordres, à bout de nerfs.
MALRAUX, Les Conquérants, 1928, p. 126.
Au fig. et fam. Être à bout de souffle. Être sans ressources (G. et H. COSTON, L'A. B. C. du journ., 1952, p. 44). P. ext. et iron. Un harmonium à bout de souffle (L'Enseign. en France, L'Enseign. de la mus. et l'éduc. musicale, t. 2, 1950, p. 9).
Emploi abs., loc. Patience à bout (SUE, Atar Gull, 1831, p. 6). Être, mettre, pousser à bout :
• 33. Le Sénat laissait aux proconsuls d'autres moyens de s'enrichir eux-mêmes. Ils se saisissaient du blé des habitants, le taxaient à un prix énorme et affamaient le pays. De pareilles vexations auraient poussé à bout des hommes plus pacifiques.
MICHELET, Hist. romaine, t. 2, 1831, p. 106.
Rem. À bout de est plus général que au bout de, comme le montre l'absence ou la présence d'un art. ou d'un déterminatif devant le complément.
II.— [Le bout est une chose ou un être relativement petit, de forme allongée; gén. introduit par un compl. sans art., indiquant en quoi consiste le bout]
A.— [Le bout est le résidu d'un processus d'épuisement; la partie principale a disparu] Bouts de chandelle. Menus morceaux de chandelles subsistant une fois qu'elles ont fini de servir.
— Loc. fig. Faire des économies de bouts de chandelles. Faire des épargnes ridicules sur de très petites choses (cf.BALZAC, Les Petits bourgeois, 1850, p. 48).
Rem. 1. Dans cette loc. chandelle désigne à la fois l'objet chandelle et la matière de cet objet. D'où la position de transition de cette constr. entre les emplois I et II. 2. On pourrait placer ici les constr. mentionnées supra sous I C 2 b : être à bout de souffle indique en effet que les réserves de souffle sont en train de s'épuiser (fin de processus).
B.— [Le compl. est explicité] Fragment détaché (ou censé détaché) de l'extrémité d'une chose ou d'un espace allongé; p. ext., petit morceau, fragment de quelque chose.
1. [Le bout est celui d'un objet matériel ou culture] Bout de bois, de terrain; bout de fil de fer, de papier; bout de sermon, bout de messe :
• 34. Et, dans le calme brusque qui se fit, on distingua, au fond de l'arrière-boutique, la voix épaisse de Coupeau. Il restait bon enfant, il riait tout seul, en lâchant des bouts de phrase.
ZOLA, L'Assommoir, 1877, p. 514.
• 35. Dès qu'il fut entendu que nous partagerions, soldats, les commodités relatives du bastion avec ces vieillards, ils se mirent à nous détester à l'unisson, non sans venir toutefois en même temps mendier et sans répit nos résidus de tabac à la traîne le long des croisées et les bouts de pain rassis tombés dessous les bancs.
CÉLINE, Voyage au bout de la nuit, 1932, p. 112.
— Arg. Tailler un bout de gras, discuter le bout de gras. Faire un brin de conversation, parler d'une affaire :
• 36. Tandis qu'ils [le chêne et le roseau] discutaient l'bout [d'] gras,
Le temps tourna à la godille.
MARCUS, 15 fables célèbres (racontées en arg. par Marcus) 1947, p. 4.
2. [Le bout est celui d'un mouvement spatial, d'un espace] Un bout de chemin (BECQUE, Les Corbeaux, 1882, p. 140); faire un bout de conduite à qqn (PESQUIDOUX, Le Livre de raison, 1932, p. 27) :
• 37. Parfois, le dimanche, lorsqu'il faisait beau, Camille forçait Thérèse à sortir avec lui, à faire un bout de promenade aux Champs-Élysées. La jeune femme aurait préféré rester dans l'ombre humide de la boutique; elle se fatiguait, elle s'ennuyait au bras de son mari qui la traînait sur les trottoirs en s'arrêtant aux boutiques avec des étonnements, des réflexions, des silences d'imbéciles.
ZOLA, Thérèse Raquin, 1867, p. 61.
— P. antiphrase valorisante. Un bon bout de chemin. Une grande distance.
— P. méton., CIN. Un bout d'essai. ,,Bout de pellicule impressionnée, prélevée à la fin d'un plan, par l'assistant-opérateur, et développé immédiatement pour le contrôle de la prise de vue`` (G. COHEN, SÉAT, Essai sur les principes d'une philos. du cin., introd. gén., Nomenclature cinématographique, 1946, p. 196).
3. [Le bout est celui d'un espace de temps, d'une durée] Un bout de journée; un bout de temps (COLETTE, Julie de Carneilhan, 1941, p. 27).
C.— Emploi abs. [Sans compl. prép.]
— [Le bout désigne une partie du corps] S'en aller par petits bouts.
♦ Au fig. et pop. Mettre les bouts (de bois : proprement les jambes). Se sauver rapidement (cf. CÉLINE Mort à crédit, 1936, p. 209).
III.— [En constr. expressive] (Un) bout de (+ subst. d'inanimé ou d'animé). Petit.
A.— [Le compl. désigne un inanimé : chose ou opération] Écrire un bout de lettre Écrire une petite lettre; faire un bout de toilette Faire une toilette sommaire :
• 38. — Ne conviendrait-il pas, messieurs, de nous rendre tous autour du lit du blessé, et ensuite de faire une consultation? Je ferai dresser un bout de procès-verbal de ce qui sera dit, et je le porterai à M. le Ministre de l'Intérieur.
STENDHAL, Lucien Leuwen, t. 2, 1836, p. 353.
B.— Dans le lang. affectif [Le compl. désigne un animé : notamment un enfant, une femme] Un bout d'homme, un bout de chou (ou bout'chou), un bout de zan :
• 39. Les hommes de lettres ont fait le tour des idées, et ils finissent par se marier avec de pauvres petits bouts de femmes laides.
RENARD, Journal, 1897, p. 402.
— [Avec ell. du compl.] Un petit bout, un gentil petit bout.
Rem. 1. Dans ces constr. où bout de signifie « petit », il y a anticipation expressive du subst. bout exprimant une qualification; en synt. non expressive ou aurait une constr. d'attribut ou d'appos. : une lettre qui n'est qu'un bout (de papier) devient en synt. expressive un bout de lettre; un chou (« petit enfant ») qui n'est qu'un bout (d'homme) devient en synt. expressive : bout de chou. Cf. les tournures usuelles comme mon gendarme de mari, issu par anticipation expressive du qualificatif gendarme. de : mon mari qui est un gendarme. 2. LITTRÉ et Nouv. Lar. ill, enregistrent le subst. masc. boudrillon appliqué p. plaisant. au duc de Saint-Simon et qui désigne un homme de petite taille.
PRONONC. — 1. Forme phon. :[bu]. Les dict. soulignent que le t ne se prononce que devant une voyelle. 2. Homon. et homogr. boue, (je, tu) bous et (il) bout (du verbe bouillir). Enq. :/bu/.
ÉTYMOL. ET HIST. — A.— Ca 1121 « coup » (St Brandan, éd. E.G.R. Waters, Oxford, 1928, 1025) — seulement au Moy. Âge. B.— 1. 1180-1200 « extrémité d'un objet » (Aliscans, 166 dans T.-L.); spéc. subst. 1288 « avant, proue d'un navire » (JACQUEMARD GIELEE, Renart le Nouvel, 5032 dans T.-L.) loc. — 1268-71 bout à bout « sans avantage de part ni d'autre » (E. BOILEAU, Métiers, 316, ibid.) — XIVe s. (GDF. Compl.); 1573 id. « extrémité contre extrémité, les extrémités se rejoignant » (A. PARÉ, Des Monstres et Prodiges, éd. Malgaigne, Paris, 1841, III, 42); 1718 mettre bout à bout « énumérer » (Ac.); — XIVe s. a chaque bout de champ « à chaque instant » (Troilus, IV dans GDF. Compl. : Ainsi que font les coqs a chacun bout de champ [chant?]) — hapax; 1580 (MONTAIGNE, I, 40 dans LITTRÉ); 1636 à tout bout de champ (MONET, Invantaire des deus lang., françoise et latine, Lyon); — 1468 prendre qqn par le bon bout (G. CHASTELLAIN, Chron. des ducs de Bourgogne, II, ch. 25 dans LITTRÉ); a) p. anal. XVe s. « fin d'une durée » (ALAIN CHARTIER, Le Débat du Réveille matin dans LITTRÉ : Dont j'ai souffert tant longuement Dure peine ... Et si n'en puis trouver le bout); loc. XVe s. venir à bout de (FROISSART, I, 1, 315, ibid.); 1616-20 être à bout de (D'AUBIGNÉ, Hist., II, 305, ibid.); b) p. ext. 1538 « ce qui garnit l'extrémité de certaines choses » (EST.); 2. 1580 « morceau qui reste de quelque chose » (Montaigne d'apr. FEW t. 15, 1, p. 216b); 1680 (RICH. : Un bout de chandelle); d'où p. anal. 1561 (DU BELLAY, V. 8, verso dans LITTRÉ : Petit bout d'homme).
STAT. — Fréq. abs. littér. :17 938. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 15 553, b) 32 571; XXe s. : a) 31 629, b) 26 542.
BBG. — MAT. Louis-Philippe 1951, p. 145. — QUEM. 2e s. t. 3 1972, p. 27; t. 4 1972, pp. 32-33. — REID (T. B. W.). The Dirty end of the stick. In : [Mél. Orr (J.)]. R. Ling. rom. 1967, t. 31, pp. 55-63. — ROG. 1965, p. 118, 134. — WALT. 1885, p. 79.
bout [bu] n. m.
❖
———
1 Partie extrême, terminale (d'un objet allongé). ⇒ Extrémité, limite. || Tenir les deux bouts d'une corde, d'une couverture. || Le bout d'un bâton, d'une canne, d'un parapluie. || Embout, garniture, virole garnissant le bout d'un bâton. || Le bout d'une chaussure. ⇒ Carre. || Ciseaux à bouts ronds, droits. || Bout aigu, piquant. ⇒ Pointe. || Le bout d'une aile. ⇒ Aileron. || Le bout d'un morceau de bois. || Couper le bout (d'un bâton). ⇒ Ébouter, raccourcir. || Manger un œuf à la coque par le gros bout, le petit bout (cf. Les « gros boutiers » et les « petits boutiers », dans les trad. franç. des Voyages de Gulliver de Swift). || Le bout d'une pipe. — (Avec à). || À un bout, à l'autre bout, aux deux bouts, au bout de… — Par métaphore. « Le pouvoir est au bout du fusil » (slogan révolutionnaire). || Repousser quelque chose du bout du pied.
0.1 (…) les moustaches, d'une longueur démesurée, poissées et maintenues à chaque bout par un cosmétique, remontaient en arc de cercle (…)
Th. Gautier, le Capitaine Fracasse, p. 45.
0.2 (…) une planche posée sur deux bâtons, dont le Tyran, Blazius, Scapin et Léandre tenaient les bouts, forma une civière.
Th. Gautier, le Capitaine Fracasse, p. 230.
0.3 (…) il devient alors impossible d'apercevoir, depuis le pont, autre chose que la paroi abrupte de la digue fuyant tout droit vers le quai et interrompue à l'autre bout (…)
A. Robbe-Grillet, le Voyeur, p. 14.
♦ Techn. || Bois de bout, travaillé (scié, entaillé, gravé, etc.). perpendiculairement aux fibres (opposé à bois de fil).
♦ ☑ Loc. Au bout du fil : au téléphone. ⇒ Fil (cit. 25.1 et supra). || Qui est au bout du fil ? (cf. À l'appareil).
♦ (1288). Mar. (d'un navire). Vx. || Avoir le vent de bout (mod. vent debout), face au navire. — Mod. || Bout au vent, bout au courant, bout à la lame, face à eux (dans ces trois expressions, bout se prononce [but]). || Être, rester, se mettre bout au vent. Absolt. || Se mettre bout, bout au vent. — REM. Bout, au sens de avant (→ Proue) ne s'emploie pas seul.
♦ ☑ Loc. fig. Regarder une chose par le gros bout, par le petit bout de la lorgnette. ⇒ Lorgnette (cit. 3 à 5). Var. : par le petit bout de la lunette.
♦ Le bout de la table. || Être placé au bout de la table, en bout de table. — Anciennt. || Le haut bout de la table : la place d'honneur. || Occuper le haut bout de la table. ⇒ Siéger, trôner. || Le bas bout. — ☑ Par métaphore. Le haut bout : la première place.
1 Peu de gens en leur estime
Lui refusent le haut bout.
La Fontaine, Fables, VIII, 13.
2 À table, au plus haut bout il veut qu'il soit assis (…)
Molière, Tartuffe, I, 2.
♦ || Bout de table ou bout-de-table : flambeau déposé à chaque bout d'une table servie. || Des bouts-de-table.
♦ || Bout de pied ou bout-de-pied : petit tabouret servant à poser les pieds quand on est assis dans un fauteuil. || Des bouts-de-pied.
♦ (Parties du corps) :
♦ Le bout du sein. ⇒ Bouton, mamelon. || Un sein sans bout : un sein borgne.
♦ Le bout du nez. || Avoir le bout du nez froid. || Se gratter le bout du nez. — ☑ Loc. fig. Ne pas voir au bout (vx), plus loin que le bout de son nez : avoir la vue courte, manquer de sagacité. → Nez, cit. 26 et supra.
3 Mme Panache, avec ses yeux pleins de chassie, ne voyait pas au bout de son nez (…)
Saint-Simon, Mémoires, 44, 9.
♦ ☑ Loc. Mener qqn par le bout du nez, lui faire faire ce que l'on veut.
4 (…) la justice est bête, et par le bout du nez,
On conduit où l'on veut Thémis, la vieille aveugle.
Hugo, les Années funestes, XXX.
♦ ☑ Loc. fam. Ça lui (me, te…) pend au bout du nez : (en parlant d'une chose désagréable) ça risque de lui (m', t'…) arriver.
♦ Le bout de la langue.
5 La consonne D, par exemple, se prononce en donnant du bout de la langue au-dessus des dents d'en haut (…)
Molière, le Bourgeois gentilhomme, II, 6.
♦ ☑ Loc. fig. Le bout de la langue. || Avoir un mot, un nom sur le bout de la langue : être sur le point de se rappeler ce mot (→ Sur le bord des lèvres).
♦ ☑ Le bout des dents. (Dans des loc. fig.). || Manger du bout des dents, sans appétit. || Goûter qqch. du bout des dents. — (1331). || Rire du bout des dents : rire avec peine, par calcul, par nécessité… ⇒ Rire (rire jaune).
6 Je dissimulais, et, riant du bout des dents, je lui dis que je trouvais cette aventure plaisante (…)
A. R. Lesage, Don Guzman…, V, 4.
6.1 (…) c'était ce qu'on appelle un homme du monde, affectant toujours et partout un peu de dédain. Cette légère complaisance dans l'inflexion, cette affectation de négligence qui tenait les mots du bout des dents, m'en assuraient.
Drieu la Rochelle, la Comédie de Charleroi, p. 151.
♦ À regret, avec dégoût. || Accepter qqch. du bout des dents.
♦ Le bout des lèvres. ☑ Du bout des lèvres : avec dédain, et aussi sans sincérité, sans empressement. || Répondre du bout des lèvres. ☑ Littér. Du bout du cœur (même sens).
7 Depuis lors, quand il me parla, ce fut toujours du bout des lèvres, d'un air méprisant.
Alphonse Daudet, le Petit Chose, I, 2.
8 (…) je me prêtais à ses projets par convenance, du bout du cœur (…)
Gide, Si le grain ne meurt, I, 7.
9 Les voix restent toujours quelque peu confidentielles; elles n'échangent les pensées ou les sentiments que du bout des lèvres.
H. Bosco, Un rameau de la nuit, p. 177.
9.1 Thérèse se lève, obéit en silence, reçoit de secs « merci » dits du bout des lèvres et sifflant comme coups de bec.
Suzanne Prou, la Terrasse des Bernardini, p. 89.
♦ Le bout d'un doigt, des doigts, de nos doigts (cit. 18). || Par le bout, du bout du doigt.
9.2 (Isabelle) appuya sur la manche rapée du Baron le bout de ses doigts délicats (…)
Th. Gautier, le Capitaine Fracasse, p. 86.
9.3 Blazius, content de sa besogne, mena par le bout du petit doigt, comme on mène une jeune épousée à l'autel, le baron de Sigognac devant la glace de Venise (…)
Th. Gautier, le Capitaine Fracasse, p. 148.
♦ ☑ Loc. Toucher qqch. du bout des doigts, délicatement. Vx. ☑ Avoir des yeux au bout des doigts : avoir des doigts très habiles, un toucher délicat.
♦ ☑ Fig. Ne pas remuer le bout du petit doigt : ne pas bouger. — ☑ (1665). Connaître, savoir quelque chose sur le bout du doigt, le savoir parfaitement. ⇒ Connaître. — ☑ Jusqu'au bout des doigts : de façon complète. || Avoir de l'esprit jusqu'au bout des doigts.
10 (…) Pour moi, j'aime mieux qu'Émile ait des yeux au bout de ses doigts que dans la boutique d'un chandelier.
Rousseau, Émile, II.
11 On ne remue pas le bout du petit doigt sans faire du mal à quelqu'un.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier, II, XXII.
♦ ☑ Au bout, jusqu'au bout des ongles (même sens) :
11.1 Ils voient que je suis bourgeois jusqu'au bout des ongles et pourtant homme.
Drieu la Rochelle, la Comédie de Charleroi, p. 198.
12 (…) je ne suis pas encore content; l'auteur y montre (dans la Mare au Diable) encore de temps en temps le bout de l'oreille (…)
G. Sand, François le Champi, Avant-Propos.
♦ ☑ Loc. À bout de bras : à l'extrémité du bras levé ou tendu, en faisant un effort. || Tenir, porter qqch. à bout de bras. — Par métaphore ou fig. || Il tient son affaire à bout de bras, par son effort personnel.
♦ (Bout, non spécifié par un compl. de nom). ☑ Tirer à bout portant, (vx) à bout touchant, de façon à ce que l'arme touche l'adversaire, la cible, et, par ext., tirer de très près. — ☑ Fig. Répondre à bout portant, directement, immédiatement. ⇒ Brûle-pourpoint (à).
13 Au pied de la montagne, on boit vite une bière froide qui vous fracasse les tempes à bout portant.
Cocteau, le Grand Écart, I.
♦ ☑ Bout à bout [butabu] (XIVe; « sans avantage de part ni d'autre », 1268). Loc. adv. De façon qu'une extrémité touche l'autre. || Mettre bout à bout. ⇒ Abouter, ajointer, joindre, rabouter. || Coudre deux tissus bout à bout. || Être bout à bout. ⇒ Queue (à la queue leu leu).
♦ Fig. || Mettre bout à bout mots et phrases. → Non, cit. 55.4. || En mettant leur expérience bout à bout, ils iront loin, en ajoutant leur deux expériences.
14 Quatre Mathusalem bout à bout ne pourraient
Mettre à fin ce qu'un seul désire.
La Fontaine, Fables, VIII, 25.
15 L'homme n'a pas une seule et même vie; il en a plusieurs mises bout à bout, et c'est sa misère.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, I, 3.
♦ ☑ Loc. fig. Brûler la chandelle par les deux bouts : manquer d'esprit d'économie. Aussi : mener une vie débridée, sans égards pour sa santé. ⇒ Gaspiller. || Manger son bien par les deux bouts.
16 (…) le maître d'hôtel et l'intendant étaient d'accord ensemble et brûlaient la chandelle par les deux bouts (…)
A. R. Lesage, Gil Blas, VII, XV, 71.
♦ ☑ Joindre les deux bouts : équilibrer son budget. → Pleurer, cit. 29.
17 Mes deux bouts que j'ai peine à joindre sont malheureusement les deux bouts de bien des choses.
Sainte-Beuve, Lettre à Guttinguer, 5 sept. 1839.
17.1 (…) elle se trouvait indépendante, elle le faisait remarquer, sa toute petite rente, sa retraite, mais cependant un peu juste pour tous ses besoins « spiritueux » en plus et de sa vie mondaine !… Elle aurait pas pu s'habiller… Comme ça « governess » chez Titus ça lui faisait joindre les deux bouts…
Céline, Guignol's band, p. 250.
17.2 On doit remuer à peine les lèvres pour ses fins de mois difficiles, on doit dissimuler ses acrobaties pour un budget. Ne pas joindre les deux bouts, une lèpre. Il faut cacher cette maladie.
Violette Leduc, la Folie en tête, p. 53.
♦ Spécialt. Partie extrême (d'un objet) distincte et constituée par un élément ajouté (ornemental ou fonctionnel). || Le bout d'une canne. ⇒ Embout. || Le bout d'un instrument à vent. ⇒ Embouchure. || Enlever, remettre le bout. || Sertir un bout. ⇒ Emboutir.
2 (1468, prendre qqch. par le bon bout). Abstrait. Manière dont qqch. se présente. ⇒ Aspect, côté. || Je ne sais pas par quel bout commencer ce travail, aborder cette affaire. ☑ Prendre une affaire par le bon, le mauvais bout, d'une manière qui convient, ne convient pas.
17.3 Et pour commencer par un bout : avez-vous vu, dites-moi (…)
Molière, l'Avare, I, 4.
17.4 (…) Son cœur, croyez-moi, n'est point roche, après tout,
À quiconque la sait prendre par le bon bout.
Molière, l'Étourdi, III, 2.
17.5 Il faut signaler aussi le cas de ceux qui ne verbalisent pas leur demande et qui, bien souvent, sont écrasés par le poids de leur symptôme. Leur demande est pour ainsi dire totale, ils ne savent pas comment l'exprimer, par quel bout la prendre.
Tahar ben Jelloun, la plus Haute des Solitudes, p. 51.
♦ ☑ Prendre qqn par le bon, le mauvais bout, en tenant compte ou non de son caractère, de ses susceptibilités. — ☑ Loc. On ne sait pas par quel bout le, la prendre : il, elle est difficile, revêche, peu abordable.
♦ ☑ Tenir le bon bout (d'une affaire) : être en passe de réussir, avoir l'avantage.
3 Limite (d'un espace matériel ou métaphorique). || Le bout de la route. — Accompagner qqn jusqu'au bout de la route. || Disparaître au bout de l'horizon. || Aller au bout du monde. ⇒ Éloigner (s'). || Suivre qqn jusqu'au bout du monde. || Parcourir les deux bouts de la terre. || Voyage au bout de la nuit, roman de Céline. — Tout au bout : à l'extrême limite.
18 Robin mouton, qui par la ville
Me suivait pour un peu de pain,
Et qui m'aurait suivi jusques au bout du monde.
La Fontaine, Fables, IX, 19.
19 Dieu leur a promis qu'encore qu'il les disperserait aux bouts du monde, néanmoins, s'ils étaient fidèles à sa loi, il les rassemblerait.
Pascal, Pensées, 638.
20 Maintenant elle avait pris l'habitude d'aller dès le matin tout au bout des terres, sur la haute falaise de Pors-Even (…)
Loti, Pêcheur d'Islande IV, 8, p. 292.
21 Le missionnaire va jusqu'au bout de la terre pour trouver son compte entre les brebis de Dieu.
Claudel, Feuilles de Saints, Ste Thérèse.
21.1 Au bout de l'esprit, le corps. Mais au bout du corps, l'esprit.
Valéry, M. Teste, p. 116.
21.2 Vers le bout de la jetée, la construction se complique, la chaussée se divise en deux (…)
A. Robbe-Grillet, le Voyeur, p. 13.
21.3 Celui (le piquet) qui se dressait au bout de l'allée centrale était encore plus volumineux que les autres (…)
A. Robbe-Grillet, le Voyeur, p. 19.
21.4 Au bout du paysage de l'avenir, au bout de ces routes de ciment, de ces ponts suspendus, de ces dédales des villes, de ces dessins des fils et des transistors, il y a peut-être encore ce même pays, inconnu, ce pays vieux de millions d'années (…)
J.-M. G. Le Clézio, Haï, p. 14.
21.5 Elle vient de l'autre bout de la ville, de derrière les môles et les entrepôts à huile, à l'opposé de ce boulevard de la Mer, de ce périmètre qui lui fut il y a dix ans autorisé (…)
M. Duras, Moderato cantabile, 10/18, p. 96.
21.6 L'auto était garée sous un toit de joncs au bout du jardin.
M. Duras, les Petits Chevaux de Tarquinia, p. 19.
♦ ☑ Loc. fig. (1619, in D. D. L.). C'est le bout du monde (si…) : c'est à la limite de ce qui est possible. || C'est bien le bout du monde si on n'y arrive pas : il est quasi certain qu'on y arrivera. — ☑ Ce n'est pas le bout du monde : ce n'est pas bien difficile à faire.
22 Je pars, et si je vous écris encore lundi, c'est le bout du monde.
Mme de Sévigné, 296, 8 juil. 1672.
♦ ☑ D'un bout à l'autre : du début jusqu'à la fin, de haut en bas, entièrement.
♦ ☑ (1530, in D. D. L.). Littér. De bout en bout : d'une extrémité à l'autre, complètement. || Traverser un pays de bout en bout. ⇒ Part (de part en part).
23 Et d'un bout à l'autre il (Tartuffe) ne dit pas un mot (…) qui ne peigne aux spectateurs le caractère d'un méchant homme.
Molière, Tartuffe, Préface.
24 Quoi ? Jouer nos amours ainsi de bout en bout !
Corneille, la Suite du Menteur, Variante, I.
25 Cette architecture bizarre se répète d'un bout à l'autre avec la plus exacte symétrie.
E. Fromentin, Un été dans le Sahara, I, p. 103.
26 Le building monte ! Il va vivre : vingt puits d'ascenseurs le perforent de bout en bout.
G. Duhamel, Scènes de la vie future, VIII, p. 112.
26.1 Le jeune physicien, dès qu'on le laisse à lui-même, frappe la table de son hochet ou de son poing. Il ne se lasse pas de recommencer. D'où ces petits fragments d'Univers, toujours mesurés aux forces et aux projets; et ces chemins explorés de bout en bout.
Alain, les Dieux et les Arts, Pl., p. 1224.
26.2 Il gambillait comme un cabri d'un bout à l'autre du terrain.
Céline, Mort à crédit, p. 242.
♦ ☑ Loc. fig. Être au bout de son rouleau, du rouleau. ⇒ Rouleau (supra cit. 2); → ci-dessous, à bout, infra cit. 32.3.
♦ À tout bout de champ. → ci-dessous, avec une valeur temporelle, I., 4.
4 Fin (d'une action, d'une durée, d'un temps qui s'écoule). ⇒ Terme, terminaison. || Le bout de l'année. || Arriver au bout d'un travail. || Voir le bout de ses peines. || Ne pas être au bout de ses ennuis, de ses peines. || On en voit le bout.
26.3 Tes desseins n'ont pas naissance
Qu'on en voit déjà le bout.
Malherbe, II, 2.
♦ Prières, service du bout de l'an, service religieux que l'on fait faire pour un mort au jour anniversaire de son décès.
26.4 (…) quelque frère vous récitera les prières du bout de l'an.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, IV, 9.
♦ Au bout de (une durée) : après que s'est écoulé. || Au bout de quelques jours. || Au bout d'un moment, d'un certain temps : après un certain temps.
27 Au bout de quelque temps que messieurs les louvats
Se virent loups parfaits et friands de tuerie (…)
La Fontaine, Fables, III, 13.
28 Il se plia sur le côté, baissa les yeux; et, au bout d'une minute, parlait de nouveau.
Valéry, M. Teste, p. 33.
29 (…) ces empoisonnements qui n'agissent qu'au bout d'un certain temps.
Proust, À la recherche du temps perdu, t. IX, p. 252.
29.1 (…) ce n'est qu'au bout de plusieurs secondes qu'il vit ses prunelles glisser vers la pelote de ficelle qu'il tenait dans la main (…)
A. Robbe-Grillet, le Voyeur, p. 10.
♦ Au bout de (qqch.) : à la fin de. || Être, arriver au bout d'une opération, d'un travail. ⇒ Accomplir, achever. || Arriver au bout de sa carrière, de sa vie. || Arriver au bout d'un voyage. || En être au bout de son discours. || Être au bout de ses peines. ☑ Loc. Il n'est pas au bout de ses peines.
30 C'est que d'abord elle était au bout de son pauvre argent.
Loti, Pêcheur d'Islande, VIII, p. 106.
31 Il avait forcé la voix pour arriver au bout de sa tirade.
Martin du Gard, les Thibault, t. IX, p. 125.
31.1 Hier à huit heures Madame Bérenge, la concierge, est morte (…) C'était une douce et gentille et fidèle amie. Demain on l'enterre rue des Saules. Elle était vraiment vieille, tout au bout de la vieillesse.
Céline, Mort à crédit, p. 11.
31.2 (…) le total, la somme sont pour le langage des terres promises, entrevues au bout de l'énumération (…)
R. Barthes, S/Z, p. 120.
♦ ☑ Loc. À bout. || À bout de course : à la fin de son mouvement (en parlant d'un mécanisme). — Fig. Fatigué, épuisé.
32 (…) ma femme n'était pas d'attaque, elle n'en pouvait plus, à bout de course, recrue de fatigue.
F. Mauriac, le Nœud de vipères, XIII.
♦ ☑ (1616). À bout de… : en n'ayant plus de… || Être à bout de forces, de ressources, d'arguments, de nerfs, de patience. || À bout de souffle.
32.1 Il aboyait comme un dogue… Ils ont hurlé le pour et le contre, entre les crises et les furies… J'allais pas moi, leur causer…
À bout d'arguments, ma mère est remontée m'entreprendre… Elle voulait que je lui confesse…
Céline, Mort à crédit, p. 196.
32.2 Peut-être pouvait-elle encore se rattraper ? Mais elle était à bout d'arguments, à bout de force, et l'autre n'avait pas bronché !
H. Troyat, le Vivier, p. 104.
32.3 (…) son cri pénètre de force les courtines défonce les baldaquins dorés
puis s'effondre à bout de tout et coagule au creux des draps
M. Leiris, Haut mal, p. 33.
♦ ☑ Absolt. Être à bout : n'en pouvoir plus, être épuisé. || Mes forces sont à bout. || Ma patience est à bout. ☑ Pousser, mettre qqn à bout, l'exaspérer.
33 Les valets enrageaient, l'époux était à bout.
La Fontaine, Fables, VII, 2.
34 (Sa mauvaise conduite) Met à chaque moment ma patience à bout.
Molière, l'Étourdi, I, 7.
34.1 Tu m'as fait trop de peine, tu m'as souvent caché la vérité, je suis à bout.
Proust, le Côté de Guermantes, Folio, p. 313.
♦ ☑ (XVe). Venir à bout de (qqch., qqn), s'en débarrasser par une suite d'efforts. || Venir à bout d'un travail, aboutir, l'achever. || Venir à bout d'une difficulté, d'un adversaire. ⇒ Triompher (de), vaincre. — Venir à bout de (et inf.). || Venir à bout de faire qqch., d'inspirer un sentiment (→ Cependant, cit. 6.2, Rousseau).
35 (…) mais un peu de courage
Vous le fera trouver, vous en viendrez à bout.
La Fontaine, Fables, V, 9.
36 Une espèce de préjugé nous fait croire que le seul équilibre qu'on doive chercher entre deux êtres, est celui du bonheur. Le reste, nous l'appelons crise, et nous n'avons pas de cesse, que nous n'en soyons venus à bout.
J. Romains, Psyché, t. I, Lucienne, p. 195.
36.1 Le gros animal tapi au fond de sa tanière a été enfumé, il est sorti… ouvre, qu'il entre… Mais regardez, la dose a été trop forte, il s'affale, ses gros yeux bulbeux se voilent, il va expirer… Et nous qui pensions qu'il aurait encore la force de mordre, qu'on n'en viendrait jamais à bout…
N. Sarraute, Vous les entendez ?, p. 159.
♦ ☑ Jusqu'au bout : jusqu'à la fin. — Fig. Complètement. || Aller jusqu'au bout d'une affaire, la terminer, l'achever. — Aller jusqu'au bout de ses idées : être logique, conséquent. || Personne qui va jusqu'au bout de ses idées. ⇒ Jusqu'au-boutiste. || Être fidèle jusqu'au bout.
37 Vous êtes généreux; soyez-le jusqu'au bout.
Corneille, Polyeucte, IV, 5.
38 (…) Vous devez, Madame, espérer jusqu'au bout.
Racine, la Thébaïde, III, 1.
39 Habitués qu'ils sont à frapper l'esprit du public par des formules sonores et creuses, les politiques se vantent volontiers d'aller « jusqu'au bout de leurs idées ».
G. Duhamel, Défense des lettres, III, p. 256.
39.1 (…) je sentais que ce n'était pas la phrase qui était mal faite, mais moi pas assez fort et agile pour aller jusqu'au bout.
Proust, le Côté de Guermantes, t. II, Folio, p. 25.
40 (…) une fois sur mille je pouvais suivre l'écrivain jusqu'au bout de sa phrase (…)
Proust, le Côté de Guermantes, t. III, Folio, p. 26.
41 De quoi j'ai souffert le plus ? Peut-être de l'habitude de développer toute ma pensée, d'aller jusqu'au bout en moi.
Valéry, M. Teste, p. 74.
42 C'est gentil à vous, dit-elle, d'être resté jusqu'au bout. Cette pièce est absurde. Et je suis une vieille comédienne qui n'intéresse plus personne (…) Ils sont tous partis les uns après les autres.
A. Robbe-Grillet, la Maison de rendez-vous, p. 138.
♦ ☑ Au bout du compte : tout compte fait, après tout, en définitive… ⇒ Finalement.
43 On trouve au bout du compte que les choses sont bien comme elles sont.
Fontenelle, Sapho, Laure.
♦ ☑ À tout bout de champ [atubudʃɑ̃] (métaphore du sens I, 3, 1636; à chacun bout de champ, XVe, proprt « à chaque fois que la charrue arrive au bout du champ ») : à tout propos, à chaque instant.
44 Autrefois on rencontrait à tout bout de champ des personnages dont les allures ressemblaient à celles de M. de Talleyrand, et l'on n'y prenait pas garde (…)
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, IV, 9.
45 (…) mon ami Achmet, gai ou rêveur, homme du peuple et poétique à l'excès, riant à tout bout de champ et dévoué jusqu'à la mort !
Loti, Aziyadé, VII, p. 82.
———
II (1580).
1 Partie, fragment (d'une matière ou d'un objet). ⇒ Morceau (cit. 2). || Un bout de fromage, de réglisse. || Un bout de fil. || Un bout de bougie. || Un bout de paille. ⇒ Brin. || Un petit bout d'os. || Se défaire par petits bouts.
♦ Fam. Morceau de forme irrégulière ou non spécifiée. || Un bout de papier (cit. 2). || Un bout de pain. || Un bout de bois. || Un vieux bout de savon. || Un gros bout de viande.
45.1 (…) un bout de tablier retroussé par un coin, un large couteau plongé dans une gaine de bois, tempérait ce que sa mine pouvait avoir d'un peu farouche (…)
Th. Gautier, le Capitaine Fracasse, p. 87.
46 Jamais cette minute ne reviendrait, jamais cet éclat incroyable d'un tout petit bout de ciel n'étendrait de nouveau un espace vierge entre ces nues opaques et ces vagues rebelles.
Edmond Jaloux, les Visiteurs, I, 8.
47 Fabien (…) fumait dans le secret les bouts de cigarettes opiacées où Fanny avait injecté des parfums.
F. Mauriac, le Mal, p. 20.
47.1 Il ramasse tous les morceaux au fur et à mesure qu'ils se débinent, des bouts de commande et des boulons, des petites goupilles et des grosses pièces.
Céline, Mort à crédit, p. 72.
47.2 C'est moi qui tenais les paris, le ginger, les chocolats, les images, les bouts de cigarettes… même des bouts de sucre… trois allumettes.
Céline, Mort à crédit, p. 241.
47.3 Quelques-unes (des photographies) sont épinglées avec des petits bouts de fil de laiton que m'apporte le contremaître et où je dois enfiler des perles de verre coloriées.
Jean Genet, Notre-Dame des fleurs, p. 14.
47.4 Cette merveilleuse éclosion de belles et sombres fleurs, je ne l'appris que par fragments : l'un m'était livré par un bout de journal, l'autre cité négligemment par mon avocat (…)
Jean Genet, Notre-Dame des fleurs, p. 10.
♦ Bout saigneux : cou de veau, de mouton, tel qu'on le vend chez le boucher. (On écrit aussi bout-saigneux).
♦ ☑ Loc. fam. (orig. obscure). Discuter le bout de gras : bavarder (→ Tailler une bavette).
47.5 Les Baponot et les Sabotier discutaient le bout de gras à quelques pas de l'entrée en un groupe compact et distant.
R. Queneau, Loin de Rueil, p. 106.
♦ ☑ (1919). Cin. Bout d'essai : morceau de pellicule développé rapidement pour contrôler la prise de vue. — Par ext. Essai, fragment de film tourné pour juger un acteur. || Faire un bout d'essai (au cinéma, au théâtre).
♦ (1895, in Petiot). Fam. (Sports). Vx. || Bout de bois : volant (d'une auto). || À toi de prendre le bout de bois, de conduire.
2 Absolt, fam. (De bout de bois « jambe », argot). || Mettre les bouts : partir, s'en aller, s'enfuir. → Mettre les cannes. || « Charlamilébou » (Queneau, Zazie dans le métro).
47.6 Dès que le patron a mis les bouts, le petit Robert, il se tenait plus.
Céline, Mort à crédit, p. 180.
47.7 Hé la p'tite dame z'avez une putain qui met les bouts !
Tony Duvert, Paysage de fantaisie, p. 102.
3 Partie (d'une chose abstraite). || Il n'a écouté qu'un bout du cours. || Il ne connaît que des petits bouts du cours. || Il ne connaît que des petits bouts de la théorie. ⇒ Bribe, fragment. || J'ai appris cette nouvelle par petits bouts. || Entendre un bout de sermon, un bout de messe, une partie du sermon, de la messe.
48 Je vous embrasse mille fois, et m'en retourne à mon jardin, et puis à un bout de salut (…)
Mme de Sévigné, 244, 29 janv. 1672.
♦ ☑ Loc. Par antiphrase. En connaître, en savoir un bout : savoir beaucoup de choses, en savoir long (→ En connaître un rayon). || Il en connaît un bout sur ses antécédents politiques. — Absolt. Être très compétent.
48.1 — Ne t'inquiète pas, Landry te sortira de là. Laisse-le faire, il est un peu brutal, mais il en connaît un bout.
René Floriot, La vérité tient à un fil, p. 140.
♦ Partie (d'une étendue, d'un espace). || Faire un bout du chemin à pied. ☑ Fam. Faire un bout de conduite à qqn, l'accompagner une partie de sa route.
49 (…) elle nous adopta tous (…) me fit un bout de conduite quotidienne sur le chemin de l'école.
Colette, Histoires pour Bel-Gazou, VI.
♦ Par antiphrase. || C'est un bout de chemin !, une grande distance. Absolt. || Il y a un bout, un bon bout d'ici au village.
♦ Partie (d'une durée). || Un petit bout de temps : peu de temps. || Un bon bout de temps : un temps long. || Il y a un bout de temps qu'il est parti.
50 Il est resté là un bout de temps à rêvasser, les yeux fixés en terre (…)
Mme de Genlis, Théâtre d'éducation, La Rosière, II, 4.
4 Un bout de : un peu de. || Un bout de lettre : une lettre courte, rapide. || Jouer un bout de rôle : jouer un rôle secondaire, sans importance. || Faire un bout de lecture à qqn. || Faire un bout de toilette. || Chanter un bout de mélodie. || Il a un bout de jardin derrière sa maison.
51 Il comprit que monsieur Squadra, ayant remarqué cette desserte dans la chambre, venait de l'apporter là, puisqu'il devait être rentré faire un bout de ménage.
Zola, Rome, p. 607.
52 (…) nous avons acheté un bout de terrain dans le Midi (…) pour avoir un coin vraiment à nous, où planter notre tente par la suite (…)
Bernard Moitessier, Cap Horn à la voile, p. 57.
♦ Un bout d'homme : un homme de petite taille. — Fig. Homme sans capacité. || Un petit bout, un gentil petit bout : un enfant gracieux. ☑ Un bout de chou, un petit bout de chou : un petit enfant.
53 Enfin et surtout, il existe à Marseille un petit bout de femme qui s'appelle Françoise (…)
Bernard Moitessier, Cap Horn à la voile, p. 37.
———
III (On prononce le t : [but]). Mar. Cordage. || Passe-moi le bout. || Un vieux morceau de bout. || Ranger tous les bouts [but] qui traînent dans le fond d'un bateau.
54 Un bout frappé sur l'arrière de Vencia nous avait permis d'amener l'ancre en paix, de brosser la chaîne, de laver le pont maculé de vase et d'établir la voilure sur un bateau propre.
Bernard Moitessier, Cap Horn à la voile, p. 91.
❖
COMP. Abouter, bouts-rimés, debout, embouter, surbout. — V. Bout-dehors.
HOM. (Sauf III.). Boue, formes du v. bouillir.
Encyclopédie Universelle. 2012.