déraper [ derape ] v. intr. <conjug. : 1>
• 1739 mar.; desrapper « arracher » déb. XVIIe; provenç. derapa, de rapar « saisir », du germ. °hrapon
I ♦
1 ♦ Mar. En parlant d'une ancre, Quitter prise sur le fond et laisser dériver le navire. — Chasser sur l'ancre. Navire qui dérape.
2 ♦ (fin XIXe) Cour. Glisser sur le sol, en parlant des roues (d'une automobile, d'une bicyclette). ⇒ chasser, glisser, 2. patiner, riper. Il a dérapé et fait un tête-à-queue. Ces pneus empêchent de déraper. ⇒ antidérapant.
II ♦ Fig.
1 ♦ Effectuer un mouvement imprévu, incontrôlé (dans le domaine intellectuel, psychique). La conversation a dérapé. — (Personnes) S'écarter brusquement de la norme, de l'habitude.
2 ♦ (v. 1965) Échapper au contrôle des dirigeants, surtout en économie; s'écarter des prévisions, de normes établies. La consommation, la demande dérape.
● déraper verbe intransitif (provençal derapa, de rapar, saisir, du germanique rapôn, arracher) Glisser dans une direction oblique : La voiture a dérapé sur le verglas. Prendre un caractère ambigu, dangereux, grossier, etc. : La conversation a dérapé. S'écarter de ce qui est normal, attendu, prévu et contrôlé : Les prix des matières premières ont dérapé et sont en forte hausse. En parlant d'un avion, exécuter un virage en dérapage. Détacher ou se détacher du fond, en parlant d'une ancre. En parlant d'un skieur, effectuer un dérapage. ● déraper (synonymes) verbe intransitif (provençal derapa, de rapar, saisir, du germanique rapôn, arracher) Glisser dans une direction oblique
Synonymes :
- chasser
déraper
v. intr.
d1./d TECH Glisser, lorsque l'adhérence n'est plus suffisante. La voiture a dérapé sur des gravillons.
|| Fig. S'écarter de façon incontrôlée. La conversation a dérapé.
d2./d MAR En parlant d'une ancre, ne plus assurer la tenue sur le fond.
⇒DÉRAPER, verbe intrans.
A.— [En parlant d'un moyen de transport]
1. MARINE
a) [En parlant de l'équipage d'un navire, d'une embarcation] En vue d'appareiller ou de changer de mouillage, arracher du sol la dernière ancre ou le dernier grappin (d'apr. BONN.-PARIS 1859, SOÉ-DUP. 1906); p. ext. appareiller, lever l'ancre. Le capitaine, debout sur la dunette, prêt à donner l'ordre de déraper (A. DAUDET, Port-Tarascon, 1890, p. 73). On utilisait la voile pour déraper (LA VARENDE, J. Bart, 1957, p. 77) :
• Dès midi, il vente grand frais de N. avec des rafales et une pluie abondante et continuelle. Au lieu de déraper il fallut songer à assurer notre tenue au mouillage.
DUMONT D'URVILLE, Voyage au Pôle Sud, t. 3, 1842, p. 78.
— [Avec un compl. d'obj. interne] Déraper l'ancre. Nous virâmes donc en dérapant l'ancre batarde (DUMONT D'URVILLE, Voy. autour du monde, t. 2, 1832-34, p. 54). On agit avec le cabestan sur le garant du palan (...) pour déraper une ancre lorsqu'elle tient durement (GALOPIN, Lang. mar., 1925, p. 51).
Rem. Déplanter se dit de toutes les ancres alors que déraper ne s'emploie que pour la dernière ancre mouillée (d'apr. BONN.-PARIS 1859).
— P. métaph., fam. Il travaille quelquefois un mois sans déraper (POULOT, Sublime, 1872, p. 69). [... La vieille est malade,] à cause du gas Marie-Pierre qui a dérapé de chez eux depuis trois jours (RICHEPIN, Glu, 1881, p. 16).
Rem. On rencontre ds le même sens un emploi factitif de l'expr. déraper l'ancre (cf. ID., ibid., p. 271).
b) [En parlant de l'ancre, du grappin] Cesser d'être fixé au fond et laisser ainsi dériver le bateau. Le grappin égratigna la roche, puis dérapa (HUGO, Travaill. mer, 1866, p. 262). Ou son grelin pouvait casser, ou son ancre déraper, et dans les deux cas il était en détresse (VERNE, Enf. cap. Grant, t. 3, 1868, p. 73). Le navire chasse, ce n'est pas la chaîne qui a cassé; c'est certainement l'ancre qui a dérapé (LE CLÈRE 1960).
2. Usuel. [En parlant d'un véhicule : bicyclette, automobile, etc.] En changeant, en quittant sa direction initiale, glisser involontairement sur la route par suite d'un défaut d'adhérence au sol. Déraper dangereusement, violemment; une roue, une voiture dérape. L'automobile vira (...) la machine dérape et va buter contre un arbre (A. FRANCE, Crainquebille et autres contes, 1904, p. 171). Les voitures, brillantes de pluie, dérapaient sur le sol humide (ARLAND, Ordre, 1929, p. 257). La voiture en partant dérapa légèrement dans l'épaisse poussière (ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 149).
♦ P. méton du suj.; [en parlant du conducteur] Le sol était glissant : j'ai dérapé (Ac. 1932).
♦ Rare. [En parlant d'un traîneau] Dès le premier tournant, le traîneau dérapa (TRIOLET, Prem. accroc, 1945, p. 297).
— P. métaph. Le dialogue dérapait (TOULET, Demois. La Montagne, 1920, p. 173). On a beau se donner du mal, on glisse, on dérape, on retombe dans l'alcool qui conserve les vivants et les morts (CÉLINE, Voyage, 1932, p. 411).
Rem. Déraper indique en gén. un mouvement du véhicule non contrôlé par le conducteur; dans les courses d'autos, ce mouvement est pratiqué en vue d'augmenter la vitesse moyenne. Dans une course d'autos, il n'est point nécessaire de vouloir déraper au tournant; les forces mécaniques s'en chargent (ALAIN, Propos, 1927, p. 743).
— P. ext. ou anal.
♦ [En parlant d'un véhicule sur rails] Le Batignolles-Clichy-Odéon, en tournant, dérapa, oscilla un peu, et versa sur la gauche (TOULET, Nane, 1905, p. 32).
♦ Fam. [En parlant d'une pers.] Glisser de façon involontaire lors d'un déplacement. Dans sa fougue pour la caresser, il a dérapé du tapis, il est allé se cogner la tronche (CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p. 215). Les pieds dérapant dans la neige (ROMAINS, Hommes bonne vol., 1938, p. 136).
B.— P. anal., emplois techn. divers
1. ÉCON. ,,Échapper au contrôle des autorités, des dirigeants. Amorcer une évolution, un mouvement soudains aux conséquences fâcheuses`` (GILB. 1971). Les prix ne dérapent pas encore brutalement en hausse (L'Express, 29. 9. 69ds GILB.1971).
2. AÉRON. Glisser latéralement, notamment en exécutant un virage avec une inclinaison insuffisante. J'ai lancé l'avion en travers. Il dérape brutalement vers la gauche, avec des vibrations craquantes (SAINT-EXUP., Pilote de guerre, 1942, p. 348).
— P. méton du suj. Glissade sur l'aile [de l'avion], suivie d'un virage. Comme s'il tombait, Attignies semble déraper avec un bruit de ferraille et de chargeurs qui roulent dans la carlingue (MALRAUX, Espoir, 1937, p. 664).
3. SKI. Avancer en faisant glisser les skis transversalement par rapport à leur direction normale de déplacement. Vous « stemmez, vous stemmez », je vous dis de « couler... » et d'abord, apprenez à déraper (Comment parlent sportifs ds Vie Lang., 1953, p. 140).
Rem. La docum. atteste l'emploi adj. du part. prés. Sous la neige, la route était dérapante (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 292). Mêler des particules de caoutchouc au bitume [des routes] (...) de tels revêtements vieillissaient moins vite et étaient moins dérapants (Industr. fr. caoutch., 1965, p. 46).
Prononc. et Orth. :[], (je) dérape []. La prononc. avec [a] ant. est rég. le verbe étant un emprunt au prov. mod. derrapa. Mais d'apr. GRAMMONT Prononc. 1958, p. 30 on prononce [] post. d'apr. râpe, râper, dérâpe. BARBEAU-RODHE 1930 admet [] ou [a]. Enq. :/, (D)/ (il) dérape. Étymol. et Hist. [Av. 1637 région. (domaine prov.) se deraper « s'arracher (à) » ds DG]; 1. 1687 en parlant d'une ancre (DESROCHES, Dict. de mar., 20 ds Fr. mod., t. 25, p. 310 : l'ancre est dérapée ou a quitté); p. ext. 1859 (BONN.-PARIS 1971 : un navire Dérape, au moment où, quand il appareille, quand il chasse sur son ancre [...], sa dernière ancre est arrachée de la place où elle était mouillée); 2. fig. 1870 (POULOT, loc. cit.); 3. 1896 (La France automobile, 274 ds Fr. mod., t. 42, p. 252). Empr. au prov. derapa, derraba « arracher, déraciner » (ds MISTRAL), a. prov. derrabar 1390, darrabar 1402 ds PANSIER t. 3; dér. de rapar « saisir, enlever », issu du germ. rapôn « arracher, enlever », FEW t. 16, p. 664 a. Fréq. abs. littér. :36.
déraper [deʀape] v. intr.
ÉTYM. 1687, t. de marine; du provençal derapa, derraba « arracher, déraciner », de rapar « saisir ».
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1 Mar. (En parlant d'une ancre). Quitter prise sur le fond et laisser dériver le navire.
1 — L'ancre est à pic !… s'écria Pencroff.
— Oui, et elle dérape déjà.
J. Verne, l'Île mystérieuse, t. II, p. 636.
♦ (1859). || Navire qui dérape : navire qui chasse sur son ancre, lorsque celle-ci est arrachée du fond.
2 (1886, in Petiot). Cour. Glisser latéralement sur le sol, en parlant des roues (d'une automobile, d'une bicyclette…). ⇒ Chasser, glisser, patiner, riper. || Déraper sur un sol glissant. || Il a dérapé et fait un tête-à-queue. || Ces pneus empêchent de déraper. ⇒ Antidérapant.
♦ Par extension :
2 Au violent piétinement de leurs sabots ferrés sur ces dalles de l'école a succédé, dehors, le bruit étouffé de leurs pas qui mâchent le sable de la cour et dérapent au virage de la petite grille ouverte sur la route.
Alain-Fournier, le Grand Meaulnes, p. 29.
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II
1 Par métaphore ou fig. Effectuer un mouvement imprévu, incontrôlé (dans le domaine intellectuel, psychique). || La conversation a dérapé. — (Personnes). S'écarter brusquement de la norme, de l'habitude (le Monde, 1966, in P. Gilbert). || Il dérape complètement. ⇒ Dérailler. — (Avec des compl.). || Déraper de… à…, vers…
2 (V. 1965). Fig. Échapper au contrôle des dirigeants, surtout en économie, s'écarter des prévisions, des normes établies. || L'économie dérape. || Personne qui dérape.
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DÉR. Dérapage.
COMP. Antidérapant.
Encyclopédie Universelle. 2012.