guérir [ gerir ] v. <conjug. : 2>
• XVIe; var. de guarir (1050), garir « protéger », puis XIIe, sens mod.; germ. °warjan
I ♦ V. tr.
1 ♦ Délivrer (qqn, un animal) d'un mal physique; rendre la santé à (qqn). ⇒ sauver. Guérir un malade. Guérir un toxicomane. ⇒ désintoxiquer. — Traitement qui guérit de la bronchite. — Absolt « il n'y a point de médecin sans la passion de soigner et de guérir » (Duhamel). Un placebo guérit par l'effet psychique.
♢ Par ext. Guérir une maladie. Panacée propre à guérir tous les maux.
2 ♦ Fig. Délivrer (qqn) d'un mal moral. Il faut le guérir de ce souci. ⇒ débarrasser, ôter.
♢ Par ext. Faire disparaître les effets de (un mal moral, un défaut, etc.). ⇒ adoucir, calmer, pallier, remédier (à). Une peine, un chagrin que rien ne guérit, ne peut guérir. « Il est peu de plaies morales que la solitude ne guérisse » (Balzac).
♢ Vx Guérir de, et inf. ⇒ consoler. « Un soupir, une larme à regret épandue M'aurait déjà guéri de vous avoir perdue » (P. Corneille).
II ♦ V. intr.
1 ♦ Recouvrer la santé; aller mieux et sortir de maladie. ⇒ se remettre, se rétablir. Espérons qu'elle guérira. « le seul moyen de guérir, c'est de se considérer comme guéri » (Flaubert). — Guérir d'un cancer.
♢ Par ext. Plaie qui guérit vite. ⇒ se cicatriser, se fermer. Angine mal soignée, qui ne guérit pas.
2 ♦ Fig. Être débarrassé, soulagé (d'un mal moral, d'un défaut, de qqch. de pénible). « Je sais un moyen de guérir De cette passion malsaine » (Baudelaire). — Souffrance qui ne guérit pas.
III ♦ SE GUÉRIR v. pron.
1 ♦ Se délivrer d'un mal physique. Il se guérira peu à peu (cf. S'en sortir, s'en tirer).
2 ♦ (Pass.) Une maladie qui se guérit facilement. Son rhume s'est guéri de lui-même. ⇒ se soigner, se traiter.
3 ♦ Fig. Il ne s'est pas encore guéri de ses préjugés. ⇒ se débarrasser; se délivrer; perdre. Il finira par se guérir de cette manie. ⇒ se corriger.
⊗ CONTR. Aggraver, détraquer; attraper (une maladie), 1. tomber (malade).
● guérir verbe transitif (francique warjan, protéger) Délivrer quelqu'un d'un mal physique, lui rendre la santé : Ce médicament m'a guéri de la grippe. Faire cesser une maladie : Guérir une angine avec des antibiotiques. Débarrasser quelqu'un d'un défaut, le lui ôter : Elle m'a guéri de ma vanité en me ridiculisant. Faire cesser un défaut : Il n'y a pas de secret pour guérir la timidité. ● guérir (citations) verbe transitif (francique warjan, protéger) Ambroise Paré Bourg-Hersent, près de Laval, vers 1509-Paris 1590 Je le soignai, Dieu le guérit. Commentaire On a attribué au célèbre chirurgien ces paroles imitées de celles dont se servaient les rois de France quand ils touchaient les malades atteints d'écrouelles. ● guérir (synonymes) verbe transitif (francique warjan, protéger) Délivrer quelqu'un d'un mal physique, lui rendre la santé
Synonymes :
- remettre
- rétablir
Faire cesser une maladie
Synonymes :
- traiter
Débarrasser quelqu'un d'un défaut, le lui ôter
Synonymes :
- délivrer
Faire cesser un défaut
Synonymes :
- corriger
- effacer
- estomper
● guérir
verbe intransitif
se guérir
verbe pronominal
être guéri
verbe passif
Cesser, disparaître, en parlant d'un mal : Blessure qui guérit.
Sortir d'une maladie, se soigner pour en sortir, être rétabli : Il s'est guéri de son rhume en prenant des grogs.
Se débarrasser d'un défaut, d'une habitude, s'en corriger : Être guéri de l'envie de fumer.
● guérir (citations)
verbe intransitif
se guérir
verbe pronominal
être guéri
verbe passif
François, duc de La Rochefoucauld
Paris 1613-Paris 1680
En amour, celui qui est guéri le premier est toujours le mieux guéri.
Maximes
● guérir (synonymes)
verbe intransitif
se guérir
verbe pronominal
être guéri
verbe passif
Sortir d'une maladie, se soigner pour en sortir, être rétabli
Synonymes :
- remis
- rétabli
- se rétablir
Se débarrasser d'un défaut, d'une habitude, s'en corriger
Synonymes :
guérir
v.
rI./r v. tr.
d1./d Redonner la santé à (qqn), délivrer (qqn) d'une maladie. Guérir un malade.
d2./d Fig. Délivrer d'un mal moral. Guérir qqn de ses préjugés, de sa passion.
rII./r v. intr.
d1./d Recouvrer la santé. Il guérira.
d2./d Disparaître, en parlant d'un mal physique. Sa blessure guérit.
rIII/r v. Pron.
d1./d Recouvrer la santé par ses efforts. Se guérir en se soignant énergiquement.
d2./d Disparaître, en parlant d'un mal physique. Cette plaie se guérit vite.
d3./d Fig. Se délivrer de. Se guérir de ses préjugés.
⇒GUÉRIR, verbe
I. — Emploi trans.
A. — [Le suj. désigne une pers. ou un moyen thérapeutique quelconque]
1. [L'obj. désigne une pers., le corps ou une partie du corps]
a) Guérir qqn/qqc. de qqc. Débarrasser d'une maladie physique ou mentale en ramenant à la santé. L'air parfumé de la campagne me guérit aussitôt de la grippe et de ma fatigue (GIDE, Journal, 1905, p. 189). S'improviser médecin à Lahore, guérir la sultane d'un abcès dans l'oreille (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 12).
— Emploi abs., proverbe, vieilli. C'est un saint qui ne guérit de rien. ,,Se dit d'un homme qui n'a ni pouvoir ni crédit, qui ne peut être d'aucun secours`` (Ac. 1798-1878).
— Emploi pronom. réfl. Pour se guérir de la blessure des vipères, on les écrase sur la plaie (FLAUB., Salammbô, t. 2, 1863, p. 148).
♦ Proverbe, vieilli. Médecin, guéris-toi toi-même. ,,Gardez pour vous-même les avis que vous donnez aux autres`` (Ac. 1798-1878).
b) Guérir qqn/qqc. Rendre la santé à. De même que Christ, Bacchus avait fait des miracles : il guérissait les malades, et prédisait l'avenir (DUPUIS, Orig. cultes, 1796, p. 353). Puisque le grand froid détruit le bacille de Koch, on pourrait essayer de guérir les tuberculeux en les frigorifiant pendant plusieurs heures (J. ROSTAND, La Vie et ses probl., 1939, p. 106).
— Emploi pronom. à sens passif. Un malade ne se guérit pas dans un jour (SAY, Écon. pol., 1832, p. 185) :
• 1. ... Monsieur de Bargeton (...) avait de temps en temps des digestions difficiles, et l'heureuse manie de regarder l'indigestion de son dîner comme une maladie qui devait se guérir par celle du souper.
BALZAC, Illus. perdues, 1837, p. 133.
c) Emploi abs. Rendre la santé. Moyen de guérir.
— Littér. L'art de guérir. La médecine. Le savant Hippocrate est considéré encore aujourd'hui comme le maître dans l'art de guérir (MAINE DE BIRAN, Journal, 1816, p. 160) :
• 2. ... l'art de guérir périra, comme l'art de vivre ou la morale, étouffé par ces rêveries soi-disant métaphysiques de gens qui croient que disséquer un cadavre c'est étudier l'homme, et qu'ils connoissent l'ensemble, parce qu'ils nomment des parties.
BONALD, Législ. primit., t. 2, 1802, p. 165.
— Proverbe. Mieux vaut prévenir que guérir. Mieux vaut éviter une maladie que la soigner. Au fig. Mieux vaut éviter un ennui que remédier à ses inconvénients :
• 3. Il professe un axiome assez original : « Mieux vaut prévenir que guérir ». Et il me graisse le nez avant que la musique commence. C'est radical. Je peux pleurer comme je ne sais pas combien de mères qui auraient perdu leurs enfants, pas le moindre rhume. Quelquefois un peu de conjonctivite, mais c'est tout. L'efficacité est absolue. Sans cela je n'aurais pu continer à écouter du Vinteuil. Je ne faisais plus que tomber d'une bronchite dans une autre.
PROUST, Prisonn., 1922, p. 241.
2. [L'obj. désigne un mal physique ou mental] Guérir qqc. Supprimer, faire disparaître. Le quinquina guérit la fièvre (C. BERNARD, Princ. méd. exp., 1878, p. 74). Pastilles destinées à (...) guérir l'enrouement des chanteurs (HUYSMANNS, Oblat, t. 1, 1903, p. 97).
— [P. méton. du suj.] Le jour où la médecine (...) aura trouvé le moyen de guérir la tuberculose ou d'enrayer sa marche, elle aura augmenté pour l'avenir (GAULTIER, Bovarysme, 1902, p. 192).
B. — Au fig. [Le suj. désigne une pers. ou un inanimé]
1. Guérir qqn de qqc.
a) Débarrasser une personne de (quelque chose de blâmable, de répréhensible, de pénible). Synon. corriger. Guérir qqn d'une crainte, d'une obsession, d'un souci. Il entreprit de la guérir de ses excentricités (ZOLA, E. Rougon, 1876, p. 146). Il n'y a point d'enchanteur qui guérisse quelqu'un de l'envie ou de la haine (ALAIN, Propos, 1921, p. 293) :
• 4. ... quelques cents francs gagnés, quelque peu d'encens vous guérissent si vite du passé et l'éloignent si loin! Misères et blessures d'hier, il suffit d'un rayon d'aujourd'hui pour les cicatriser.
GONCOURT, Journal, 1857, p. 331.
♦ Emploi abs. Venez à Dieu car il guérit (HUGO ds ROB.).
♦ Loc. verb. Ne guérir de rien. Ne servir à rien :
• 5. Si on l'accuse [l'Église] de s'être un peu méfiée de ces lettres qui ne guérissent [it. ds le texte] de rien, comme parle Sénèque; il faut aussi condamner cette foule de législateurs, d'hommes d'État, de moralistes, qui, dans tous les temps, se sont élevés, beaucoup plus fortement qu'elle, contre le danger, l'incertitude, et l'obscurité des sciences.
CHATEAUBR., Génie, t. 2, 1803, p. 51.
b) Dégoûter, détourner d'(une chose) pour l'avenir. Synon. faire revenir. Que diable allais-je faire dans cette galère? Enfin cela me guérira pour jamais de la manie de conserver d'anciennes conquêtes et de réclamer d'anciens droits (CONSTANT, Journaux, 1805, p. 220). Il me semble que cette séparation me guérit à jamais de la manie des voyages (MICHELET, Journal, 1835, p. 768).
2. [L'obj. désigne un mal quelconque] Guérir qqc. Supprimer, faire cesser. Le spécifique pour guérir un événement malheureux (...) c'est une décision; car elle a pour effet (...) d'interrompre le flux de celles qui viennent de l'événement passé (PROUST, Fugit., 1922, p. 444). Jane (...) passait sa main sur le front de Shelley et s'efforçait de guérir sa triste passion par de douces et magiques effluves (MAUROIS, Ariel, 1923, p. 303). La vie est cruelle, mais le temps guérit les blessures (GREEN, Malfaiteur, 1955, p. 184).
II. — Emploi intrans.
A. — 1. [Le suj. désigne un animé, le corps ou une partie du corps] Cesser d'être malade, recouvrer la santé. Il y a des malades qui meurent et d'autres qui guérissent; autrement s'ils guérissaient ou mouraient nécessairement tous, il n'y aurait plus de statistique à faire (C. BERNARD, Princ. méd. exp., 1878, p. 61). Là [à Menton], les oranges mûrissent et les poitrinaires guérissent (MAUPASS., Contes et nouv., t. 2, Notes voy., 1884, p. 437).
2. [Le suj. désigne un mal physique ou mental] Disparaître. Vous dites à nos maux : Guérissez! (...). Soudain nos maux guérissent (DELAVIGNE, Louis XI, 1832, IV, 6, p. 170).
— En partic. [Le suj. désigne une plaie, une blessure] Synon. de cicatriser, se fermer :
• 6. ... tu as une blessure qui t'a fait souffrir, qui se cicatrise, mais qui te démange justement parce qu'elle guérit. J'ai toujours remarqué le même fait chez les gens qui avaient souffert violemment d'un premier amour; ils espèrent hâter la guérison dans la tranquillité, et la tranquillité ne revient jamais aussi pleine et entière que dans l'état d'innocence.
CHAMPFL., Bourgeois Molinch., 1855, p. 74.
B. — Au fig.
1. [Le suj. désigne une pers.] Se remettre de, cesser d'être tourmenté par. Il est possible que je parte avec Norvins pour Bruxelles. Il y a mille raisons, et je guérirai aussi de mon misérable amour (CONSTANT, Journaux, 1815, p. 450). Adieu, monsieur. On guérit facilement d'une passion pour une femme de mon âge (BALZAC, Cous. Bette, 1846, p. 19).
♦ [P. méton. du suj.] Si des maux soufferts les cœurs peuvent guérir; S'ils peuvent oublier (SAINTE-BEUVE, Tabl. poés. fr., 1828, p. 76).
— Se débarrasser de, abandonner. Les épouses guérissent plus facilement des larmes que d'un tel sourire (GIRAUDOUX, Amphitr. 38, 1929, I, 2, p. 31).
2. [Le suj. désigne un mal quelconque] Disparaître. Qui m'eût dit à Combray, quand j'attendais le bonsoir de ma mère avec tant de tristesse, que ces anxiétés guériraient, puis renaîtraient un jour (PROUST, Fugit., 1922, p. 501).
REM. 1. Guéri, -ie, part. passé en emploi adj., arg. Libéré, sorti de prison. Il est malade à Canelle (Il est arrêté à Caen) (...) et vous? Il paraît que vous êtes guéri (que vous êtes libre)? — Oui guéri, mais qui sait si je ne retomberai pas bientôt? (VIDOCQ, Mém., t. 4, 1828-29, p. 98). 2. Guérit-tout, subst. masc., rare. Plante aux nombreuses propriétés médicinales. Au fig., littér. Personne qui guérit tous les maux. Synon. panacée. Nasie m'embrassera demain comme son enfant, ses caresses me guériront. Enfin, n'aurais-je pas dépensé mille francs chez l'apothicaire? J'aime mieux les donner à mon guérit-tout, à ma Nasie (BALZAC, Goriot, 1835, p. 273).
Prononc. et Orth. : [], (il) guérit []. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. Ca 1050 guarir « garantir, protéger » (Alexis, éd. Chr. Storey, 99); 2. a) ca 1100 guarir intrans. « recouvrer la santé » (Roland, éd. J. Bédier, 2036); 1176-81 p. ext. garir « disparaître, se cicatriser (en parlant d'une plaie) » (CHR. DE TROYES, Chevalier Lion, éd. M. Roques, 1375); b) 1130-40 garir trans. « rendre la santé » (WACE, Conception N.D., éd. W.R. Ashford, 1691); c) 1210-25 soi garir pronom. « se procurer la guérison à soi-même » (Yder, éd. H. Gelzer, 2588). De l'a. b. frq. warjan « défendre, protéger » (cf. a. h. all. werian « id. », all. wehren « défendre ») qui est attesté d'abord en a. fr. sous la forme garir/guarir puis, vers la fin du XIIIe s. notamment dans les parlers de Champagne, sous la forme guerir (1288, C.A. BEVANS, The Old French Vocabulary of Champagne, 33). Garir et guerir coexistent jusqu'au XVIIe s. Pour les problèmes posés par l'a. prov. guerir (début XIIe s., GUILLAUME IX ds RAYN., t. 3, p. 430) v. DEAF, s.v. garir. Fréq. abs. littér. Guérir : 2 609. Guéri : 1 375. Fréq. rel. littér. Guérir : XIXe s. : a) 3 911, b) 4 469; XXe s. : a) 3 371, b) 3 335. Guéri : XIXe s. : a) 1 629, b) 2 310; XXe s. : a) 2 290, b) 1 842.
guérir [geʀiʀ] v.
ÉTYM. XVIe; var. de guarir (v. 1050) « garantir », garir (v. 1155) « protéger », 1080 au sens mod.; d'un germanique warjan « réprimer, protéger ».
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I V. tr.
1 Délivrer (qqn, un animal) d'un mal physique; rendre la santé à (qqn). ⇒ Sauver; arracher (à la maladie, à la mort). || Guérir un malade (→ Empirique, cit. 5). || Guérir un toxicomane. ⇒ Désintoxiquer. || Guérir qqn de… (et le nom d'un mal). || Guérir qqn d'une maladie (→ Assassin, cit. 10), d'une fracture.
1 Les médecins ne te guériront pas car tu mourras à la fin. Mais c'est moi qui guéris et rends le corps immortel.
Pascal, Pensées, VII, p. 553.
2 (…) ce qu'il y a de fâcheux auprès des grands, c'est que, quand ils viennent à être malades, ils veulent absolument que leurs médecins les guérissent.
Molière, le Malade imaginaire, II, 5.
3 (…) elle a guéri nombre de malades que les médecins auraient fait mourir si l'on avait essayé de leurs remèdes.
G. Sand, la Petite Fadette, VIII.
♦ (Sujet n. de chose). || Une cure thermale vous guérira de vos rhumatismes. || Ce sirop l'a guéri de sa toux. || Médicament, remède qui guérit de la fièvre (→ Abracadabra, cit. 1). || Traitement qui guérit de la folie (cit. 2).
4 (…) de spécifique qu'il était contre la colique, il guérit de la fièvre quarte, de la pleurésie (…) l'hémorragie, dites-vous ? il la guérit.
La Bruyère, les Caractères, XIV, 68.
♦ Absolt. || La médecine, art de guérir. || Le but (cit. 11) du médecin est de guérir. || Médecin qui soigne et guérit par les simples (→ Aromate, cit. 3). || Charlatan qui guérit par des talismans (→ Consteller, cit. 4). || Un cataplasme (cit. 2) soulage, mais ne guérit pas.
5 La science qui instruit et la médecine qui guérit sont fort bonnes sans doute; mais la science qui trompe et la médecine qui tue sont mauvaises. Apprenez-nous donc à les distinguer.
Rousseau, Émile, I.
6 Et questionné par un de ses malades sur je ne sais quel remède en vogue, un autre médecin célèbre, Bouvart, répondait : « Dépêchez-vous d'en prendre pendant qu'il guérit. »
Sainte-Beuve, Causeries du lundi, 24 avr. 1854, t. X, p. 94.
7 (…) il n'y a point de médecin sans la passion de soigner et de guérir.
G. Duhamel, Inventaire de l'abîme, VII.
8 Car il savait que, pour une période dont il n'apercevait pas le terme, son rôle n'était plus de guérir. Son rôle était de diagnostiquer.
Camus, la Peste, p. 210.
♦ (Compl. n. de chose, désignant le mal). || Guérir une maladie (→ Attouchement, cit. 1; feinte, cit. 15). || Le quinquina guérit la fièvre (cit. 2). ⇒ Couper, tomber (faire). || Pilules propres à guérir tous les maux. ⇒ Panacée; → Fournir, cit. 3. || Emplâtre (cit. 3) qui guérit tous les maux. || Un placebo qui guérit par l'effet psychique. || Guérir une crise (cit. 2) d'hystérie. || Guérir une blessure (cit. 1), une foulure (cit.). || Guérir une plaie. ⇒ Cicatriser. || Guérir les écrouelles (cit. 2). || Guérir la fatigue. ⇒ Apaiser; → Application, cit. 8.
9 Où ils ne peuvent guérir la plaie, ils sont contents de l'endormir (…)
Montaigne, Essais, II, XII.
10 (…) les talents des hommes sont comme les vertus des drogues, que la nature nous donne pour guérir nos maux, quoique son intention soit que nous n'en ayons pas besoin. Il y a des plantes qui nous empoisonnent, des animaux qui nous dévorent, des talents qui nous sont pernicieux.
Rousseau, Julie ou la Nouvelle Héloïse, Lettre II.
11 Certaines paysannes, qui passent pour sorcières, guérissent radicalement la rage en Pologne, avec des sucs d'herbe.
Balzac, l'Initié, Pl., t. VII, p. 388.
12 Le beau temps doit guérir, aussi, les maux qui font souffrir les bêtes.
M. Genevoix, Rroû, IV, IV.
2 (1564). Délivrer (qqn) d'un mal moral; enlever, ôter à (qqn) un mal. || Guérir qqn de… || Guérir qqn de l'ennui. ⇒ Délivrer (→ Croix, cit. 18). || Il faut le guérir de cette obsession, de ce souci. ⇒ Débarrasser. || Le Dieu (cit. 35) qui guérit les âmes.
13 (…) une charité qui songeait à gagner les cœurs, et à guérir des esprits malades.
Bossuet, Oraison funèbre du prince de Condé.
14 On prétend nous guérir de l'amour par la peinture de ses faiblesses (…)
Rousseau, Du contrat social, Lettre à d'Alembert.
15 (…) quelques années d'expérience n'avaient pu me guérir encore radicalement de mes visions romanesques (…)
Rousseau, les Confessions, V.
16 Qui nous guérira de la médecine, qui se prend pour une religion ?
André Suarès, Trois hommes, « Ibsen », VI (→ Drogue, cit. 4).
♦ Guérir qqn de la coquetterie (cit. 4).
17 Il y a plusieurs remèdes qui guérissent de l'amour, mais il n'y en a point d'infaillibles.
La Rochefoucauld, Maximes, 459.
♦ Vx. || Guérir de, suivi d'un inf. ⇒ Consoler.
18 Un soupir, une larme à regret épandue
M'aurait déjà guéri de vous avoir perdue (…)
Corneille, Polyeucte, II, 2.
♦ Absolt. → Anatomiste, cit.
19 Vous qui pleurez, venez à ce Dieu, car il pleure
Vous qui souffrez, venez à lui, car il guérit.
Hugo, les Contemplations, III, IV.
♦ Par ext. Faire disparaître les effets de (un mal moral, un défaut, etc.). ⇒ Adoucir, apaiser, calmer, pallier, remédier (à). || Guérir le mal (→ Apparence, cit. 32). || Guérir les égarements de l'esprit (→ Anneau, cit. 8). || Chagrin, ennui, peine que rien ne guérit (→ Endormir, cit. 7; engourdir, cit. 5; essayer, cit. 21). || Rien ne pourra guérir sa peine. || La mort guérit tout (→ Devise, cit. 3). || Guérir les effets de l'anarchie (→ Baguette, cit. 7). || L'action (cit. 3) guérit la timidité. ⇒ Corriger.
20 La pauvreté des biens est aisée à guérir; la pauvreté de l'âme, impossible.
Montaigne, Essais, III, X.
21 Le temps guérit les douleurs et les querelles, parce qu'on change : on n'est plus la même personne; ni l'offensant, ni l'offensé, ne sont plus eux-mêmes.
Pascal, Pensées, II, 122.
22 Quelle religion nous enseignera donc à guérir l'orgueil et la concupiscence ?
Pascal, Pensées, VII, 430.
23 Il est peu de plaies morales que la solitude ne guérisse.
Balzac, Mme de La Chanterie, Pl., t. VIII, p. 252.
24 Si, au contraire (…) vous pouviez avoir la patience, je dirai même le bon sens de laisser faire le médecin qui guérit toute chose, le Temps (…)
A. de Musset, Bettine, 17.
25 (…) un homme, quel qu'il soit, c'est toujours un malade. Celui qui souffre dans son corps ne l'est que deux fois. Mais la maladie originelle et mortelle dès l'origine, qui la guérit ?
André Suarès, Trois hommes, « Pascal », III.
———
II V. intr.
1 (1080). Sujet n. d'être animé. Recouvrer la santé; aller mieux et sortir de maladie. ⇒ Convalescence (être en), échapper, réchapper (d'une maladie); remettre (se), renaître, ressusciter, rétablir (se), revenir (en). || Espérons (cit. 25) qu'elle guérira. || Malade condamné, qui ne guérira pas. ⇒ Incurable. || Guérir après une longue convalescence. || Guérir d'un mal, d'une maladie. — Oiseau qui guérit de ses blessures (→ Coup, cit. 18).
26 (…) le seul moyen de guérir, c'est de se considérer comme guéri.
Flaubert, Correspondance, 629, 18 déc. 1859, t. IV, p. 358.
27 (…) parfois, de brefs accès de toux la soulageaient, mais ils l'effrayaient plus encore, comme le signe d'une maladie abhorrée et elle mettait tous ses soins à les empêcher de se produire, s'imaginant qu'elle guérirait ainsi.
J. Green, Adrienne Mesurat, III, I.
♦ (Le sujet désigne le mal). || Plaie qui guérit vite. ⇒ Cicatriser (se), fermer (se). || Rhume mal soigné, blessure négligée qui ne guérit pas. || Cela a mis longtemps à guérir.
28 Est-ce que ma lèpre guérira ? Non pas, autant qu'il y aura une parcelle de chair mortelle à dévorer. Est-ce que l'amour en mon cœur guérira ? Jamais, tant qu'il y aura une âme immortelle à lui fournir aliment.
Claudel, l'Annonce faite à Marie, III, 3.
2 (Fin XIIe). Le sujet désigne une personne, son cœur, son âme… Être débarrassé, soulagé (d'un mal moral, d'un défaut, de quelque chose de pénible). || Guérir de son angoisse, de sa peine. — Le compl. désigne la cause du mal. → ci-dessous, cit. 29. — Sans compl. → ci-dessous, cit. 33; accorder, cit. 20; cicatrice, cit. 9; consoler, cit. 14; faiblesse, cit. 27.
29 (…) il semble (…) qu'il (Dieu) leur ait réservé ce dernier et infaillible moyen de guérir des femmes.
La Bruyère, les Caractères, III, 6.
30 Je sais ce qu'il en coûte, et qu'il est des blessures
Dont un cœur généreux peut rarement guérir (…)
Voltaire, Tancrède, V, 3.
31 Je sais un moyen de guérir
De cette passion malsaine (…)
Baudelaire, Amœnitates Belgicæ, VI.
32 Pour guérir de tout, de la misère, de la maladie et de la mélancolie, il ne manque absolument que le goût du travail.
Baudelaire, Journaux intimes, « Mon cœur mis à nu », XC.
33 L'important, disait l'abbé Galiani à Mme d'Épinay, n'est pas de guérir, mais de vivre avec ses maux. Kierkegaard veut guérir. Guérir, c'est son vœu forcené, celui qui court dans tout son journal.
Camus, le Mythe de Sisyphe, p. 58.
♦ (Le sujet désigne le mal). || Souffrance qui ne guérit pas (→ Fermer, cit. 29). || Amour qui guérit dans un cœur.
34 La blessure guérit, mais la marque reste (…)
Rousseau, Julie ou la Nouvelle Héloïse, VI, VII.
——————
se guérir v. pron.
ÉTYM. (Déb. XIIIe).
1 Recouvrer la santé, se délivrer d'une maladie, d'un mal physique (→ ci-dessus, II., 1.). || Il se guérira peu à peu (Académie). ⇒ Tirer (s'en). || Il se guérirait sans doute, s'il avait son frère auprès de lui (→ Empirer, cit. 5). || Elle s'est guérie assez vite de sa pleurésie. ⇒ Rétablir (se).
35 Nous guérissons infailliblement tous ceux qui se guérissent d'eux-mêmes (…)
Voltaire, Dict. philosophique, Maladie.
♦ || Sa blessure ne se guérit guère (Académie). || Sa plaie s'est vite guérie. || Ce genre de maladie ne se guérit guère. ⇒ Inguérissable (→ Astrologie, cit. 2).
2 Réfléchi. Se procurer la guérison à soi-même. || « Il s'est guéri par sa persévérance à suivre le régime qui lui avait été recommandé » (Littré).
36 Sans doute que vous m'appliquerez ce proverbe : Médecin, guérissez-vous vous-même (…)
Bible (Sacy), Évangile selon saint Luc, IV, 23.
37 Toutes les maladies se guérissent, et le vice est aussi une maladie.
A. de Musset, Lorenzaccio, III, 3.
3 (XVIIe). Se débarrasser (d'un défaut). || Son cœur a trop souffert pour se guérir jamais (Académie). — Il ne s'est pas encore guéri de ses préjugés. ⇒ Débarrasser (se); délivrer (se); perdre. || Il finira par se guérir de cette mauvaise habitude, de cette manie. ⇒ Corriger (se). || Il ne peut se guérir de sa folie (→ Accabler, cit. 17).
38 Ou l'amour est un bien, ou c'est un mal; si c'est un bien, il faut croire en lui; si c'est un mal, il faut s'en guérir.
A. de Musset, la Confession d'un enfant du siècle, V, V.
39 Vous tombez peu à peu dans une mélancolie dont vous ne parviendrez peut-être jamais à vous guérir si vous ne réagissez pas maintenant.
J. Green, Adrienne Mesurat, III, VI.
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guéri, ie p. p. adj.
♦ Rétabli d'un mal physique. || Il a été très malade, mais le voilà enfin guéri. ⇒ Pied (sur). || Un aveugle (cit. 34) guéri. — Par plais. || Il est mort guéri. — Débarrassé d'une chose pénible. || Être entièrement guéri d'une passion (→ Agiter, cit. 24). — ☑ Fam. Être guéri de tous les maux, du mal de dents : être mort. || En être guéri de…, suivi d'un inf. ⇒ Revenu (en être). || J'en suis guéri de dépenser pour de pareilles bêtises !
40 (…) je ne vois nulle race de gens si tôt malade et si tard guérie que celle qui est sous la juridiction de la médecine.
Montaigne, Essais, II, XXXVII.
41 En amour, celui qui est guéri le premier est toujours le mieux guéri.
La Rochefoucauld, Maximes, 417.
42 Ceux qui ont eu de grandes passions se trouvent, toute leur vie, heureux et malheureux d'en être guéris.
La Rochefoucauld, Maximes, 485.
43 Je n'ai plus de fièvre, puisque je suis guérie (…)
Hugo, les Misérables, I, VIII, II.
44 Il y a pis. Il y a le moment où vous ne souffrirez presque plus. Oui ! Presque guérie, c'est alors que vous serez « l'âme en peine », celle qui erre, qui cherche elle ne sait quoi (…)
Colette, les Vrilles de la vigne, La guérison.
45 À tout jamais, je suis guérie des bêtes ! je n'en veux plus, vous m'entendez ?
M. Genevoix, Rroû, IV, XI.
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DÉR. Guérison, guérissable, guérissant, guérisseur.
COMP. Guérit-tout.
Encyclopédie Universelle. 2012.