noirceur [ nwarsɶr ] n. f.
• 1487; nerçor 1160; de noir
1 ♦ Littér. Couleur, caractère de ce qui est noir. Noirceur de l'encre. « chez Ribera, un ton clair éclate subitement sur la noirceur lugubre » (Taine).
2 ♦ Vx Mélancolie, tristesse.
♢ Mod. et littér. Méchanceté extrême, odieuse. ⇒ perfidie . « la noirceur d'un regard, d'une âme, d'un forfait » (Sartre ). La noirceur de cette trahison. ⇒ horreur, indignité.
3 ♦ Vieilli Une, des noirceurs : acte, parole témoignant de cette méchanceté. Tramer, méditer quelque noirceur.
⊗ CONTR. Blancheur, clarté; bonté.
● noirceur nom féminin Littéraire. Qualité de ce qui est noir ; couleur noire : La noirceur de l'ébène. Tache noire, hématome, bleu. Littéraire. Caractère de ce qui est sombre : La noirceur de la nuit. Qualité de ce qui est empreint de méchanceté ; action ou parole méchante, perfide : La noirceur d'un crime. Au Canada, obscurité. ● noirceur (expressions) nom féminin À la noirceur, au Canada, à la nuit tombée. ● noirceur (synonymes) nom féminin Littéraire. Qualité de ce qui est noir ; couleur noire
Contraires :
Tache noire, hématome, bleu.
Synonymes :
- macule
- tache
Littéraire. Caractère de ce qui est sombre
Synonymes :
- obscurité
- ténèbres
Contraires :
- éclat
- luminosité
Qualité de ce qui est empreint de méchanceté ; action ou...
Synonymes :
- atrocité
- crasse (populaire)
- horreur
- méchanceté
- monstruosité
- perfidie
- perversité
- scélératesse
- vilenie
Contraires :
- bonté
- candeur
- naïveté
- pureté
noirceur
n. f.
d1./d Litt. Couleur noire. La noirceur de l'ébène.
d2./d (Québec) Cour. Obscurité; pénombre.
— Tombée du jour.
|| HIST La grande noirceur (parfois avec majuscules): nom donné à la période des années 1950, laquelle a précédé la Révolution tranquille. (Terme utilisé pour souligner la censure sociale et l'obscurantisme attribués au régime politique de l'époque.)
d3./d Fig., litt. Vilenie, méchanceté, bassesse. La noirceur de son âme.
⇒NOIRCEUR, subst. fém.
A. —Rare
1. a) Qualité de ce qui est noir. La noirceur des cheveux, des sourcils. Mettre de ce corps mercuriel calciné et fixé dans l'eau spirituelle ou esprit liquide mercuriel distillé; (...) les putréfier ensemble jusqu'à la noirceur (CARON, HUTIN, Alchimistes, 1959, p.156):
• 1. La puanteur intolérable des déjections, la sécheresse et la noirceur de la langue, la prostration des forces, les défaillances, l'intermittence du pouls et les autres signes de putridité font distinguer la dysenterie putride de la bénigne.
GEOFFROY, Méd. prat., 1800, p.3859.
b) Vieilli ou région. (Canada). Obscurité. Au milieu des tourmentes et des noirceurs d'un long hiver, souvent apparaissent des matinées de neige, de glace et de soleil (BARRÈS, Cahiers, t.10, 1914, p.250). Les feuilles des fusains luisaient au milieu de la noirceur nocturne (MONTHERL., J. filles, 1936, p.974):
• 2. —Noé, disait-il, j'aime ça un feu au bord de l'eau, ou devant une tente. C'est vivant, c'est plus gai que la noirceur.
H. BERNARD, Les Jours sont longs, Ottawa, 1951, p.27 ds ROGERS 1977.
2. Tache noire. Il a des noirceurs au visage (LITTRÉ).
B. —Au fig.
1. a) Caractère méchant, perfide (d'une personne, d'une action). La noirceur d'un crime, d'un attentat; la noirceur de son âme; la noirceur de l'égoïsme. La noirceur de son ingratitude, de son infidélité, de sa trahison (Ac. 1935). Divine naissance, symbole elle aussi du triomphe prochain du jour sur la nuit, du bien sur le mal, de la lumière sur la noirceur de Satan, espoir en des jours nouveaux (MENON, LECOTTÉ, Vill. Fr., 2, 1954, p.109).
b) Rare. État de ce qui est assombri par la tristesse, la mélancolie. La noirceur des pensées. Breuil, gâteaux, pâtés en terrine, Pain blanc, chocolat sans farine, Dans un veuvage sans noirceur (TOULET, Vers inéd., 1920, p.85).
c) État de ce qui est inquiétant, menaçant. Malgré les rigueurs du moment présent et la noirceur du tableau qui m'était fait à la 2e Armée (FOCH, Mém., t.1, 1929, p.170).
2. Action, parole, pensée, sentiment méchant(e), perfide. Il y avait eu d'abord contre M. Madeleine, sorte de loi que subissent toujours ceux qui s'élèvent, des noirceurs et des calomnies (HUGO, Misér., t.1, 1862, p.210):
• 3. Quelle éloquente révélation des noirceurs que peuvent cacher, dans un jeune homme, les grâces de l'esprit, les charmes du langage, les agréments de la figure, et tous les dons de séduire et de plaire! Quel exemple des perfidies et des horreurs dont l'orgueil et l'amour, réunis dans une âme violente et dans un coeur dépravé, sont capables!
MARMONTEL, Essai sur rom., 1799, p.338.
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. Ca 1175 nerçor «qualité de ce qui est noir» (Chronique Ducs Normandie, éd. C. Fahlin, 26907); 2e quart XIIIe s. noirceur (Lapidaires, éd. L. Pannier, E 1061, p.270); 2. ca 1175 neiçors «obscurité» (Chronique Ducs Normandie, 4239); 3. 1690 noirceur «tache noire» (FUR.). B. 1. a) 1628 «méchanceté» (HARDY, Amour victorieux, 1554: l'aveugle noirceur); 1651 (SCARRON, Roman comique, Ie part., chap.XXII ds ROB.: la noirceur de son action); b) 1680 «acte, parole méchante» (Mme DE SÉVIGNÉ, Lettres, 26 janv., éd. R. Duchêne, t.2, p.815); 2. 1657-62 «mélancolie, tristesse» (PASCAL, Pensées, éd. L. Lafuma, n° 622). Dér. de noir; suff. -eur1 (+ -c- d'apr. noircir). Fréq. abs. littér.:205. Fréq. rel. littér.: XIXe s.: a) 204, b) 531; XXe s.: a) 296, b) 233.
noirceur [nwaʀsœʀ] n. f.
ÉTYM. XIIIe; nerçor, v. 1160; de noir, d'après noircir; a remplacé l'anc. mot noireté.
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A (⇒ Noir, I., A.).
1 Littér. Couleur, caractère de ce qui est noir. || Noirceur de l'encre (→ Liqueur, cit. 2), du corbeau (→ Hérisser, cit. 7). || La noirceur de ses cheveux (→ Lustre, cit. 1). — Noirceur dans le ciel (→ Forme, cit. 8).
1 (…) l'aurore accentuait par la noirceur des ombres ces profils lamentables (…)
Hugo, les Misérables, IV, III, VIII.
2 (…) l'apparition violente par laquelle, chez Ribera, un ton clair éclate subitement sur la noirceur lugubre (…)
Taine, Philosophie de l'art, t. II, p. 335.
2.1 Et, sur son passage, la nuit cédait lentement, l'ombre se séparait et s'écartait, la noirceur était délayée par une eau toute fraîche, dont chaque goutte évanescente avait pouvoir de la rendre pâle.
J.-M. G. Le Clézio, la Fièvre, p. 51.
2 (1690). Tache noire. || « Il a une noirceur à la jambe » (Acad.).
3 Ciel ! ainsi, comme on voit aux voûtes des celliers
Les noirceurs qu'en rôdant tracent les chandeliers (…)
Hugo, la Légende des siècles, LVIII, II.
3 (V. 1175). Obscurité. || La noirceur nocturne (→ Fusain, cit. 1). || La noirceur des bois sombres (Littré).
4 Les reflets intermittents des soupiraux n'apparaissaient qu'à de très longs intervalles, et si blêmes que le plein soleil y semblait clair de lune; tout le reste était brouillard, miasme, opacité, noirceur.
Hugo, les Misérables, V, III, IV.
4 Méd. anc. || Noirceur des vapeurs, de l'humeur.
5 (…) je ne comprends pas l'opiniâtreté et la noirceur de ses vapeurs (du chevalier de Grignan), de tenir contre tant de bonnes choses.
Mme de Sévigné, 1196, 17 juil. 1689.
1 Vx. Mélancolie, tristesse; pensées sombres.
6 Rien n'est si insupportable à l'homme que d'être dans un plein repos, sans passions, sans affaire, sans divertissement, sans application (…) Incontinent il sortira du fond de son âme l'ennui, la noirceur, la tristesse, le chagrin, le dépit, le désespoir.
Pascal, Pensées, II, 131.
7 J'ai quelquefois des rêveries dans ces bois, d'une telle noirceur que j'en reviens plus changée que d'un accès de fièvre.
Mme de Sévigné, 172, 31 mai 1671.
♦ Littér. Caractère inquiétant. || La noirceur des perspectives.
2 (1628). Mod. et littér. Méchanceté extrême, odieuse. ⇒ Perfidie. || La noirceur de son âme. || « De ces femmes pourtant l'hypocrite (cit. 25) noirceur » (Boileau). || La noirceur de son forfait, de son ingratitude, de cette trahison. ⇒ Horreur, indignité (→ Atroce, cit. 3). || Une noirceur infernale.
8 (…) dom Antoine, ayant fait avouer à dom Fernand son mauvais procédé avec Victoria, lui reprocha cent fois la noirceur de son action et lui représenta les fâcheuses suites qu'elle pouvait avoir.
Scarron, le Roman comique, I, XXII.
9 Dans toute leur noirceur retracez-moi ses crimes (…)
Racine, Phèdre, IV, 4.
10 (…) encore le Grand-Singe avait-il eu la noirceur de nous placer aux deux bouts de la salle, sous prétexte que nous causions trop (…)
Loti, Figures et Choses…, Vacances de Pâques, II.
11 (…) l'instituteur lui livre (au nègre) cent habitudes de langage qui consacrent la priorité du blanc sur le noir. Le nègre apprendra à dire « blanc comme neige » pour signifier l'innocence, à parler de la noirceur d'un regard, d'une âme, d'un forfait.
Sartre, Situations III, p. 248.
3 (1680). || Une, des noirceurs. Acte, parole témoignant de cette méchanceté. || Tramer, méditer quelque noirceur (→ Mégère, cit. 2; épier, cit. 6). || La kyrielle de ses noirceurs (→ Compte, cit. 14). || Des commérages (cit.) et des noirceurs.
12 (…) il y a bien des noirceurs dans ce que dit la Voisin.
Mme de Sévigné, 775, 26 janv. 1680.
13 Non, non, s'écriait le chevalier en penchant sa tête sur ses deux mains, et se couvrant le visage de honte; c'est une noirceur, une noirceur impardonnable.
Diderot, Jacques le fataliste, Pl., p. 707.
14 Mais bien entendu la démission se produira dans de telles conditions, dans une telle atmosphère, que votre patron sera admiré par tout le monde pour sa grandeur d'âme et se retirera sous les applaudissements, tandis que le mien, obligé de démissionner à son tour, mais convaincu d'un tas de noirceurs fuira dans les huées.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. XI, XIV, p. 131.
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CONTR. Blancheur, clarté. — Gaieté. — Bonté.
Encyclopédie Universelle. 2012.