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nuage

nuage [ nɥaʒ ] n. m.
• 1564; de nue, qu'il a remplacé
1Amas de vapeur d'eau condensée en fines gouttelettes maintenues en suspension dans l'atmosphère par les courants ascendants. 1. brouillard, nébulosité; littér. nue, nuée; cirrus, cumulus, nimbus, stratus. Nuages en flocons. mouton. Nuages de grêle, de pluie, qui portent la grêle, la pluie. Les nuages s'amoncellent, couvrent, obscurcissent le ciel. Nuages bas, élevés. Nuages blancs, gris, noirs. Ciel chargé de nuages ( nébuleux, nuageux) , couvert de petits nuages ( moutonné) . Ciel sans nuages. pur. « J'aime les nuages... les nuages qui passent... là-bas... les merveilleux nuages ! » (Baudelaire). « Les nuages couraient sur la lune enflammée » (Vigny).
Loc. Être, se perdre dans les nuages : être distrait; se perdre dans des rêveries confuses (cf. Dans la lune). Vivre sur son nuage, être sur son petit nuage : être très satisfait et détaché des choses qui vous entourent, hors des réalités. ⇒fam. 2. planer. Par métaph. Nuages noirs à l'horizon : menace, danger. — Ce qui trouble la sérénité (soupçons, brouilleries, etc.). Un nuage sur leur union. Bonheur sans nuage, qui n'est pas troublé.
2Par anal. Amas vaporeux, ou mouvant. Nuage de fumée, de poussière. Nuage de sauterelles. nuée. Nuage de mousseline, de tulle (tissu léger, transparent). — Nuage de lait : très petite quantité qui prend, avant de se mélanger avec le thé, le café, l'aspect d'un nuage.

Nuage distribution de densité de probabilité de présence des électrons autour du noyau d'un atome.

nuage
n. m.
d1./d Amas de gouttelettes d'eau ou de petits cristaux de glace en suspension dans l'atmosphère. Un ciel sans nuages.
|| Fig. être dans les nuages, distrait, absent.
d2./d Ce qui évoque un nuage par son aspect. Un nuage de poussière.
d3./d Fig. Ce qui trouble la tranquillité. Bonheur sans nuages.

⇒NUAGE, subst. masc.
A. —1. MÉTÉOR. Amas compact visible, plus ou moins important, d'aspect et de forme variables, de fines particules d'eau ou de glace en suspension dans l'air, dues à la condensation de la vapeur d'eau contenue dans l'atmosphère et qui se déplace selon les courants ascendants de l'air. Les phénomènes optiques tels que les halos produits par certains nuages élevés montrent que ces nuages sont constitués, au moins en grande partie, par des particules de glace ayant des formes cristallines (MAURAIN, Météor., 1950, p.127):
1. Les principales sortes de nuages sont: les cirrus, les cumulus et les nimbus. Les cirrus sont des nuages blancs qui se forment dans les très hautes atmosphères, qui affectent toutes sortes de formes. Les cumulus sont des nuages de couleurs blanc grisâtre, de forme plus arrondie que les cirrus, et les nimbus sont des nuages de couleur plus ou moins noire; ils sont plus gros et plus lourds que les précédents, c'est d'ailleurs les nimbus qui fournissent les averses suivant les saisons.
TSCHEUSCHNER, Prévis. temps, 1919, p.4.
Nuage bas. Nuage se formant entre le sol et deux mille mètres d'altitude (stratocumulus, stratus, nimbostratus). Nuage moyen. Nuage entre deux mille et sept mille mètres (altostratus, altocumulus). Nuage supérieur ou élevé. Nuage entre cinq mille et quinze mille mètres (cirrus, cirrocumulus, cirrostratus).
Nuage (orageux). Nuage chargé d'électricité qui, au contact d'un autre nuage provoque une étincelle ou éclair et dont la résonance est le tonnerre. Les nuages s'électrisent de trois manières différentes: par frottement, par influence ou actiniquement (BRUNET, Matér. vitic., 1909, p.219).
2. Lang. cour. Masse diversement colorée flottant dans l'atmosphère, obscurcissant généralement le ciel et pouvant annoncer la pluie, plus rarement la grêle ou la neige. —Eh! qu'aimes-tu donc, extraordinaire étranger? —J'aime les nuages... les nuages qui passent... là-bas... là-bas... les merveilleux nuages! (BAUDEL., Poèmes prose, 1867, p.12). Un léger vent du sud poussait dans le ciel des bancs de petits nuages pommelés qui rendaient la lumière plus délicate (VAILLAND, Drôle de jeu, 1945, p.132):
2. Ce n'étaient plus les orages du printemps, qui naguère s'amassaient, éclataient, disparaissaient. C'étaient les blancs nuages de l'été, montagnes de neige et d'or, grands oiseaux de lumière, qui planent avec lenteur et remplissent le ciel...
ROLLAND, J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p.1565.
SYNT. Nuage blanc, bleu, bleuâtre, doré, irisé, gris, nacré, noir, rose, roux; nuage clair, pâle, sombre; nuage épais, épars, fin, léger, lourd; beau, grand, petit, vaste nuage; nuage lent, rond, immobile; nuage d'été; nuage au ciel; nuage de pluie, de grêle, d'orage; nuage d'ouate; nuages en bande, mamelonnés; amas de, armée de nuages; course, forme, fuite des nuages; banc, lambeau, masse, mer, montagne, troupeau de nuages; (ciel) chargé, couvert, enveloppé, environné, moutonné, ombragé, voilé de nuages; chasser, dissiper, percer les nuages.
Ciel sans nuage(s). Ciel pur et serein. L'automne est poétique. Un ciel serein et sans nuages, une belle prairie, un ruisseau limpide (CHÊNEDOLLÉ, Journal, 1818, p.98).
P. métaph. (Avenir, bonheur, front, joie) sans nuage(s). Que rien ne semble devoir troubler. Synon. parfait, serein. Vous aviez vingt ans, un avenir sans nuages, un présent sans soucis, et des amis désintéressés (ABOUT, Roi mont., 1857, p.2).
B.P. anal. Ce qui forme un amas comparable à l'aspect et à la couleur des nuages.
1. Emplois techn.
a) AGRIC. Nuages artificiels. Fumées artificielles produites par des substances fumigènes que les agriculteurs répandent au-dessus des plantes et des cultures pour les protéger contre les gelées de printemps. Une fumée d'une noirceur majuscule annonça l'usage incendiaire du goudron détourné de son utilisation viticole: créer contre la gelée des nuages artificiels (HAMP, Champagne, 1909, p. 169).
b) ASTRON., ASTROPHYS.
) Concentration de matière interstellaire (gaz, poussière) pouvant être soit obscure (en absorbant la lumière des étoiles) soit brillante ou diffusante (dans le cas des nébuleuses diffuses ou brillantes). Nuage interstellaire. Les photographies obtenues à Lick et au mont Wilson révélèrent la structure spirale de nombreuses nébuleuses, ainsi que les nuages absorbants si caractéristiques pour les nébuleuses allongées (Hist. gén. sc., t.3, vol. 2, 1964, p.563).
) Amas d'étoiles du système galactique ayant des appellations différentes selon leur localisation dans l'espace. Nuage galactique:
3. Dès 1785, Herschel émit l'idée que les étoiles visibles font toutes partie d'un vaste amas isolé dans l'espace et fortement aplati, comprenant non seulement les étoiles des nuages de la voie lactée proprement dite, mais toutes les étoiles visibles à l'oeil nu ou dans une lunette, dans quelque direction que ce soit.
DANJON, Cosmogr., 1948, p.291.
Nuages de Magellan. Ensemble de deux galaxies (le Grand et le Petit nuage) situées dans l'hémisphère austral, riches en nébuleuses gazeuses et formées d'un grand nombre d'étoiles. D'autres [étoiles] encore moins distinctes, forment, par leur multitude innombrable, des nuages blancs comme ceux de Magellan près du pôle sud (BERN. DE ST-P., Harm. nat., 1814, p.367).
c) ÉLECTRON. Nuage électronique. Ensemble des électrons gravitant autour du noyau d'un atome. Sous l'action du champ magnétique, les électrons suivent une trajectoire incurvée au lieu de se diriger en ligne droite vers l'anode. Si le champ est assez fort, aucun électron n'atteint l'anode et il se forme un nuage électronique en rotation autour de la cathode (Hist. gén. sc., t.3, vol. 2, 1964 p.279).
d) MATH., STAT. Nuage de points. Ensemble de points portés sur un graphique rectangulaire et qui résulte de la corrélation entre deux variables figurés par un point d'abscisse x et d'ordonnée y. L'ensemble des points suggère en général un nuage, de forme plus ou moins allongée, de densité plus ou moins forte (OLMI-JULY 1970).
2. [Gén. suivi d'un compl. ou d'un adj. déterm.]
a) [L'anal. porte sur le caractère d'opacité et de densité du nuage] Nuage de boue, de poussière, de tabac. Les cheminées des usines (...) soufflaient dans le ciel leurs nuages de charbon (MAUPASS., Bel-Ami, 1885, p.228). Les nuages de fumée devenaient de plus en plus serrés, et l'odeur du feu aussi forte que si l'hôtel même eût brûlé (MALRAUX, Espoir, 1937, p.460):
4. Bientôt, autour du hamac d'Yves, les femmes birmanes vinrent danser. Au milieu du nuage d'encens, rendu plus ténébreux par le rêve, elles arrivèrent l'une après l'autre avec leur sourire mort, en d'étranges costumes de soie, toutes couvertes de pierreries.
LOTI, Mon frère Yves, 1883, p.142.
En partic. [Appliqué à une troupe d'animaux ou à une foule hum.] Synon. de nuée. Nuage d'insectes, de mites. Que sert de chicaner ses erreurs, son chemin, Les retours en arrière, à ce nuage humain [la foule] (...)? (HUGO, Année terr., 1872, p.13). Tantôt ce sont les myriades d'animalcules propagateurs de la peste et du typhus, tantôt les nuages de sauterelles qui (...) promèneront la stérilité, la destruction, la famine et la mort (GOBINEAU, Pléiades, 1874, p.25).
Loc. En nuages, par nuages. En grand nombre ou regroupés. Du ciel les ramiers tombant en nuages bleus (VIALAR, Homme de chasse, 1961, p.17).
b) [L'anal. porte sur l'apparence de légèreté, sur le caractère flou et vaporeux de certains nuages]
Nuage de cheveux, de duvet, de mousseline. Je ris encore, en songeant à ce lit à estrade, ombragé d'un nuage de mousseline, et soutenu par des cygnes et des amours (JOUY, Hermite, t.4, 1813, p.251). Ce n'était que frouement de plumes, nuages de duvet, tournoiements et volètements de canards (GUÈVREMONT, Survenant, 1945, p.72):
5. ... la petite marquise se leva, tira les verrous, tourna la serrure, souleva la portière et montra sa tête, rien que sa tête blonde, cachée sous un nuage de cheveux.
MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Signe, 1886, p.1047.
Expr. Faire le nuage. [Le suj. désigne une chevelure] S'arranger sur la tête à la manière vaporeuse et gonflante d'un nuage. Toi, ma chère, tu «boucles» assez serré, et puis tes cheveux font le nuage assez facilement (COLETTE, Cl. école, 1900, p.269).
Région. (Canada). Cache-nez en laine. La mère avait fini d'emmitoufler les plus jeunes en leur ceinturant des «nuages» et des «crémones» jusque par-dessus le nez (L. GROULX, Les Rapaillages, 1916, p. 23 ds Richesses Québec 1982).
Nuage de poudre, de crème, de lait. Petite quantité se répandant en évoquant un peu la légèreté d'un nuage. Synon. soupçon (de). Les dames (...) descendirent à l'entrepont se donner un petit nuage de poudre de riz (L. DAUDET, Mésentente, 1911, p.81). Qu'est-ce que vous voulez encore? Un peu de crème? Un nuage? Voilà, madame (GÉRALDY, Toi et Moi, 1913, p.121).
c) [P. transpos. du domaine visuel au domaine des sensations auditives ou olfactives] [Mon piano] peut livrer à la brise du soir son nuage de féeriques accords (BERLIOZ, Souv. voy., 1869, p.62). Nous marchions [au marché de Marrakech] dans un nuage de parfums (MAUROIS, Mes songes, 1933, p.24).
3. [P. anal. avec la couleur grise de certains nuages, en emploi d'appos.] Couleur nuage. Couleur gris clair. Bustier bains de soleil sans épaulettes, (...) Coloris: bleu, blanc, noir, orage, nuage (Union écon. privée, juin 1951). Gris nuage. Des tons délicats comme le gris nuage et le rose pastel (Le Point, 17 mars 1980, p.32, col. 2).
C.P. métaph. et au fig.
1. Expr. et loc. [En relation avec la position (souvent lointaine) des nuages dans le ciel] Être, se perdre, glisser, vivre dans les nuages. Être rêveur, distrait, perdre le sens des réalités, vivre dans un autre monde. Synon. planer, ne pas avoir les pieds sur terre, être dans la lune. Approchez, mesdemoiselles, vous n'êtes pas de trop. Votre mère est dans les nuages, aidez-moi à la ramener sur terre (BECQUE, Corbeaux, 1882, II, 10, p.142).
Descendre de son nuage. Retrouver son sens pratique, ne plus rêver. Maintenant que tu es descendue de ton nuage, je recommence: Nous dînons ce soir à Berlin, —au restaurant de Berlin, grande bête! (COLETTE, Cl. s'en va, 1903, p.216).
2. Tout ce qui obscurcit, assombrit.
a) Ce qui assombrit, masque la visibilité des choses. Avoir un nuage devant les yeux. Un nuage couvrit ses yeux; ses membres fléchirent; elle roula évanouie (GAUTIER, Rom. momie, 1858, p.277).
b) Souci, légère inquiétude qui se peint sur le visage. Il y eut un moment de silence, pendant lequel un léger nuage passa sur le front de la jeune fille (THEURIET, Mariage Gérard, 1875, p.110).
[Suivi d'un compl. déterm.] Tout à coup, et sans que nous eussions encore rien dit qui la pût affliger, un nuage de tristesse se répandit sur son aimable physionomie (RESTIF DE LA BRET., M. Nicolas, 1796, p. 39).
c) Obstacle, infortune venant troubler la quiétude et le bonheur ou la bonne entente entre des personnes. Lisa s'était remise. Elle avait l'orgueil de la paix honnête de son ménage, elle n'avouait pas le moindre nuage entre elle et son mari (ZOLA, Ventre Paris, 1873, p.754).
d) Menace pesant sur quelqu'un, annonce d'un danger. Nous avions reçu des papiers jusqu'au 15 septembre; ils devinrent le sujet de la conversation; l'empereur les analysa: l'avenir demeurait enveloppé des nuages les plus sinistres (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t.1, 1823, p.244).
3. Nuage de + inanimé abstr.
a) Ce qui cache la vérité des choses, masque les réalités de la vie. Trompé par la distance et par le nuage doré de la jeunesse, il [Frédéric II] voit en lui [Voltaire] (...) un législateur et un sage (SAINTE-BEUVE, Caus. lundi, t.3, 1850, p.188):
6. Incapables de comprendre le mal, ils [les êtres purs] ne le voient point. Ils vivent comme dans un nuage d'ignorance; leur existence est pour ainsi dire latente.
SAND, Jeanne, 1844, p.259.
b) Ce qui permet de se dissimuler, de se protéger. Synon. écran. [La pensée bourgeoise] lance des nuages de raisons comme un croiseur émet un écran de fumées (NIZAN, Chiens garde, 1932, p.122).
REM. 1. Nuagelet, subst. masc. Petit nuage. Le nuagelet demeurait immobile, son reflet blanc flottait toujours à la même place, dans la même clarté bleue et sans fond (GENEVOIX, Marcheloup, 1934, p.63). 2.Nuager, -ère, adj., vx ou poét. Formé, couvert de nuages. La lune, dans le ciel, luisait comme une montre, Quand soudain, je ne sais quel soigneux horloger S'étant mis à passer un coton nuager Sur le boîtier d'argent de cette montre ronde, Il se fit une nuit la plus noire du monde (ROSTAND, Cyrano, 1898, II, 9, p.96). P. métaph. Marqué par l'inquiétude, les soucis. Sur mon front nuager de nouveaux plis se fouillent (GAUTIER, Comédie mort, 1838, p.13). 3. Nuagerie, subst. fém., rare. Ensemble des nuages. Le pays s'est de ciel houleux enveloppé. Tu cèdes, l'oeil levé vers la nuagerie, À ce doux midi blème et plein d'osier coupé (NOUVEAU, Valentines, 1886, p.207).
Prononc. et Orth.:[], [-]. Att. ds Ac. dep.1694. Étymol. et Hist. 1. a) ) 1564 météor. (THIERRY); ) 1847 fig. dans les nuages «distrait» (MICHELET, Hist. de la Révolution fr., livre V, chap. 1, éd. G. Walter, t1, p.611); b) ) 1717 [éd.] nuage de poussière (FÉNELON, Télémaque, t.2, p.427); ) 1840 nuage de lait (MUSSET, Caprice, 6, p.61); 2. a) 1576 fig. «ce qui obscurcit la vue, offusque l'intelligence» (DESPORTES, Discours ds Élégies I, éd. V. E. Graham, p.152, 81); b) 1619 «obscurcissement de la vue causée par la fatigue, l'émotion...» (RÉGNIER, Dialogue de Cloris et de Phylis ds OEuvres, éd. J. Plattard, p.203); 3. a) 1604 [éd.] «ce qui trouble la sérénité, constitue une menace» (MONTCHRESTIEN, Les Lacenes ds Tragédies, 201: Tout nuage d'ennui de vos ames s'escarte; Arrestez desormais la course de vos pleurs); b) 1669 «ce qui trouble l'harmonie régnant entre des personnes» (BOSSUET, Oraison funèbre de Henriette-Marie de France, 16 nov. ds Oraisons funèbres, éd. J. Truchet, p.116). Dér. de nue auquel il s'est substitué; suff. -age. Fréq. abs. littér.:5754. Fréq. rel. littér.:XIXes.: a) 9597, b) 9931; XXe s.: a) 7562, b) 6411.
DÉR. Nuager, verbe trans., rare. Couvrir de nuages (dans ce sens l'emploi adj. du part. passé est le plus cour.). P. métaph. Quand l'uniformité m'écoeure, Dans la rue ou dans la maison, Que de fois pour nuager l'heure Je savoure ton cher poison [à la pipe]! (ROLLINAT, Névroses, 1883, p.237). Emploi adj. du part. passé. a) Ciel nuagé. Ciel couvert de nuages. Ces approches d'automne sont belles, la température adoucie, le ciel plus nuagé, des teintes de deuil qui commencent (E. DE GUÉRIN, Journal, 1839, p.288). b) P. anal. Nuagé de + subst. évoquant l'aspect d'un nuage. Des femmes nuagées de gaze (GONCOURT, Journal, 1857, p.429). Coiffure en hérisson, nuagée de poudre (GAUTIER, Guide, 1872, p.311). c) P. métaph. Son beau front discret toujours nuagé d'un souci (A. DAUDET, Rois en exil, 1879, p.211). [], [-]. 1res attest. a) ) 1576 [éd.] nuagé de «couvert de» (BRACH, Poèmes, f° 33 r°: un chaume..., nuagé de fumée), 1611 nuager «couvrir de nuage» (COTGR.); ) fig. 1589 «assombrir, voiler» (MATTHIEU, Aman, III, p.66 ds HUG.: le deuil qui nuage ta face), 1770 [éd.] front nuagé (RESTIF DE LA BRET., Idées singulières, t.2, p.40), b) 1632 [éd.] hérald. (CHIFFLET, Le Blason des armoiries de tous les chevaliers de l'Ordre de la Toison d'or, p.71); de nuage, suff. -é, dés. -er.
BBG. —MUDIMBE (V. Y.). Air: ét. sém. Wien, 1979, pp.440-441. — QUEM. DDL t. 18.

nuage [nɥaʒ] n. m.
ÉTYM. 1564; de nue, qu'il a remplacé dans l'usage courant.
1 Amas de vapeur d'eau condensée en fines gouttelettes qui se forme et se maintient en suspension dans l'atmosphère. Brouillard, nébulosité; nue, nuée (littér.) || Principaux types de nuages. Cirrus, cumulus, nimbus, stratus; altocumulus, altostratus, cirrostratus, cumulonimbus, stratocumulus. || Formes capricieuses, couleurs variées des nuages. || Bande de nuages au-dessus de l'horizon. Panne. || Nuages en flocons. Cotonneux (cit. 3), floconneux, mouton (II., 4.). || Nuages légers et rares (→ Ardoisé, cit. 2), ballonnés (cit. 1), violacés (→ Bigarrer, cit. 2), sombres (→ Éclair, cit. 2), opaques, noirs (→ Faiblir, cit. 6)… || Les nuages sont à l'origine de la pluie. || Nuages de grêle (1. grêle, cit. 3), qui portent la grêle. || Nuage orageux (→ Arc-en-ciel, cit. 2), chargé (cit. 29) de neige. || Nuage qui crève (→ Grêler, cit. 2). || Les nuages s'amoncelaient (cit. 1). || Les nuages couvrent le ciel. Brouiller, couvrir, obscurcir, rembrunir. || Ciel chargé de nuages ( Nébuleux, nuageux), couvert de petits nuages ( Moutonner, pommeler). || Ciel sans nuage. Pur (→ Lumière, cit. 5). || Le soleil perce les nuages (→ Abord, cit. 3). || Un ciel immense où glissent (cit. 25) les nuages. || Un vent du sud avait balayé les nuages (→ Hippodrome, cit. 3). Éclaircie. || Cime encapuchonnée (cit. 2) de nuages.
1 J'ai aperçu aussi dans les nuages des tropiques, principalement sur la mer et dans les tempêtes, toutes les couleurs qu'on peut voir sur la terre. Il y en a alors de cuivrées, de couleur de fumée de pipe, de brunes, de rousses, de noires, de grises, de livides, de couleur marron, et de celle de gueule de four enflammée… Quelquefois les vents alizés (…) cardent les nuages comme si c'étaient des flocons de soie, puis ils les chassent à l'occident, en les croisant les uns sur les autres, comme les mailles d'un panier à jour. Ils jettent, sur les côtes de ce réseau, les nuages qu'ils n'ont pas employés (…) ils les roulent en énormes masses blanches comme la neige, les contournent sur leurs bords en forme de croupes, et les entassent les uns sur les autres comme les Cordillères du Pérou, en leur donnant des formes de montagnes, de cavernes et de rochers (…)
Bernardin de Saint-Pierre, Études de la nature, X, « Des couleurs ».
2 Les nuages couraient sur la lune enflammée
Comme sur l'incendie on voit fuir la fumée,
A. de Vigny, Poèmes philosophiques, « La mort du loup », I.
2.1 — J'aime les nuages… les nuages qui passent… là-bas… là-bas… les merveilleux nuages !
Baudelaire, le Spleen de Paris, « L'étranger ».
3 (…) il se couchait sur le dos, et regardait courir les nuages : ils avaient l'air de bœufs, de géants, de chapeaux, de vieilles dames, d'immenses paysages. Il causait tout bas avec eux; il s'intéressait au petit nuage, que le gros allait dévorer; il avait peur de ceux qui étaient très noirs, presque bleus, ou qui couraient très vite.
R. Rolland, Jean-Christophe, L'aube, I, p. 21.
4 Dès que la vapeur d'eau se condense dans l'atmosphère, la première manifestation de sa condensation est l'apparition d'un brouillard ou d'un nuage. D'ailleurs, brouillards et nuages ne sont pas différents l'un de l'autre : un brouillard est un nuage qui arrive au contact avec le sol; un nuage est un brouillard élevé dans l'atmosphère.
A. Viger, l'Atmosphère, VI.
Fig. Être, se perdre dans les nuages : être distrait; se perdre dans des rêveries confuses et chimériques. Lune (dans la). Cf. Ne pas avoir les pieds sur terre. — ☑ Vivre sur son nuage : vivre détaché des choses qui nous entourent.
5 Bonneville, homme de grand cœur, franc-maçon mystique, trop souvent dans les nuages, prenait, dans les questions graves, dans les crises périlleuses, beaucoup de lucidité.
Michelet, Hist. de la Révolution franç., V, I.
6 Elle n'avait plus la tête à l'ouvrage, elle était dans les nuages, elle ne répondait pas quand on lui parlait.
Aragon, les Beaux Quartiers, I, XVII.
2 Par anal. (d'aspect). || Nuage de fumée (cit. 3), de vapeur (→ Fuser, cit. 8), de poussière (→ Malle, cit. 6). || Nuage artificiel émis au moyen d'un appareil fumigène pour dissimuler un navire de guerre, pour protéger les cultures contre les gelées. || Nuage qui se produit après une explosion atomique. Champignon (atomique). || Un nuage d'encens (→ Appareil, cit. 7).Nuage de mousseline, de tulle : tissu léger, transparent (→ Langueur, cit. 15). — ☑ Nuage de lait (cit. 15) : très petite quantité de lait qui est versée dans du thé, du café et qui prend avant de se mélanger, l'aspect d'un nuage.
7 (…) il aspire, avec le flegme d'une honnête conscience, une longue bouffée de tabac qu'il laisse échapper par petits nuages en économe qui veut faire durer son plaisir.
Th. Gautier, Souvenirs de théâtre…, « Meissonnier ».
Nuage de mouches (→ Déplacer, cit. 6), de moustiques, de sauterelles.
7.1 (…) comme s'il en était sorti (du mur) en une seule bouffée le sombre, bref et pestilentiel nuage de fumée qui dissimule traditionnellement sur les poussiéreuses scènes d'Opéra l'escamotage de Méphisto.
Claude Simon, le Palace, p. 75.
8 Secouant la dentelle des palmiers géants, le vent rabattait ses nuages de moustiques dans les soucoupes.
Céline, Voyage au bout de la nuit, p. 135.
Astron. a Nuage solaire.
8.1 Admettant que ces appendices roses qui deviennent visibles quand la lumière du soleil est suffisamment éteinte dans une éclipse, appartiennent décidément au soleil, M. Le Verrier propose de les nommer nuages solaires; ce sera là un des résultats les plus nets auxquels aura donné lieu l'observation de l'éclipse de 1860.
L. Figuier, l'Année scientifique et industrielle 1861, p. 23 (1860).
b Concentration de matière interstellaire formant une zone luminescente lorsqu'elle est éclairée par une étoile (nébuleuse à émission). Nébuleuse. || Nuages d'hydrogène de la voie lactée. || Matière, gaz d'un nuage. Nébulaire.(En parlant d'une nébuleuse extra-galactique). || Le grand et le petit nuage de Magellan, visibles dans le ciel austral.
3 Vieilli. Ce qui empêche de voir, ce qui obscurcit, trouble la vue. || « Un nuage confus se répand sur ma vue » (→ Frisson, cit. 15, Boileau).
9 Déjà je ne vois plus qu'à travers un nuage
Et le ciel et l'époux que ma présence outrage;
Racine, Phèdre, V, 7.
Fig. Ce qui offusque l'intelligence (→ Écarter, cit. 8). || Esprit aveuglé par un nuage. Obnubiler, offusquer.
10 Ah ! que je crains, mes sœurs, les funestes nuages
Qui de ce prince obscurcissent les yeux !
Comme il est aveuglé du culte de ses dieux !
Racine, Esther, II, 8.
4 Ce qui annonce un danger, est lourd de menaces. || Apercevoir des nuages noirs à l'horizon.Ce qui trouble la sérénité (soupçons, brouilleries, etc.).Un bonheur sans nuages, qui n'est pas troublé. Trouble (sans). → Épanouir, cit. 14.
11 Cependant, quand il n'était plus question de ce volume, qui avait projeté un seul nuage sur une amitié de cinquante ans, son œil se mouillait au souvenir de l'homme excellent qu'il avait aimé.
Nerval, les Filles du feu, « Angélique », XII.
5 Chagrin, souci qui semble se peindre sur le visage. || Un nuage de tristesse.
12 Puis-je vous demander quel funeste nuage,
Seigneur, a pu troubler votre auguste visage ?
Racine, Phèdre, IV, 2.
DÉR. Nuagé, nuageux, nuagisme.

Encyclopédie Universelle. 2012.