séparation [ separasjɔ̃ ] n. f.
• 1314; lat. separatio
1 ♦ Action de séparer, de se séparer, fait d'être séparé. ⇒ désagrégation, disjonction, dislocation, dispersion; dis-. La séparation des éléments d'un mélange. Séparation des isotopes (à partir d'un mélange, par centrifugation, diffusion thermique, spectrographie de masse, etc.).— Séparation des attributions, des compétences. ⇒ distinction . Le principe de la séparation des pouvoirs. ⇒ cloisonnement. Séparation d'un parti en différentes tendances. ⇒ scission. — Séparation de l'Église et de l'État.
2 ♦ (1456) (Personnes) Fait de se séparer, de se quitter (par suite d'un départ ou d'une rupture). « bien souvent, pour que nous découvrions que nous sommes amoureux [...] il faut qu'arrive le jour de la séparation » (Proust).
♢ Dr. Séparation de fait (ou amiable) :état de deux époux qui ont convenu de vivre séparément. — Cour. Séparation de corps : suppression du devoir de cohabitation par décision juridictionnelle, sans qu'il y ait divorce. — Séparation de biens : régime matrimonial dans lequel chacun des époux conserve la propriété de ses biens personnels. Être marié sous le régime de la séparation. — Séparation des patrimoines : privilège accordé aux créanciers d'une succession sur les créanciers des héritiers.
3 ♦ (1549) Objet ou espace qui empêche un objet, un lieu, etc., d'être réuni à un autre, de former un tout avec lui. ⇒ démarcation. Rideau servant de séparation entre deux parties d'une pièce. La surface de séparation de deux milieux.
♢ Fig. Différenciation, distinction. « la séparation commune entre le signe et la chose, le mot et l'idée » (Paulhan).
⊗ CONTR. Assemblage, jonction , réunion; contact.
● séparation nom féminin (latin separatio) Action de séparer, d'isoler ; fait d'être séparé : La séparation des divers composants d'un mélange. Fait de distinguer, de mettre à part : Séparation des pouvoirs. Fait de se séparer, de rompre ou de se quitter : Une séparation difficile à supporter. Objet ou espace qui sépare, qui forme obstacle : Abattre une séparation entre deux pièces. ● séparation (expressions) nom féminin (latin separatio) Séparation de biens conventionnelle, régime matrimonial qui permet à chaque époux d'administrer tous ses biens présents ou futurs. Séparation de biens judiciaire, régime matrimonial substitué par le juge au régime adopté lors du mariage, sur demande d'un époux dans son intérêt ou celui de son conjoint. Séparation de corps, suppression du devoir de cohabitation et substitution du régime de séparation de biens au régime matrimonial antérieur. (La séparation de corps peut, après 3 ans, être convertie en divorce à la demande d'un des époux.) Séparation de dettes, clause d'un régime de communauté qui stipule que chacun des époux garde la charge de ses dettes. Séparation de fait, ou amiable, état de deux époux qui vivent séparés sans y avoir été autorisés par un jugement de séparation de corps ou de divorce. Séparation des patrimoines, privilège accordé aux créanciers d'une succession et aux légataires particuliers d'une somme d'argent, leur permettant de se faire payer sur les biens successoraux de préférence aux créanciers personnels de l'héritier. Séparation des racines réelles d'une équation, recherche, pour chaque racine réelle de l'équation, d'un encadrement ne contenant aucune autre racine réelle de l'équation. Séparation des isotopes, ou séparation isotopique, opération ayant pour objet de modifier la teneur relative des isotopes d'un élément donné dans un mélange. (Elle permet d'augmenter la proportion d'un isotope dans le mélange, donc l'enrichissement de l'élément en cet isotope. Les procédés de séparation isotopique sont fondés sur des différences de propriétés physiques ou chimiques des isotopes. Ce sont principalement la diffusion gazeuse, la centrifugation, les échanges chimiques et le laser.) ● séparation (synonymes) nom féminin (latin separatio) Action de séparer, d'isoler ; fait d'être séparé
Synonymes :
- scission
Contraires :
- agglomération
- jonction
- réunion
Fait de distinguer, de mettre à part
Synonymes :
- division
Contraires :
- fusion
- union
Fait de se séparer , de rompre ou de se...
Synonymes :
- brouille
- divorce
- éloignement
- rupture
Objet ou espace qui sépare, qui forme obstacle
Synonymes :
- barrière
- borne
- cloison
- démarcation
- frontière
séparation
n. f.
d1./d Action de séparer, de se séparer; son résultat.
— Séparation des pouvoirs: principe constitutionnel en vertu duquel les pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire sont séparés.
— Séparation de corps: état résultant d'une décision de justice, dans lequel se trouvent deux époux qui, tout en restant mariés et soumis aux autres obligations du mariage, vivent séparément.
|| PHYS NUCL Séparation isotopique: V. encycl. isotope.
d2./d Chose qui sépare un espace, un objet d'un autre.
|| Fig. Délimitation.
⇒SÉPARATION, subst. fém.
Fait, action de séparer, de se séparer; résultat de l'action.
I. — [L'action concerne une globalité; corresp. à séparer 1re et 2e Section I]
A. — 1. Division, partage. Cette séparation [de la gauche en deux factions], qui n'est pas une scission, est aussi désirable qu'inévitable; elle seule peut et doit assurer à la démocratie radicale une sincère représentation dans le parlement (GAMBETTA, Avenir nat., 1869 ds Fondateurs 3e Républ., p. 73). Récemment (...) une décision de séparation entre deux communes bretonnes s'est accompagnée de l'obligation d'édifier un talus (MEYNIER, Paysages agraires, 1958, p. 23).
— [P. allus. à Exode XIV, 16 et suiv.] J'ai tiré l'épée acérée et brûlante, et j'ai vu L'humanité s'écarter devant moi comme la séparation des eaux! (CLAUDEL, Tête d'Or, 1901, 2e part., p. 221).
2. Spécialement
a) CRISTALLOGR. Un véritable plan de clivage ne doit pas être confondu avec les plans de séparation de position définie que peut déterminer parfois l'existence de matières interposées, par exemple de poussières déposées sur les faces à certains stades de la cristallisation (FRIEDEL, Cristallogr., 1926, p. 413).
b) GÉOGR. Ligne de séparation des eaux. Synon. usuel ligne de partage des eaux. [La ligne onduleuse, qui s'étend des collines boisées du Luxembourg et des Ardennes aux ballons des Vosges] Cette ligne est la séparation des eaux: du côté occidental, la Seine, la Loire et la Garonne descendent à l'Océan; derrière s'écoulent la Meuse au nord, la Saône et le Rhône au midi (MICHELET, Tabl. Fr., 1861, p. 4). L'influence du niveau de base de la Méditerranée si voisine a probablement reculé peu à peu jusqu'au point actuel la ligne de séparation des eaux (VIDAL DE LA BL., Tabl. géogr. Fr., 1908, p. 354).
B. — [L'action concerne un ensemble hétérogène] Distribution, répartition, classement, tri.
♦ Séparation de... en. La distillation opère la séparation en essence légère et en essence lourde (CHARTROU, Pétroles natur. et artif., 1931, p. 83).
♦ Séparation de... par. La séparation par grosseurs de grains (fractionnement granulométrique) est pratiquée dans l'étude des alluvions, des sables, des argiles et des sols (BRAJNIKOV, Pétrogr. et rayons X, 1936, p. 14). On a évoqué plus haut la ségrégation par âge, par métier. Il faut tenir compte aussi de la séparation par milieu social, par origine géographique ou ethnique (Gds ensembles habit., 1963, p. 28).
II. — [L'action concerne une ou les diverses part. d'un tout, un ou les divers élém. d'un ensemble]
A. — [Corresp. à séparer 1re et 2e Section II A]
1. a) [L'action concerne des choses]
) Fait d'écarter, de disjoindre, de se disjoindre. Rouir le lin, c'est-à-dire faciliter la séparation de l'écorce filamenteuse et de la tige ligneuse, agglutinées par une substance gommo-résineuse à dissoudre (PESQUIDOUX, Chez nous, 1923, p. 250):
• 1. Deux marches de pierre usées par le frottement des pieds conduisaient à la porte d'entrée, porte faite de trois planches qui jamais, malgré leurs séparations annuelles [sous l'effet du soleil] n'avaient connu le mastic et la peinture, attendant patiemment que l'humidité revînt pour les rapprocher.
DUMAS père, Monte-Cristo, t. 2, 1846, p. 699.
♦ P. plaisant. Mouton eut peur et s'arrêta net au milieu de son trot (...). Ce mouvement brusque et sec opéra la séparation du docteur et de la selle; le docteur (...) tomba (STENDHAL, Lamiel, 1842, p. 48).
— En partic. ,,Opération destinée à rendre indépendantes deux parties, précédemment solidaires, d'un engin spatial`` (Sc. Techn. spat. 1978). Séparation d'un étage, d'une charge utile (Sc. Techn. spat. 1978).
) Fait de ne pas accoler. V. séparer 1re Section II A 1 a ex. de L'Hist. et ses méth. En partic., vieilli. Siège de séparation. Siège individuel, indépendant. Une petite Mme Taigny, femme d'un petit auditeur, fils d'un pâtissier, fait les beaux jours des Tuileries. Une cour où les tabourets, les sièges hauts et de séparation de la cour d'autrefois semblent remplacés par les banquettes banales des bals publics ; il suffit de monter là-dessus pour être vu (GONCOURT, Journal, 1862, p. 1140).
b) P. anal. V. âme ex. 14.
2. [L'action concerne des pers.]
a) ) Action de se quitter en prenant congé. On les rencontre partout ensemble, ils dînent ensemble, vont ensemble par les rues, et chaque soir se reconduisent dix fois de la porte de l'un à la porte de l'autre sans se décider à la séparation (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Homme-fille, 1883, p. 613). Place Clichy il n'y avait pas de fiacre. — Nous en trouverons sûrement à Villiers, dit une voix. Il n'y avait pas plus de raison pour continuer que pour se séparer. Le froid engourdissait les volontés. Il se trouva que personne ne prit l'initiative de la séparation (VAILLAND, Drôle de jeu, 1945, p. 62).
) En partic. Séparation d'une assemblée. Interruption des travaux d'une assemblée, dispersion de ses membres. L'on déclara tout de suite à l'unanimité des suffrages, « que l'Assemblée consentait provisoirement, pour la nation, à la perception des impôts existants, — quoique illégalement établis et perçus, — mais seulement jusqu'à la première séparation de l'Assemblée, de quelque cause qu'elle pût provenir! (ERCKM.-CHATR., Hist. paysan, t. 1, 1870, p. 238).
b) Action, fait de s'éloigner, d'être éloigné de quelqu'un pour un temps plus ou moins long. Des larmes avaient jailli de ses yeux, au souvenir de leur séparation, là-bas, à Remilly, lorsqu'ils s'étaient quittés en se demandant si l'on se reverrait un jour, et comment, dans quelles circonstances de douleur ou de joie (ZOLA, Débâcle, 1892, p. 609):
• 2. Si je cherche maintenant pourquoi je m'imposais cette séparation qui m'était pénible, j'aperçois plusieurs mobiles: d'abord je me trouvais laide à ce moment; j'avais le visage fatigué; je craignais de lui déplaire. Puis l'idée d'éloigner Philippe de Solange continuait à m'être précieuse, et peut-être plus précieuse même que la présence de mon mari.
MAUROIS, Climats, 1928, p. 228.
— Séparation + adj. Séparation déchirante, douloureuse; séparation imminente, imprévue, inévitable, irrévocable ; séparation momentanée, passagère; cruelle séparation; brusque, courte, longue séparation. Souvent, leurs yeux se rencontraient, avec une expression de tendresse inquiète, comme s'ils étaient à la veille d'une séparation éternelle (ROLLAND, J.-Chr., Maison, 1909, p. 1068). Quand le train s'arrêta, des séparations interminables, qui avaient souvent commencé sur ce même quai de gare, y prirent fin, en une seconde, au moment où des bras se refermèrent avec une avarice exultante sur des corps dont ils avaient oublié la forme vivante (CAMUS, Peste, 1947, p. 1460).
[À propos de la mort] Séparation à jamais. Mon père disait que cet enfant faisait sa gloire. Tout le monde se louait de lui, ce n'était que larmes et louanges sur son cercueil. Ce fut avant-hier la triste, lugubre, déchirante et dernière séparation au cimetière (E. DE GUÉRIN, Lettres, 1839, p. 295). Toute la question était d'empêcher le plus d'hommes possible de mourir et de connaître la séparation définitive. Il n'y avait pour cela qu'un seul moyen qui était de combattre la peste (CAMUS, Peste, 1947, p. 1325).
♦ Séparation + déterm. qui en précise la durée. Il me tarde bien de vous revoir, mes bons amis. Notre séparation d'un mois m'est extrêmement pénible (MICHELET, Journal, 1838, p. 792). Particulièrement heureux, tous les deux, aujourd'hui; savourant le bonheur d'être ensemble et isolés dans la foule, souffrant à la seule idée d'une séparation de quelques instants (LARBAUD, Journal, 1931, p. 250).
— Séparation + déterm. désignant l'un des protagonistes ou les protagonistes de l'action.
♦ Séparation + adj. de rel. La « crise d'originalité juvénile », comme on l'a nommée, est une réaction fonctionnelle normale, qui ne doit pas être brimée, mais aidée et canalisée. Une séparation familiale de quelque durée est presque indispensable pour favoriser cette maturation (MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 103).
♦ Séparation (de qqn) avec/d'avec qqn. Annette, sentant que sa séparation avec son cousin alloit devenir éternelle, mit à le voir, lui parler et l'accueillir, une affectueuse amitié, une tendresse si forte, si sentie, qu'il en fut ému (BALZAC, Annette, t. 3, 1824, p. 161). Pendant les premières sept années de sa séparation d'avec sa maîtresse, il s'échappait de chez lui le matin, avant le jour, et il allait à 4 lieues de là, à pied, pour voir à un bureau de poste s'il n'était pas venu de lettres (FLAUB., Corresp., 1846, p. 288).
♦ Séparation de qqn (vieilli). Le 16 septembre, jour de deuil, séparation de mes enfants qui sont reparties avec leur tante pour Périgueux (MAINE DE BIRAN, Journal, 1818, p. 158):
• 3. Tout ce qu'on peut dire (...), c'est que le chagrin causé par la séparation de la « bien-aimée » inconnue n'est pas encore assez fort, à cette date (...), pour ne point laisser à l'esprit de Beethoven la liberté de jouir de la compagnie d'une jolie fille et de ses aimables agaceries.
ROLLAND, Beethoven, t. 2, 1937, p. 533.
♦ Séparation de... et de. La veille de la double séparation du père et de la fille, de l'épouse et de l'époux, Eudore fit savoir à Cymodocée que tout étoit prêt (CHATEAUBR., Martyrs, t. 2, 1810, p. 220).
— Séparation + compl. prép. désignant l'orig. ou la cause de l'action. Le toi, c'est la personne avec qui l'on vit, que l'on aime, dont on est tourmenté, que l'on agite, que l'on passionne, qu'il faudra quitter pour la séparation volontaire de la vie ou involontaire de la mort (VIGNY, Journal poète, 1862, p. 1366). [Alban s'était] rasé pendant la séparation des vacances (MONTHERL., Bestiaires, 1926, p. 388).
— Séparation en position de compl. déterm. L'heure de la séparation était venue. L'équipage et les passagers se tenaient sur le pont. Plus d'un se sentait l'âme serrée (VERNE, Enf. cap. Grant, t. 3, 1868, p. 245). On sentait (...) qu'une mélancolie pesait sur la maison tout entière, et devenait de plus en plus lourde à mesure qu'approchait le jour de la grande séparation (LOTI, Rom. enf., 1890, p. 95).
♦ [Le déterminé précise la durée de la séparation] Après une année de séparation forcée, nous nous retrouvons chez mon oncle (DUMAS fils, Fils natur., 1858, III, 4, p. 148). Elle avait abdiqué toute fierté. Ces trois jours de séparation l'avaient transformée (MARTIN DU G., Thib., Été 14, 1936, p. 467).
♦ [Le déterminé précise le sentiment, la réaction provoqué(e) par la séparation] Toute la douleur de la séparation vint me saisir; je me sentais défaillir en regardant cette voiture qui m'entraînait loin d'elle! (KRÜDENER, Valérie, 1803, p. 189). C'est la fin du jour, la tristesse de la séparation, un plaisir douloureux d'amour (BARRÈS, Cahiers, t. 11, 1914, p. 17).
c) ) Relâchement ou rupture du lien qui unissait deux personnes. Le sevrage alimentaire du nourrisson (...) est en même temps une séparation d'avec la mère: plus il a été pénible, moins bien les renoncements ultérieurs seront supportés (MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 428).
— En partic. [À propos d'un homme et d'une femme, d'un mari et de sa femme] Puisque la princesse, sa femme, ne se souciait aucunement de lui, une séparation de forme n'ajoutait guère à la séparation de fait, et n'y joignait pas même une notoriété déjà complète (GOBINEAU, Pléiades, 1874, p. 332). Il se rendait (...) bien compte que depuis sa séparation d'avec sa femme sa fille ne lui appartenait plus (VAN DER MEERSCH, Invas. 14, 1935, p. 75). V. dissocier B 1 ex. de Sauvegarde de l'enfance.
♦ Synon. de divorce. Le mariage avec Marie-Louise, disait l'Empereur, se proposa et se conclut dans le même jour, et sous les mêmes formes et conditions que celui de Marie-Antoinette, dont le contrat fut adopté pour modèle. Depuis la séparation avec Joséphine, on traitait avec l'empereur de Russie pour une de ses sœurs (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 193).
) DR. CIVIL. [À propos de deux conjoints]
— Séparation de biens. ,,Régime matrimonial caractérisé par l'absence de biens communs aux deux époux`` (Jur. 1985). Le contrat fut établi sur le régime de la séparation des biens qui conserve aux époux l'entière administration de leur fortune (ZOLA, Curée, 1872, p. 384)
♦ Séparation de biens conventionnelle. ,,Séparation de biens stipulée dans le contrat de mariage`` (CAP. 1936).
♦ Séparation de biens judiciaire. Séparation de biens prononcée par l'autorité judiciaire à la demande d'un des époux en cas de mauvaise gestion ou d'inconduite de son conjoint, qui se substitue au régime matrimonial antérieur mais peut cesser par consentement des deux époux et qui, par ailleurs, résulte également de la décision de justice prononçant la séparation de corps entre les époux (d'apr. CAP. 1936 et Lar. encyclop. Suppl. 1968).
— Séparation de corps ou, absol., séparation. Simple relâchement du lien conjugal, consistant essentiellement dans la dispense du devoir de cohabitation, prononcé par jugement et résultant des mêmes causes que le divorce (d'apr. Jur. 1985). La séparation de corps (...) laisse subsister les obligations de fidélité et de secours (M. VANEL, Pt Manuel de Dr., t. 1, 1956, p. 162). V. corps II A 2 b ex. de Drieu La Rochelle.
♦ Loc. verb. Demander la séparation; plaider en séparation; intenter un procès en séparation; introduire une demande, présenter une requête en séparation. On n'attribue à la femme qu'un seul genre d'honneur. Infidèle à son mari, elle est flétrie et avilie, elle est déshonorée aux yeux de ses enfants, elle est passible d'une peine infamante, la prison. Voilà ce qu'un mari outragé qui veut soustraire ses enfants à de mauvais exemples, est forcé de faire quand il demande la séparation judiciaire (SAND, Hist. vie, t. 4, 1855, p. 393).
Prononcer la séparation; rendre un jugement de séparation. Le 16 février 1836, le tribunal rendit un jugement de séparation en ma faveur (SAND, Hist. vie, t. 4, 1855, p. 388). Si j'avais croqué la dot de ma femme, c'est contre moi que l'on prononcerait la séparation. Ce n'est pas cela que je veux, je veux qu'elle soit prononcée en ma faveur (MEILHAC, HALÉVY, Boule, 1875, I, 10, p. 26).
— Séparation de dettes. ,,Clause d'un contrat de mariage aux termes de laquelle les dettes de chaque époux doivent être payées par celui qui les a contractées`` (BARR. 1974). La clause de séparation des dettes n'empêche point que la communauté ne soit chargée des intérêts et arrérages qui ont couru depuis le mariage (Code civil, 1804, art. 1512, p. 279).
— Séparation de fait. ,,Situation de deux époux qui vivent séparément sans y avoir été autorisés par un jugement de divorce ou de séparation de corps`` (Jur. 1985). La séparation de fait n'est plus désormais illicite (Jur. 1985).
— P. métaph. Ils avaient cru, ainsi que la chose arrive souvent, s'épouser sous le régime de la séparation de cœur. Mais un soir, après une violente querelle où ils avaient résolu de se quitter sur le champ, ils s'aperçurent que leurs mains, qui s'étaient serrées en signe d'adieu, ne voulaient plus se séparer. Presque à leur insu leur caprice était devenu de l'amour (MURGER, Scènes vie boh., 1851, p. 171).
) P. anal., RELIG., MYSTIQUE. Le christianisme, après avoir posé comme premier terme le dogme de la chute, a poursuivi sa pensée en affirmant, pour tous ceux qui mouraient dans cet état de souillure, une séparation irrévocable d'avec Dieu, une éternité de supplices (PROUDHON, Syst. contrad. écon., t. 1, 1846, p. 345).
) Fait de rompre avec quelqu'un sur le plan des idées, des options politiques notamment; divergence d'idées, d'opinions. L'Empereur m'a amené au jardin vers les quatre heures. Il venait de finir la dictée sur la Corse, ayant épuisé le sujet sur cette île, celui de Paoli, et parlé de l'influence que lui-même s'y était créée si jeune encore, lors de sa séparation politique d'avec Paoli (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 212). Dans ce journal comme dans l'organisation, à la fin de 1830, la démission de Lafayette, qui était le grand chef de la garde nationale, provoque des dissentiments et des séparations (MORIENVAL, Créateurs gde presse, 1934, p. 34).
) POL. Rupture d'une alliance, d'un lien de dépendance. Seules, les perspectives d'une rupture avec nous et la nécessité de ménager les sentiments de la France pourraient imposer à Londres une certaine modération (...). L'inconvénient moral et matériel que présenterait, pour nous, la séparation d'avec la Grande-Bretagne avait, évidemment, de quoi nous retenir (DE GAULLE, Mém. guerre, 1954, p. 179).
— HIST. POL. Séparation des Églises et de l'État. ,,Régime considérant l'activité religieuse comme une activité privée, soumise à la seule police de l'ordre public et traitant par la suite les Églises comme des groupements de droit privé`` (CAP. 1936); situation qui en résulte. Qu'on ne s'effraie pas des inconvéniens que la suppression du salaire semble, au premier coup-d'œil, pouvoir entraîner; fussent-ils réels, il faudroit encore s'y résigner sans hésitation, puisque le salut de l'Église dépend de sa séparation d'avec l'État (LAMENNAIS ds L'Avenir, 1830-31, p. 156):
• 4. Le régime légal fixe la condition officielle de la société religieuse dans l'État: séparation radicale ou partielle, concordat large ou restrictif. On se gardera de faire aux textes officiels une confiance excessive: « il y a des concordats orageux et des séparations cordiales »...
Philos., Relig., 1957, p. 44-4.
♦ Loi de séparation. Loi du 9 décembre 1905 instituant ce régime. Tout récemment la loi de Séparation qui a dissous un grand nombre de congrégations a eu également pour effet de transmettre à l'État et aux communes la propriété des œuvres d'art qui se trouvaient dans les Églises et les Évêchés (RÉAU, Archives, bibl., musées, 1909, p. 26).
♦ Absol. La Séparation. ,,Épisode historique qui a abouti à l'état de droit de la séparation entre les Églises et l'État`` (Lar. Lang. fr.). [Les] grands débats de la Séparation et des querelles des Inventaires (FRANCE, Révolte anges, 1914, p. 4).
d) P. anal. Rupture temporaire ou définitive avec son milieu habituel. Après deux ans d'une totale séparation du monde, une femme divorcée pourrait se remarier (STENDHAL, Amour, 1822, p. 229). Qu'elle était belle, cette jeunesse qui, à l'âge où le tempérament s'allume, où l'on ne cherche qu'à plaire et à gagner de l'argent, s'enfermait derrière de hauts murs et s'habillait de noir des pieds à la tête afin d'accentuer sa séparation d'avec le monde! (BILLY, Introïbo, 1939, p. 37).
3. [L'action concerne des pers. ou des choses]
a) ) Action, fait de constituer quelque chose en unité distincte par rapport à autre chose; fait pour quelque chose de constituer une unité distincte par rapport à autre chose; absence de relation, de lien de dépendance avec autre chose. Le rideau est peut-être le signe le plus visible de l'enfermement de la scène et de la séparation de la salle, séparation à la fois spatiale et temporelle, à la fois matérielle et spirituelle (SERRIÈRE, T.N.P., 1959, p. 92). Dans tous les partis de masse, les dirigeants forment un groupe assez nettement distinct du reste des adhérents et des militants (...). Cependant, la séparation entre les deux groupes n'est pas rigoureuse dans les pays développés: le « cercle intérieur » demeure très ouvert, et les membres de la base peuvent y pénétrer assez facilement (Traité sociol., 1968, p. 32).
) En partic. Absence de lien entre le Créateur et sa création; indifférence de celui-ci pour celle-là. Malgré la joie qu'elle exprime souvent, c'est le côté sombre de la gnose, le drame de la séparation du divin et du monde, qui en reste, aux yeux de beaucoup, le caractère fondamental (Philos., Relig., 1957, p. 34-10).
b) Fait, pour une personne ou pour un groupe, d'être exclu d'une communauté, de constituer une unité distincte par rapport à elle. L'injustice est un amer qui redonne du goût à la solitude, aiguise l'appétit de séparation et de singularité (VALÉRY, Tel quel I, 1941, p. 39):
• 5. Dans le bouddhisme (...) l'illumination est (...) inséparable de l'amour des êtres. Les Bodhisatvas retardent indéfiniment leur propre délivrance, qui est pourtant à leur portée, pour aider les autres à se sauver. C'est que l'amour est premier et que la séparation d'une âme rend imparfaite l'union de toutes les autres.
Philos., Relig., 1957, p. 36-14.
♦ [P. réf. à l'unité primordiale] Non appartenance au tout. V. individuation ex. de Béguin.
— [Pour une communauté] Perte de ce qui en faisait partie. Les malheurs de la France, la séparation de l'Alsace et de la Lorraine, avaient imprimé au caractère de Marcel une maturité toute virile (VERNE, 500 millions, 1879, p. 22).
B. — [Corresp. à séparer 1re et 2e Section II B]
1. a) ) Action, fait de mettre à part, d'isoler l'un de l'autre/les uns des autres, pour les regrouper éventuellement par catégories, les éléments d'un ensemble, d'un mélange hétérogène. V. grain I A ex. de Lamennais, pesée B ex. de Proust.
♦ [P. allus. à Gen. I, 4] Quand je lisais ma Bible seul, ayant le choix des passages, c'était toujours la Genèse grandiose, la séparation de la lumière et des ténèbres, ou bien les visions et les émerveillements apocalyptiques (LOTI, Rom. enf., 1890, p. 107).
— [À propos de pers.] Il semblait à Sibylle que cette séparation remarquable des deux sexes dans les coutumes de la société polie avait l'inconvénient de réduire trop souvent la conversation des femmes à des commérages de harem (FEUILLET, Sibylle, 1863, pp. 159-160). Chez les Sakai (...) hommes et femmes dansent, mais toujours séparément; toutefois la séparation ne va pas jusqu'à défendre aux femmes d'accompagner la danse des hommes par leurs chants et par la scansion de la mesure (CUISINIER, Danse sacrée, 1951, p. 33).
Discrimination, ségrégation. Les centres ainsi institués ne devraient pas être réservés exclusivement aux chômeurs, mais être ouverts aussi aux travailleurs occupés, afin d'éviter toute séparation systématique qui donne, comme nous l'avons vu, aux chômeurs l'impression accablante de ne pas faire partie de la vie normale (BECQUET, Organ. loisirs travaill., 1939, p. 79).
) CHIM., PHYS., INDUSTR. AGRO-ALIM. Séparation huile eau. Les essais faits en employant un courant de vapeur d'eau et un mélange de néon et d'hélium ont conduit à une excellente et rapide séparation de ces deux gaz. La méthode doit être appliquée à la séparation des isotopes (Mme P. CURIE, Isotopie, 1924, p. 884). La trichromie. — Tous ces procédés sont basés sur la séparation des couleurs fondamentales: bleu, rouge, jaune. La sélection des couleurs s'obtient par l'emploi des écrans colorés: on photographie trois fois le document, à travers trois écrans (Arts et litt., 1935, p. 28-16). V. caillé III A ex. de Pouriau.
♦ [Avec adj. désignant l'objet de l'action] Cinq milliards de nouveaux francs (...) sont consacrés au programme nucléaire d'études et d'engins spéciaux et comprennent les crédits nécessaires pour assurer le financement de l'usine de séparation isotopique (GOLDSCHMIDT, Avent. atom., 1962, p. 145).
♦ [Avec déterm. désignant le procédé utilisé]
[Le déterm. est un adj.] Pour les séparations magnétiques, on se sert d'un électro-aimant en faisant varier l'intensité du champ, pour extraire du mélange des minéraux de susceptibilités magnétiques différentes (BRAJNIKOV, Pétrogr. et rayons X, 1936, p. 14). Les étonnants résultats acquis par M. Georges Claude, pour la liquéfaction de l'air, donnaient à penser que les méthodes de séparation fractionnée des divers éléments (oxygène, azote, gaz rares...) pourraient s'appliquer à tous les mélanges gazeux, notamment à ceux où domine l'hydrogène (E. SCHNEIDER, Charbon, 1945, p. 308).
[Le déterm. est un compl. prép.] Le blutage est la séparation, par tamisage, de la farine et du son, lequel garde la cellulose et les trois quarts des sels, notamment les phosphates (MACAIGNE, Précis hyg., 1911, p. 248). Ce savant [Rayleigh] a donné une théorie de la séparation de deux gaz par diffusion au travers d'une paroi poreuse (Mme P. CURIE, Isotopie, 1924, p. 183).
— BIOLOGIE
♦ Fait pour des caractères distincts d'être répartis sur des individus distincts. Chez les Métazoaires, la séparation des sexes est fréquente, en particulier chez les animaux supérieurs (Arthropodes, Vertébrés) (Hist. gén. sc., t. 3, vol. 1, 1961, p. 524).
♦ Synon. de différenciation. Chez le ver Ascaris, par exemple, la séparation du germen et du soma se manifeste clairement dès la première division de l'œuf (J. ROSTAND, La Vie et ses probl., 1939, p. 44).
— MATH. Séparation des racines d'une équation. ,,Opération consistant à trouver une suite de nombres réels tels qu'entre deux de ces nombres consécutifs ne se trouve qu'une racine réelle, et une seule, de l'équation proposée`` (Lar. encyclop.). Ce théorème [théorème de Bolzano pour les polynômes] est (...) à la base de tous les critères de séparation des racines réelles d'un polynôme (à coefficients réels), qui constituent un des sujets de prédilection de l'algèbre pendant le XIXe siècle (BOURBAKI, Hist. math., 1960, p. 119).
b) P. anal.
) Fait de mettre entre des mains différentes, de confier à des autorités différentes des attributions différentes. [Auguste Comte] a formulé ainsi la loi historique de l'industrie moderne: séparation progressive du capital et du travail, distinction inévitable et toujours croissante entre la fonction du capitaliste et celle du travailleur (FERRY, 1867 ds Fondateurs 3e Républ., p. 247):
• 6. Les trois données du problème sont donc: — commander, — administrer, — contrôler. Les solutions données à ce problème ont varié au cours de l'histoire pour aboutir à l'organisation actuelle dont les principes essentiels sont les suivants: — séparation du commandement, de l'administration et du contrôle; — subordination de l'administration au commandement.
LUBRANO-LAVADERA, Législ. et admin. milit., 1954, p. 176.
— En partic. Séparation des pouvoirs. V. pouvoir2 I D 3 a.
) Fait de ne pas mélanger les tâches confiées à des mains différentes. Il fut persuadé du bien-fondé de ses griefs envers son fils. Heureusement, il avait prévu tout cela dès le jour où il avait décidé la séparation de leurs activités (DRUON, Gdes fam., t. 2, 1948, p. 45).
c) Au fig.
) Fait de distinguer, de différencier les unes des autres des réalités concrètes ou abstraites pour en établir éventuellement un classement. Synon. différenciation, distinction ; anton. confusion.
♦ Séparation de... d'avec. Les partis (...). Leur séparation d'avec les groupes de pression constitue un point généralement hors de discussion dans les analyses courantes (MEYNAUD, Groupes pression en Fr., 1958, p. 37).
♦ Séparation de... et de. La séparation du sacré et du profane, du dimanche et des autres jours (AMIEL, Journal, 1866, p. 269).
♦ Séparation entre... et. La séparation commune entre le signe et la chose, le mot et l'idée, relève de la méthode de connaissance la plus simple, mais aussi la plus savante, qui soit à notre portée: celle dont use le détective aussi bien que le philosophe, et le dépanneur d'autos comme le physicien (PAULHAN, Fleurs Tarbes, 1941, p. 72).
Séparation entre les genres. Le tableau reste, et l'œil le parcourt (...) le mouvement théâtral est soumis à la loi du temps, et c'est dans la succession et non dans les parties qu'il exprime la variété. (...) l'on comprend ici assez clairement que la séparation entre les genres n'a rien d'arbitraire, et répond aux conditions de tout langage (ALAIN, Beaux-arts, 1920, p. 152).
— [À propos de pers.] Vieilli. Au miracle politique du respect pour les droits de chacun, fondé sur le sentiment de la justice, il faut ajouter la réunion habile autant qu'heureuse de l'égalité devant la loi, avec les avantages attachés à la séparation des rangs. Chacun y a besoin des autres pour ses jouissances, et cependant chacun y est indépendant de tous par ses droits (STAËL, Consid. Révol. fr., t. 2, 1817, p. 339).
) Fait de classer dans des catégories différentes. La détermination précise du caractère optique de l'axe unique des cristaux à un axe, ou de la bissectrice des cristaux à deux axes, peut fournir à la minéralogie un élément précieux pour assurer la réunion ou la séparation de certaines espèces, lorsque l'étude cristallographique et chimique laisse cette réunion ou cette séparation incertaine (DES CLOIZEAUX, Propr. opt. biréfringentes, 1857, p. 4).
) P. méton. Ce qui justifie une différenciation, une distinction. Pour que deux substances soumises à une action chimique aussi uniforme pour chacune donnent lieu à des résultats si différents, il faut bien qu'il y ait une séparation profonde entre les arrangements moléculaires correspondants (PASTEUR ds Ann. chim. et phys., t. 23, 1848, p. 292). De nouveaux essais sont (...) nécessaires pour que soit tranchée la séparation entre le journal et la revue (Civilis. écr., 1939, p. 32-5).
2. a) Action, fait d'extraire, d'isoler un corps, une substance de son milieu d'origine (pour le recueillir ou l'éliminer). L'écrémage (...) consiste à séparer les globules gras ou crème de l'eau, de la caséine, du lactose et des matières minérales qui constituent le lait écrémé ou petit-lait. Ce travail de séparation, qui se faisait autrefois à la main (...) est maintenant remplacé par l'écrémage centrifuge (BRUNERIE, Industr. alim., 1949, p. 42). Jusqu'à présent, tout effort de séparation d'une protéine par rapport à son milieu biologique a surtout abouti à en faire une protéine morte (P. MORAND, Confins vie, 1955, p. 25). V. granulométrique ex. de Caillère, Hénin.
b) Fait d'isoler un malade pour préserver le groupe de la contamination. Peut-être n'y a-t-il rien, dans sa liturgie, de plus touchant et de plus solennel à la fois que le cérémonial, dit separatio leprosorum, avec lequel on procédait à la séparation de celui que Dieu avait frappé (MONTALEMBERT, Ste Élisabeth, 1836, p. 218).
c) Au fig. Action, fait de mettre à part en vertu d'un statut particulier. La notion de « séparation » est inhérente à l'homme en tant qu'homme. Nous avons cité plus haut (...) la phrase du rituel de kippour (office de Neïla): « Tu as distingué l'homme dès l'origine... » C'est pourquoi l'on peut dire que la séparation « spéciale » dont Israël est l'objet accentue tout à la fois son particularisme et son humanité (WEILL, Judaïsme, 1931, p. 114).
3. Action, fait de distinguer l'un de l'autre des objets effectivement distincts, mais apparemment confondus. Bientôt, la perception visuelle ne sera plus qu'un moyen d'investigation parmi d'autres; la séparation optique des étoiles que la spectroscopie aura fait préalablement classer comme doubles, par exemple, ne soulèvera aucune émotion (Hist. gén. sc., t. 3, vol. 1, 1961, p. 152).
C. — [Corresp. à séparer 1re et 2e Section II C]
1. a) Rupture du contact entre deux éléments par interposition d'un troisième. L'offensive allemande avait provoqué la rupture du front franco-britannique, effectué une large brèche, dont la séparation des armées britannique et française était la première conséquence (FOCH, Mém., t. 2, 1929, p. 19).
b) Loc. adj. De séparation. Qui s'interpose.
) Qui a pour fonction d'isoler l'une de l'autre deux fractions d'espace, deux entités concrètes ou abstraites. Mur de séparation. Un bouton situé sur le tableau de bord (...) assure le fonctionnement automatique (...) de la glace de séparation sur les limousines (TINARD, Automob., 1951, p. 386):
• 7. Quand un ingénieur du téléphone étudie un circuit électrique, il trouve souvent très commode de se servir des nombres par paires, telles que 2, 5 ou — 4, — 1. La virgule est ici un signe de séparation pour exprimer qu'il s'agit d'un groupe de deux nombres distincts, mais associés. Les mathématiciens appellent par tradition les nombres de ce genre, nombres complexes...
BERKELEY, Cerveaux géants, 1957, p. 146.
♦ TYPOGR. Blanc de séparation. ,,Blanc qui sépare le texte des notes`` (CARABELLI, [Lang. typogr.], s.d.).
♦ [Dans un cont. métaph.] [Les prêtres-ouvriers] veulent abattre « le mur de séparation » qui s'est dressé entre la classe ouvrière et l'Église et que Pie XI appelait « le scandale du XIXe siècle » (Philos., Relig., 1957, p. 50-2).
) Qui marque la limite de part et d'autre de laquelle se démarquent deux entités concrètes ou abstraites.
♦ Ligne de séparation (entre). Synon. frontière. Au cours des dernières années, des clivages à l'intérieur des partis se sont ajoutés à leurs divisions extérieures: sur plusieurs problèmes fondamentaux (l'unification européenne en est un bon exemple) la ligne de séparation entre les attitudes se situe au sein des partis eux-mêmes (MEYNAUD, Groupes pression en Fr., 1958, p. 185):
• 8. Parmi tous les services publics qu'assure ou que fait assurer l'État multiforme, la ligne principale de séparation est entre les services publics administratifs qui sont soumis au droit public et les services publics industriels et commerciaux qui y échappent largement.
BELORGEY, Gouvern. et admin. Fr., 1967, p. 68.
♦ Point de séparation (de... et de). Le point de séparation du rouge et du violet (...) est plus reculé en proportion dans la seconde bande sombre que dans la première (FRESNEL ds Ann. chim. et phys., t. 1, 1816, p. 256).
♦ Surface de séparation (d'avec). Nous savons que dans le cas d'un mélange de corps dont l'un possède une faible tension, il y a concentration de celui-ci à la surface de séparation d'avec un autre milieu (CHARTROU, Pétroles natur. et artif., 1931, p. 23).
2. a) P. méton. L'agent de l'action, ce qui s'interpose. La partie de l'Église du Saint-Sépulcre qui n'est pas sous la coupole est exclusivement réservée aux Grecs schismatiques; une séparation en bois peint, et couverte de tableaux de l'école grecque, divise cette nef de l'autre (LAMART., Voy. Orient, t. 1, 1835, p. 443). La crête sous-marine qui joint l'est du Groenland au nord de l'Écosse par l'Islande et les îles Féroé et sur laquelle l'épaisseur d'eau ne dépasse nulle part 1 000 m, est une séparation efficace entre les faunes pélagiques profondes de la mer de Norvège au nord et de l'Atlantique septentrional au sud (J.-M. PÉRÈS, Vie océan, 1966, p. 58).
♦ Au fig. La nature, cinquante ans d'intervalle, avaient mis une séparation profonde entre Jean Valjean et Cosette; cette séparation, la destinée la combla. La destinée unit brusquement (...) ces deux existences déracinées, différentes par l'âge, semblables par le deuil (HUGO, Misér., t. 1, 1862, p. 525). Les goûters (...) que Gilberte offrait à ses amies et qui si longtemps m'avaient paru la plus infranchissable des séparations accumulées entre elle et moi devenaient maintenant une occasion de nous réunir (PROUST, J. filles en fleurs, 1918, p. 504).
— En partic., dans le domaine de l'écriture, de la représentation graph. Les blancs employés comme séparation des mots ont le même aspect que les lettres, mais sont tenus plus bas qu'elles afin de ne pas marquer à l'impression (É. LECLERC, Nouv. manuel typogr., 1932, p. 50). Si, à l'intérieur d'un diagramme d'Euler, nous traçons une séparation verticale, par exemple, nous formons ainsi deux nouveaux ensembles, situés de part et d'autre de la nouvelle frontière (WARUSFEL, Math. mod., 1969, p. 48).
— MUS. Synon. de note séparative. [La] séparation (...) [est un] ornement conseillé par Geminiani (1749) comme exprimant la tendresse; sa place la plus favorable est dans le cas où la mélodie monte d'une seconde ou d'une tierce, ou descend d'une seconde; on l'associe à un trille ou à un mordant (BRENET Mus. 1926, p. 404).
b) P. anal. [Dans un processus en évolution] Coupure, rupture, discontinuité. L'évolution de la terre a été continue; il n'y a pas de séparations brusques dans les divisions géologiques, pas plus que dans les divisions des historiens. Les coupures établies par les uns et les autres ne sont faites que pour venir en aide à notre esprit (BOULE, Conf. géol., 1907, p. 56). Marx avait, au plus haut degré, l'idée que la révolution sociale dont il parlait constituerait une transformation irréformable et qu'elle marquerait une séparation absolue entre deux ères de l'histoire (SOREL, Réflex. violence, 1908, p. 201).
Prononc. et Orth.:[]. Ac. 1694, 1718: se-; dep. 1740: sé-. Étymol. et Hist. 1. 1314 « action de séparer, d'isoler divers éléments » separacion entre choses de diverses entencions (HENRI DE MONDEVILLE, Chirurgie, éd. A. Bos, n ° 106); en partic. a) 1718 « isoler les éléments d'un mélange » separation des metaux (Ac.); b) 1791 séparation des pouvoirs (Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, art. 16); c) 1830 la séparation de l'Église et de l'État (LAMENNAIS ds L'Avenir, p. 149); 1906 la Séparation (BLOY, Journal, p. 328); d) 1936 séparation des autorités administratives et judiciaires (CAP.); e) 1933 math. séparation des variables (Lar. 20e); 2. a) 1314 « brouille » contens et separations (GERVAIS DU BUS, Fauvel, éd. A. Långfors, 1464); b) 1456-57 « rupture entre époux » le divorce et separacion (Cent. nouv. Nouvelles, éd. Fr. P. Sweetser, LXXIIIe nouvelle, p. 445, 169); c) 1549 « action d'éloigner quelqu'un de personnes qui lui sont chères » (EST.); d) 1784 « fait d'être séparé de quelqu'un, temps que dure cet éloignement » (Mme DE GENLIS, Veill. du chât., t. II, p. 411 ds POUGENS ds LITTRÉ); 3. a) 1549 « obstacle dressé pour séparer » les separations et menaux (L'Ordre tenu au sacre et couronnement de la royne Catherine de Médicis ds HAVARD t. 4); b) 1701 fig. le mur de séparation qui vous éloigne de Dieu (MASS., Carême, Doutes ds LITTRÉ). Empr. au lat. class. separatio « id. », formé sur le supin separatum de separare, v. séparer. Fréq. abs. littér.:1 985. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 3 343, b) 2 826; XXe s.: a) 2 127, b) 2 795. Bbg. QUEM. DDL t. 11. — RABOTIN (M.). Le Vocab. politique... Montréal, Paris, Bruxelles, 1975, p. 90.
séparation [sepaʀɑsjɔ̃] n. f.
ÉTYM. 1314; lat. separatio, du supin de separare. → Séparer.
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1 Le fait de séparer (une chose en plusieurs parties, des choses, des personnes), de se séparer, d'être séparé. ⇒ Décollement, démembrement, désagrégation, désunion, disjonction, dislocation, dispersion, rupture (1.); et aussi le préf. Di- ou dis-. || Séparation des éléments d'un mélange. || Séparation des isotopes par diffusion (gazeuse, thermique, à travers une membrane), centrifugation, distillation, électrolyse, etc. — Facteur de séparation : rapport des valeurs de la richesse relative à l'isotope à séparer. || Coefficient de séparation. || Un commencement de séparation (→ Dilatation, cit. 1). — La séparation du bon grain de l'ivraie, d'avec l'ivraie.
1 (La justice s'exerce) comme la justice du Jugement Dernier, comme la séparation du bon et du méchant.
Giraudoux, De pleins pouvoirs à sans pouvoirs, I, p. 19.
➪ tableau Vocabulaire de la chimie.
♦ Spécialt. || La séparation d'une province, d'une colonie (⇒ Indépendance, scission, sécession, séparatisme), d'une secte (⇒ Dissidence, schisme). — Dr.; admin. || Séparation des attributions, des compétences… ⇒ Distinction. || Séparation d'une partie d'un compte… ⇒ Distraction. || Séparation des autorités administratives et judiciaires. — (1791). || Séparation des fonctions, des pouvoirs (2. Pouvoir, supra cit. 16) : principe constitutionnel selon lequel les fonctions de l'État (législative, exécutive, judiciaire) doivent être exercées par des organes distincts jouissant d'une certaine indépendance (→ Garantie, cit. 6). — (1878). || Séparation des Églises et de l'État, principe d'après lequel les organisations religieuses (Églises, etc.) sont considérées comme des groupements de droit privé (→ Lettre, cit. 30; radical, cit. 3). — (1804). Dr. privé. || Séparation des patrimoines : priorité accordée aux créanciers d'une succession sur les créanciers des héritiers. — Littér. || Le principe de la séparation des genres dans la littérature classique.
♦ Math. || Séparation des variables.
♦ Techn. Qualité de deux signaux stéréophoniques répartis dans leurs deux canaux.
♦ Par ext. Le fait de se distinguer, d'être différent (⇒ Différence) et de ne pas avoir de relations.
2 (…) la séparation des classes, qui est plus prononcée en Allemagne que partout ailleurs, parce que la société n'en adoucit pas les nuances, nuit à quelques égards à l'esprit proprement dit.
Mme de Staël, De l'Allemagne, I, II.
2 (Mil. XVIe; « brouille », XIVe). Personnes. Le fait de se séparer, de se quitter (⇒ Partir) ou de cesser d'être ensemble, d'avoir des relations. || La séparation d'une personne et d'une autre, d'une personne d'avec une autre. || Sa séparation de sa femme, d'avec sa femme. || La séparation de deux amants. ⇒ Rupture. || Le déchirement (cit. 3) d'une première séparation. || Après six ans de séparation… (→ Irréconciliable, cit. 5). — La minute (→ Endiguer, cit. 3), le moment de la séparation… (→ Pathétique, cit. 6). — La séparation dernière : la mort. ⇒ Perdre, perte (→ 1. Mère, cit. 10).
3 Ma séparation d'avec Albertine, le jour où Françoise m'avait dit : « Mademoiselle Albertine est partie », était comme une allégorie bien affaiblie de tant d'autres séparations. Car bien souvent, pour que nous découvrions que nous sommes amoureux, peut-être même pour que nous le devenions, il faut qu'arrive le jour de la séparation.
Proust, la Fugitive, Pl., t. III, p. 506.
4 C'était comme au moment d'une séparation, quand on s'embrasse très fort et qu'on sait parfaitement bien qu'on ne se verra plus jamais.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier, III, XI.
♦ Par ext. Le fait de ne pas être ensemble, de ne pas être unis. ⇒ Éloignement, exil. || Séparation totale (→ Compréhensible, cit. 1).
5 Cette séparation dans l'union, cette réciprocité de liberté dans le ménage, cette tolérance absolue n'est pas un trait du mariage, elle en est le caractère. Il n'y a plus guère de ménage sans coadjuteur.
Ed. et J. de Goncourt, la Femme au XVIIIe siècle, t. I, p. 242.
♦ Dr. || Séparation de fait (ou séparation amiable) : état de deux époux qui ont convenu de vivre séparément. — ☑ Loc. (1636). Séparation de corps, résultant d'un jugement rendu à la demande des époux (comme le jugement de divorce; Code civil, art. 306) et qui entraîne une atténuation des effets du mariage (→ Communauté, cit. 5; divorce, cit. 3; honte, cit. 12).
♦ (1636). || Séparation de biens : « régime matrimonial dans lequel chacun des époux conserve la propriété de ses biens personnels (…), à charge de contribuer aux dépenses du ménage » (Capitant). || Séparation de biens conventionnelle (stipulée dans le contrat de mariage), judiciaire (résultant d'un jugement).
♦ (1845). || Séparation de dettes, stipulée par une convention entre époux (sous le régime de la communauté).
3 (1549). Ce qui empêche un objet, un lieu, etc., d'être réuni à un autre, de former un tout avec lui. Objet ou espace qui sépare. || Séparation entre deux surfaces, deux zones, deux pays. ⇒ Borne(s), démarcation, frontière. || Barrière, haie, mur servant de séparation (→ Héberge, cit.). || Faire la séparation d'une pièce avec une autre (→ Balustre, cit. 3). || Former séparation. — Surface, ligne de séparation (→ Optique, cit. 2; pâte, cit. 10). ⇒ aussi Solution (de continuité). — Par ext. Cloison. || Établir une séparation amovible entre deux pièces.
4 Fig. Différenciation, distinction. ⇒ Discrimination, cloison (fig.), coupure, fossé (fig.), limite, mur (fig.). || Établir une séparation entre les plaisirs (cit. 21) sensoriels et les plaisirs spirituels (→ aussi 1. Logique, cit. 6). || Tirer une ligne de séparation entre le règne (cit. 1) animal et végétal. || L'analyse établit des séparations.
6 S'il fallait pousser un peu plus loin dans l'analyse, l'on ajouterait ici que la séparation commune entre le signe et la chose, le mot et l'idée, relève de la méthode de connaissance la plus simple, mais aussi la plus savante, qui soit à notre portée (…)
J. Paulhan, les Fleurs de Tarbes, p. 72.
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CONTR. Addition, agglomération, agglutination, assemblage, conjonction, connexion, fusion, incorporation, jonction, mélange, raccordement, réunion, union; contact, contiguïté; adhésion, alliance, annexion, association, assimilation; hymen, mariage; cumul. — Approche, retrouvailles; conciliation, confrontation, joint, lien, raccord; continuité; correspondance, identité, ressemblance, similitude.
Encyclopédie Universelle. 2012.