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soucier

soucier [ susje ] v. tr. <conjug. : 7>
• v. 1240; du lat. sollicitare solliciter
1Causer de l'inquiétude à (qqn). ennuyer, préoccuper.
2 ♦ SE SOUCIER v. pron. Vx ou littér. Se faire du souci. se tourmenter. « Sans se soucier Que le monde à ses pieds souffre, existe ou périsse » (Hugo).
♢ SE SOUCIER DE : prendre intérêt à, avoir la préoccupation de (surtout au négatif) . ⇒ s'embarrasser, s'inquiéter, se préoccuper. Il se soucie toujours des autres. Sans plus se soucier de rien. Je ne m'en soucie guère. S'en soucier comme de sa première chemise. « Elle qui s'en soucie comme un poisson d'une pomme » (Proust). « En fait, elle se souciait fort peu de penser. Elle se souciait de manger, boire, chanter, danser » (R. Rolland).

soucier verbe transitif Familier et vieux. Cela me soucie, cela me cause du souci. ● soucier (expressions) verbe transitif Familier et vieux. Cela me soucie, cela me cause du souci.

soucier (se)
v. Pron. Se soucier de: se préoccuper de. Ne vous souciez de rien.

⇒SOUCIER, verbe trans.
A. — Empl. trans., vieilli ou fam. Causer de l'inquiétude, du souci à quelqu'un. Synon. préoccuper. Cela ne me soucie guère; ça le soucie un peu. Mes deux autres voisins n'étaient pas si savants, à beaucoup près, et les choses d'autrefois ne les souciaient guère (ABOUT, Roi mont., 1857, p. 14). V. perclue rem. s.v. perclus ex. de Céline.
Empl. trans. indir. Ils venaient (...) exposer d'une seule traite ce qui les chagrinait ou leur souciait, Thomas ne donnant son avis qu'avec une extrême prudence et seulement si on le sollicitait (QUEFFÉLEC, Recteur, 1944, p. 93).
Empl. impers., rare. Elle ne cessa de proclamer [qu'elle-même allait très bien] quand elle était le plus malade, jusqu'au jour où, dans le détachement de la mort, il ne lui soucia plus que les heureux allassent bien et sussent qu'elle-même se mourait (PROUST, Fugit., 1922, p. 603).
Rem. L'empl. trans. est absent des dict. de l'Ac.
B. — Empl. pronom.
1. [Empl. seul] Rare. Se faire du ou des souci(s). Synon. s'inquiéter. Alors tu n'auras plus à te soucier, notre destinée sera complète, et nous ne tarderons pas à nous revoir (NODIER, Fée Miettes, 1831, p. 179).
2. [Souvent à la forme nég.] Se soucier de. Faire attention à, se préoccuper de (quelqu'un, quelque chose) qui intéresse et tient à cœur. Se soucier (fort) peu, médiocrement; ne s'en soucier aucunement, guère, plus, point; ne ... pas s'en soucier le moins du monde.
a) Se soucier de + subst. Se soucier des autres; se soucier de l'avenir, du bonheur, de la mode, de la vérité. Je suis là, près de vous, et vous ne vous souciez pas de moi (FRANCE, Lys rouge, 1894, p. 260). Brave, il savait que toute perte est limitée par la mort, dont son extrême jeunesse lui permettait de se soucier peu (MALRAUX, Conquér., 1928, p. 44):
Olivier, s'intéressant à lui, l'interrogea sur sa vie, tâcha de savoir ce qu'il pensait du mouvement ouvrier. Guérin n'en pensait rien; il ne s'en souciait pas. Il n'était pas de cette classe.
ROLLAND, J.-Chr., Buisson ard., 1911, p. 1311.
P. antiphr. Je me soucie bien de (qqn, qqc.)! je m'en soucie bien. Je m'en moque. Il se soucie bien des femmes! Il n'aime que ses bronzes (CHAMPFL., Avent. Mlle Mariette, 1853, p. 227). Je me soucie bien du bonheur. Je veux mes souvenirs, mon sol, ma place au milieu des hommes d'Argos (SARTRE, Mouches, 1943, II, 1er tabl., 4, p. 61).
Expr. fam. [Dans des compar. où le second terme désigne une chose dérisoire, insignifiante] N'attacher aucune importance à (quelqu'un, quelque chose).
Se soucier de qqn/qqc. comme de l'an quarante. V. an ex. 10. Se soucier de qqn/qqc. comme d'une guigne. V. an ex. 10. Se soucier de qqn/qqc. comme de sa première culotte. V. culotte A 1 b ex. de Pourrat. Se soucier de qqn/qqc. comme de sa première chemise. V. chemise I A 2 c.
Se soucier de (qqn, qqc.) comme un poisson (se soucie) d'une pomme. Elle se souciait autant des belles phrases qu'un poisson d'une pomme (BERNANOS, Journal curé camp., 1936, p. 1227).
b) Se soucier de + inf. Se soucier de dire, de faire. Je me soucie peu d'être aimé, et je ne sais qu'aimer comme une servante (CLAUDEL, Tête d'Or, 1890, 2e part., p. 79). Le maître, quel qu'il soit, est bien attentif à cette multitude, et se soucie de plaire (ALAIN, Propos, 1927, p. 704).
Ne pas se soucier de + inf. Ne pas se préoccuper de, n'avoir pas envie de. Sachant qu'il existe au monde une femme accomplie, je ne me soucie pas d'épouser Mlle Danglars (DUMAS père, Monte-Cristo, t. 2, 1846, p. 124). On ne s'était pas soucié de les attendre (POURRAT, Gaspard, 1930, p. 207).
c) Se soucier peu que + subj. (vieilli ou littér.). Attacher plus d'importance au fait que. Mon émotion est. Je me soucie peu que l'artiste qui l'a produite en ait pris les moyens ailleurs (ALAIN-FOURNIER, Corresp. [avec Rivière], 1906, p. 242). Ah! Je me souciais peu que ce qu'ils ourdissaient maintenant eût pour conséquence de sauver le père de Silbermann! (LACRETELLE, Silbermann, 1922, p. 175).
Ne pas se soucier que + subj. Ne pas attacher d'importance à ce que. Nous avons déjà observé que maître Florian ne se souciait pas qu'on s'aperçut de sa surdité (HUGO. N.-D. Paris, 1832, p. 236).
d) Rare. Se soucier peu si, ne pas se soucier si. Attacher peu, pas d'importance à la question de savoir si. Le compositeur qui écrit une phrase, ne se soucie pas si sa longueur dépasse les possibilités normales de la respiration (Arts et litt., 1935, p. 36-7). André Malraux, de même que Valéry, sa grande force est de se soucier fort peu s'il essouffle, ou lasse, ou « sème » celui qui l'écoute (GIDE, Journal, 1936, p. 1254).
REM. Souciance, subst. fém., hapax. État d'une personne qui se fait du souci. Anton. insouciance. Il n'y avait plus en lui ni préoccupation de l'avenir, ni méditation du passé, ni souciance du présent (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 2, 1823, p. 235).
Prononc. et Orth.:[susje], (il se) soucie [-si]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1223 part. prés. adj. home susiant (GAUTIER DE COINCI, Miracles, éd. V. Fr. Koenig, 1 Mir 10, 1939); 1269-78 réfl. soi soussier « se tourmenter, s'inquiéter » (JEAN DE MEUN, Rose, éd. F. Lecoy, 4687); id. soi soussier de aucune rien (ID., ibid., 4955); 2. id. trans. soussier aucun « donner du souci » (ID., ibid., 14 168). Du lat. vulg. , altér. du class. , prob. d'apr. , part. passé de « faire venir; réveiller; agiter, tourmenter; exciter ». Fréq. abs. littér.:1 563. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 1 827, b) 2 181; XXe s.: a) 2 090, b) 2 658.

soucier [susje] v. tr. et pron.
ÉTYM. V. 1240, se soussier de; du lat. sollicitare (le second i, bref en lat. class., est devenu long en lat. pop.). → Solliciter.
V. tr. (V. 1265). Vx. Causer de l'inquiétude à (qqn). Ennuyer; et aussi 1. souci (→ Ni, cit. 44, La Fontaine).
1 Je relève dans Proust : « Cela ne me souciait pas davantage ». Indéfendable, je crois bien.
Gide, Journal, 30 janv. 1949.
2 (…) ils n'avaient aucun sentiment de la commodité, et rien ne les souciait moins que d'arranger à leur goût soit les logis héréditaires ou les logis de hasard qu'ils habitaient successivement.
A. Hermant, les Épaves, II, II.
——————
se soucier v. pron.
1 (V. 1265). Vx. Se faire du souci. Tourmenter (se).
3 Quand vous vous soucieriez encore plus que vous ne faites, à quoi cela remédierait-il ? à rien.
Diderot, Jacques le fataliste, Pl., p. 551.
2 (V. 1240, se soussier de). || Se soucier de (le plus souvent en contexte négatif ou restrictif) : prendre intérêt à…, avoir la préoccupation de… 1. Souci (2.); embarrasser (s'), inquiéter (s'), préoccuper (se). || Il se soucie toujours des autres (→ Retrait, cit. 6).Ne pas se soucier de. Désintéresser (se), moquer (se).|| Arriver à quelque chose « sans faire effort et même sans s'en soucier » (→ Chaleur, cit. 7). || Sans plus se soucier de rien (→ Force, cit. 13). || Je ne m'en soucie guère (→ Heureusement, cit. 7). Iron. || Je m'en soucie bien ! (→ Jurer, cit. 18).Il s'en soucie comme d'une guigne (1. Guigne, cit. 1 et 2), comme de l'an quarante, comme de sa première chemise, comme un poisson d'une pomme : il ne s'en soucie pas du tout.Se soucier de…, se soucier peu de…, suivi d'un inf. || La compagnie des garçons qui ne se souciaient pas de plaire (→ Masculin, cit. 2; et aussi cruel, cit. 7; 1. être, cit. 51).Vx ou littér. || Se soucier que…, suivi du subj. (→ Faiblesse, cit. 34), si… (→ Exprimer, cit. 10).
4 Théoricien fantasque, il se souciait autant de renommée que d'une pipe cassée. Sa vie était en harmonie avec ses opinions.
Balzac, Massimilla Doni, Pl., t. IX, p. 348.
5 Il est, il vit, farouche, et sans se soucier
Que le monde à ses pieds souffre, existe ou périsse (…)
Hugo, la Légende des siècles, VI, VI, II.
6 Entendre du Wagner pendant quinze jours avec elle qui s'en soucie comme un poisson d'une pomme, ce serait gai !
Proust, Du côté de chez Swann, Pl., t. I, p. 301.
7 En fait, elle se souciait fort peu de penser. Elle se souciait de manger, boire, chanter, danser, crier, rire, dormir : elle voulait être heureuse (…)
R. Rolland, Jean-Christophe, L'adolescent, III, p. 333.
(1559). || Ne pas se soucier de…, que… : se soucier de ne pas…; ne pas tenir à…, ne pas désirer, n'avoir guère envie de…, craindre de… || Je ne me soucie pas de… → Je ne prétends (supra cit. 25) pas… || Personne ne se soucie de se faire repérer, en ce moment (→ Filet, cit. 9). || Il ne se souciait pas de perdre son crédit à… (→ 1. Mou, cit. 19).
8 Il était certain que maman ne reprendrait pas connaissance, de sorte que je ne me souciai pas d'appeler mes tantes auprès d'elle; j'étais jaloux de rester seul à la veiller.
Gide, Si le grain ne meurt, II, II, p. 367.
DÉR. 1. Souci.
COMP. Insouciant.

Encyclopédie Universelle. 2012.