effort [ efɔr ] n. m.
• esforz 1080; de efforcer
1 ♦ Activité d'un être conscient qui mobilise toutes ses forces pour résister ou vaincre une résistance (extérieure ou intérieure). Effort physique, musculaire. Sentiment de l'effort (fondement de la conscience de soi, selon Maine de Biran). Faire un grand, un violent effort. ⇒ forcer; forcing. « Il fit un effort désespéré » (Hugo). Tout effort lui est interdit. — Effort intellectuel : tension de l'esprit cherchant à résoudre une difficulté. ⇒ application, concentration. « La vie moderne tend à nous épargner l'effort intellectuel comme elle fait l'effort physique » (Valéry). Un effort de volonté, de mémoire. « Ma mémoire est excédée par l'effort que je lui demande » (A. Gide). « un effort d'adaptation qu'il ne va peut-être pas pouvoir fournir » (A. Gide). Faites un effort d'imagination. Un ouvrage laborieux qui sent l'effort, qui manque d'aisance. Faire tous ses efforts, tout son possible. ⇒ s'efforcer. Allons, faites un petit effort, un dernier effort : un peu de courage, manifestez votre bonne volonté. Cet élève ne fait aucun effort. Je veux bien faire un effort, envisager une dépense, une aide financière (mesurée). ⇒ sacrifice. Sans effort, sans peine. ⇒ facilement. « Elle se mit debout avec effort » (F. Mauriac), difficilement. ⇒ péniblement. Un partisan du moindre effort : un paresseux. « Il n'y a pas de doctrine plus funeste que celle du moindre effort » (A. Gide). C'est la loi du moindre effort (cf. Une solution de facilité). Faire un effort, des efforts pour... : se donner du mal. ⇒Fam. 1. ramer. Collect. Se reposer après l'effort.
2 ♦ Vieilli Vive douleur musculaire ou articulaire due à une tension excessive des muscles. Fam. et vieilli. Se donner, attraper un effort, une hernie.
♢ Vétér. Entorse, distension. Effort de boulet, de tendon. Effort de rein. ⇒ 3. tour.
3 ♦ Par anal. (Mécan.) Force exercée par un corps. ⇒ 1. travail. Effort de traction, de compression, de torsion, de cisaillement. — Force de résistance qu'oppose (une pièce) aux forces extérieures. L'effort des arches d'un pont.
⊗ CONTR. Détente (5o), repos.
⊗ HOM. Éphore.
● effort nom masculin (de s'efforcer) Mobilisation volontaire de forces physiques, intellectuelles, morales en vue de résister ou pour vaincre une résistance : Faire des efforts pour soulever un fardeau. Vieux. Douleur vive produite par une tension trop brutale d'un ou de plusieurs muscles ; déchirure musculaire, hernie : Attraper un effort. Matériaux Force interne provoquée dans une structure par les actions extérieures. ● effort (citations) nom masculin (de s'efforcer) Paul, dit Tristan Bernard Besançon 1866-Paris 1947 Je suis un contemplateur fervent de l'effort d'autrui. Contes, Répliques et Bons Mots Livre-Club du Libraire Roger Caillois Reims 1913-Paris 1978 Académie française, 1971 Il n'y a pas d'efforts inutiles, Sisyphe se faisait les muscles. Circonstancielles Gallimard Catulle, en latin Caius Valerius Catullus Vérone vers 87-Rome vers 54 avant J.-C. La victoire aime l'effort. Amat victoria curam. Poésies, 62 William James New York 1842-Chocorua, New Hampshire 1910 Maintenez vivante en vous la faculté de l'effort en la soumettant chaque jour à un petit exercice sans profit. Keep the faculty of effort alive in you by a little gratuitous exercise every day. Principles of Psychology, X Vladimir Vladimirovitch Maïakovski Bagdadi, aujourd'hui Maïakovski, Géorgie, 1893-Moscou 1930 La poésie, c'est comme le radium ; pour en obtenir un gramme, il faut des années d'effort. Entretien sur la poésie avec un inspecteur des finances Edgar Allan Poe Boston 1809-Baltimore 1849 Le mot infini, comme les mots Dieu, esprit et quelques autres expressions, dont les équivalents existent dans toutes les langues, est non pas l'expression d'une idée, mais l'expression d'un effort vers cette idée. That merest of words « Infinity » this, like « God », « Spirit » and some other expressions of which the equivalents exist in all languages, is by no means the expression of an idea, but of an effort at one. Eureka ● effort (expressions) nom masculin (de s'efforcer) Faire effort sur soi-même, s'obliger à faire quelque chose qui vous coûte. Faire un (petit) effort, consentir à un petit sacrifice et, en particulier, faire, donner plus qu'il n'était prévu en matière d'argent, de dépenses. Partisan du moindre effort, paresseux. Sans effort, facilement. Sentir l'effort, qui a été fait avec difficulté, sans aisance naturelle. Effort de traction, force que peut fournir une locomotive, dans un plan horizontal, pour se déplacer et remorquer un certain nombre de véhicules avec leur chargement. Épreuve d'effort, mesure du comportement fonctionnel respiratoire et surtout cardiaque à l'effort, qui permet, dans l'insuffisance coronarienne, de déceler des anomalies de l'électrocardiogramme n'existant pas au repos. ● effort (homonymes) nom masculin (de s'efforcer) éphore nom masculin ● effort (synonymes) nom masculin (de s'efforcer) Mobilisation volontaire de forces physiques, intellectuelles, morales en vue de...
Synonymes :
Matériaux. Force interne provoquée dans une structure par les actions extérieures.
Synonymes :
effort
n. m.
d1./d Action énergique des forces physiques, intellectuelles ou morales. L'ennemi fit un effort désespéré pour nous déloger. Faire un effort de compréhension.
— Sans effort: sans peine, facilement.
|| Dépense, aide financière. Faire un effort en faveur des déshérités.
d2./d MED VET Entorse. Effort du boulet.
d3./d Force avec laquelle un corps tend à exercer son action. L'effort de l'eau a rompu la digue.
|| MECA Force tendant à déformer ou à rompre un corps. Effort tranchant.
⇒EFFORT, subst. masc.
I.— [L'effort est celui d'un être vivant] Mise en œuvre de toutes les capacités d'un être vivant pour vaincre une résistance ou surmonter une difficulté. Selon M. de Biran, le type du sentiment de la volonté est dans le sentiment de l'effort (COUSIN, Hist. philos. XVIIIe s., 1829, p. 178).
A.— [En parlant de capacités physiques] Effort musculaire; entraînement à l'effort. Un grand cheval peut exercer un effort moyen d'une centaine de kilogrammes (HATON DE LA GOUPILLIÈRE, Exploitation mines, 1905, p. 750). Elle est cassée à angle droit, et souffre longtemps avant de pouvoir se redresser. Se reposant entre chaque effort, elle enfile ses bas, son jupon (MARTIN DU G. Vieille France, 1933, p. 1053).
— Fam. Synon. de hernie. Attraper, se donner un effort.
♦ Au fig. :
• 1. ... cet homme [Duclos] qui dîna en ville jusqu'à la fin, et qui pérorait du matin au soir, avait enroué sa voix et donné comme un effort à son esprit, il lui fallait à tout prix du montant naturel ou factice.
SAINTE-BEUVE, Causeries du lundi, t. 9, 1851-62, p. 214.
— ART. VÉTÉR. L'effort de boulet. Entorse de l'articulation du boulet. Il [le colonel] apprenait aussi que Jupiter [un cheval] avait un effort de boulet (GYP, Mariage civil, 1892, p. 103). Effort de tendon. Tuméfaction du tendon ou de la bride carpienne. Effort de genou, de couronne, d'épaule, de hanche.
B.— [En parlant de capacités intellectuelles] Un effort de compréhension, d'imagination, d'intelligence, de mémoire, de réflexion :
• 2. Et moi, de plus en plus, à peu près une demi-douzaine de fois par jour, je suis plongé par tel événement de la vie dans tout un monde de réflexions que j'aperçois prêt à s'ouvrir à l'effort d'attention le plus léger, et que je n'ai jamais le temps de suivre.
DU BOS, Journal, 1927, p. 290.
Rem. Effort peut prendre une nuance péj. dans des ex. du type : un travail qui sent ou trahit l'effort. Ces premières pages de M. Thiers sont d'un heureux augure... elles n'ont pas d'efforts, et elles ont de la portée (SAINTE-BEUVE, Portr. contemp., t. 4, 1846-69, p. 66). Je ne veux plus que l'effort se fasse sentir (VERLAINE, Corresp., t. 1, 1873, p. 103).
C.— [En parlant de capacités morales] Glorifier l'effort :
• 3. La Prusse, j'en conviens, avait besoin d'un effort de vertu pour oublier ce qu'elle avait souffert, elle, son roi et sa reine.
CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 2, 1848, p. 527.
Rem. 1. L'examen des syntagmes où effort est associé à un adj. fait apparaître en premier lieu l'amplitude de l'effort (grand, immense, suprême, moindre, petit) ensuite sa situation dans le temps de l'action ou sa durée (premier, dernier, long), son efficacité ou son impuissance (vain) et enfin justifie les classements des divers domaines que nous avons retenus dans la présentation de notre article à savoir que l'effort est a) humain, b) musculaire ou physique, c) intellectuel, d) moral. 2. L'effort peut être celui d'un groupe, d'une communauté, d'un peuple, d'une nation, etc. L'effort militaire d'un pays. Quelle que soit la suite réservée à ces nouvelles négociations, l'heure est venue pour la France d'orienter elle-même son effort militaire (DE GAULLE, Mém. guerre, 1959, p. 333).
D.— Expr. Faire + effort
1. [Effort sans déterminant]
♦ Faire effort sur soi-même. S'obliger à faire une chose bien qu'on éprouve à cela une forte répugnance (cf. prendre sur soi) :
• 4. ... si quelques gens ne se plaisent pas à Versailles, qu'ils fassent effort sur eux-mêmes qu'ils se détachent du colifichet pour se hausser à l'idée de l'ordre et de la raison.
BARRÈS, Mes cahiers, t. 10, 1913, p. 128.
♦ Faire effort pour. S'efforcer de. En entendant ces paroles, M. Bergeret fit effort pour contenir sa joie (FRANCE, Mannequin, 1897, p. 350).
2. [Effort + déterminant]
♦ Faire un petit effort. Faire plus qu'il n'était prévu. Fam. (en matière d'argent, de dépenses) :
• 5. Deuxième créancier. — C'est dur! c'est dur! encore de l'argent! encore de l'argent! encore de l'argent! mais il vaut mieux faire un petit effort que de perdre tout.
CLAUDEL, Le Livre de Christophe Colomb, 1929, p. 1153.
♦ Faire un dernier effort. Faire une ultime tentative en vue du but recherché :
• 6. Le sergent fit un dernier effort pour rentrer dans ses songes heureux, pour refuser notre univers de dynamite, d'épuisement et de nuit glacée; mais trop tard. Quelque chose s'imposait qui venait du dehors.
SAINT-EXUPÉRY, Terre des hommes, 1939, p. 248.
— Loc. adv. Sans effort. Facilement. Écrire sans effort. Avec effort. Difficilement.
II.— P. anal. [L'effort est produit par une chose] Manifestation d'une force. Efforts du vent, de la tempête, des eaux. Ce massif boisé marque sur ce point de la presqu'île [la Hague] le dernier effort de la végétation normande (FEUILLET, de Trécœur, 1872, p. 84) :
• 7. ... un bruit singulier, comme le claquement de toile d'une voile en pleine mer, l'effort d'un cordage qui crie en se tendant, a passé dans l'air au-dessus de moi. C'était un ballon...
A. DAUDET, Robert Helmont, 1874, p. 146.
— PHYS. et MÉCAN. Effort de traction, de compression, de flexion, de torsion, de cisaillement.
♦ Spéc. [En parlant d'une locomotive] Effort de traction. Charge que peut tirer une locomotive dans un plan horizontal :
• 8. Le travail produit par une locomotive est égal à l'effort de traction multiplié par la vitesse.
BRICKA, Cours de ch. de fer, t. 2, 1894, p. 520.
Rem. On rencontre ds la docum. le région. efforce, subst. fém. Le toit n'était guère bien couvert, et le four était moitié égrôlé par l'efforce de la gelée (SAND, Le Champi, 1850, p. 120).
Prononc. et Orth. :[]. Transcrit avec [] ouvert à l'initiale, sous l'influence des lettres redoublées ds LITTRÉ, BARBEAU-RODHE 1930 et, à titre de var. ds WARN. 1968. Enq. : //. Le mot est admis ds Ac. 1694-1932. Homon. éphore. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1100 « activité d'un être qui emploie ses forces dans un but » (Roland, éd. J. Bédier, 1197 [ici, loc. a esforz « à toute force »]); b) 1547 p. ext. « action, force produite par quelque chose » (MELIN DE SAINCT-GELAYS, Œuvres, éd. P. Blanchemain, t. 1, p. 64 : le temps et ses efforts); 2. a) 1559 « effet, résultat d'un effort » (O. DE MAGNY, Odes, II, 171 : Il sentoit pour vous les effortz De l'amour et de sa puyssance); b) 1678 « douleur, lésion due à un effort musculaire excessif » (G. GUILLET, Les Arts de l'homme d'épée, 1re partie). Déverbal de (s')efforcer. Fréq. abs. littér. :13 502. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 14 840, b) 13 130; XXe s. : a) 20 059, b) 25 662. Bbg. COUTURE (B.). Vocab. de l'industr. du bât. Banque Mots. 1974, n° 8, p. 191. — DARM. Vie 1932, p. 49.
effort [efɔʀ] n. m.
ÉTYM. 1547; esforz, 1080; déverbal de efforcer.
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1 Activité d'un être conscient qui utilise ses forces pour résister ou vaincre une résistance, extérieure ou intérieure; en général (l'effort) ou par un acte particulier (un, des efforts).
a (Au physique). || Effort physique (caractérisé par une contraction musculaire qui produit un certain travail, développe une certaine force). || Sentiment de l'effort (donnée élémentaire du sens intime, fondement de la conscience de soi, selon Maine de Biran). || Effort musculaire. || Les efforts de l'accouchement. || Faire un grand, un gros, un violent effort. ⇒ Suer (suer sang et eau). || Entraînement à l'effort. || Être fatigué par l'effort accompli. || Soulever un fardeau sans effort apparent, sans le moindre effort (→ Coque, cit. 4). || Déplacer par un effort. ⇒ Pousser. || Effort de l'épaule pour pousser. ⇒ Épaulée. || Effort fait avec un levier. ⇒ Pesée.
1 Pour que je sente le passage d'une modification à une autre, il faut qu'il y ait quelque chose qui reste et ce qui reste, moi, est différent de ce qui est changé. Ce qui reste, c'est l'effort continu que j'exerce sur mon corps tant que la veille dure ou que j'existe pour moi-même.
Maine de Biran, Œuvres inédites, II, p. 323.
2 Lorsque le prêtre lui approcha des lèvres le crucifix en vermeil pour lui faire baiser le Christ, il (le père Grandet) fit un épouvantable geste pour le saisir, et ce dernier effort lui coûta la vie (…)
Balzac, Eugénie Grandet, Pl., t. III, p. 626.
3 (…) le râle épais d'un blessé qu'on oublie
Au bord d'un lac de sang, sous un grand tas de morts,
Et qui meurt, sans bouger, dans d'immenses efforts.
Baudelaire, les Fleurs du mal, Spleen et idéal, « La cloche fêlée ».
3.1 Je prends de plus en plus en horreur le tipoye, où l'on est inconfortablement secoué et où je ne puis perdre un instant le sentiment de l'effort des porteurs.
Gide, Voyage au Congo, in Souvenirs, Pl., p. 763.
♦ Faire un effort, des efforts. || Il fit un effort désespéré pour…
4 (Jean Valjean) soulevait toujours Marius, et, avec une dépense de force inouïe, il avançait; mais il enfonçait (…) il renversa sa face en arrière pour échapper à l'eau et pouvoir respirer (…) il fit un effort désespéré et lança son pied en avant; son pied heurta on ne sait quoi de solide (…)
Hugo, les Misérables, V, III, VI.
♦ (1547). Par ext. Action énergique, effet produit par cette action. ⇒ Force. || L'effort de ses coups (→ Approcher, cit. 54). || L'effort de la digestion (→ Assoupir, cit. 9).
5 Le traître, quel qu'il soit, n'aura pas l'avantage
De dérober sa vie à l'effort de ma rage.
Molière, Dom Garcie, IV, 8.
b (Domaine psychique). || Effort (intellectuel) : tension dynamique et généralement volontaire de l'esprit cherchant à résoudre une difficulté, à vaincre une résistance intérieure. ⇒ Application, concentration.
6 (…) à mesure que l'état de concentration intellectuelle se complique, il devient plus solidaire de l'effort qui l'accompagne. Il y a des travaux de l'esprit dont on ne conçoit pas qu'ils s'accomplissent avec aisance et facilité. Pourrait-on, sans effort, inventer une nouvelle machine ou même simplement extraire une racine carrée ? L'état intellectuel porte donc ici imprimée sur lui (…) la marque de l'effort.
H. Bergson, l'Énergie spirituelle, Effort intellectuel, p. 154.
7 La vie moderne tend à nous épargner l'effort intellectuel comme elle fait l'effort physique. Elle remplace, par exemple, l'imagination par les images, le raisonnement par les symboles et les écritures, ou par des mécaniques; et souvent par rien.
Valéry, Variété IV, Discours de l'histoire, p. 141.
♦ Effort de… (suivi du nom d'une faculté). || Un effort de mémoire, d'imagination, d'intelligence. || Faites un petit effort d'imagination. || Effort d'adaptation, de compréhension (→ Adaptation, cit. 2). || Un effort de l'esprit. — Effort (et adj.). || Effort intellectuel, mental, psychologique.
8 (…) depuis cinquante ans qu'il (le Cid) tient sa place sur nos théâtres, l'histoire ni l'effort de l'imagination n'y ont rien fait voir qui en ait effacé l'éclat.
Corneille, Examen du Cid.
9 Encore maintenant, il admettait comme un dogme que la science médicale était l'aboutissement de tout l'effort intellectuel, et constituait le plus clair profit de vingt siècles de tâtonnements dans toutes les voies de la connaissance, le plus riche domaine ouvert au génie de l'homme.
Martin du Gard, les Thibault, t. III, p. 226.
10 (…) tandis qu'il accomplissait un effort de mémoire, ordonné et rapide, en simuler un autre, beaucoup plus tâtonnant.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. II, XIII, p. 136.
11 J'avoue que je prenais très au sérieux les affaires de mon esprit, et que je me préoccupais de son salut comme d'autres font celui de leur âme. Je n'estimais rien et ne voulais rien retenir de ce qu'il pouvait produire sans effort, car je croyais que l'effort seul nous transforme et nous change notre facilité première qui suit de l'occasion, et s'épuise avec elle, en une facilité dernière qui la sait créer et la domine.
Valéry, Variété V, Mémoires d'un poème, p. 80.
♦ L'effort de l'écrivain, de l'artiste. — Par ext. || L'effort d'un art, d'une science, qui tend vers son but. || L'effort du drame (→ Consommer, cit. 4).
12 L'effort de la grande littérature semble être de créer des univers clos ou des types achevés.
Camus, l'Homme révolté, p. 320.
♦ L'effort (avec une nuance un peu péjorative, par oppos. à naturel). || Style tourmenté où l'effort se fait sentir. || La poésie de Vigny trahit souvent l'effort. ⇒ Volonté. || Un ouvrage laborieux qui sent l'effort.
♦ L'effort, dans l'ordre moral, considéré comme une ascèse (→ Ascèse, cit. 2), comme une valeur morale. || Effort de vertu. || La vertu est toute dans l'effort. || Glorifier l'effort. || Provoquer qqn à l'effort.
13 (…) il n'y a pas de création sans effort et sans souffrance.
Gustave Lanson, l'Art de la prose, p. 290.
14 Gringalet n'a pas assez considéré que le mal est nécessaire au bien, comme l'ombre à la lumière; que la vertu est toute dans l'effort et que, si l'on n'a plus de diable à combattre, les saints seront aussi désœuvrés que les pécheurs.
France, le Livre de mon ami, p. 177.
15 L'effort excitant à l'effort. Tel est le nom de ce qui a fait toutes les grandes choses. Sudare jucunde.
Valéry, Mélange, p. 191.
16 L'effort, c'est dans l'action qu'il faut le porter; dans la sensation ou les sentiments il fausse tout.
Gide, Pages de journal, 9 juil. 1940, p. 68.
17 (…) je fais toujours des efforts qui m'élèvent au-dessus de moi-même et qui comptent parmi les plus joyeuses victoires de ma vie.
G. Duhamel, Scènes de la vie future, III, p. 61.
♦ ☑ Loc. Faire effort sur soi-même : se déterminer à…, se faire violence, s'obliger à… || Se faire effort pour être calme.
18 Quels efforts à moi-même il a fallu me faire !
Corneille, Polyeucte, V, 3.
19 (Je doute) Si vous pourrez sur vous faire ce grand effort.
Molière, Dom Garcie, I, 3.
20 (…) on se cache de la pitié, de peur qu'elle ne ressemble à la faiblesse; on se fait effort pour dissimuler le sentiment divin de la compassion (…)
A. de Vigny, Servitude et grandeur militaires, II, XIII, p. 167 (→ Durcir, cit. 2).
c (Sans précision quant au domaine : syntagmes). || Un, des efforts. || L'effort de qqn. || Un effort soutenu, constant, continu (cit. 2). ⇒ Application, attention, concentration, contention, tension. || La persévérance de son effort (→ Dignité, cit. 6). || Un long effort de patience. || Un effort désespéré, dramatique (cit. 13), surhumain. || Dans un suprême effort. ⇒ Sursaut, tentative (→ Bagne, cit. 1; concevoir, cit. 15). || Un effort mesuré (→ Apathie, cit. 8). || Des efforts touchants d'amabilité. || Des efforts impuissants, stériles, vains. → Coup d'épée dans l'eau. || S'épuiser en efforts inutiles. || Faire de grands efforts (→ Blanc, cit. 13). || Son effort n'est pas sans mérite. — Au prix de quels efforts ! || Se décider à fournir un effort énergique. → Donner un coup de collier. || Faites un petit effort, un dernier effort : un peu de courage, manifestez votre bonne volonté. || Il n'y a pas de réussite sans un certain effort. ⇒ Difficulté, mal, peine, travail. — Cet élève n'a fait aucun effort, ne travaille pas. || Faire un effort exceptionnel. ⇒ pop. Arracher (s'). || Poursuivre, soutenir, relâcher son effort. Ouvrage qui coûte de longs efforts. ⇒ Haleine, patience. || Après bien des efforts. Déployer tous ses efforts pour se tirer d'affaire. ⇒ Accrocher (s'), débattre (se), lutter. || Multiplier ses efforts (→ Cinq, cit. 9). || Soutenir l'effort, les efforts d'un ennemi, d'un adversaire. || Consacrer tous ses efforts à… || Unir ses efforts. ⇒ Coaliser (se). || Unis dans un même effort, dans un effort commun. || Un effort de coopération. || Avec un gros effort (→ D'arrache-pied; à l'arraché).
21 Tout le monde va faire des efforts pour remporter le prix de cette course.
Molière, la Princesse d'Élide, II, 4.
22 Je n'entre point dans la politique (…) la politique n'est pas mon affaire : je me suis toujours borné à faire mes petits efforts pour rendre les hommes moins sots et plus honnêtes.
Voltaire, Correspondance au roi de Prusse, 244, nov. 1769.
23 La Dauphine faisait des efforts touchants, mais visibles, pour être gracieuse, elle adressait un mot à chacun.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, t. VI, p. 104.
24 En littérature, il n'y a que des bœufs. Les génies sont les plus gros, ceux qui peinent dix-huit heures par jour d'une manière infatigable. La gloire est un effort constant.
J. Renard, Journal, 1887, p. 8.
25 (…) l'assurance que l'œuvre que je n'avais plus aucune hésitation à entreprendre méritait l'effort que j'allais lui consacrer (…)
Proust, À la recherche du temps perdu, t. XV, p. 73.
♦ ☑ Le moindre effort. || C'est un partisan du moindre effort. ⇒ Paresseux.
26 Il n'est pas de doctrine plus funeste que celle du moindre effort. Cette sorte d'idéal qui invite les objets à venir à nous au lieu que nous allions vers les objets (…)
Gide, Journal, 27 sept. 1942.
♦ Faire un, des efforts pour… ⇒ Efforcer (s'); → Remuer ciel et terre. — Faire effort : se donner du mal. || Il a dû faire effort pour y parvenir.
27 Quelque effort qu'il fît ensuite pour obtenir de la vieille dame au moins une bienveillante neutralité, il n'y parvint pas.
Camus, la Peste, p. 250.
♦ Collectif. || L'effort. || L'effort, ça fatigue. || Après l'effort, il faut se reposer. || Après l'effort, le réconfort.
d Spécialt. Fam. || Faire un effort (en matière d'argent, de dépense). || Faire un effort pour qqn, lui apporter une aide financière dépassant les limites prévues. || Sa banque a fait un gros effort pour le soutenir. || Demander à qqn de faire un effort (dans un marchandage). ⇒ Rabais, sacrifice. || Un généreux effort (→ Avaricieux, cit. 1).
28 (…) le mari et la femme étaient d'avis de réserver leur effort pour quelques réceptions assez fastueuses qu'ils donnaient l'été dans leur château, et pour quelques chasses que le marquis y organisait au cours de l'automne.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. III, XI, p. 146.
e ☑ Loc. adv. Sans effort : sans peine. ⇒ Facilement. || Travailler sans effort. || On n'obtient rien sans effort. ⇒ Peine (sans). || Écrire sans effort, au courant de la plume (→ Abondant, cit. 5). || Atteindre son but sans effort (→ Assigner, cit. 8). — Avec effort : difficilement (→ Atteindre, cit. 48; bras, cit. 14; dilater, cit. 6).
2 (1559). Par métonymie. Résultat de l'effort; chose produite par une activité. || C'est un bel effort. || Ce barrage est un magnifique effort de la technique. ⇒ Réalisation.
29 (…) si je souhaite quelque durée pour cet heureux effort de ma plume, ce n'est point pour apprendre mon nom à la postérité (…)
Corneille, Dédicace du Cid, À Mme de Combalet.
30 Quant à ces chefs magnanimes, Bonchamps, Lescure, La Rochejaquelein, ils se trompèrent. La grande armée catholique a été un effort insensé; le désastre devait suivre (…)
Hugo, Quatre-vingt-treize, III, I, VI.
3 (1678). Vieilli. Vive douleur musculaire ou articulaire due à une tension excessive des muscles. — Spécialt. Fam. Hernie. || Attraper, se donner un effort. — Vétér. Entorse, distension. || Effort de boulet : entorse et tuméfaction de l'articulation du boulet. ⇒ Bouleture. || Effort de genou, de couronne. || Effort de tendon. ⇒ Nerf-férure. || Effort de reins : entorse des vertèbres lombaires. ⇒ Tour (de reins, de bateau). || Effort d'épaule. ⇒ Écart. || Effort de cuisse, de hanche : écart du membre postérieur.
4 Sc. (phys. et mécan.). Force exercée par un corps. ⇒ Force, poussée, pression, travail. || Effort normal, effort tranchant, d'un couple décomposé en deux composantes, l'une d'axe normal au plan de la section, l'autre dont l'axe est dans le plan de la section. || Effort de torsion, de traction, de compression, de tension, de cisaillement. || Indicateur d'effort. ⇒ Résistance.
♦ Effort de traction (d'un véhicule à moteur) : charge qui peut être tirée sur un plan horizontal.
♦ Force de résistance qu'oppose (une pièce) aux forces extérieures. || Effort du bois, du fer. || L'effort des arches d'un pont, d'une voûte.
5 Manifestation (d'une force). || Les efforts du vent. || Le vent redouble ses efforts (→ Arbre, cit. 7). || L'effort du vent sur un bâtiment produit un décentrement de la résultante des charges (→ Déchirer, cit. 11). || L'effort de la tempête (→ Arrêter, cit. 9). || L'effort de l'eau, des eaux a rompu la digue.
♦ Fig. || Être soumis à des efforts contraires. ⇒ Force, influence, tendance (→ Déchirer, cit. 26).
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CONTR. Détente, relâchement, repos. — Aisance, facilité. — Abandon, naturel.
HOM. Éphore.
Encyclopédie Universelle. 2012.