serpent [ sɛrpɑ̃ ] n. m.
• 1080; lat. serpens, proprt « rampant »
1 ♦ Reptile apode à corps cylindrique très allongé, qui se déplace par des ondulations latérales du corps (⇒ ophidien). Serpents venimeux, non venimeux. « Pas un serpent de nos pays, mais une bête tropicale, chargée de venins sûrs, et rapide à mordre » (Bosco). Morsure de serpent. Serpent aglyphe. La mue d'un serpent. Œuf de serpent. — Charmeur de serpent : en Orient (Inde, etc.), homme qui donne en spectacle des serpents venimeux qu'il tient en respect en les « charmant » au son d'un instrument. ⇒ 1. psylle. — (1875) Serpent à lunettes (⇒ cobra) , à sonnettes (⇒ crotale) . Serpent d'eau : espèce de couleuvre aquatique; par anal. poisson anguiforme (anguille, congre).
♢ Peau de serpent utilisée en maroquinerie. Ceinture en serpent.
2 ♦ Représentation symbolique ou religieuse de cet animal. Les Gorgones à chevelure de serpents. Serpents fabuleux. ⇒ dragon, guivre, hydre, vouivre. Le serpent à plumes, Quetzalcoatl, divinité de l'Amérique précolombienne. — Serpent de mer : animal marin fabuleux, mal identifié; fig. sujet d'article rebattu, utilisé périodiquement dans la presse, en l'absence d'informations plus importantes. « les histoires de trésors cachés des S.S. et autres serpents de mer de la presse à grand tirage » (Perec).
♢ Incarnation du démon qui tenta Ève dans le paradis terrestre. — Personne perfide et méchante. « ces serpents de la littérature qui se nourrissent de fange et de venin » (Voltaire). Loc. Vieilli Réchauffer, nourrir un serpent dans son sein : protéger qqn qui cherche à vous nuire.
3 ♦ Chose étirée, sinueuse. « un gros serpent de fumée noire » (Maupassant).
♢ Ancien instrument à vent plusieurs fois recourbé dont on se servait dans les églises sans orgues.
4 ♦ (1972) Écon., fin. Serpent monétaire européen : accord visant à limiter les marges de fluctuation des taux de change entre pays européens. Absolt Être, entrer dans le serpent. Sortir du serpent.
● serpent nom masculin (latin serpens, -entis, de serpere, ramper) Reptile sans pattes, au corps allongé, se déplaçant par ondulations latérales du corps. (Les serpents constituent le sous-ordre des ophidiens, de l'ordre des squamates.) Littéraire. Personne perfide et méchante. Ce qui affecte une forme sinueuse, étirée, ondulante : Le long serpent des véhicules la nuit sur l'autoroute. Instrument de musique à vent constitué par un tube en bois recouvert de cuir et percé de trous, accessibles grâce à sa forme en S. (Il est la basse des cornets à bouquin.) ● serpent (citations) nom masculin (latin serpens, -entis, de serpere, ramper) Nicolas Boileau, dit Boileau-Despréaux Paris 1636-Paris 1711 Il n'est point de serpent ni de monstre odieux Qui, par l'art imité, ne puisse plaire aux yeux. L'Art poétique Marceline Desbordes-Valmore Douai 1786-Paris 1859 Il y a des temps où l'on ne peut plus soulever un brin d'herbe sans en faire sortir un serpent. Correspondance, à Pauline Duchambge, 11 mai 1857 Jean Giraudoux Bellac 1882-Paris 1944 Il était un pauvre serpent qui collectionnait toutes ses peaux. C'était l'homme. Sodome et Gomorrhe, I, 3, Lia Grasset Jean de La Fontaine Château-Thierry 1621-Paris 1695 On en use ainsi chez les grands : La raison les offense ; ils se mettent en tête Que tout est né pour eux, quadrupèdes et gens Et serpents. Fables, l'Homme et la Couleuvre Jean Racine La Ferté-Milon 1639-Paris 1699 Pour qui sont ces serpents qui sifflent sur vos têtes ? Andromaque, V, 5, Oreste Paul Valéry Sète 1871-Paris 1945 Va ! je n'ai plus besoin de ta race naïve, Cher serpent… La Jeune Parque Gallimard François Marie Arouet, dit Voltaire Paris 1694-Paris 1778 L'autre jour, au fond d'un vallon, Un serpent piqua Jean Fréron. Que pensez-vous qu'il arriva ? Ce fut le serpent qui creva. Poésies mêlées, Épigramme imitée de l'Anthologie Virgile, en latin Publius Vergilius Maro Andes, aujourd'hui Pietole, près de Mantoue, 70 avant J.-C.-Brindes 19 avant J.-C. Un serpent se cache dans l'herbe. Latet anguis in herba. Les Bucoliques, III, 93 William Shakespeare Stratford on Avon, Warwickshire, 1564-Stratford on Avon, Warwickshire, 1616 Semblez être la fleur innocente, mais soyez le serpent qu'elle dissimule. Look like th'innocent flower, But be the serpent under't. Macbeth, I, 5, lady Macbeth ● serpent (difficultés) nom masculin (latin serpens, -entis, de serpere, ramper) Orthographe Serpent à lunettes (= naja), avec lunettes au pluriel. Serpent à sonnette ou à sonnettes, avec sonnette au singulier ou au pluriel. Recommandation Préférer la graphie serpent à sonnette, avec sonnette au singulier, plus fréquente aujourd'hui. Emploi On dit se faire mordre par un serpent (et non se faire piquer par un serpent). Remarque Les serpents et certaines araignées mordent en enfonçant leurs crochets, contrairement aux insectes et aux scorpions, acariens, tiques, etc. qui piquent en enfonçant leur aiguillon ou leur dard. → piqÛre ● serpent (expressions) nom masculin (latin serpens, -entis, de serpere, ramper) Serpent cracheur, serpent capable de projeter son venin dans les yeux de son adversaire, comme le font certains cobras. Serpent marin, synonyme de hydrophidé. Serpent de mer, très grand animal marin hypothétique, observé dans l'océan Indien et le Pacifique, et qui pourrait être une anguille géante ou un survivant d'un groupe de reptiles disparus ; (familier) sujet banal, cliché qui revient dans l'actualité aux moments où celle-ci est peu fournie ; histoire qui redevient périodiquement un sujet de conversation. Serpent minute, synonyme de typhlopidé. Serpent monétaire européen, système monétaire instauré en 1972 et remplacé en 1979 par le Système monétaire européen (S.M.E.). Serpent à plumes, nom donné au dieu précolombien Quetzalcóatl souvent représenté sous la forme d'un serpent portant le plumage du quetzal. ● serpent (synonymes) nom masculin (latin serpens, -entis, de serpere, ramper) Serpent marin
Synonymes :
- hydrophidé
Serpent minute
Synonymes :
- typhlopidé
serpent
n. m.
d1./d Reptile ophidien au corps allongé, dépourvu de membres, et qui se déplace par reptation.
— Serpents aglyphes, opisthoglyphes, protéroglyphes, solénoglyphes: V. ces mots.
— Serpent à lunettes: naja.
— Serpent d'eau: couleuvre aquatique.
— (Afr. subsah.) Serpent des bananiers: mamba vert. Serpent-minute ou serpent à deux têtes: typhlops. Serpent-cracheur: V. cracheur. Serpent-boa: python.
|| Fig. Réchauffer un serpent dans son sein: favoriser les débuts dans la vie d'une personne qui plus tard nuira à son bienfaiteur.
|| Le Serpent: le démon tentateur, dans les écritures.
d2./d Fig. Personne perfide, mauvaise.
|| Une langue de serpent: une personne médisante.
d3./d ECON, FIN Serpent monétaire: système qui organise et limite les marges de la fluctuation entre les monnaies de plusieurs pays. Serpent monétaire européen.
Encycl. Les serpents les plus dangereux sont les serpents protéroglyphes et solénoglyphes. Les premiers gestes à accomplir en cas de morsure sont de mettre la victime au repos, de la rassurer, de calmer ses douleurs par un antalgique, de désinfecter la plaie. L'injection d'un sérum antivenimeux est essentielle.
⇒SERPENT, subst. masc.
I. A. — ZOOLOGIE
1. a) Reptile du sous-ordre des Ophidiens comportant de nombreuses espèces, au corps cylindrique et très allongé, caractérisé par l'atrophie ou la disparition complète des membres. Combat d'un lézard et d'un serpent d'un mètre de long, noir lamé de blanc, très mince et agile, mais si occupé par la lutte que nous pouvons l'observer de très près (GIDE, Voy. Congo, 1927, p. 687). V. anneau ex. 10, basilic2 ex. 1 et darder I B 1 ex. de France et de Toulet:
• 1. Va! je n'ai plus besoin de ta race naïve,
Cher Serpent... Je m'enlace, être vertigineux!
Cesse de me prêter ce mélange de nœuds
Ni ta fidélité qui me fuit et devine...
VALÉRY, J. Parque, 1917, p. 97.
SYNT. Grand, gros, énorme, immense serpent; peau, mue du serpent; crochets, dent, langue du serpent; le serpent siffle, darde sa langue; venin du serpent; morsure, piqûre de serpent; avoir peur des serpents; anneaux, mouvements, ondulations, orbes du serpent; serpent qui glisse, se faufile, ondule, rampe, s'enroule, s'enlace; charmeur de serpents (v. charmeur I A p. anal.); serpents ovipares, ovovivipares; serpents venimeux, non venimeux; serpents constricteurs; serpents terrestres, arboricoles; serpents aquatiques, semi-aquatiques; serpents marins.
— [Suivi d'un déterminatif indiquant l'espèce (dans la lang. cour.)]
♦ Serpent boa. V. boa ex. 3.
♦ Serpent à collier ou serpent d'eau. Couleuvre aquatique appelée aussi couleuvre d'eau. Parmi les serpens de notre pays, il n'y a que la vipère seule qui soit vénimeuse et dangereuse, tous les autres ne le sont pas; la couleuvre, le serpent à collier, qui est une espèce de couleuvre, l'orvet ne peuvent pas même mordre (GEOFFROY, Méd. prat., 1800, p. 514).
♦ Serpent fouet. Serpent très mince, de la famille des Colubridés, appelé aussi couleuvre verte et jaune, commun dans le midi de la France et en Europe méditerranéenne (d'apr. Zool. 1972).
♦ En compos. Serpent-loup. ,,Petite couleuvre terrestre d'Asie méridionale (...) de 30 à 60 cm, à tête plate armée de 2 grandes dents pleines, qui se nourrit surtout de petits lézards`` (Animaux 1981).
♦ Serpent à lunettes. V. lunette C 5 .
♦ Serpent marin. Serpent aquatique vivant près des côtes du Pacifique occidental et de l'océan Indien (d'apr. Animaux 1981).
♦ Serpent-minute. Serpent fouisseur, venimeux, de très petite taille. Ces scorpions jaunes, noirs ou blancs qui se cachent dans les pantoufles, les chiques qui pondent entre les doigts de pied, le serpent-minute qui ne vous laisse pas faire votre testament (MORAND, Paris-Tombouctou, 1929, p. 31).
♦ Serpent volant. Serpent grimpeur d'Asie méridionale de la famille des Colubridés. Les véritables grimpeurs, dont le type est le Serpent volant (...) ne sont pas particulièrement minces, mais ont des plaques ventrales et sous-caudales très fortement encochées et carénées latéralement (Zool., t. 4, 1974, p. 167 [Encyclop. de la Pléiade]).
— [Dans des compar., des loc. ou des expr.; p. allus. aux traits physiques du serpent ou aux caractéristiques morales qui lui sont traditionnellement attribuées]
♦ Se dresser, se glisser, ramper, se tordre comme un serpent; des yeux de serpent; des ondulations, des mouvements de serpent; une souplesse de serpent; souple comme un serpent. L'œil de loin suit leur foule [des caravanes], Qui sur l'ardente houle Ondule et se déroule Comme un serpent marbré (HUGO, Orient., 1829, p. 21). La superbe femme était sur la prairie (...). Elle remuait un peu, plus onduleuse qu'un serpent (JOUVE, Scène capit., 1935, p. 196).
♦ La prudence du serpent. La femme, au moment où elle est dans l'incertitude de savoir si elle prendra un amant ou restera fidèle à son mari, devient l'être le plus spirituel et le plus perspicace du monde. Elle a la ruse du renard, la prudence du serpent, l'intelligence des singes, la force des lions (BALZAC, Physiol. mariage, 1826, p. 116).
[P. allus. à la parole du Christ recommandant à ses disciples d'être ,,prudents comme les serpents et simples comme les colombes`` (Matth. X, 16)] La simplicité de la colombe doit être tempérée par la prudence du serpent, et la prudence consiste essentiellement à ne tomber dans aucun piège et à choisir le bon chemin (AMIEL, Journal, 1866, p. 281).
♦ Littér. Nourrir, réchauffer un serpent dans son sein. Protéger, favoriser une personne qui se manifeste ingrate et rend le mal pour le bien. Bernadotte a été le serpent nourri dans notre sein; à peine il nous avait quittés, qu'il était dans le système de nos ennemis, et que nous avions à le surveiller et à le craindre (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 977). Si tout cela n'est qu'hypocrisie, si je dois voir en vous un serpent que j'aurai réchauffé dans mon sein, vous seriez une infâme, une horrible créature! (BALZAC, Pierrette, 1840, p. 102).
♦ Un serpent caché sous les fleurs (ou plus rarement, sous l'herbe traduit de Virgile: Latet anguis in herba). Danger caché sous des apparences trompeuses, séduisantes. Le mal, comme un serpent caché sous les fleurs, se serait glissé dans la république mellifère par cela même qui devait en faire la gloire (PROUDHON, Propriété, 1840, p. 320). Je trouvais chez les dames Laroque un serpent sous l'herbe. C'était Mademoiselle Alphonsine Dusuel qui jadis me piquait les mollets en m'appelant « trésor » (FRANCE, Pt Pierre, 1918, p. 144). V. fleur B 5 b ex. de Sand.
♦ [P. allus. à la mue du serpent, pour évoquer une transformation, une métamorphose de l'être humain ou son caractère versatile] Si on pouvait dépouiller sa vieille peau comme les serpents, renouveler son moi, rajeunir! (FLAUB., Corresp., 1874, p. 127). L'insaisissable Lemaître énumère humblement, pour sa plus grande gloire, toutes les peaux de serpent (...) qu'il a semées avant que d'être un royaliste de Maurras (BARRÈS, Cahiers, t. 6, 1908, p. 303).
b) P. méton. Peau de cet animal, traitée et utilisée pour la fabrication de certains articles. Bracelet de montre, sac à main en serpent. La direction et le portier de l'hôtel avaient conservé à Mistress Key leur gratitude, et vu revenir avec joie ses valises de serpent (PEYRÉ, Matterhorn, 1939, p. 98).
2. P. anal. [Désignant des animaux non ophidiens, reptiles ou poissons, évoquant le serpent par leur forme]
a) Serpent de verre. Synon. de orvet. V. ce mot ex. de Gautier.
b) Serpent d'eau, serpent marin, serpent(-)de(-)mer. [Nom donné à certains poissons anguiformes tels que l'anguille, le congre, la murène] On donne ce nom [de serpent marin] à deux espèces du genre des murènes de Linnaeus (...) la première espèce, la murène-serpent taché est un poisson dont l'ensemble, les habitudes et les mouvements ont beaucoup de rapport avec ceux des véritables reptiles (...) la seconde espèce, que l'on nomme plus souvent que toutes les autres espèces de poissons serpent marin, serpent-de-mer, est la muraena-serpens de Linnaeus (BAUDR. Pêches 1827). J'aperçus une bête qui se tordait traversée par les dents de fer. C'était un congre (...). Le serpent de mer, le corps percé de cinq plaies, glissa, rampa, frôlant mes pieds (MAUPASS., Contes et nouv., t. 1, Soir, 1889, p. 1132).
— Serpent marin, serpent de mer. Monstre marin fabuleux. On se rappelle le bruit que fit en 1837 la découverte du grand serpent de mer vu par le navire le Havre à la hauteur des Açores. Tous les journaux s'en sont occupés; et, après s'en être montrée stupéfaite, la presse, faisant volte-face, a présenté ensuite le grand serpent marin comme un être imaginaire (COLLIN 1863).
♦ Au fig. Serpent de mer. Thème rebattu et peu crédible ou information généralement peu fondée, souvent à caractère sensationnel, reprise par la presse durant les périodes creuses. On a trop souvent annoncé l'arrivée de ce serpent de mer de la sociologie, la fin du couple, des noces, de la famille, pour qu'on y croie facilement (Le Nouvel Observateur, 2 févr. 1976, p. 32, col. 2).
En compar. Comme le serpent de mer, Paris, port-de-mer, est encore un de ces sujets qui passent en première page, les jours creux, au mois d'août, quand les journaux n'ont rien à monter en vedette (CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p. 302).
B. — [Représentation figurative ou symbolique]
1. ALCHIM. Symbole du mercure. Le mercure des philosophes, appelé aussi le lion vert, le serpent (HUYSMANS, Là-bas, t. 1, 1891, p. 127). Le serpent, dépourvu d'ailes, demeure l'hiéroglyphe du mercure commun, pur et mondé, extrait du corps de la magnésie ou matière première (FULCANELLI, Demeures philosophales, t. 2, 1929, p. 224).
2. HÉRALD. Figure d'armoiries représentant un serpent. Pusay-d'azur, à trois serpents d'argent, couronnés d'or (GRANDM. 1852).
3. [Dans les relig. et les mythol., comme animal sacré doué d'un caractère symbolique ambivalent] Le serpent de vie que les Hindous appellent kundalini et dont toutes les religions ont fait le symbole de la connaissance, celle qui apporte le bien et le mal parce qu'elle augmente le pouvoir de l'homme (ABELLIO, Pacifiques, 1946, p. 213). Symbole de vie et de mort, principe spirituel et puissance des ténèbres, avaleur et avalé, le serpent est dans la Genèse (3, 1-15) à la fois ce qui détruit l'harmonie paradisiaque en induisant Ève en tentation et l'initiateur au savoir, nouvelle forme d'harmonie. De la même façon la pensée grecque, comme la pensée égyptienne, distingue dans le serpent l'artisan d'un retour du monde au chaos et l'être vivifiant, le fécondateur de l'esprit (AZ.-OLIV. Litt. 1978).
a) Dans les relig. ou les mythol. antiques
— Attribut de certaines divinités (Isis, Cybèle, Athéna, les Furies, les Gorgones, etc.). Tous les monuments qui me sont connus mettent dans les mains de cette déesse [Athénée] un serpent, qui était le symbole de la vie. Mais cette image n'eût pas été agréable (CHÉNIER, Bucoliques, 1794, p. 297). Dans la mythologie, la divinité Méduse avait une tête horrible dont les cheveux étaient remplacés par des serpents sifflants (COUPIN, Animaux de nos pays, 1909, p. 461).
♦ En partic. Attribut des dieux guérisseurs, notamment d'Esculape, dieu de la médecine dont l'emblème est le caducée. La boutique du pharmacien avec ses bocaux et les serpents d'Esculape (FRANCE, Riquet, 1904, p. 84). [L'Esculape dans l'iconographie grecque] est reconnaissable à ses attributs: le bâton et le serpent. Le bâton est celui du médecin en tournée, bâton noueux autour duquel s'enroule le serpent, animal divinateur (LAVEDAN 1964). V. caducée ex. 1.
— Le serpent qui se mord la queue. L'Ouroboros égyptien, symbole de la vie, de la continuité, de l'éternité. Nous comprenons pourquoi aux yeux des alchimistes, l'œuvre mystérieuse n'avait ni commencement ni fin, et pourquoi ils la symbolisaient par le serpent annulaire, qui se mord la queue: emblême de la nature toujours une, sous le fond mobile des apparences (BERTHELOT, Orig. alchim., 1885, p. 284). Ce n'est pas sans raison que le serpent est le symbole de la puissance oblique, littéralement diabolique, qui déforme nos beaux projets. En revanche, le serpent qui se mord la queue, imitant le cercle des rondes, représente la victoire de l'esprit, et l'éternel régnant sur la bête (ALAIN, Propos, 1933, p. 1182).
♦ [Avec une valeur nég.] Ce qui apparaît comme sans solution possible; situation sans issue. En compar. La méfiance est un cercle vicieux, pareil au symbole égyptien du serpent qui se mord la queue. Elle se dévore elle-même (AMIEL, Journal, 1866, p. 62).
— Serpent à plumes. Divinité des mythologies amérindiennes, représentée sous la forme d'un serpent ailé, notamment le Quetzalcoatl des Toltèques puis des Aztèques. Dans les mythologies amérindiennes, souligne Alexander (Alec 125 sq), depuis le Mexique jusqu'au Pérou, le mythe de l'Oiseau-Serpent coïncide avec les plus anciennes religions de culture du maïs (...). Le serpent à plumes est tout d'abord le nuage de pluie et, de façon privilégiée, le cumulus aux reflets argentés du milieu de l'été (Symboles 1969).
b) Dans les relig. juive et chrét.
— Le serpent d'airain (Nombres XXI, 8-9). Serpent d'airain érigé dans le désert par Moïse, sur l'ordre de Dieu, et dont la vue guérissait les Israélites mordus par les serpents brûlants. C'est [Jésus] le Serpent d'airain du Livre des Nombres (Num. XXI, 8, 9) à quoi il a plu au Sauveur Lui-même de se comparer (Joann. III, 14), ce serpent dont la vue curative suffit à réparer la morsure de cet autre reptile enflammé qui attaque notre pied dans le sable (CLAUDEL, Poète regarde Croix, 1938, p. 62).
— Symbole du principe du mal, le démon, Satan. Le serpent de l'Éden, du Paradis; le serpent d'Ève; le serpent infernal. Au sens mystique, le diable est le serpent de la Genèse; il règne sur la terre. L'iniquité le presse sur la terre; il ne pourra donc faire pénitence; son iniquité descendra (Théol. cath. t. 4, 1 1920, p. 366):
• 2. Le serpent a offert la connaissance à Adam et à Ève. Les sirènes ont offert la connaissance à Ulysse. Ces histoires enseignent que l'âme se perd en cherchant la connaissance dans le plaisir. Pourquoi? Le plaisir peut-être est innocent, à condition qu'on n'y cherche pas la connaissance. Il n'est permis de la chercher que dans la souffrance.
WEILL, Judaïsme, 1931, p. 88.
C. — P. anal. ou au fig.
1. Personne rusée, malfaisante, médisante. Un vrai serpent, ce Fauchery; un envieux, un homme capable de s'acharner après une femme et de détruire son bonheur (ZOLA, Nana, 1880, p. 1188). Et ce vil serpent, Fourcroy, qui enseignait alors la chimie au Jardin des Plantes! Il diffamait déjà son collègue Lavoisier (ADAM, Enf. Aust., 1902, p. 344).
— Loc. (Avoir une) langue de serpent. V. langue B 2.
♦ P. méton. Personne très médisante. (Dict. XIXe et XXe s.).
Rem. ,,On dit plutôt aujourd'hui: c'est une langue de vipère`` (Ac. 1935).
2. Littér. Sentiment mauvais ou douloureux s'exerçant d'une manière insidieuse et obsédante. Tout mortel dans son cœur cache, même à ses yeux, L'ambition, serpent insidieux, Arbre impur, que déguise une brillante écorce (CHÉNIER, Odes, 1794, p. 239). La douleur est un serpent qui se glisse à travers toutes les barrières et qui nous retrouve toujours (CONSTANT, Journaux, 1804, p. 87). [Dans des périphrases] Les serpents de l'Envie, de la Calomnie (Ac. 1835-1935). L'abominable serpent de jalousie se déroulait et se tordait en son cœur (GIDE, Faux-monn., 1925, p. 1070).
II. — P. anal.
A. — 1. Ce qui se déroule, se développe à la manière d'un serpent. Des serpents de flamme, de fumée. On montait, on montait, par des chemins en zigzags, toute la famille à la file et à pied, formant serpent (LOTI, Rom. enf., 1890, p. 189). Des laminoirs sortaient des barres de fer rouge qui s'allongeaient et se tordaient sur le sol, comme des serpents de feu (MOSELLY, Terres lorr., 1907, p. 209).
2. Objet qui évoque un serpent par sa forme ou qui est fabriqué en forme de serpent. Dans son salon, il avait une jardinière dont le pied était fait par un serpent en bois verni qui montait en s'enroulant vers un nid d'oiseau (GONCOURT, Journal, 1853, p. 92). Et [elle] s'occupait à se passer au poignet, un serpent de diamants, en bracelet (BOURGES, Crépusc. dieux, 1884, p. 48).
— Arg., vx. Ceinture de cuir où un soldat mettait son argent. Depuis six mois qu'il [ce caporal] tient l'ordinaire il a un serpent qui lui coupe les flancs, lui qui n'avait pas le sou auparavant (VIDAL, DELMART, Caserne, 1833, p. 172).
B. — Empl. techn.
1. AÉRON. ,,Long cordage fixé à la nacelle d'un ballon et qui sert d'amortisseur pour les descentes un peu brusques`` (Lar. 20e). Les stabilisateurs funiculaires continus employés (...) [dans les ballons maritimes] sont formés d'un gros câble souple ou serpent (MARCHIS, Nav. aér., 1904, p. 559).
2. ASTRON. Constellation équatoriale répartie en deux aires distinctes séparées par une zone du Serpentaire (d'apr. MULLER 1980).
3. BIJOUT. Œil-de-serpent.
4. BOT. Langue(-)de(-)serpent. Ophioglosse (v. ce mot s.v. ophio- et serpentaire1). Bois de serpent. V. serpentine B 1.
5. CHIM. ANC. ,,Petit cylindre de sulfocyanure de mercure, de la grosseur d'un crayon, qui, allumé à une extrémité, reproduit les enroulements et les flexuosités d'un ophidien qui se tord`` (Lar. encyclop.). Elle désigna la poudre blanche: c'est du serpent de Pharaon. N'aie pas peur, cela ne tue qu'en brûlant (DRUON, Roi de fer, 1955, p. 257).
6. ÉCON. [P. réf. à la forme de la courbe graphique, représentant l'évolution du cours des différentes monnaies concernées] Serpent monétaire européen (abrév. S.M.E.), ou p. ell., serpent. Système déterminant la marge de fluctuation des taux de changes à l'intérieur d'un groupe de plusieurs monnaies européennes liées entre elles par des parités définies. Être, entrer dans le serpent; sortir du serpent. Le 22 avril 1972 a commencé à fonctionner le « serpent » européen (...). Les monnaies qui font partie du « serpent » sont liées par des parités fixes dont elles peuvent s'écarter au maximum de 1,125 % dans chaque sens (...). La Banque de France était tenue jusqu'à maintenant de maintenir la valeur du franc vis-à-vis des monnaies européennes faisant également partie du fameux « serpent » communautaire (Le Monde, 22 janv. 1974 ds GILB. 1980).
7. MUS. Instrument à vent, en bois recouvert de cuir, au tuyau ondulé dans sa forme primitive, utilisé couramment jusqu'au XIXe s. dans la musique d'église et la musique militaire et aujourd'hui à peu près délaissé. L'origine de l'ophicléide est le serpent, qui accompagnait autrefois le plain-chant dans les églises, et qu'on trouve encore dans les campagnes (LAVIGNAC, Mus. et musiciens, 1895, p. 147). Il se présentait en tambour-major devant trois rangs de tambours et la musique, composée de soixante amateurs jouant du flageolet, du serpent ou du bugle (POURRAT, Gaspard, 1930, p. 262).
— P. méton. Celui qui joue de cet instrument. Le poëte et le musicien se rendirent à l'école normale, où les attendait le serpent de la cathédrale qui initiait les futurs maîtres d'école à l'art du plain-chant (CHAMPFL., Souffr. profess. Delteil, 1853, p. 200).
8. SPORTS (ski). ,,Méthode d'accélération réservée surtout aux slaloms et qui consiste à opérer une série de petits virages enchaînés que le skieur exécute en pleine décontraction`` (GAUTRAT Ski 1969).
C. — [Par jeu de mots] Arg. Sergent (anciennement, sergent chef de salle à l'École polytechnique; sergent de ville). En dehors de ces établissements, tout chôme jusqu'aux décrotteurs indépendants, dont l'un qui cirait mes bottines s'est vu, ce dernier Sunday, véhémentement réprimandé par un « serpent » qui passait (VERLAINE, Corresp., t. 1, 1872, p. 57).
REM. 1. Homme-serpent. V. homme- I C. 2. Serpentelet, subst. masc., hapax. Petit serpent. Le pli de sa bouche se tordait sous la moustache comme un serpentelet (GIONO, Baumugnes, 1929, p. 48). 3. Serpenté, -ée, adj., rare, littér. a) Disposé en forme de serpent. (Dict. XIXe et XXe s.). b) Orné, entouré de quelque chose qui se déploie à la manière d'un serpent. Un garagiste en compagnie de sa maîtresse, serpentée de renard argenté (FARGUE, Piéton Paris, 1939, p. 46). 4. Serpental, -ale, -aux, adj., hapax. Qui est sinueux, ondulant. Sur les vagues jaunes et dorées du désert, où les caravanes de chameaux décrivent au loin leurs lignes serpentales (LAMART., Voy. Orient, t. 2, 1835, p. 259). 5. Serpenteux, -euse, adj., rare. Qui ondule à la manière d'un serpent, qui décrit une ligne sinueuse. Tandis que par derrière de longues et serpenteuses vagues, semblables aux monstres fantastiques de la fable (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 2, 1823, p. 525). L'ancien chemin carrossable, serpenteux à cause de la pente (RICHEPIN, Cadet, 1890, p. 44).
Prononc. et Orth.:[]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1100 « reptile à corps cylindrique, très allongé, dépourvu de membres » (Roland, éd. J. Bédier, 2543); b) 1606 serpent d'eau (NICOT); 1611 serpent cornu (COTGR.); 1671 serpent à deux têtes (POMEY); 1680 serpent à sonnette (RICH.); 1765 serpent à lunettes (Encyclop. [la vedette est orthographiée: serpent à lunette]); 1791 serpent de verre (VALM.); 1854 serpent diamant (Abbé FALCIMAGNE, trad. Mgr R. SALVADO, Mém. historiques sur l'Australie, p. 381 ds QUEM. DDL t. 13); 2. a) déb. XIIe s. uns marins serpenz (St Brendan, éd. E. G. R. Waters, 909); 1855 serpent de mer « gigantesque monstre à l'existence hypothétique » (NERVAL, Nouv. et fantais., p. 279); 1939 fig. « sujet rebattu, cliché » (GIRAUDOUX, Pleins pouvoirs, p. 93); b) 1501 « le Diable, Lucifer » (Livre de conduite du regisseur ... pour le mystère de la Passion joué à Mons, éd. G. Cohen, 10); 1585 serpent d'airain (N. DU FAIL, Contes d'Eutrapel, éd. J. Assézat, II, p. 334); c) 1926 serpent à plumes « dieu de la mythologie aztèque » (D. H. LAWRENCE, Le Serpent à plumes); 3. 1174-77 pute serpant « personne perfide et méchante » (Renart, éd. M. Roques, br. VIIa, 6071, t. 3, p. 17); 4. a) av. 1606 « ce qui ondule comme un serpent » (DESPORTES, Angélique, I ds LITTRÉ); b) 1636 « instrument de musique » (MERSENNE, Harmonie universelle, p. 278); c) 1904 aéron. (MARCHIS, loc. cit.); 5. 1973 serpent européen (Le Point, 8 oct. ds GILB. 1980); 1975 serpent monétaire européen (ibid., 19 mai ds ROB. 1985). Du lat. serpentem, acc. de serpens « serpent ». Fréq. abs. littér.:1 961. Fréq. rel. littér.:XIXe s.: a) 3 448, b) 3 643, XXe s.: a) 2 085, b) 2 190. Bbg. BRÜCKER (F.). Die Blasinstrumente in der altfranzösischen Literatur. Giessen, 1926, p. 54, 55. — QUEM. DDL t. 9, 12 (s.v. serpent à chapeau), 16.
serpent [sɛʀpɑ̃] n. m.
ÉTYM. 1080, Chanson de Roland; parfois fém. en anc. franç., du lat. serpentem, accus. de serpens « le rampant », de serpere « ramper », euphémisme pour anguis « serpent », dont on évitait de prononcer le nom.
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1 Reptile à corps cylindrique, très allongé, dépourvu de membres apparents, appartenant au groupe des Ophidiens. ⇒ Reptile. — REM. Dans la langue courante, serpent s'applique aussi à des Sauriens serpentiformes non ophidiens. — Les serpents (ou Ophidiens) ont de nombreuses vertèbres portant des côtes, des yeux protégés par une écaille transparente (sans paupière), une langue bifide et rétractile. || Étude des serpents. ⇒ Erpétologie, ophiographie. || On distingue plus de deux mille espèces de serpents. — Écailles des serpents. || Mue des serpents. ⇒ Muer. || Serpent ovipares, ovovivipares. — Serpents venimeux, non venimeux. || Poisons (névrotoxine, hémorragine) des venins de serpents. || Serpents aglyphes (sans crochets à venin; ⇒ Colubriformes), à crochets sillonnés (placés en arrière [opistoglyphes] ou en avant [protéroglyphes] de la bouche), à crochets cannelés (solénoglyphes). || Langue de serpent (⇒ Dard, Poét.). || Le serpent siffle, darde sa langue. || Morsure de serpent (⇒ Piquer, piqûre, par ext.). || « Ce fut le serpent qui creva » (cit. 19, Voltaire). — Les serpents avancent par reptation. || Anneaux, replis d'un serpent. ⇒ aussi Nœud (cit. 14). || Serpent qui rampe, se faufile (cit. 6), glisse entre les pierres — Par compar. || Se tordre, se tortiller comme un serpent, comme un ver. — Serpent qui fascine un oiseau. || Combat d'une mangouste (2. Mangouste, cit.) et d'un serpent. — Charmeur de serpent : en Orient, Homme qui donne en spectacle des serpents venimeux qu'il tient en respect en les « charmant » au son d'un instrument de musique (flûte, etc.). ⇒ 1. Psylle (cit. 1). || « On dirait un serpent qui danse » (→ Marcher, cit. 9). || Adoration, culte des serpents. ⇒ Ophiolâtrie, ophite. — Le serpent et la lime, fable de La Fontaine (V, 16).
1 (…) des serpents oiseleurs sifflent, suspendus aux dômes des bois, en s'y balançant comme des lianes.
Chateaubriand, Atala, Prologue.
2 Deux haillons transparents, deux nasses en gros tulle couleur d'araignée, témoignent que le printemps a dégainé d'eux-mêmes les deux grands serpents. Ils sont neufs (…) Mais où est le col, le flanc, la tête ? Un pavage d'émail habite ces cylindres, par leur propre poids oppressés.
Colette, Prisons et Paradis, « Serpents ».
3 (…) je regardai, éperdu, se lever, avec une lenteur menaçante et sournoise, le monstre enroulé sur le seuil. Cette chose se dépliait et d'elle-même mollement tirait des anneaux noirs d'une substance indéfinissable. Peu à peu cette vie sans nom et ce déroulement sans origine, en ondes dénouées d'une masse confuse, créaient sur le seuil un reptile. Il oscillait. Par ondulations il reformait sans cesse son corps indéfiniment dilué sous la fluidité de sa matière. Maintenant on pouvait distinguer un serpent énorme, dont la terrible tête plate se dandinait à un mètre du sol. Pas un serpent de nos pays, mais une bête tropicale, chargée de venins sûrs, et rapide à mordre (…)
H. Bosco, le Jardin d'Hyacinthe, p. 159.
3.1 Si la musique agit sur les serpents ce n'est pas par les notions spirituelles qu'elle leur apporte, mais parce que les serpents sont longs, qu'ils s'enroulent longuement sur la terre, que leur corps touche à la terre par sa presque totalité; et les vibrations musicales qui se communiquent à la terre l'atteignent comme un massage très subtil et très long (…)
A. Artaud, le Théâtre et son double, Idées/Gallimard, p. 124.
♦ Peau de serpent : peau préparée, tannée, du serpent (⇒ Cuir). || Un étui en peau de serpent (→ Camper, cit. 4), en serpent.
♦ (Qualifié, dans des noms d'espèces). || Serpent à collier : couleuvre à collier, dite aussi serpent d'eau. — (1611). Vx. || Serpent cornu; mod. serpent à cornes (1904) : vipère à cornes, ou céraste. — (1765). || Serpent à lunettes. a Aspic (dit aussi serpent de Cléopâtre). b ⇒ Cobra, naja. — (1680). || Serpent à sonnettes. ⇒ Crotale. — Serpent corail. ⇒ Élops. — Serpent devin : le boa constrictor. — Serpent cracheur, qui projette son venin. — Serpent à deux têtes, serpent à deux queues. ⇒ Amphisbène. — Serpent minute : serpent minuscule (d'où son nom, du port. minuto) du genre typhlos. — Serpent ratier, mangeur de rats. — Serpent fouet : petit serpent très mince. — Serpent loup : serpent du genre lycodon. — En franç. d'Afrique. || Serpent boa : python. || Serpent cracheur ou cracheur : naja.
3.2 (…) les colons eurent la désagréable surprise d'apercevoir Top s'arrêter devant un serpent de grande taille, qui mesurait quatorze ou quinze pieds de longueur. Nab l'assomma d'un coup de bâton. Cyrus Smith examina ce reptile, et déclara qu'il n'était pas venimeux, car il appartenait à l'espèce des serpents-diamants dont les indigènes se nourrissent dans la Nouvelle-Galle du Sud. Mais il était possible qu'il en existât d'autres dont la morsure est mortelle, tels que ces vipères-sourdes, à queue fourchue, qui se redressent sous le pied, ou ces serpents ailés, munis de deux oreillettes qui leur permettent de s'élancer avec une rapidité extrême.
J. Verne, l'Île mystérieuse, t. I, p. 209.
3.3 Une fois, j'avais regardé un serpent de très près. Je n'ai jamais eu peur des serpents. Je les aime comme j'aime les belettes, les fouines, les perdreaux, les hases, les petits lapins, tout ce qui n'a pas la hantise de la mort et l'hypocrisie de l'amour. Les serpents sont d'admirables bêtes paisibles et sensuelles, nées au plus creux du monde, dans l'endroit où doit se trouver l'essence des granits, des basaltes et des porphyres; ils sont vraiment d'une beauté et d'une grâce extraordinaires.
J. Giono, Jean le Bleu, Pl., t. II, p. 81.
♦ En parlant de sauriens non ophidiens. (1791). || Serpent de verre : orvet.
4 C'était une bête longue de près de deux mètres et épaisse comme une bouteille… elle s'approchait de l'homme et elle ouvrait sa grande mâchoire silencieuse aux dents de scie. Antonio toucha le congre à pleines mains au moment où le serpent d'eau balançait sa queue devant lui.
J. Giono, le Chant du monde, I, II.
➪ tableau Noms de reptiles non fossiles.
2 Animal fabuleux, rampant et allongé; représentation symbolique ou religieuse de serpent. ⇒ Monstre (cit. 4); amphisbène, 1. basilic, guivre, hydre. || Chimère, dragon à queue de serpent. || Les deux serpents du Caducée. || Le serpent Python (1.). || Les serpents, attributs de Furies (1.), de la Méduse. || « Pour qui sont ces serpents… » (→ Enfer, cit. 2, Racine). — Dieux serpents, dans certaines religions. || Le serpent à plumes Quetzalcoatl, divinité de l'Amérique précolombienne (toltèque, puis maya). — T. biblique. || Le serpent d'airain : emblème sauveur fait par Moïse, inspiré par Yahvé, pour guérir son peuple des morsures de serpents (Nombres, XXI, 4).
5 (…) le serpent aux ailes d'or, qui déroulait autour de l'arbre de la science sa spirale d'azur, était pétri de lumière et d'amour.
France, Thaïs, II, p. 144.
♦ (V. 1112, marin serpent). || Le serpent de mer : animal fabuleux serpentiforme, de grande taille, dangereux; animal ou objet marin mal identifié. ☑ Loc. C'est le serpent de mer, c'est un sujet rebattu, un cliché. Cf. Le monstre du Loch Ness.
6 Voilà quelques années encore, les grands travaux de la mer, le canal sous la Manche, le canal des Deux-Mers, n'apparaissaient dans les journaux qu'en été, dans l'absence d'autres chroniques, aux époques du grand serpent de mer.
Giraudoux, De pleins pouvoirs à sans pouvoirs, p. 93.
♦ (1550). Symbole de l'esprit du mal, du malin, dans la Bible (Genèse). || Le serpent qui tenta Ève (dans le paradis terrestre), et l'incita à manger le fruit de l'arbre de la science du bien et du mal. ⇒ Démon, tentateur (cf. Genèse, III). || La Vierge est souvent représentée terrassant le serpent. — Fig. Celui qui séduit, trompe, induit au mal (→ Corrupteur, cit. 4; Ève, cit.).
7 Il devait être et fut, pour l'Ève ennuyée de son paradis de la rue du Rocher, le serpent chatoyant, coloré, beau diseur, aux yeux magnétiques, aux mouvements harmonieux, qui perdit la première femme.
Balzac, Une fille d'Ève, Pl., t. II, p. 93.
♦ Alchim. || Le serpent : le mercure (cit. 1).
♦ Par compar. (de formes allongées et tortueuses). || En forme de serpent, comme un serpent. → ci-dessous, 4.
7.1 La Seine semble un gros serpent roulé, couché immobile, dont on n'aperçoit ni la tête ni la queue (…) et la terre entière a l'air d'une immense cuvette de prés et de forêts qu'enferme à l'horizon une montagne basse, lointaine et circulaire.
Maupassant, De Paris à Heyst, Pl., t. II, p. 1282.
3 (XIIIe). Par métaphore, fig. (par allus. aux caractères traditionnels de finesse, de prudence [cit. 4 et 5], de ruse…, attribués au serpent).
a Personne méchante, perfide. || Un de ces serpents de la littérature (→ Folliculaire, cit. 1). — Langue de serpent. ⇒ Langue. — ☑ Un serpent qu'on réchauffe dans son sein (→ Hypocrisie, cit. 17; récompense, cit. 4). — Une prudence, une ruse de serpent, extrême.
b Action, parole trompeuse, mensongère, dangereuse et perfide. || Le serpent, les serpents de la calomnie, de l'envie, de la médisance.
7.2 Le jour de son mariage !… Ah ! voilà donc pourquoi il ne m'embrassait pas, moi ! (Tragiquement.) Oh ! je sens les serpents de la jalousie ! (À Amédée.) Ne t'en va pas ! je te reprends !
E. Labiche, le Clou aux maris, 16.
♦ ☑ Loc. Un serpent caché sous les fleurs : un danger caché sous des apparences flatteuses.
4 (Déb. XVIIe). Par anal. de forme. Chose longue et mince, sinueuse ou lovée comme un serpent. || Cheveux en longs serpents noirs (→ Boucle, cit. 5). || Le long serpent de ses bois (→ 1. Glycine, cit. 1). || Serpents de feu.
8 (…) ces espèces de tire-bouchons (de cheveux) que les prédicateurs appelaient, dans ce temps-là, des serpents, pour en dégoûter les jolies filles, sans avoir jamais pu y parvenir.
Barbey d'Aurevilly, les Diaboliques, « Le bonheur dans le crime », p. 157.
9 Le vaste bateau glissait, jetant sur le ciel, qui semblait ensemencé d'étoiles, un gros serpent de fumée noire (…)
Maupassant, Contes de la Bécasse, « La peur ».
10 Maintenant les canaux tortueux qui traversent la ville sont un long serpent de barques amalgamées qui s'avance dans les vociférations (…)
Claudel, Connaissance de l'Est, « Marée de midi ».
♦ (1908). Techn. Cordage fixé sous la nacelle d'un ballon, et qui sert d'amortisseur en cas de descente brusque.
♦ (1636). Mus. Ancien instrument à vent, en bois et en cuir, dont le tube était recourbé plusieurs fois. || L'ophicléide a remplacé le serpent. — Par métonymie. Instrumentiste qui jouait du serpent.
5 Loc. || Œil de serpent. ⇒ Œil-de-serpent. — Langue de serpent. a Ophioglosse (plante). b Outil à deux pointes. — Bois de serpent. ⇒ Serpentine.
6 (1972). Écon., fin. Marge de fluctuation des cours, autorisée sans intervention obligatoire des banques centrales, pour un ensemble de monnaies déterminé. || Le serpent monétaire européen. || Être, entrer dans le serpent. || Sortir du serpent. || « Le retour du franc dans le “serpent” monétaire européen » (le Point, 19 mai 1975, p. 54). — Le serpent communautaire, européen.
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DÉR. Serpente, serpenteau, serpenter, serpentueux.
COMP. Serpentiforme.
Encyclopédie Universelle. 2012.