cajoler [ kaʒɔle ] v. tr. <conjug. : 1>
• 1551 « babiller, chanter », en parlant du geai; moy. fr. gayoler; infl. de enjôler
♦ Avoir envers (qqn) des manières, des paroles tendres et caressantes. Cajoler un enfant. ⇒ câliner, caresser, choyer, dorloter. Il aime se faire cajoler. ⇒ chouchouter. « le plus jeune était le plus gâté et le plus cajolé » (Sand).
⊗ CONTR. Brusquer, malmener.
● cajoler verbe transitif (peut-être moyen français gayoler, caqueter, du picard gaiole, cage) Avoir avec quelqu'un des manières douces, caressantes et tendres pour lui manifester sa tendresse : Cajoler un enfant. ● cajoler (difficultés) verbe transitif (peut-être moyen français gayoler, caqueter, du picard gaiole, cage) Orthographe On écrit cajoler, sans accent circonflexe sur le o (à la différence d'enjôler). ● cajoler (synonymes) verbe transitif (peut-être moyen français gayoler, caqueter, du picard gaiole, cage) Avoir avec quelqu'un des manières douces, caressantes et tendres pour...
Synonymes :
- câliner
- caresser
- chouchouter (familier)
- couver
- dorloter
- gâter
Contraires :
- brusquer
- malmener
- rudoyer
- tarabuster (familier)
cajoler
v.
d1./d v. tr. Avoir des paroles, des gestes tendres pour. Cajoler un enfant.
d2./d v. intr. Crier (pie ou geai).
I.
⇒CAJOLER1, verbe.
I.— Emploi intrans., vx [Le suj. désigne un oiseau, et plus spéc. le geai et la pie] Chanter, siffler pour attirer la femelle. Entendre cageoler le geai (F. GALIPEAUX, Souvenirs, 1931, p. 238).
II.— Emploi trans.
A.— [Le suj. et le compl. désignent une pers.]
1. Entourer quelqu'un d'attentions délicates, lui prodiguer des caresses, des paroles douces et affectueuses. Cajoler un enfant. Cajoler du regard et de la voix (ZOLA, Madeleine Férat, 1868, p. 120). Synon. câliner, choyer, dorloter :
• 1. Les tard-venus comme moi ne connaissent pas de demi-mesure; ou bien on les choie, on les cajole, on les mignarde ridiculement, on en fait d'insupportables petits tyrans...
A. ARNOUX, Les Crimes innocents, 1952, p. 168.
• 2. ... je refusais d'entrer dans les comédies concertées par les adultes; trop âgée à présent pour me faire caresser, câliner, cajoler par eux, j'avais de leur approbation un besoin de plus en plus aigu.
S. DE BEAUVOIR, Mémoires d'une jeune fille rangée, 1958, p. 31.
2. [Avec une idée de profit] Cajoler un vieillard pour se faire nommer dans son testament (Nouv. Lar. ill.). Synon. aduler, amadouer, flagorner. Il apprenait [dans les salons politiques] à caresser les grands et à cajoler les forts (FLAUBERT, La 1re Éducation sentimentale, 1845, p. 266).
— Spéc., ds le lang. de l'amour. Cajoler une femme. Lui tenir des propos galants, la caresser en vue de la séduire. Synon. courtiser, enjôler. Il s'est mis (...) à me dire des flatteries, et puis à me cajoler tant que le jour durait (MAUPASSANT, Contes et nouvelles, t. 2, Rosalie Prudent, 1886, p. 644).
— Absol. Tu cajoles, tu fais l'enfant et brusquement, (...) te voilà une petite vipère (MONTHERLANT, L'Exil, 1929, p. 42).
— Emploi pronom. à sens réciproque :
• 3. [L'exécuteur à son aide] : — ... il est fort inconvenant de se cajoler mutuellement au balcon de l'entre-sol, comme tu le fais avec ta marchande de vin tout le temps que dure l'exposition.
BALZAC, Œuvres diverses, t. 1, 1850, p. 571.
Rem. On rencontre ds la docum. a) Cajolant, ante, part. prés. et adj. Ces cajolantes paroles (SAINTE-BEUVE, Nouveaux lundis, t. 1, 1863-69, p. 229). b) Cajolé, ée, part. passé et adj., rare. Tant d'heures cajolées et tendres (ZOLA, Travail, t. 2, 1901, p. 173).
B.— Au fig., littér.
1. [Le suj. désigne un élément de la nature, le compl. désigne une pers.] Caresser légèrement. Une pauvre enfant de l'école / Cherche le vent qui la cajole (L. DE VILMORIN, Les Belles amours, 1954, p. 212).
2. [Le suj. désigne une pers., le compl. désigne un inanimé abstr.] Entretenir avec complaisance un sentiment, une idée, un état. Cajoler la fortune (BALZAC, Splendeurs et misères des courtisanes, 1847, p. 240), cajoler une passion (SAINTE-BEUVE, Causeries du lundi, t. 2, 1851-62, p. 306), cajoler certaines illusions (RADIGUET, Le Bal du comte d'Orgel, 1923, p. 134), cajoler ses désirs (SARTRE, Le Diable et le Bon Dieu, 1951, p. 247).
Prononc. et Orth. :[], (je) cajole []. Ds Ac. 1694-1932. FÉR. 1768 : ,,Quelques-uns écrivent cageoler``. Étymol. et Hist. 1. 1579 cageoller « chanter, crier (comme un oiseau, geai) » (PARÉ, Livre des Animaux, éd. J.-F. Malgaigne, chap. 25, t. 3, p. 767), forme attestée jusqu'en 1771, Trév.; 1551-1616 cajoler (J. LE HOUX, Vaux de vire, XXI, Gasté ds GDF.); sens attesté jusqu'en 1675 (WIDERHOLD, Nouv. dict. all.-fr. et fr.-all., Bâle); repris dep. 1752, Trév. comme terme de fauconn., qualifié de ,,vx`` par Lar. 20e; d'où 2. 1585 intrans. cajoller « flatter par intérêt avec des paroles » (CHOLIÈRES, 5e Ap. Disnée, pp. 197-198 ds HUG.) — 1611, COTGR.; spéc. 1637 « échanger des propos galants » (CORN., Suiv., 584 ds ROB.), lang. du XVIIe s.; emploi trans. dep. 1596 (G. DE TAVANNES, Mém., p. 416 ds GDF. Compl.). Orig. incertaine; peut-être adaptation sous l'infl. de cage du m. fr. gayoler « caqueter, babiller comme un oiseau » (1525, Banquet du boys ds GDF.), dér. de gaiole forme pic. de geole « cage » (XIIe s. d'apr. FEW t. 2, 1, p. 554b; 1278, Roman de Hem., ds T.-L.) avec infl. sém. de enjôler « attirer (dans une cage) par des vocalises qui flattent » (DAUZAT 1973). — Cette hyp. semble préférable à celle qui consiste à dissocier cajoler « caqueter, babiller » et cajoler « flatter » (EWFS2 et REW3, n° 1790 et 3640) et considérant le premier soit comme un dér. de l'anthroponyme Jacques désignant la pie dans certains dial., soit comme une formation onomatopéique à partir de cacarder « caqueter », le second comme un croisement soit de enjoler et de caresser, soit de l'a. fr. jaiole « petite cage » et de caresser. Fréq. abs. littér. :89.
II.
⇒CAJOLER2, verbe.
MARINE
A.— Emploi trans. Cajoler le navire. ,,Le faire marcher contre le vent, en profitant d'un courant`` (Ac. Compl. 1842).
B.— Emploi intrans. [Le suj. désigne un bâtiment] Aller à la dérive en suivant un courant par vent contraire. Les navires anglais, se laissant dériver, survenaient en « cajolant » (J. DE LA VARENDE, Le Maréchal de Tourville et son temps, 1943, p. 200).
Rem. Attesté ds WILL. 1831, JAL1.
Étymol. et Hist. 1687 (DESROCHES, Dict. ds JAL1). Prob. p. ext. de sens de cajoler1, le courant facilitant la dérive du bateau. Bbg. Défense de se cajoler. Vie Lang. 1960, pp. 613-615. — NIGRA (C.). Note etimologiche e lexicali. Z. rom. Philol. 1904, t. 28, p. 642. — SAIN. Sources t. 2 1972 [1925], pp. 45-46; p. 320; t. 3 1972 [1930], p. 111. — TEPPE (J.). Cris d'animaux. Vie Lang. 1961, p. 208.
cajoler [kaʒɔle] v.
ÉTYM. 1551; moy. franç. gayoler « babiller comme un oiseau », de gaiole, forme picarde de geole « cage » avec infl. sémantique de enjôler « attirer (dans une cage) par des vocalises flatteuses ».
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1 (1551-1616; cageoller, 1579). Chanter, crier (en parlant du geai ou de la pie).
0.1 Sur le plateau, par dizaines, les geais cajolent autour des restes de l'ours; des corbeaux arrivent en croassant, venus d'on ne sait où.
Jean-Yves Soucy, Un dieu chasseur, p. 15.
2 (1637). Échanger de galants propos.
1 (…) Bien que tout le jour il cajole avec toi.
Corneille, la Suivante, II, 8.
2 Tudieu ! comme avec lui votre langue cajole !
Molière, l'École des femmes, V, 4.
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II V. tr. (1596).
1 Mod. Traiter (qqn) en l'entourant d'attentions, avoir envers (qqn) des manières, des paroles tendres et caressantes. || Cajoler un enfant. ⇒ Amignarder (vx), câliner, caresser, choyer, dorloter, mignoter. — Pron. || Ils se cajolent tendrement.
3 (…) le plus jeune était le plus gâté et le plus cajolé comme son âge le comportait.
G. Sand, François le Champi, V, p. 55.
2 (1596). Vieilli. Chercher à gagner, à séduire par des prévenances, des flatteries, des attentions aimables. ⇒ Amadouer, courtiser, enjôler, flagorner, flatter. || Cajoler (qqn) du regard et de la voix.
4 Voir cajoler sa femme et n'en témoigner rien
Se pratique aujourd'hui par force gens de bien.
Molière, Sganarelle, 17.
5 Cajoler les mères pour obtenir les filles (…)
Molière, les Amants magnifiques, I, 2.
6 S'il (Onuphre) se trouve bien d'un homme opulent (…) il ne cajole point sa femme, il ne lui fait du moins ni avance ni déclaration (…) Il est encore plus éloigné d'employer pour la flatter et pour la séduire le jargon de la dévotion (…)
La Bruyère, les Caractères, XIII, 24.
7 À force de cajoler les dames d'Annecy, il s'était mis à la mode parmi elles; elles l'avaient à leur suite comme un petit sapajou.
Rousseau, les Confessions, IV.
8 (…) il n'y avait sorte de bassesse qu'il (M. Bagueret) n'employât pour me cajoler.
Rousseau, les Confessions, V.
♦ Entretenir complaisamment (un sentiment, une pensée).
9 On s'étonnera de voir Mme d'Orgel, si fine, incapable de démêler des fils si gros. Mais à force de cajoler certaines illusions de son cœur, elle en avait fait ses esclaves.
R. Radiguet, le Bal du comte d'Orgel, p. 134.
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CONTR. Brusquer, brutaliser, rudoyer.
DÉR. Cajolable, cajolant, cajolerie, cajoleur.
Encyclopédie Universelle. 2012.