employer [ ɑ̃plwaje ] v. tr. <conjug. : 8>
• 1080; lat. implicare « enlacer, engager »
1 ♦ Faire servir à une fin. ⇒ se servir, user (de), utiliser. Employer un outil, des matériaux, un produit. J'emploierai cette somme à l'achat d'un piano. Voilà de l'argent bien, mal employé. Employer tous les moyens. ⇒ recourir (à). « Employant des ruses d'enfant pour voir les photographies » (Giraudoux). Employer la force, la douceur. Employer les grands moyens. Employer toute son énergie à une tâche. ⇒ appliquer, apporter, consacrer; déployer. J'ai employé toute une journée à rédiger mon courrier. ⇒ mettre, passer. Vous avez employé un terme impropre. Il « employait à chaque instant les mots de chef, de meneur » (Romains) . Adjectif employé comme nom. Pronom. Être en usage. Cette expression ne s'emploie pas, plus. ⇒ se dire; inusité.
♢ Spécialt, Comptab. Mettre, porter en compte. Employer une somme en recette.
2 ♦ Faire travailler pour son compte en échange d'une rémunération. Société qui emploie dix ouvriers. « Je compte t'employer au restaurant » (Green). Des enfants « employés comme dévideurs de trame » (Bernanos). — Occuper. On l'emploie à de menus travaux.
3 ♦ V. pron. S'EMPLOYER À : s'occuper avec ardeur ou dévouement. ⇒ s'appliquer, se consacrer. Il s'emploie à la convaincre. Il faut s'y employer activement. ⇒ se dépenser, se prodiguer. « Aimer, c'est avoir pour but le bonheur d'un autre, s'employer et se dévouer à son bien » (Taine). Vieilli S'employer pour qqn, lui apporter tout son appui.
⊗ CONTR. Négliger, renvoyer.
● employer verbe transitif (latin implicare, placer) Faire usage de quelque chose, l'utiliser, s'en servir, y avoir recours : N'employez pas ce mot, il est incorrect. Utiliser complètement quelque chose dans un usage, le consommer : À quoi allez-vous employer cet argent ? Faire travailler quelqu'un, un animal, l'utiliser pour remplir telle tâche, telle fonction : On l'emploie à de menus travaux. Faire travailler quelqu'un pour son compte en échange d'une rémunération : Maison qui emploie deux cents personnes. Utiliser quelque chose à titre de, dans telle fonction : Employer un adjectif comme nom. ● employer (difficultés) verbe transitif (latin implicare, placer) Conjugaison Attention, le y devient i devant e muet : il emploie mais il employait. - Bien noter le i après le y aux première et deuxième personnes du pluriel, à l'indicatif imparfait et au subjonctif présent : (que) nous employions, (que) vous employiez. Construction 1. S'employer à (+ infinitif ou nom) : il s'est vainement employé à nous convaincre ; elle s'emploie sans compter à ce projet. Registre soutenu. 2. S'employer à ce que (+ subjonctif) : nous nous emploierons à ce que le meilleur accueil vous soit réservé. Sens Employer /utiliser → utiliser ● employer (synonymes) verbe transitif (latin implicare, placer) Faire usage de quelque chose, l'utiliser, s'en servir, y avoir recours
Synonymes :
- recourir à
- se servir de
- user de
- utiliser
Faire travailler quelqu'un pour son compte en échange d'une rémunération
Synonymes :
- engager
- recruter
employer
v.
rI./r v. tr.
d1./d Faire usage de. Employer un produit. Bien employer son temps. Employer la douceur.
d2./d Faire travailler en échange d'un salaire. Cette entreprise emploie deux mille personnes.
rII./r v. Pron.
d1./d être utilisé (pour un usage quelconque). Cette substance s'emploie en pharmacie.
|| être usité, en parlant d'un mot, d'une tournure. Ce terme ne s'emploie plus.
d2./d S'employer à: s'occuper activement de, s'appliquer à.
⇒EMPLOYER, verbe trans.
A.— [Le compl. d'obj. désigne une chose]
1. [Le compl. désigne une substance, un matériau, un outil] Faire usage d'une chose en la faisant fonctionner, en la faisant entrer dans la composition de quelque chose ou en la consommant. Synon. se servir de, user de, utiliser. Employer des matières premières; employer un médicament; employer un appareil, des armes. J'ai eu mal aux yeux, au point d'employer un collyre (FLAUB., Corresp., 1879, p. 261). Mathieu, qui en tenait la recette d'Antoine, a toujours su manier les rouges, à la différence de Louis, qui ne les emploie pas beaucoup (JAMOT, Les Le Nain, 1929, p. 107) :
• 1. ... les pendules étaient de bois : aiguilles, cadran, rouages. (...) On employait du néflier ou du corbier. Le bois qui se polit le mieux en durcissant le plus.
PESQUIDOUX, Le Livre de raison, 1932, p. 7.
— Employer + compl. prép. indiquant le domaine d'emploi. Employer qqc. dans, en. Les femmes employaient avec à propos les condiments dans la cuisine (AYMÉ, Jument, 1933, p. 13). La pharmacie l'emploie [le sucre] en plusieurs compositions (FARAL, Vie temps St Louis, 1942, p. 172).
— Employer + compl. prép. (subst. ou inf.) indiquant le but. Employer qqc. pour. Claire n'emploie jamais le savon pour se laver la figure (DUHAMEL, Terre promise, 1934, p. 174). Employer qqc. contre. Le thé se vendait encore chez les apothicaires, comme une drogue employée contre les indigestions (BALZAC, Illus. perdues, 1843, p. 64). Employer qqc. à. Le maïs est employé à mille usages (PESQUIDOUX, Chez nous, 1921, p. 198).
— Employer + compl. prép. indiquant l'attribution, la destination. Employer comme. Le vaisseau l'« Orion » (...) a été plus tard employé à Brest comme vaisseau-école (HUGO, Misér., t. 1, 1862, p. 442).
— Emploi pronom. passif. Au lieu de quatre millions de livres de coton qui s'employaient au moment de la révolution, il s'en travaillait à présent au delà de trente millions de livres (LAS CASES, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 450).
2. P. anal.
a) [Le compl. désigne un animal] Utiliser ses capacités. Pendant la guerre sud-africaine, (...) nous employions pour nos transports un grand nombre de bœufs (MAUROIS, Silences Bramble, 1918, p. 230).
b) [Le compl. désigne une pers. ou une catégorie de pers.] Confier à quelqu'un un travail à faire, une mission à remplir. Employer l'armée, la gendarmerie (dans une circonstance précise). La grande raison des Bourgeois pour employer cet artiste est celle-ci :« Dites-en ce que vous voudrez, il place vingt mille francs par an chez son notaire » (BALZAC, P. Grassou, 1840, p. 459). L'an dernier, le mémoire de la couturière était de dix-huit mille. Il a fallu employer le confesseur pour réduire la femme (TAINE, Notes Paris, 1867, p. 25). Nous démontrons que le Kuomintang peut être employé en l'employant. Non en discutant. Nous n'avons cessé de l'employer depuis deux ans (MALRAUX, Cond. hum., 1933, p. 285) :
• 2. ... l'Allemagne emploie des espions chez nous, et leur donne des instructions très judicieuses. Il est à croire que nous en employons chez elle...
ROMAINS, Les Hommes de bonne volonté, Le 6 octobre, 1932, p. 162.
3. En partic.
a) [Le compl. d'obj. désigne une somme d'argent]
) Dépenser (une somme d'argent) dans un but quelconque :
• 3. Agathe et moi nous voulions employer notre argent de tant de manières différentes, que nous ne savions plus à quel achat nous résoudre.
BALZAC, Le Père Goriot, 1835, p. 108.
— Employer + compl. prép. (subst. ou inf.) indiquant le but. Employer (de l'argent) à l'achat, à l'acquisition de qqc., à s'acheter qqc. Employer la dot de sa femme à satisfaire les prodigalités ruineuses de sa maîtresse (PONSON DU TERR., Rocambole, t. 1, 1859, p. 412). Olympe employait à des fantaisies l'argent qu'elle tirait des poches de Marthe (ZOLA, Conquête Plassans, 1874, p. 1164).
— Employer + compl. prép. (subst.) précisant la nature de l'acquisition. Employer (de l'argent) en. J'aurais encore mieux aimé que cet argent fût employé en fards et en toilettes (MONTHERL., Lépreuses, 1939, p. 1409).
) Utiliser (une somme d'argent) en vue d'un placement productif. Anton. dépenser, gaspiller :
• 4. Ce conseil déterminera positivement la somme à laquelle commencera, pour le tuteur, l'obligation d'employer l'excédant des revenus sur la dépense : cet emploi devra être fait dans le délai de six mois, passé lequel le tuteur devra les intérêts à défaut d'emploi.
Code civil, 1804, art. 455, p. 84.
— Employer + compl. prép. indiquant la nature, le domaine d'emploi. Employer des capitaux en actions. Dès que l'un d'eux [un bourgeois] se sentait possesseur d'un petit capital, au lieu de l'employer dans le négoce, il s'en servait aussitôt pour acheter une place (TOCQUEVILLE, Anc. Rég. et Révol., 1856, p. 171).
b) [Le compl. d'obj. désigne un terme lex., une forme gramm., une figure de style, etc.] Utiliser (un terme) dans un discours, un écrit. Tout substantif français peut être employé adjectivement (GOURMONT, Esthét. lang. fr., 1899, p. 33). Ils employaient des expressions et des tournures de phrases que l'on n'entend point au pays de Québec (HÉMON, M. Chapdelaine, 1916, p. 165). Il n'emploie presque jamais les substantifs convenables; il les remplace par deux ou trois mots omnibus (DUHAMEL, Journal Salav., 1927, p. 74) :
• 5. « J'avoue que Taquin le Superbe me plaît infiniment comme rédaction », concluait la princesse. En réalité, le mot de « rédaction » ne convenait nullement pour ce calembour, mais la princesse d'Épinay (...) avait pris à Oriane les expressions « rédigé, rédaction » et les employait sans beaucoup de discernement.
PROUST, Le Côté de Guermantes 2, 1921, p. 466.
SYNT. Employer une métaphore, une tournure de phrase, un langage noble, bas; employer un temps (du verbe), un mode; employer un mot nouveau, un vilain mot, un mot au figuré; employer un mot pour un autre.
— Employer un mot + compl. déterminatif en appos. ou introd. par de, indiquant le mot employé. J'employe à dessein ce mot d'empire, ce mot d'impérialisme auquel je donne leur signification de conquête et de prééminence (BARRÈS, Cahiers, t. 12, 1919-20, p. 93). Toi seul n'as pas remarqué qu'elle n'employait jamais le mot femme (GIRAUDOUX, Ondine, 1939, III, 1, p. 171).
— Employer un mot, un terme + compl. déterminatif introd. par de, indiquant la provenance, le domaine habituel d'emploi du mot en question. Le dépit, entre femmes, emploie volontiers les métaphores de la halle et de la grève, fussent-elles duchesses ou grandes coquettes (GAUTIER, Fracasse, 1863, p. 91). — (...) On ne m'a raconté que le thème de votre histoire, le synopsis, comme on dit maintenant... — Vous voyez, vous êtes forcé d'employer des mots de théâtre (VAILLAND, Drôle de jeu, 1945, p. 154). Cf. aussi apache ex. 5.
♦ P. ext. « Pour arriver. » Même dans ses pensées les plus obscures, elle employait ce mot de succès et d'ambition (ROY, Bonheur occas., 1945, p. 117).
— Employer + compl. prép. indiquant la destination. Elle employait toujours un langage noble pour les choses les plus simples (PROUST, J. filles en fleurs, 1918, p. 596).
— Employer un mot au sens de/où, dans le sens + déterminatif. Jamais, en effet, on n'a pu constater un départ plus net entre le « peuple » et les « habiles », au sens où La Bruyère employait ces deux mots (LEMAITRE, Contemp., 1885, p. 339). Elle aussi bien que moi, nous ne pûmes supporter cette gêne (et j'emploie ce mot dans son sens le plus fort) (GIDE, Et nunc manet, 1951, p. 1129).
— Expr. Pour employer le mot propre, exact, un mot cher à (qqn). Bref, dans l'heure qui a suivi, Antonia, pour employer la formule consacrée, est devenue ma maîtresse (ROMAINS, Hommes bonne vol., 1939, p. 206).
— Emploi pronom. passif. Quelle étonnante ambiguïté dans la notion de justice. (...) le même mot s'emploie pour désigner la justice distributive et la justice mutuelle (ALAIN, Propos, 1912, p. 136).
c) [Le compl. désigne un espace de temps]
) Occuper un certain intervalle de temps. Employer sa journée, ses loisirs, quelques heures. Elle était affectée de quelques millions et ne savait comment employer le plus agréablement son temps (FARGUE, Piéton Paris, 1939, p. 119) :
• 6. Je pense (...) aux choses du dehors. Elles me distraient, emploient mon temps et usent ma vie sans m'intéresser beaucoup.
MAINE DE BIRAN, Journal, 1817, p. 4.
— Employer + compl. prép. précisant la nature de l'occupation, introd. par à lorsque l'occupation est une action précise, introd. par en lorsque le sens est assez vague. Employer du temps à faire qqc.; employer du temps en discussions, en promenades, en enfantillages; employer du temps à la conversation. J'ai employé ce temps partie en distractions et partie à la composition d'un morceau de philosophie mystique sur les deux « révélations » (MAINE DE BIRAN, Journal, 1818, p. 185). Ces huit jours d'amour que tu prétends avoir eus pour moi, je n'en ai pas profité. Je ne les ai employés qu'à ma jalousie (ACHARD, J. de la Lune, 1929, I, 6, p. 11).
— [Le suj. désigne la chose qui fait que qqn occupe du temps à la réaliser] Ces diverses courses, ces occupations minutieuses employèrent plus de deux heures (BALZAC, Splend. et mis., 1846, p. 412).
) Occuper (du temps) utilement, avec profit. Anton. gaspiller. Si j'avais deviné, il y a six ans, ce que je soupçonne maintenant, j'aurais employé mes loisirs d'alors et j'en saurais beaucoup aujourd'hui (VALÉRY, Corresp. [avec Gide], 1899, p. 346). Je n'emploie pas encore tout mon temps. Un peu de vertige devant trop d'heures vides (GIDE, Journal, 1906, p. 199) :
• 7. Si j'eusse parlé vers 1795 de mon projet d'écrire, quelque homme sensé m'eût dit : « Écrivez tous les jours pendant deux heures, génie ou non ». Ce mot m'eût fait employer dix ans de ma vie dépensés niaisement à attendre le « génie ».
STENDHAL, Vie de Henry Brulard, t. 1, 1836, p. 215.
d) [Le compl. d'obj. désigne une faculté, un pouvoir, un moyen d'action de la pers.] Mettre en œuvre. Il fallait produire, il fallait employer tes dons, faire valoir tes talents (AMIEL, Journal, 1866, p. 236). Jamais on n'avait encore employé pour elles tant de galanterie (COLETTE, Cl. école, 1900, p. 72). Dans ces moments où sa volonté était employée tout entière, rien ne lui résistait (MAUROIS, Ariel, 1923, p. 321) :
• 8. ... elle n'avait pas osé employer la calomnie et le mensonge, armes incertaines qui se retournent parfois contre celui qui les emploie.
H. BAZIN, Vipère au poing, 1948, p. 178.
SYNT. Employer des moyens, des procédés, un stratagème; employer ses facultés intellectuelles, ses dons, son habileté; employer la force, la ruse, la violence; employer son crédit, son influence en faveur de qqn.
— Employer + compl. prép. précisant le domaine d'emploi. Employer qqc. dans. Quand il employait ainsi toutes ses forces dans une lecture, il perdait en quelque sorte la conscience de sa vie physique (BALZAC, L. Lambert, 1832, p. 19). Ils employaient toute leur intelligence dans les affaires (FRANCE, Île ping., 1908, p. 402).
— Employer + compl. prép. indiquant le but. Employer qqc. à. La citoyenne avait employé son crédit à faire nommer Gamelin à un poste envié (FRANCE, Dieux ont soif, 1912, p. 104). Employer qqc. pour. Il me fallait employer mille ruses pour éloigner de nous ce démon familier, persécuteur et jaloux (THARAUD, Fête arabe, 1912, p. 215).
B.— [Le compl. d'obj. désigne une pers.]
1. Faire travailler quelqu'un à son profit, en échange d'une rémunération, généralement selon les modalités d'un contrat de travail. Une jeune ouvrière, que Manette employait à la journée (THEURIET, Mariage Gérard, 1875, p. 6). M. Mourguer me dit :« J'emploie douze cents ouvriers dans mes fabriques du Liban (BARRÈS, Cahiers Orient, 1914, p. 335). Le coiffeur Gustave, qui emploie quatre manucures (SARTRE, Nausée, 1938, p. 63).
— Employer + compl. prép. indiquant le but. Employer qqn à. Deraedt le plombier était employé par les Allemands à revoir les tuyauteries d'eau et de gaz de la prison (VAN DER MEERSCH, Invas. 14, 1935, p. 292). Les Nord-Africains qu'on emploie à l'empierrement des routes (ARAGON, Rom. inach., 1956, p. 45). Employer qqn en (rare). Or les seigneurs, voyant qu'ils ne pouvaient plus guère Employer leur personne en actions de guerre, Partaient pour Mexico (HEREDIA, Trophées, 1893, p. 176).
— Employer + compl. prép. précisant la fonction. Employer qqn comme. Le prisonnier de guerre français Pierre L... est employé chez nous comme contremaître en outillage et serrurier (AMBRIÈRE, Gdes vac., 1946, p. 192).
— Emploi pronom. réfl. S'employer dans, comme + subst. indiquant le domaine d'activité ou la nature de l'emploi. Occuper un emploi dans, comme. Pour se distraire, il s'employa chez lui comme homme de peine (FLAUB., Mme Bovary, t. 1, 1857, p. 100). Le comte est inflexible : il l'obligera sûrement à s'employer dans les ambassades (ADAM, Enf. Aust., 1902, p. 454).
2. Utiliser le crédit, l'influence dont dispose une personne, en sa faveur (cf. A 3 d, employer le crédit de qqn) :
• 9. Je comptais employer, pour obtenir de vous la faveur que je vous demande, monsieur Hugo ou Dumas, qui sont mes amis et je pense aussi les vôtres...
NERVAL, Corresp., 1830-55, p. 33.
3. Emploi réfl.
a) S'employer à + inf. ou subst. Se consacrer énergiquement, mettre son ardeur à. Sous la voûte impalpable [de la fumée], la société s'employait à boire; quelques Anglais, quelques Pérotes, mais des Russes surtout (MORAND, Ouv. la nuit, 1922, p. 98). Il s'employait à toutes les tâches avec une égale ardeur : au ménage, aux courses, à la polycopie, au classement des périodiques (MARTIN DU G., Thib., Été 14, 1936, p. 38) :
• 10. Ce grand homme [E. Poe] serait aujourd'hui complètement oublié, si Baudelaire ne se fût employé à l'introduire dans la littérature européenne.
VALÉRY, Variété II, 1929, p. 144.
b) S'employer pour qqn. Mettre en œuvre son activité, ses forces, son influence en faveur de quelqu'un. Je compte à Bruxelles des cœurs généreux qui s'emploient pour moi (VERLAINE, Corresp., t. 3, 1873, p. 144).
Prononc. et Orth. :[], (j')emploie []. Ds Ac. 1694-1932. Conjug. Cf. aboyer. Étymol. et Hist. 1. Ca 1100 « utiliser, mettre à, placer, user de (ici, des coups, une arme) » (Roland, éd. J. Bédier, 1013 et 3418); 2. 1370-80 pronom. s'employer à « s'occuper ardemment de » (Remèdes d'Amour, 106 et 336 ds T.-L.); 3. a) 1636 « avoir (quelqu'un) à son service » (MONET); b) 1723 employé subst. masc. (SAVARY DES BRUSLONS, Dict. universel de comm., s.v. employé et commis). Du lat. class. implicare signifiant proprement « plier dans » d'où « entortiller dans, emmêler, enlacer » et « mettre, placer », parallèlement à l'empr. plus tardif impliquer. Fréq. abs. littér. :5 171. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 10 379, b) 6 262; XXe s. : a) 5 738, b) 6 325. Bbg. BRUNEAU (Ch.). Romania. 1927, t. 53, p. 235. — GOTTSCH. Redens. 1930, p. 25, 239, 267, 391. — RICARD (R.). Utiliser et employer. Vie Lang. 1961, pp. 519-521.
employer [ɑ̃plwaje] v. tr. [CONJUG. noyer.]
ÉTYM. Fin XIIe; empleier, 1080; du lat. implicare « plier dedans », d'où « mêler à, engager dans ». → Impliquer.
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1 Compl. n. de chose. Faire servir à une fin; faire emploi, usage de (qqch.). ⇒ Appliquer (2.), disposer (de), servir (se servir de), user, utiliser; mettre (en œuvre, en pratique…). || Employer utilement, efficacement une chose. ⇒ Profit (mettre à profit), profiter. || Employer qqch. pour la première fois. ⇒ Essayer, étrenner. || Employer un matériel avec économie, mesure, parcimonie. ⇒ Ménager. || Employer un outil, un instrument, des matériaux. || Employer la pierre, le béton pour une construction. || Employer du combustible. ⇒ Consommer. — Employer qqch. à…, en… || Employer l'électricité à l'éclairage. || Employer tout son argent à des distractions, en distractions. ⇒ Dépenser. || J'emploierai cette somme à l'achat d'un piano. ⇒ Destiner. — Au p. p. || Somme d'argent bien, mal employée. — Comptab. || Employer une somme en recette, en dépense, l'inscrire en recette, en dépense dans un compte. — Employer tous les moyens, toutes les ressources dont on dispose. || Employer par précaution certains moyens. ⇒ Prendre (prendre des mesures). — (Le compl. désigne une abstraction, une réalité psychologique). || Employer la force, l'autorité (cit. 12). ⇒ Recourir (à). || Employer la douceur. ⇒ Agir (avec). || Employer toute son activité, toute son énergie, tout son zèle à une tâche. ⇒ Appliquer, apporter, consacrer, dépenser, déployer, vouer. || Employer tout son talent à une œuvre. || Employer ses efforts, ses soins à l'exécution d'un projet. || Employer son crédit en faveur de qqn. ⇒ User (de). || Employer sa verve à ridiculiser qqn. ⇒ Exercer. || Employer un ton peu naturel. ⇒ Adopter, affecter.
1 L'intelligence qui nous a été donnée pour notre plus grand bien l'emploierons-nous à notre ruine, combattant le dessein de nature, et l'universel ordre des choses, qui porte que chacun use de ses outils et moyens pour sa commodité ?
Montaigne, Essais, I, XIV.
2 Vous n'avez pas le temps de faire aucun usage de la beauté et de l'étendue de votre esprit; vous ne vous servez que du bon et du solide (…) mais c'est dommage que tout ne soit pas employé.
Mme de Sévigné, Lettres, 1127, 24 janv. 1689.
3 Tous ceux qui emploient de l'argent pour obtenir les ministères ecclésiastiques (…)
Pascal, Réfutation de la réponse à la 12e lettre.
4 Dieu (…) qui, fécond en moyens, emploie toutes choses à ses fins cachées (…)
Bossuet, Oraison funèbre de la reine d'Angleterre.
5 (…) dans l'Antigone il (Sophocle) emploie autant de vers à représenter la fureur d'Hémon (…) que j'en ai employé aux imprécations d'Agrippine (…)
Racine, Britannicus, 1re Préface.
6 J'employais les soupirs, et même la menace.
Racine, Britannicus, II, 2.
7 (…) il fallait employer le pouvoir que cette princesse avait sur lui pour l'engager à servir Mlle de Chartres auprès du roi (…)
Mme de la Fayette, la Princesse de Clèves, I, p. 254.
8 (…) il faut nous séparer. J'essaie déjà depuis quinze jours, et j'ai employé, tour à tour, la froideur, le caprice, l'humeur, les querelles; mais le tenace personnage ne quitte pas prise ainsi (…)
Laclos, les Liaisons dangereuses, Lettre CXIII.
9 Il vint chez Moïse, chez moi, chez ceux qu'il savait connus ou chéris, de Bella, employant des ruses d'enfant pour voir les photographies que j'avais prises d'elle à Évry et dont chacune devenait pour lui un souvenir.
Giraudoux, Bella, IX, p. 215.
♦ Occuper (un intervalle de temps). || Employer une heure, l'après-midi, huit jours à faire qqch. ⇒ Mettre, passer. || Employer tout son temps, sa vie entière à travailler. ⇒ Consacrer, consumer (4.), donner. || Employer son temps inutilement. ⇒ Perdre. || Ne pas savoir employer son temps (→ Couler, cit. 17).
10 C'est une précieuse chose que la santé, et la seule chose qui mérite à la vérité qu'on y emploie, non le temps seulement, la sueur, la peine, les biens, mais encore la vie à sa poursuite (…)
Montaigne, Essais, II, XXXVII.
11 (…) je crois être d'autant plus obligé à ménager le temps qui me reste, que j'ai plus d'espérance de le pouvoir bien employer (…)
Descartes, Discours de la méthode, VI.
12 La plupart des hommes emploient la meilleure partie de leur vie à rendre l'autre misérable.
La Bruyère, les Caractères, XI, 102.
13 Excellente est l'attitude de celui qui a bien employé le temps qu'on lui octroie et ne s'est pas mêlé d'être son propre juge.
Cocteau, la Difficulté d'être, p. 137.
♦ Au p. p. || Bien, mal employé. || Une vie pleine, bien employée.
♦ Employer un mot, une tournure, une locution, s'en servir en parlant, en écrivant. || Employer des mots grossiers, vulgaires. || Employer le terme exact, des termes impropres, un mot pour un autre. || Employer couramment, fréquemment une interjection, une locution. || Employer des comparaisons, des antithèses. || Se servir d'un dictionnaire (cit. 11) pour bien employer les mots. || Ce mot n'est plus employé. ⇒ Usité. || On emploie le verbe employer avec les prépositions à et pour.
14 Je n'emploierai point pour vous rassurer les grandes phrases d'honneur et de dévouement dont on abuse à la journée; je n'ai qu'un mot : mon intérêt vous répond de moi (…)
Beaumarchais, le Barbier de Séville, I, 4.
15 Michels employait à chaque instant les mots de chef, de meneur, de guide, par lesquels tour à tour il traduisait un même mot qu'il avait dans l'esprit, et qui était celui de « führer ».
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. IV, XVI, p. 176.
♦ ☑ Loc. prov. Employer toutes les herbes de la Saint-Jean : avoir recours à tous les moyens dont on dispose.
2 Compl. n. de personne. Faire travailler (qqn) pour son compte en échange d'une rémunération, donner de l'emploi à… || Société qui emploie plusieurs milliers d'ouvriers. || Employer de nouveaux ouvriers. ⇒ Embaucher, engager, recruter. || Son patron l'emploie à toutes sortes de travaux. ⇒ Charger, commettre, préposer. || On ne sait à quoi l'employer. ⇒ Occuper. — Employer (qqn) à l'heure, à la journée.
16 Ta mère est une brave femme (…) Tu lui diras (…) que je compte t'employer au restaurant (…) Est-elle satisfaite des gages que je te donne ?
J. Green, Léviathan, p. 61.
♦ Par ext. || Employer qqn, se servir de son crédit, de son action.
17 Monsieur (…) Faites-moi la grâce de m'employer. Soyez persuadé que je suis entièrement à vous.
Molière, l'Impromptu de Versailles, 3.
♦ (Passif). || Être employé dans les bureaux (⇒ Employé). || Être employé dans une société comme comptable.
——————
s'employer v. pron.
1 (Passif). Être employé, être utilisé. || Ce remède doit s'employer avec prudence. — Ce mot ne s'emploie pas dans ce sens, ne s'emploie pas dans le langage courant. ⇒ Usité (être usité). || Ce terme ne s'emploie qu'au figuré.
2 (Réfl.). S'occuper avec ardeur ou dévouement. ⇒ Appliquer (s'), consacrer (se), donner (se). || S'employer à chercher (cit. 8) Dieu. || S'employer entièrement à… → Se donner corps et âme; payer de sa personne; se mettre en quatre pour… || S'employer activement. ⇒ Dépenser (se), multiplier (se). — S'employer pour qqn, en faveur de qqn : user de son crédit, de son influence en faveur de qqn. || S'employer pour qqn en appuyant (cit. 7) sa demande, en faisant des démarches en sa faveur. || S'employer au bien (cit. 17) de qqn.
18 Sauvez ce malheureux, employez-vous pour lui (…)
Corneille, Polyeucte, IV, 5.
19 Je n'aime pas à manquer de parole quand j'ai promis de m'employer pour quelqu'un.
Racine, Lettres, t. VI, 502.
20 Vous verrez (…) quel médiateur j'avais choisi pour me rapprocher de ma Belle, et avec quel zèle le saint personnage s'est employé pour nous réunir.
Laclos, les Liaisons dangereuses, Lettre CXXV.
21 Ils s'employaient, au hasard, à des besognes obscures et mal payées, qu'ils abandonnaient dès qu'ils avaient un peu d'argent en poche.
Martin du Gard, les Thibault, t. V, p. 13.
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employé, ée p. p. adj. et n. Voir ci-dessus à l'article et ⇒ Employé.
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CONTR. Dédaigner, laisser (de côté), négliger; dérober (se). — Licencier, renvoyer. — (Du p. p.). Inemployé.
DÉR. Emploi, employable, employé, employeur.
COMP. Inemployable, inemployé, sous-employer.
Encyclopédie Universelle. 2012.