inertie [ inɛrsi ] n. f.
• inhertie « atonie », h. v. 1370; lat. inertia
♦ État de ce qui est inerte.
1 ♦ Résistance des objets pesants au mouvement qui leur est imposé. L'inertie de la matière. Centre d'inertie. ⇒ gravité; barycentre. — Force d'inertie (1re loi de Newton),égale et opposée au produit de la masse par l'accélération. — Fig. et cour. Opposer la force d'inertie à la violence. ⇒ non-violence, résistance (passive). — Principe d'inertie, selon lequel un corps pesant, non soumis à une force, est au repos ou en mouvement rectiligne uniforme.
♢ Phys. Inertie électromagnétique : augmentation de l'impédance d'un circuit électrique. ⇒ inductance.
♢ Aéronaut. Navigation par inertie, utilisant, pour calculer une position, l'intégration des accélérations subies par le véhicule. Centrale à inertie (⇒ gyroscope) . — Inertie thermique : capacité d'un matériau à accumuler puis à restituer un flux thermique.
2 ♦ Physiol. Perte de la contractilité (d'un muscle, d'un organe). Inertie musculaire. ⇒ atonie, paralysie. Inertie intestinale, vésiculaire.
3 ♦ (1734) Cour. Manque absolu d'activité, d'énergie intellectuelle ou morale. ⇒ inaction, paresse. Arracher qqn à son inertie. Sortir de son inertie. ⇒ apathie, indolence, passivité. L'inertie gouvernementale. ⇒ abstention, immobilisme, stagnation.
⊗ CONTR. 1. Action, activité, ardeur, entrain, mouvement.
● inertie nom féminin (latin inertia) Propriété de la matière qui fait que les corps ne peuvent d'eux-mêmes modifier leur état de mouvement. Manque d'énergie, d'activité : L'inertie des bureaux entrave toutes les initiatives. Photographie Valeur de l'énergie lumineuse en dessous de laquelle une surface sensible n'est pratiquement pas impressionnée. ● inertie (citations) nom féminin (latin inertia) Charles de Gaulle Lille 1890-Colombey-les-Deux-Églises 1970 Dans le conflit présent comme dans ceux qui l'ont précédé, être inerte, c'est être battu. L'Avenir des forces mécanisées Plon ● inertie (difficultés) nom féminin (latin inertia) Prononciation [&ph93; ;&ph98; ;ɛ ;ʀ&ph103; ;&ph93; ;], la finale -tie se prononce [&ph103; ;&ph93; ;] comme dans facétie. ● inertie (expressions) nom féminin (latin inertia) Force d'inertie, résistance passive qui consiste principalement à ne pas obéir. Centre d'inertie d'un système de points matériels, barycentre de ces points affectés de coefficients qui sont leurs masses respectives. Moment d'inertie d'un système S, somme ou intégrale, étendue à tous les points du système S, des quantités miri2, mi étant la masse d'un point Mi de S situé à la distance ri d'un point O, d'une droite D ou d'un plan P. Inertie utérine, état caractérisé par une absence ou une insuffisance de contractions utérines. Force d'inertie, dans l'étude du mouvement d'un objet dans un référentiel non galiléen, force qu'il faut ajouter aux forces d'interaction s'exerçant sur cet objet pour pouvoir appliquer les lois de la dynamique. Principe d'inertie, principe selon lequel, dans un repère galiléen, un point matériel qui n'est soumis à aucune force d'interaction est animé d'un mouvement rectiligne uniforme. Référentiel d'inertie, synonyme de référentiel galiléen. Inertie d'un nuage de n points xi de Rp par rapport à un point y de R, grandeur I(y) définie par la relation , où pi est le poids du point xi, et d2(xi, y) le carré de la distance entre xi et y. (Cette notion intervient en analyse des données.) Navigation par inertie, navigation reposant sur la mesure puis l'intégration des accélérations subies par un véhicule (aérien, maritime, spatial). ● inertie (synonymes) nom féminin (latin inertia) Manque d'énergie, d'activité
Synonymes :
- apathie
- flemme (familier)
- léthargie
- paresse
- passivité
Contraires :
- activité
- allant
- ardeur
- énergie
- entrain
- impétuosité
- pétulance
- vivacité
Géométrie et Mathématiques. Centre d'inertie d'un système de points matériels
Synonymes :
- centre de gravité
Physique. Référentiel d'inertie
Synonymes :
- référentiel galiléen
inertie
n. f.
d1./d état de ce qui est inerte. Inertie d'une masse.
|| PHYS Principe de l'inertie: dans un repère galiléen, un système soumis à des forces de somme nulle a son centre de masse immobile ou animé d'un mouvement rectiligne uniforme.
— Force d'inertie: force apparente qui se manifeste dans un repère non galiléen (la force centrifuge dans un repère en rotation, par ex.); fig. résistance passive consistant principalement à ne pas exécuter les ordres reçus.
d2./d CHIM Caractère d'un corps inerte.
d3./d Absence de mouvement, d'activité, d'énergie. Vivre dans l'inertie.
⇒INERTIE, subst. fém.
A. — Domaine sc. et techn.
1. MÉCAN. et PHYS. Propriété qu'ont les corps, la matière, de ne pouvoir par eux-mêmes, changer l'état de repos ou de mouvement dans lequel ils se trouvent. Un corps (...), en vertu de son inertie dans le champ d'attraction terrestre, se déplace selon une parabole (RUYER, Esq. philos. struct., 1930, p. 266). Le seul principe d'inertie permet de définir, en mécanique classique, une restriction de la relativité du mouvement (Hist. gén. sc., t. 3, vol. 2, 1964, p. 149) :
• 1. Ces molécules, étant électrisées, ne peuvent se déplacer sans ébranler l'éther; pour les mettre en mouvement, il faut triompher d'une double inertie, de celle de la molécule elle-même et de celle de l'éther.
H. POINCARÉ, Valeur sc., 1905, p. 195.
♦ Force d'inertie. Résistance qu'un corps oppose au mouvement et qui est proportionnelle à sa masse. Les forces d'inertie sont susceptibles de communiquer à un corps d'épreuve une accélération indépendante de ce corps d'épreuve (Hist. gén. sc., t. 3, vol. 2, 1964, p. 166).
♦ Moment d'inertie. ,,Masse d'un point matériel multipliée par le carré de la distance du point à l'axe de rotation`` (Sc. 1962). On désigne par : K, le moment d'inertie de la masse stationnaire par rapport à l'axe de rotation (ROTHÉ, Géophys., 1943, p. 330).
2. CHIM. Propriété d'un corps de ne pas réagir au contact d'un autre corps. Elle [la cellophane] présente une grande inertie vis-à-vis des agents chimiques, se montre 4 000 fois moins perméable à l'hydrogène que le caoutchouc (C. DUVAL, Verre, 1966, p. 119).
3. ÉLECTR. Synon. de masse électromagnétique :
• 2. Tout se passe donc comme si, en vertu de sa charge, la particule possédait une inertie supplémentaire, autrement dit une masse supplémentaire, auxquelles on donne le nom d'inertie ou de masse électromagnétique.
Mme P. CURIE, Radioactiv., t. 1, 1910, p. 65.
4. PAPET. Propriété d'un papier, d'un carton, de résister à l'humidité et de rester bien plat. L'emploi de la charge est, selon certains fabricants, d'une utilité absolue pour obtenir une inertie parfaite du papier (CHELET, Lithogr., 1933, p. 282).
B. — P. ext. [En parlant d'un être vivant]
1. PHYSIOL. Perte de la contractilité des muscles d'un organe. Inertie intestinale, vésicale. Ses jeûnes systématiques excessifs, qui semblaient aussi refroidir son sang et frapper d'inertie les organes digestifs (MICHELET, Journal, 1857, p. 348).
♦ Inertie utérine. Insuffisance ou absence des contractions de l'utérus au début de l'accouchement; absence de la rétraction de l'utérus après l'accouchement. (Dict. XIXe et XXe s.).
— P. ext. État caractérisé par une absence de mouvement et de vie. Synon. immobilité. Inertie d'un mourant. Garder avec l'agilité d'un clown l'inertie d'un cadavre (BLONDEL, Action, 1893, p. 9) :
• 3. Sarcelotte (...) se laissait soulever sans résistance, se prêtait mollement à l'étreinte, écœurait l'homme et le déconcertait par cette inertie de mannequin. Mais, soudain, rassemblant ses muscles, (...) il coulait contre le ventre de l'adversaire, (...) il poussait des épaules avec des saccades violentes...
GENEVOIX, Raboliot, 1925, p. 272.
2. Au fig.
a) État d'abattement, caractérisé par une absence de réaction(s) et un manque d'énergie physique ou morale. Synon. apathie, atonie, prostration; anton. action, activité, énergie, entrain, fougue, vigueur. Demeurer, vivre, être plongé dans une complète, profonde inertie; s'arracher à, sortir de son inertie. Fanny (...) suspectait malgré elle l'inertie, la langueur, même la pâleur de cet enfant imprégné de secret (COLETTE, Seconde, 1929, p. 112) :
• 4. ... dans l'inertie absolue où elle vivait, elle prêtait à ses moindres sensations une importance extraordinaire; elle les douait d'une motilité qui lui rendait difficile de les garder pour elle, et à défaut de confident à qui les communiquer, elle se les annonçait à elle-même...
PROUST, Swann, 1913, p. 50.
— PSYCHOPATHOL. Absence d'activité et d'initiative provoquée soit par un état morbide, soit par des médicaments. Inertie motrice; inertie psychique. Plus la maladie se prolonge, plus elle s'aggrave et plus on voit augmenter cette inertie caractéristique (JANET, Obsess. et Psychasth., 1903, p. 353) :
• 5. On retrouve cette même bonne conscience spontanée chez les sujets d'asile, dont l'inertie et la déchéance mentale ont évacué toute autre perspective spirituelle qu'une extase béate et inefficace.
MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 691.
b) Résistance passive et volontaire qui consiste principalement à s'abstenir d'agir ou à refuser toute contrainte physique ou morale. En toutes choses, il opposait aux volontés de son père une force d'inertie, et croyait avoir fait beaucoup s'il avait retardé le moment où il serait contraint d'obéir (MÉRIMÉE, Hist. règne Pierre le Gr., 1864-68, p. 539). Les Mazelle (...) s'entêtaient à ne pas céder [à leurs filles], non dans des explications violentes, mais par leur inertie bonasse, une sorte de vague ensommeillement, qui, croyaient-ils, lasserait son caprice (ZOLA, Travail, t. 2, 1901, p. 165).
— POL. Absence de réaction et d'initiative, état d'immobilisme. Inertie de la démocratie, de la République, du gouvernement. On cause de l'inertie du gouvernement, du mécontentement produit dans la population par l'absence de l'action du général Trochu (GONCOURT, Journal, 1870, p. 701) :
• 6. Depuis quelques années, l'industrie était prospère. Une crise éclata. Ces accidents sont périodiques. Plusieurs mauvaises récoltes étaient cause de celle-ci. Mais il faut bien blâmer le gouvernement. L'opposition se plaignit de l'inertie des ministres.
MAUROIS, Disraëli, 1927, p. 310.
Prononc. et Orth. : []. Att. ds Ac. dep. 1762. Étymol. et Hist. 1. 1370-72 inhertie « absence de mouvement » (ORESME, Ethiques, éd. A. D. Menut, p. 337, n. 7), attest. isolée; 1648 (DESCARTES, Lettre au marquis de Newcastle ds Œuvres, éd. A. Bridoux, p. 1299 : une sorte d'inertie qui dépend de la quantité de la matière); 2. 1720 force d'inertie (M. COSTE, Traité d'optique [trad. de l'angl. de Newton], p. 539 ds MACK. t. 1, p. 163; inertiae vis chez Newton, ibid.). Empr. au lat. inertia « inertie, inaction, indolence », proprement « ignorance de tout art, incapacité », dér. de iners (inerte). Fréq. abs. littér. : 581. Fréq. rel. littér. : XIXe s. : a) 612, b) 468; XXe s. : a) 890, b) 1 161.
inertie [inɛʀsi] n. f.
ÉTYM. V. 1370, inhertie « atonie » (→ sens 2), attestation isolée; lat. inertia « maladresse, incapacité; inaction, indolence », de iners, inertis. → Inerte.
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♦ État de ce qui est inerte.
1 (1648, Descartes, in T. L. F.). Propriété qu'ont les corps de ne pouvoir d'eux-mêmes changer l'état de repos ou de mouvement où ils se trouvent. || L'inertie de la matière. || Inertie mécanique, électromagnétique. — (1720, d'après le lat. sc. inertiæ vis, Newton). || Force d'inertie (→ Inactivité, cit. 1, Voltaire) : résistance que les corps opposent au mouvement et qui varie en fonction de leur masse. || Principe d'inertie ou loi d'inertie, selon lequel un corps qui n'est soumis à aucune force est en mouvement rectiligne et uniforme ou au repos.
0.1 Le Principe d'inertie. — Un corps qui n'est soumis à aucune force ne peut avoir qu'un mouvement rectiligne et uniforme.
Est-ce là une vérité qui s'impose a priori à l'esprit ? S'il en était ainsi, comment les Grecs l'auraient-ils méconnue ? Comment auraient-ils pu croire que le mouvement s'arrête dès que cesse la cause qui lui avait donné naissance ? ou bien encore que tout corps, si rien ne vient le contrarier, prendra un mouvement circulaire, le plus noble de tous les mouvements ?
H. Poincaré, la Science et l'Hypothèse, p. 112.
0.2 Eh bien maintenant, cette loi d'inertie généralisée a-t-elle été vérifiée par l'expérience et peut-elle l'être ? Quand Newton a écrit les Principes, il regardait bien cette vérité comme acquise et démontrée expérimentalement. Elle l'était à ses yeux, non seulement par l'idole anthropomorphique (…) mais par les travaux de Galilée. Elle l'était aussi par les lois de Képler elles-mêmes; d'après ces lois, en effet, la trajectoire d'une planète est entièrement déterminée par sa position et par sa vitesse initiales; c'est bien là ce qu'exige notre principe d'inertie généralisé.
H. Poincaré, la Science et l'Hypothèse, p. 116.
1 La loi d'inertie formulée par Galilée (…) a été étendue par Newton aux mouvements des corps célestes et apparaît ainsi comme une loi générale de l'Univers. Son énoncé précis consiste en ce qu'un corps qui n'est soumis à aucune force se meut d'un mouvement uniforme (rectiligne) par rapport au temps et à l'espace absolus.
É. Borel, l'Évolution de la mécanique, III, p. 79.
♦ (1910, Mme Curie, in T. L. F.). Phys., électr. || Inertie électromagnétique : augmentation de la résistance d'un circuit électrique. ⇒ Inductance (cit.).
♦ Chim. Propriété (d'un corps) de ne pas réagir (dans une circonstance donnée).
♦ Techn. Propriété (de certaines matières, notamment, les papiers et cartons) de ne pas réagir à l'humidité.
2 Didact. a (1846, Bescherelle; attestation isolée, v. 1370, Oresme). Physiol. Perte de la contractilité (d'un muscle, d'un organe). || Inertie musculaire ⇒ Atonie, paralysie. || Inertie intestinale, vésiculaire, utérine.
♦ Par ext. || Inertie d'une attitude (cit. 12).
b Inertie motrice, dans certains cas de mélancolie. || Inertie (ou sclérose) psychique des vieillards.
3 (1734). Cour. Manque absolu d'activité, d'énergie intellectuelle ou morale. || Vivre, végéter dans l'inertie. ⇒ Inaction, paresse; flemme (fam.). || Les excès du travail acharné ou de la pure inertie (→ Dérégler, cit. 7). || Aspirer à l'inertie (→ Halte, cit. 7). ⇒ Repos. || Sortir de son inertie. ⇒ Sommeil. || Arracher qqn à son inertie (⇒ Aiguillonner). || Degré d'inertie mentale (→ Persévération, cit.). — L'inertie de son caractère. || Inertie bonasse (cit. 4). ⇒ Apathie, indolence, passivité. — L'inertie gouvernementale. ⇒ Immobilisme, stagnation.
2 Cette résolution de ne point agir, de ne point se compromettre, allait parfaitement d'ailleurs à son inertie naturelle.
Michelet, Hist. de la Révolution franç., IV, XII.
3 C'est en poussant les choses, non en les heurtant, qu'on les remue. Toujours nous devons tenir compte de l'inertie des âmes et des corps. En heurtant, bien souvent l'on brise; et c'est tout. Il faut émouvoir.
Gide, Journal, août 1893.
3.1 Il avait étudié de près les six spécimens, qui une fois sortis de leur élément, continuaient à vivre, en gardant toutefois une complète immobilité.
Or, cette inertie déplaisait à Fogar, qui, tout en rejetant l'idée plus banale d'une présentation en eau de mer, voulait faire valoir ses sujets à la façon des forains montreurs de bêtes.
Raymond Roussel, Impressions d'Afrique, p. 354.
♦ (Déb. XIXe). || Force d'inertie s'opposant au génie (cit. 46) qui veut se manifester. || Opposer la force d'inertie à la violence. ⇒ Résistance (passive).
4 Elles (les municipalités) répugnaient à sévir contre les personnes, s'arrêtaient devant cette force d'inertie qui leur était opposée; d'inertie plutôt apparente, car le Clergé agissait très activement par le confessionnal et la presse, par la diffusion des libelles.
Michelet, Hist. de la Révolution franç., IV, IX.
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CONTR. Action, activité, ardeur, entrain, mouvement.
DÉR. Inertiel.
Encyclopédie Universelle. 2012.