littérature [ literatyr ] n. f.
• v. 1120 « écriture »; lat. litteratura « écriture », puis « érudition »
I ♦
1 ♦ (1432) Vx Ensemble des connaissances; culture générale. « Des gens d'un bel esprit et d'une agréable littérature » (La Bruyère).
2 ♦ (1758; all. Literatur) Mod. Ensemble des ouvrages publiés sur une question. ⇒ bibliographie. Il existe sur ce sujet une abondante littérature. Consulter la littérature médicale sur une maladie.
♢ Mus. Ensemble des œuvres écrites (pour un instrument dans une certaine forme). La littérature de la flûte est très variée.
II ♦ (XVIIIe) Les œuvres écrites, dans la mesure où elles portent la marque de préoccupations esthétiques; les connaissances, les activités qui s'y rapportent.
1 ♦ L'ensemble des œuvres littéraires. Les grandes œuvres, les plus belles pages de la littérature. La littérature française, latine. La littérature de langue française. Littérature classique, romantique, réaliste, impressionniste, symboliste, naturaliste, surréaliste. La littérature moderne. Littérature pour enfants, enfantine. Littérature générale. Littérature et paralittérature.
2 ♦ Le travail, l'art de l'écrivain. « la littérature n'est [...] qu'un développement de certaines des propriétés du langage » (Valéry).
♢ Le métier d'homme de lettres, d'auteur littéraire. Faire carrière dans la littérature.
3 ♦ Ce qu'on ne trouve guère que dans les œuvres littéraires (par oppos. à la réalité). — Ce qui est artificiel, peu sincère. « Et tout le reste est littérature » (Verlaine).
4 ♦ Ensemble des connaissances concernant les œuvres littéraires, leurs auteurs. ⇒ 2. critique. Cours, manuel de littérature. Devoir, composition de littérature. ⇒ dissertation. Littérature comparée (⇒ comparatisme) .
♢ (XXe ) Livre, manuel d'histoire de la littérature. La littérature de Lanson.
III ♦ Tout usage esthétique du langage, même non écrit. La littérature orale.
● littérature nom féminin (latin litteratura, de littera, lettre) Ensemble des œuvres écrites auxquelles on reconnaît une finalité esthétique. Ces œuvres, considérées du point de vue du pays, de l'époque, du milieu où elles s'inscrivent, du genre auquel elles appartiennent : La littérature française du XVIIe s. Ensemble des connaissances et des études qui se rapportent à ces œuvres et à leurs auteurs : Cours de littérature. Activité, métier de l'écrivain, de l'homme de lettres. Ensemble des ouvrages, des articles de journaux, etc., consacrés à quelqu'un, à un sujet : Cette affaire a suscité une abondante littérature. Familier. Correspondance épistolaire abondante, verbeuse, délayée : Qu'est-ce qu'il t'envoie comme littérature ! ● littérature (citations) nom féminin (latin litteratura, de littera, lettre) Louis Aragon Paris 1897-Paris 1982 La critique devrait, en matière de littérature, être une sorte de pédagogie de l'enthousiasme. J'abats mon jeu Éditeurs français réunis Marcel Arland Varennes-sur-Amance 1899-Saint-Sauveur-sur-École, Seine-et-Marne, 1986 Académie française, 1968 Je ne conçois pas de littérature sans éthique. La Route obscure Gallimard Honoré de Balzac Tours 1799-Paris 1850 Le vrai littéraire ne saurait être le vrai de la nature. Le Cabinet des antiques, Préface Louis, vicomte de Bonald château du Monna, près de Millau, 1754-château du Monna, près de Millau, 1840 Académie française, 1816 La littérature est l'expression de la société, comme la parole est l'expression de l'homme. Pensées sur divers sujets André Breton Tinchebray, Orne, 1896-Paris 1966 Dites-vous bien que la littérature est un des plus tristes chemins qui mènent à tout. Manifeste du surréalisme Pauvert André Gide Paris 1869-Paris 1951 J'ai écrit, et je suis prêt à récrire encore ceci qui me paraît d'une évidente vérité : « C'est avec les beaux sentiments qu'on fait de la mauvaise littérature. » Je n'ai jamais dit, ni pensé, qu'on ne faisait de la bonne littérature qu'avec les mauvais sentiments. Journal Gallimard Jean Giraudoux Bellac 1882-Paris 1944 Le plagiat est la base de toutes les littératures, excepté de la première, qui d'ailleurs est inconnue. Siegfried, I, 6, Robineau Grasset Louis Poirier, dit Julien Gracq Saint-Florent-le-Vieil, Maine-et-Loire, 1910 Quand on légifère dans la littérature, il faut avoir au moins la courtoisie et la prudence de dire aux œuvres « Après vous… » Lettrines José Corti Georges Charles, dit Joris-Karl Huysmans Paris 1848-Paris 1907 Au fond, en littérature, on arrive, comme dans l'armée, à l'ancienneté ; le principal est de débuter. Lettre, 2 mars 1901 Stéphane Mallarmé Paris 1842-Valvins, Seine-et-Marne, 1898 La littérature, d'accord avec la faim, consiste à supprimer le monsieur qui reste en l'écrivant […]. La Musique et les lettres Gallimard Stéphane Mallarmé Paris 1842-Valvins, Seine-et-Marne, 1898 — Oui, que la Littérature existe et, si l'on veut, seule, à l'exclusion de tout. La Musique et les lettres Gallimard Blaise Pascal Clermont, aujourd'hui Clermont-Ferrand, 1623-Paris 1662 Qu'on ne dise pas que je n'ai rien dit de nouveau : la disposition des matières est nouvelle ; quand on joue à la paume, c'est une même balle dont joue l'un et l'autre, mais l'un la place mieux. Pensées, 22 Commentaire Chaque citation des Pensées porte en référence un numéro. Celui-ci est le numéro que porte dans l'édition Brunschvicg — laquelle demeure aujourd'hui la plus généralement répandue — le fragment d'où la citation est tirée. Charles-Louis Philippe Cérilly, Allier, 1874-Paris 1909 Toutes les crises morales de la littérature sont les crises morales de la bourgeoisie. In Littérature contemporaine, par G. Le Cardonnel et Ch. Velay Mercure de France Nathalie Sarraute Ivanovo, Russie, 1900-Paris 1999 La poésie, dans une œuvre, c'est ce qui fait apparaître l'invisible. Tel quel, n° 9 Jean-Paul Sartre Paris 1905-Paris 1980 Le monde peut fort bien se passer de la littérature. Mais il peut se passer de l'homme encore mieux. Situations II Gallimard Anne Louise Germaine Necker, baronne de Staël-Holstein, dite Mme de Staël Paris 1766-Paris 1817 Le bon goût en littérature est, à quelques égards, comme l'ordre sous le despotisme, il importe d'examiner à quel prix on l'achète. De l'Allemagne Paul Valéry Sète 1871-Paris 1945 Il faut n'appeler Science que l'ensemble des recettes qui réussissent toujours. Tout le reste est littérature. Moralités Gallimard Paul Verlaine Metz 1844-Paris 1896 Que ton vers soit la bonne aventure Éparse au vent crispé du matin Qui va fleurant la menthe et le thym… Et tout le reste est littérature. Jadis et naguère, Art poétique Messein Georg Brandes Copenhague 1842-Copenhague 1927 Le fait qu'une littérature ne mette rien en discussion signifie qu'elle est en train de perdre toute signification. Principaux courants de la littérature du XIXe siècle Jalmari Finne 1874-1938 Notre littérature est comme une poule, elle pond sans cesse. Et les œufs se ressemblent terriblement. Jeune Finlande Franz Kafka Prague 1883-sanatorium de Kierling, près de Vienne, 1924 Tout ce qui n'est pas littérature m'ennuie, et je le hais. Alles, was nicht Literatur ist, langweilt mich und ich hasse es. Journal, 21 août 1913 Ezra Loomis Pound Hailey, Idaho, 1885-Venise 1972 La grande littérature est simplement du langage chargé de sens au plus haut degré possible. Great literature is simply language charged with meaning to the utmost possible degree. How to Read, I, 4 Oscar Fingal O'Flahertie Wills Wilde Dublin 1854-Paris 1900 La différence entre littérature et journalisme, c'est que le journalisme est illisible et que la littérature n'est pas lue. The difference between literature and journalism is that journalism is unreadable, and literature is not read. The Critic as an Artist ● littérature (expressions) nom féminin (latin litteratura, de littera, lettre) De la littérature, se dit d'un écrit ou d'un discours superficiel, empreint d'artifice, souvent peu sincère : Tout ce que tu dis, c'est de la littérature. Littérature orale, ensemble des légendes, des récits transmis par la tradition.
littérature
n. f.
d1./d OEuvres réalisées par les moyens du langage, orales ou écrites, considérées tant au point de vue formel et esthétique qu'idéologique et culturel. Littérature orale: V. encycl ci-après.
d2./d Ensemble des oeuvres littéraires d'un pays, d'une époque. La littérature française du XIXe s.
d3./d étude des oeuvres littéraires. Cours de littérature.
d4./d Ensemble des textes qui traitent d'un sujet. La littérature médicale.
d5./d Art d'écrire.
— Carrière d'écrivain. Se lancer dans la littérature.
d6./d Fam., péjor. Paroles brillantes mais sans rapport avec la réalité, ou inefficaces. Tout cela n'est que littérature.
Encycl. Littérature orale. - La littérature orale est l'ensemble des productions verbales qui se distinguent de la parole ordinaire par leur qualité formelle, la puissance communicative de leur contenu, leurs fonctions dans la société. Elle existe ou a existé chez tous les peuples et demeure une réalité vivante dans de nombreuses sociétés traditionnelles d'Afrique, d'Asie, d'Amérique et d'Océanie, mais elle a presque disparu d'Europe, sauf à l'est. Les formes orales ont longtemps coexisté avec l'écriture dans les grandes civilisations orientales. La mise en forme codifiée du fonds culturel est déterminée par des genres et obéit à des règles fixant la structure, le mode d'énonciation et aussi les circonstances dans lesquelles un genre donné peut être actualisé (temps, lieu, auditoire, etc.). Aucune typologie n'est absolue. On peut distinguer les genres narratifs en prose (mythe, conte, légende, récit historique, genres oratoires) et les genres poétiques, caractérisés par des énoncés rythmés, un mode vocal particulier, des recherches de sonorités et l'association fréquente avec la musique (épopée, poésie panégyrique, incantation, prière, devise, poésie lyrique). Le proverbe et la devinette, qui utilisent certains procédés poétiques, constituent une catégorie intermédiaire. Les agents transmetteurs sont très divers. Les textes à valeur religieuse (mythe, prière, devise) ne peuvent être dits que par des dignitaires ou par certains vieillards. D'autres sont réservés à des individus hautement spécialisés, par ex. les bardes pour les épopées, genre noble très développé en Asie du Sud-Est et récemment découvert en Afrique subsaharienne. Les contes constituent un genre plus populaire; il existe des répertoires spécialisés (hommes, femmes, castes d'artisans, etc.). La littérature orale sert au divertissement, dans les veillées où l'on conte et chante, dans les fêtes, lors du passage de bardes, griots ou conteurs itinérants. Sa fonction esthétique se manifeste dans les recherches stylistiques, le talent dramatique du narrateur, la puissance envoûtante du verbe poétique. Sa fonction sociale se mesure au respect des circonstances d'énonciation, lequel assure son efficacité. C'est par elle que s'exerce la satire, que se transmet la morale sociale. Conservatoire et véhicule des modèles culturels, elle est utilisée dans l'enseignement traditionnel (fonction pédagogique) et jouit d'une haute fonction symbolique, car à travers les images et les symboles s'exprime la vision du monde propre au groupe.
⇒LITTÉRATURE, subst. fém.
I. — Vieilli
A. — Connaissance des lettres, culture générale. Ton père me devina (...) c'était un homme sans grande éducation, sans littérature (...) mais qui avait le coup d'œil juste (LABICHE, Cigale chez Fourmis, 1876, 1, p. 194).
B. — Corps des gens de lettres. Ah! mais il faut que je vous dise que la littérature voyant ma canne, mes boutons travaillés, a décidé que j'étais le Benjamin d'une vieille anglaise (BALZAC, Lettres Étr., 1834, p. 211).
II. A. — Usage esthétique du langage écrit. La littérature; histoire et littérature; langue et littérature; théorie de la littérature; doctrines, tendances de la littérature. C'est ce que Flaubert exprimait sous cette forme paradoxale : « les bourgeois ont la haine de la littérature ». La preuve que ce n'est pas « l'art » qui a séduit le public dans Madame Bovary, c'est qu'il n'a jamais pu lire Salammbô (LEMAITRE, Contemp., 1885, p. 82). Jamais le problème de la littérature n'avait été, jusqu'à Edgar Poe (...), abordé au moyen d'une analyse où la logique et la mécanique des effets étaient délibérément employées (VALÉRY, Variété II, 1929, p. 143) :
• 1. J'ai écrit (...) ceci qui me paraît d'une évidente vérité : « C'est avec les beaux sentiments qu'on fait de la mauvaise littérature. » (...) J'aurais aussi bien pu écrire que les meilleures intentions font souvent les pires œuvres d'art et que l'artiste risque de dégrader son art à le vouloir édifiant.
GIDE, Journal, 1940, p. 52.
B. — Ensemble des productions intellectuelles qui se lisent, qui s'écoutent.
1. [La production est définie par sa matière]
a) ) Littérature + adj.
— Littérature + adj. précisant l'orig. géogr. des œuvres. Littérature anglaise, chinoise, française. On sait que la littérature britannique pousse la chasteté jusqu'à la pruderie (BAUDEL., Paradis artif., 1860, p. 402). Boylesve était radicalement clos à tout ce qui était étranger : (...) il avait pour les littératures étrangères en général une antipathie si involontaire qu'elle en prend comme une valeur de trait éthique (DU BOS, Journal, 1926, p. 134).
— Littérature + adj. précisant une période. Littérature ancienne, médiévale. Après le collège, on dévore la littérature contemporaine (LEMAITRE, Contemp., 1885, p. 289).
— Littérature + adj. ou compl. de nom précisant un genre d'œuvres. Littérature décadente, dramatique, enfantine, engagée, érotique, légère, marginale, pieuse, populaire; littérature de gare, de masse. Les procédés inhérents à la littérature d'observation (BOURGET, Nouv. Essais psychol., 1885, p. 213). Les jours de la littérature psychologique à affabulation romanesque sont comptés (BRETON, Nadja, 1928, p. 17).
) P. méton., péj. [P. oppos. à la réalité] Ce qui possède un caractère peu authentique, artificiel, superficiel. Et tout le reste est littérature (VERLAINE, Œuvres poét. compl., Jadis, Paris, Gallimard, 1962 [1884], p. 327). Elle [Mme de Sévigné] voyait un peu de littérature dans ce désespoir d'être séparée de cette ennuyeuse Mme de Grignan (PROUST, J. filles en fleurs, 1918, p. 762).
— En emploi interjectif :
• 2. MME ARROW : Quand il ne rançonne pas, il tue. COURPIÈRE : Littérature!
MME ARROW : Réalité!... Je le sais, peut-être!
HERMANT, M. de Courpière, 1907, III, 3, p. 23.
b) Bibliographie d'un sujet. P. ext. Ensemble d'ouvrages produits dans une matière, de publications éditées par un groupe social. Littérature médicale, scientifique. Caroline (...) lut d'abord, avec la profonde indifférence qu'on a pour la littérature municipale, ces premières lignes : « Arrêt de la cour d'assises de Poitiers... » (GOZLAN, Notaire, 1836, p. 127). L'efficacité du sérum antitétanique, pour ceux qui étaient au courant de la littérature de la question, paraissait un fait bien établi (CAMUS, GOURNAY ds Nouv. Traité Méd. fasc. 2 1928, p. 798).
2. [La production se définit par son moyen d'expression]
a) Littérature orale. Catégorie d'œuvres d'expression orale non écrite. Jusqu'au XIXe siècle les peuples balkaniques ont vécu presque exclusivement sur leur fonds de littératures orales : contes surnaturels en prose et chants populaires (Arts et litt., 1936, p. 52-4) :
• 3. ... on s'est souvent demandé pourquoi les mythes, et plus généralement la littérature orale, font un si fréquent usage de la duplication, triplication ou quadruplication d'une même séquence.
LÉVI-STRAUSS, Anthropol. struct., 1958, p. 254.
b) MUS. Ensemble d'œuvres musicales relatives à un instrument. Les arpèges sont très usités dans la littérature du piano et dans la musique de chambre (KOECHLIN, Harm., t. 2, 1930, p. 102).
C. — Travail qui aboutit à cette production :
• 4. Pourquoi ne travaillez-vous pas davantage? Le seul moyen de supporter l'existence, c'est de s'étourdir dans la littérature comme dans une orgie perpétuelle. Le vin de l'art cause une longue ivresse et il est inépuisable. C'est de penser à soi qui rend malheureux.
FLAUB., Corresp., 1858, p. 277.
— P. méton. Carrière des lettres. Je sais que la littérature ne nourrit pas son homme. Par bonheur, je n'ai pas très faim (RENARD, Journal, 1902, p. 724). Tu seras éternellement le petit jeune homme qu'il a lancé dans la littérature et qui lui doit tout (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 141).
D. — Fonctionnement du langage qui constitue cette production. Synon. littérarité :
• 5. Ce que l'école admire dans l'écriture d'un Maupassant ou d'un Daudet, c'est un signe littéraire enfin détaché de son contenu, posant sans ambiguïté la Littérature comme une catégorie sans aucun rapport avec d'autres langages, et instituant par là une intelligibilité idéale des choses.
R. BARTHES, Le Degré zéro de l'écriture, Paris, éd. du Seuil, 1972 [1953], p. 50.
E. — Ensemble d'études sur cette production. Cours, professeur de littérature; histoire de la littérature. Le nombre des œuvres littéraires qui survivent autrement que dans les manuels de littérature (...), qui influencent encore les destinées individuelles sont extrêmement rares (MAURIAC, Journal 2, 1937, p. 161). Des travaux de littérature comparée, des études sur le « préromantisme français » et sur les « sources occultes » communes aux deux pays [l'Allemagne et la France] (BÉGUIN, Âme romant., 1939, p. 327) :
• 6. J'ai bien retrouvé sur sa figure, surtout quand il parle de M. Mairobert, l'âcreté qui fait la seule vie des articles de littérature compris dans le pamphlet rouge.
STENDHAL, L. Leuwen, t. 3, 1835, p. 112.
REM. 1. Littéraillerie, subst. fém., hapax. En voilà bien assez sur ma littéraillerie et sur tout ce qui n'est pas plaisant (BALZAC, Lettres Étr., 1834, p. 162). 2. Littératuriser, verbe intrans., hapax. En le flattant sur la littérature, on se rend intime (parce qu'il littératurise avec vous, que vous lui fournissez la jouissance d'amour-propre dont il a besoin) (STENDHAL, Journal, 1810 p. 341). 3. Littératurisme, subst. masc. Caractère de ce qui appartient à la littérature. Ont peut affirmer que le littératurisme, si l'on appelle ainsi la volonté de la littérature de relever de lois propres et de repousser celles de l'intellectualité, n'eut jamais d'opposants plus effectifs (...) que les classiques français du grand siècle (BENDA, Fr. byz., 1945, p. 170). 4. Littératuriste, adj., hapax. Aujourd'hui, MM. Alexandre Dumas et Victor Hugo, qui savent mieux que personne à quoi s'en tenir sur la valeur de la spécialité littératuriste, (...) s'en viennent (...) protester contre toute espèce d'organisation (PROUDHON, Confess. Révol., 1849, p. 377). 5. Littératurite, subst. fém., hapax. Ces commentaires sont des types parfaits de « littératurite » à propos d'art (BREMOND, Poés. pure, 1926, p. 133).
Prononc. et Orth. : []. [lit(t)-] ds BARBEAU-RODHE 1930. V. littéraire. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1121-34 « ce qui est écrit, le sens littéral (d'un texte) » (PHILIPPE DE THAON, Bestiaire, éd. E. Walberg, 955), seulement au XIIe s. (v. T.-L. et FEW t. 5, p. 379). B. 1. 1495 « érudition, connaissance (acquise dans l'étude des livres) » (J. DE VIGNAY, Miroir hist. ds DG); ca 1500 (PHILIPPE DE COMMYNES, Mémoires, éd. J. Calmette, t. 2, p. 340); 2. 1680 « le corps des gens de lettres » (RICH.); 3. 1736-40 « ensemble des productions littéraires » (F. GRANET, Réflexions sur les ouvrages de littérature); 4. 1758 « ensemble de ce qui a été écrit sur un sujet donné » (DUHAMEL DU MONCEAU, La physique des arbres, Dissertation sur les méthodes de bot., t. 1, p. xlvij); 5. 1884 emploi péj. (VERLAINE, Jadis et naguère, p. 207 : ... Et tout le reste est littérature). Empr. au latin litteratura (de litterae « lettres ») « écriture », « ce qui concerne l'étude des lettres » et « production littéraire »; l'a. m. fr. avait lettreüre « érudition » issu du lat. litteratura et attesté du XIIe au XIVe s. (v. T.-L. et FEW, loc. cit.). Fréq. abs. littér. : 5 340. Fréq. rel. littér. : XIXs. : a) 5 725, b) 6 152; XXe s. : a) 10 898, b) 7 972.
DÉR. Littératurer, verbe intrans. Faire de la littérature. Tâchez d'être seule dimanche prochain dans l'après-midi, afin que nous ayons nos aises pour littératurer à loisir. Il y a moyen, je crois, en huit jours, de faire de ce livre un chef-d'œuvre ou quelque chose d'approchant (FLAUB., Corresp., 1861, p. 420). Emploi adj. L'Existentialisme, au théâtre et en philosophie, Sartre et tous ces jeunes littérateurs littératurants qui se trémoussent dans les caves de Saint-Germain-des-Prés (CENDRARS, Lotiss. ciel, 1949, p. 302). — [], (il) littérature []. — 1re attest. 1861 (FLAUB., loc. cit.); de littérature, dés. -er.
BBG. — ESCARPIT (R.). La Déf. du terme Littérature. In : Congrès de l'Assoc. Internat. de Litt. comp. Bordeaux, 1961, pp. 1-7; In : Congrès de l'Assoc. Internat. de Litt. comp. 3, 1962. Utrecht, 1965, pp. 77-89. - LÉONARD (A.). La Crise du concept de littérature en France au XXe s. Paris, 1974, 270 p.
littérature [liteʀatyʀ] n. f.
ÉTYM. V. 1120, « écriture », « sens littéral d'un texte »; lat. litteratura « écriture », puis « érudition », de litteræ « les lettres », plur. de littera « lettre ».
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1 Littérature; ce mot est un de ces termes vagues si fréquents dans toutes les langues (…) tels sont tous les termes généraux, dont l'acception précise n'est déterminée en aucune langue que par les objets auxquels on les applique.
Voltaire, Dict. philosophique, Littérature.
———
1 (1432). Vx. Ensemble des connaissances, culture générale, en particulier en ce qui concerne les lettres (IV.). || Des gens d'un bel (cit. 37) esprit et d'une agréable littérature (La Bruyère). || Une vaste et profonde littérature (→ Archives, cit. 2, La Bruyère). || « Un homme sans grande éducation, sans littérature » (Labiche, 1876, in T. L. F.).
2 La littérature (…) désigne dans toute l'Europe une connaissance des ouvrages de goût, une teinture d'histoire, de poésie, d'éloquence, de critique.
Voltaire, Dict. philosophique, Littérature.
2 (1680). Vx. « Le corps des gens de lettres » (Richelet). || Les serpents de la littérature (→ Folliculaire, cit. 1). || Toute la basse littérature est aux ordres des hypocrites (cit. 12, d'Alembert).
3 (1758; all. Literatur). Bibliographie d'une question, ensemble des ouvrages publiés sur cette question. || Compiler toute une littérature. || Il existe sur ce sujet une abondante littérature. — La littérature médicale (→ Hypnotisme, cit. 3).
♦ Mus. Ensemble des œuvres écrites (pour un instrument, dans une certaine forme). || La littérature de la flûte est très variée. || La littérature pour piano du XXe siècle.
———
II (1764). Les œuvres écrites, dans la mesure où elles portent la marque de préoccupations esthétiques reconnues pour telles dans le milieu social où elles circulent; les connaissances, les activités qui s'y rapportent.
3 (…) le mot ouvrage de littérature ne convient point à un livre qui enseigne l'architecture ou la musique, les fortifications, la castramétation, etc.; c'est un ouvrage technique (…)
Voltaire, Dict. philosophique, Littérature.
4 (…) l'ensemble des productions qu'on appelait autrefois les « ouvrages de l'esprit » et qu'on désigne maintenant du nom de « littérature ».
Renan, Questions contemporaines, Œuvres, t. I, p. 182.
5 La littérature se propose d'abord comme une voie de développement de nos puissances d'invention et d'excitation, dans la plus grande liberté, puisqu'elle a pour substance et pour agent la parole, déliée de tout son poids d'utilité immédiate (…)
Valéry, Variété, V, p. 81.
6 Les techniciens sortent de la littérature au fur et à mesure de l'élévation de leur spécialité à la dignité de science. Euclide et Archimède figurent dans les Histoires de la Littérature française au XIXe siècle. La purification est maintenant accomplie.
6.1 Cependant, la littérature n'est pas un système symbolique « primaire » (comme la peinture, par exemple, peut l'être, ou comme l'est, en un sens, la langue) mais « secondaire » : elle utilise comme matière première un système déjà existant, le langage. Cette différence entre système linguistique et système littéraire ne se laisse pas observer uniformément dans toute instance de littérature : elle est à son minimum dans les écrits de type « lyrique » ou sapientiel, où les phrases du texte s'organisent directement entre elles; à son maximum dans le texte de fiction, où les actions et les personnages évoqués forment à leur tour une configuration, relativement indépendante des phrases concrètes qui nous la font connaître.
Tzvetan Todorov, Poétique, in Qu'est-ce que le structuralisme ?, p. 30-31.
1 (1752). L'ensemble des œuvres, des textes littéraires. || Les grandes œuvres, les livres célèbres, les plus belles pages de la littérature. || Littérature universelle. || Le classicisme (cit. 4) en littérature. || Les créateurs (cit. 6) des œuvres d'art et de littérature. || L'évolution des genres dans la littérature. ⇒ Genre (II., 3.). || Les types, les personnages caractéristiques de la littérature. || La peinture des mœurs, des caractères dans la littérature. || « De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales », ouvrage de Mme de Staël. || Théorie, science de la littérature. ⇒ Poétique. || Caractère spécifique de la littérature. ⇒ Littérarité.
7 (…) poèmes, drames, romans, opéras, chansons, histoires, toute la littérature lui est échue (à Luchet) en patrimoine, ou par droit de conquête.
Rivarol, Littérature, Petit almanach de nos grands hommes, p. 73.
8 La littérature des peuples commence par les fables et finit par les romans.
Joseph Joubert, Pensées, XXIII, CCVII.
9 La littérature est la vie prenant conscience d'elle-même lorsque dans l'âme d'un homme de génie elle rejoint sa plénitude d'expression (…) la littérature est le lieu de rencontre de deux âmes (…) la littérature est la pensée accédant à la beauté dans la lumière (…)
Ch. du Bos, Qu'est-ce que la littérature ?, IV, La littérature et le verbe, p. 88-89.
9.1 Tout en écoutant, Jean percevait confusément que ce qu'il y a de réel dans la littérature, c'est le résultat d'un travail tout spirituel, quelque matérielle que puisse en être l'occasion (une promenade, une nuit d'amour, des drames sociaux), une sorte de découverte dans l'ordre spirituel ou sentimental que l'esprit fait, de sorte que la valeur de la littérature n'est nullement dans la matière déroulée devant l'écrivain, mais dans la nature du travail que son esprit opère sur elle.
Proust, Jean Santeuil, Pl., p. 481. N. B. Cet exemple illustre aussi le sens 2 ci-dessous.
♦ La littérature d'un pays, d'une époque. || La littérature française (cit. 18), latine, scandinave, chinoise, japonaise, russe… ⇒ Langue (cit. 43). || La littérature soviétique de langue arménienne. || La littérature africaine, antillaise, maghrébine, canadienne de langue française. || La littérature suisse de langue allemande. || Attirance (cit. 3) vers les littératures étrangères. — La littérature moderne. || La littérature actuelle (→ Expression, cit. 42). || La littérature de la Renaissance, de l'époque classique.
10 La littérature est l'expression de la société, comme la parole est l'expression de l'homme.
11 La littérature contribue à faire la langue et la langue est l'instrument premier de toute littérature (…)
Il est impossible d'imaginer une grande civilisation sans une grande littérature. Le monde hébraïque a produit la Bible et toute l'humanité vit encore sur ce message.
G. Duhamel, Refuges de la lecture, VIII, p. 242 et 274.
12 La nation française est plus hétérogène qu'aucune autre nation d'Europe; c'est en vérité une agglomération internationale de peuples. Ainsi s'expliquent la tournure internationale de l'esprit français et le caractère universel de la littérature française.
Ch. Seignobos, Hist. sincère de la nation franç., p. 4.
♦ Doctrines, écoles, tendances de la littérature. ⇒ Littéraire. || Littérature classique, romantique, réaliste, impressionniste, symboliste, naturaliste, surréaliste. || Littérature précieuse, burlesque, fantastique… || Littérature policière. || Littérature d'anticipation (3.).
13 Il n'y a donc dans l'Europe littéraire que deux grandes divisions très marquées : la littérature imitée des anciens, et celle qui doit sa naissance à l'esprit du moyen âge; la littérature qui, dans son origine, a reçu du paganisme sa couleur et son charme, et la littérature dont l'impulsion et le développement appartiennent à une religion essentiellement spiritualiste.
Mme de Staël, De l'Allemagne, Observations générales, p. 11.
14 Toute la littérature réaliste et naturaliste, en France, est, sous son pessimisme apparent, un chant de louange à la civilisation rédemptrice.
G. Duhamel, Scènes de la vie future, Préface.
♦ Bonne et mauvaise littérature (→ Illisible, cit. 4). || Littérature légère, érotique, pornographique, scatologique. || Littérature sérieuse, pieuse, édifiante, moralisante. || Les bons sentiments et la littérature. || La grande littérature (→ Effort, cit. 12). || Les feuilletons de la littérature populaire. || La littérature engagée (cit. 52, Sartre). || Littérature d'évasion. || Littérature décadente. || Littérature de masse. || Littératures marginales. ⇒ Paralittérature; non-littérature. Péj. || C'est de la sous-littérature.
15 J'aimais (…) la littérature démodée, latin d'église, livres érotiques sans orthographe; romans de nos aïeules, contes de fées, petits livres de l'enfance, opéras vieux, refrains niais, rythmes naïfs.
Rimbaud, Une saison en enfer, « Délires », II.
16 D'où vient que l'on ne peut guère plus faire de bonne littérature avec de bons sentiments, ni mettre en poésie la vertu.
J. Paulhan, les Fleurs de Tarbes, p. 34.
17 (L'art du XIXe siècle) n'enseigne rien, il ne reflète aucune idéologie, il se défend surtout d'être moralisateur : bien avant que Gide l'ait écrit, Flaubert, Gautier, les Goncourt, Renard, Maupassant, ont dit à leur manière que c'est avec les bons sentiments qu'on fait la mauvaise littérature.
Sartre, Situations II, p. 171.
18 La difficulté, penserez-vous, est précisément de distinguer entre la littérature saine, tonique, nourrissante, et la littérature vénéneuse ou débilitante.
M. Aymé, le Confort intellectuel, II.
19 (…) ces ouvrages « à lire dans le train » (…) ce qu'on appelle, d'une façon assez péjorative, la littérature des gares ?
♦ Iron. Ensemble de textes (non littéraires). || Le chef de service nous inonde de sa littérature. ⇒ Prose (I., 3., fam.).
2 (Av. 1841). Le travail, l'art de l'écrivain. || La littérature n'est pas seulement un jeu de l'esprit (cit. 51), un agréable passe-temps (→ Amateur, cit. 6). || Faire de la littérature : écrire littérairement. || Routines, clichés, nouveauté en littérature (→ Innocent, cit. 12). || La littérature commence où finit la rhétorique.
20 (…) la littérature n'est en vérité qu'une spéculation, un développement de certaines des propriétés du langage; de celles de ces propriétés qui se trouvent le plus vivantes et agissantes chez les peuples primitifs. Plus la forme est belle, plus elle se sent des origines de la conscience et de l'expression; plus elle est savante et plus elle s'efforce de retrouver, par une sorte de synthèse, la plénitude, l'indivision de la parole encore neuve et dans son état créateur.
Valéry, Variété IV, p. 150-151.
♦ Le métier d'homme de lettres. || Faire carrière en littérature. || Arriver par la littérature (→ Arriviste, cit. 1). — Par métonymie. || Sous l'Empire, la littérature fut libre et la science servile (→ Honneur, cit. 55, Chateaubriand). ⇒ Littéraire (4.).
3 Ce qu'on ne trouve que dans les œuvres littéraires (par oppos. à la réalité). ⇒ Littéraire (3.). || La vie et la littérature. || Il y a dans ce dialogue plus de littérature que de vérité. || Être intoxiqué (cit. 3) de littérature. — Fig. Ce qui est artificiel, peu sincère. — Allus. littéraire : ☑
21 De la musique avant toute chose (…)
Que ton vers soit la bonne aventure
Éparse au vent crispé du matin
Qui va fleurant la menthe et le thym…
Et tout le reste est littérature.
Verlaine, Jadis et Naguère, « Art poétique ».
22 (…) une société de malotrus et de mufles appelle sans doute littérature toute expression élevée d'une âme noble et délicate (…)
G. Duhamel, Chronique des Pasquier, III, XV (→ Abjection, cit. 3).
23 Mon regard est creux, le regard de Dieu le traverse, de part en part. « Je fais de la littérature » pensa-t-il brusquement.
Sartre, le Sursis, p. 157.
4 (1863). Ensemble des connaissances concernant les œuvres littéraires, leurs auteurs. ⇒ Critique. || Cours (cit. 25) de littérature. ⇒ Belles-lettres (vieilli). || Manuel, dictionnaire de littérature. || Histoire de la littérature anglaise, de Taine (1864). || Devoir, composition de littérature. ⇒ Dissertation. — (1806, in D. D. L.). || Littérature comparée. ⇒ Comparatisme.
♦ Livre, manuel d'histoire de la littérature. || La littérature de Lanson.
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III Usage esthétique du langage, même non écrit. || La littérature grecque a été essentiellement orale jusqu'au IVe siècle avant J.-C. || Une grande part de la littérature médiévale est orale. — Spécialt. || Littérature orale, ensemble de discours littéraires qui se conservent et se transmettent oralement, même chez les peuples disposant de l'écriture. || Littérature orale populaire.
24 Littérature orale. La matière est immense et difficile à délimiter. Elle intéresse le folklore, mais elle ressortit aussi à l'ethnologie et à la sociologie. Les littératures orales, en effet, ne sont pas le privilège des sociétés archaïques ou primitives; elles sont communes aux sociétés européennes et orientales (…) Tout ce qui a été dit, et ensuite retenu par la mémoire collective, appartient à la littérature orale. Car tous ces textes racontent, à leur manière, une histoire.
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Encyclopédie Universelle. 2012.