mol → 1. mou mol mole [ mɔl ] n. f.
• 1903; de l'all., de Molekül « molécule »
♦ Métrol. Unité de quantité de matière (symb.mol) équivalant à la quantité de matière d'un système contenant autant d'entités élémentaires qu'il y a d'atomes dans 0,012 kg de carbone 12 (⇒ molalité).
⊗ HOM. Molle (1. mou).
● mol Symbole de la mole.
Mol, molle
adj. et n. V. mou.
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Mol
com. de Belgique (prov. d'Anvers), dans la Campine; 29 800 hab. Centrale nucléaire.
⇒MOU, MOL, MOLLE, adj. et subst. masc.
I. —Adjectif
A. — [En parlant d'une chose]
1. [Par propriété naturelle ou transformation]
a) Qui enfonce au toucher, qui est malléable. Anton. dur. Il va à tâtons chercher la molle argile jusque sous le lit des rivières (BERN. DE ST-P., Harm. nat., 1814, p.227):
• 1. La terre, où l'homme errait sous la tente, inquiet
Des empreintes de pieds de géants qu'il voyait,
Était encor mouillée et molle du déluge.
HUGO, Légende, t.1, 1859, p.83.
SYNT. Boue, bouillie, cire, fange, glaise, graisse, neige, pâte, terre, vase molle; corps, fruit, sable, sol mou.
— Spécialement
♦ANATOMIE
Chancre mou.
Parties molles. Ensemble des chairs, des viscères (par opposition aux os et aux cartilages). Les cicatrices qu'ils obtiennent à la suite des plaies ou entamures des parties molles, sont presque toutes défectueuses (Voy. La Pérouse, t.4, 1797, p.58). Au fig. Toutes les oeuvres meurent; mais celles qui avaient un squelette durent bien plus par ce reste que les autres qui n'étaient qu'en parties molles (VALÉRY, Tel quel II, 1943, p.159).
♦ART CULIN.
Caramel mou (p. oppos. au caramel dur). Le ministre prit dans un tiroir de son bureau une boîte de caramels mous, et la tendit à la ronde (MALRAUX, Cond. hum., 1933, p.421).
Fromage mou. Fromage (demi-sel, petit-suisse, fromage blanc etc.) n'ayant subi que la fermentation lactique et qui est consommé frais. La servante apporta pour dessert le fameux fromage mou de la Touraine et du Berry, fait avec du lait de chèvre (BALZAC, Rabouill., 1842, p.440).
Fromage à pâte molle. Fromage (camembert, brie, coulommiers, munster, livarot, pont-l'évêque, etc.) ayant subi d'autres fermentations, indépendamment de la fermentation lactique, et dont la pâte n'est ni cuite ni pressée (d'apr. MONT. 1967).
♦TECHNOLOGIE
Bronze mou. Bronze malléable obtenu par chauffage au rouge et trempe dans l'eau. Marteau percuteur en bronze mou (Catal. instrum. chir. [Collin], 1935, p.341).
Savon mou. Savon noir. Normalement on prépare la lessive en faisant dissoudre par litre d'eau 10 à 20 grammes de sel Solvay et 5 à 10 grammes de savon mou (Lar. mén. 1926, p.194).
— [Antéposé, il a souvent une valeur positive] Qui est d'un confort agréable; doux, moelleux. Anton. raide. Son nom [Grenade] attire l'univers, mais elle n'est qu'une tente dans une oasis, et, sous un parasol délicieusement brodé, un des plus mols oreillers du monde (BARRÈS, Sang, 1893, p.54):
• 2. J'aime nonchalamment, sur la molle ottomane,
M'étendre, demi-nu, quand darde la chaleur;
Prolonger jusqu'au soir la sieste favorite;
Fumer le calumet, l'odorant cigarite,
Et d'un thé délicat égayer ma douleur.
BOREL, Rhapsodies, 1832, p.36.
— [Postposé, il a souvent une valeur péj.] Mollasse, flasque. Quoique son teint blafard et ses chairs molles pussent faire croire à une constitution maladive, Sibilet était robuste (BALZAC, Paysans, 1844, p.85). On a l'œil hagard et c'est parce que le pain est mou (MONTHERL., Olymp., 1924, p.244).
b) Qui plie facilement; souple. Éros m'a frappé d'une tige molle D'œillets odorants récemment cueillis (LECONTE DE LISLE, Poèmes ant., 1874, p.166).
— [En parlant d'un vêtement ou d'une partie d'un vêtement]
♦Chapeau, feutre mou. Le maire sortit à son tour, prit son chapeau, un grand chapeau mou, de feutre gris, à bords très larges (MAUPASS., Contes et nouv., t.2, Pte Roque, 1885, p.1022).
♦Col mou. Un col mou blanc, un noeud papillon en toile blanche, noué avec une négligence étudiée (MONTHERL., Célibataires, 1934, p.769).
♦[Antéposé, il a souvent une valeur positive] Léger, souple. Sa large tunique blanche se courbait en molles draperies, jusqu'à ses pieds, suivant les inflexions de sa taille (FLAUB., Salammbô, t.1, 1863, p.88). Son bras qui apparaissait frêle, nerveux et duveté de blond à travers la transparence de la molle étoffe rouge (BOURGET, Cosmopolis, 1893, p.141).
♦[Postposé, il a souvent une valeur péj.] Avachi, sans tenue. Leurs vêtements pendaient en plis mous, las comme eux, le long de leurs corps (R. BAZIN, Blé, 1907, p.339). Il [Mussolini] était vêtu (...) d'une façon plutôt négligée: une veste quelconque, une chemise molle, une cravate noire assez lâche (THARAUD, Passant Éthiopie, 1936, p.226).
c) [En parlant d'une corde, d'un lien, d'une chaîne, etc. (v. supra A 1)] Lâche, détendu. Anton. tendu. Les guides molles battaient sur sa croupe en s'y trempant d'écume (FLAUB., Mme Bovary, t.1, 1857, p.62).
d) [En parlant d'un bois, d'une roche] Tendre, que l'on entame facilement. Anton. dense, résistant. Un de ces hommes qui descendent dans les marnières pour extraire cette sorte de pierre molle, blanche et fondante, qu'on sème sur les terres (MAUPASS., Contes et nouv., t.1, Bécasses, 1885, p.208).
2. P. anal. [Marquant, antéposé, une atténuation et, postposé, une diminution]
a) [En parlant de la forme d'une chose] Qui possède des lignes douces, sans tranchant. L'enseigne rose et épinard [d'un caboulot] décorée de molles arabesques, portait cette belle raison sociale: À l'amitié (ARNOUX, Paris, 1939, p.182):
• 3. Laure remercia, partit d'un pas vif dans la direction qu'on venait de lui indiquer. Le chemin suivait les vignes, tout droit, au-dessus de la pente molle qui descendait jusqu'à la vallée.
DANIEL-ROPS, Mort, 1934, p.447.
— Par hypallage. Ces jolies épaules dont la molle blancheur flatte l'œil! (STENDHAL, L. Leuwen, t.2, 1836, p.132).
b) [En parlant de la force ou du mouvement qui anime une chose] Sans vigueur, sans ampleur. Je regardais les molles ondulations des pins faiblement agités (SAND, Lélia, 1833, p.9):
• 4. C'était sous eux le mol bercement de l'hélice, le mol balancement de l'eau, et l'air glissait à leurs visages, plein de promesses de bonheur.
RAMUZ, A. Pache, 1911, pp.216-217.
— Spécialement
♦ÉLECTRONIQUE
Tube mou. Tube mal vidé de ses ions. Lorsqu'un tube à vide devient de plus en plus mou, c'est-à-dire lorsque le degré du vide et la tension cathodique diminuent... (Le Radium, 1905, p.396).
Rayon, rayonnement mou. Rayon, rayonnement peu pénétrant dont les fréquences se rapprochent de l'ultra-violet. Anton. dur, pénétrant. Les rayons x constituent une gamme assez étendue dont les plus grandes longueurs d'onde sont appelées, dans le langage médical, rayons mous ou peu pénétrants (ROUSSY ds Nouv. Traité Méd. fasc. 2 1928, p.484).
♦MARINE
Mer molle. ,,Mer étale`` (BONN.-PARIS 1859).
Navire mou. Un navire à voiles est mou lorsqu'il a tendance à tomber sous le vent, c'est-à-dire à abattre, par opposition à ardent lorsqu'il a tendance à venir au vent (GRUSS 1952).
Vent mou. Mais, dans les trois journées suivantes, les vents sont si mous, que nous faisons à peine vingt lieues en route (DUMONT D'URVILLE, Voy. autour du monde, t.5, 1832-34, p.236).
♦MÉD. Pouls mou. Pouls faible, difficilement perceptible. Le pouls est accéléré, mou (ROGER ds Nouv. Traité Méd. fasc.2 1928, p.484).
♦PHONÉTIQUE
Consonne molle. ,,Consonne dont l'articulation est caractérisée par un relâchement des muscles de la langue, tel que la surface de contact approximatif entre la partie supérieure de la langue et le palais se trouve élargie et se prête ainsi à un écoulement diffus de l'air expiré`` (MAR. Lex. 1951).
Voyelle molle. [En slave] Voyelle qui détermine une prononciation molle [lâche] de la consonne précédente (d'apr. MAR. Lex. 1951). Signe mou. On appelle en slave (...) signe mou le caractère d'écriture qui sert à noter (...) [la] prononciation [molle de la consonne précédente] (MAR. Lex. 1933, p.121).
Palais mou.
— [En partic., en parlant de perceptions sensorielles autres que celles du toucher]
♦[En parlant d'une lumière, d'une couleur] Pâle, peu intense. Une belle nuit claire et transparente, inondée de la molle clarté de la lune (SUE, Atar-Gull, 1831, p.25):
• 5. La belle matinée d'automne! Un air transparent, un lever du jour radieusement calme, des nuages en monceaux, du nord au midi, des nuages d'un éclat, d'une couleur molle et vive, du coton d'or sur un ciel bleu. C'était beau, c'était beau!
E. DE GUÉRIN, Journal, 1839, p.294.
♦[En parlant d'un son, d'un bruit] Faible, peu sonore. Le lit craque et voilà le bruit mou des pieds nus sur les dalles (GIONO, Gd troupeau, 1931, p.29).
B. —[En parlant d'une pers.]
1. Qui manque de force, d'énergie, de résistance. Être mou, se sentir mou. J'étais un peu molle d'avoir bu trop de vin de Saumur (MIRBEAU, Journal femme ch., 1900, p.153). Se sentir un peu bête, agitée et facile, et molle comme une jeune fille qui vient de recevoir sa première lettre d'amour (COLETTE, Entrave, 1913, p.15):
• 6. Je commençais à reprendre conscience, et la désolation de grand-père, qui se reprochait de m'avoir appris la nouvelle trop brusquement, me faisait beaucoup de peine. Mais j'étais molle et sans force, je ne pouvais pas parler.
GYP, Souv. pte fille, 1928, p.79.
— P. méton.; [en parlant d'une partie du corps ou d'une manifestation du comportement] Il alla à la fenêtre avec des pas mous, essaya de l'ouvrir (E. DE GONCOURT, Faustin, 1882, p.332).
♦Main, jambe molle. Sa main, si molle, si fluide, maniait un pistolet, un fusil, avec la vigueur d'un chasseur exercé (BALZAC, Tén. affaire, 1841, p.76). Pourquoi donc mes mains sont-elles molles et mes genoux brisés? (FLAUB., Tentation, 1849, III, p.424). Elle craignait de tomber tant ses jambes étaient devenues molles (MAUPASS, Une Vie, 1883, p.264).
♦Voix molle. Voix faible, sourde, sans inflexion. Une voix molle au bout du fil, celle d'un homme qui en est à sa cinquième ou sixième heure de bridge et à son sixième petit verre pour le moins (SIMENON, Vac. Maigret, 1948, p.81).
2. Qui manque de caractère, de vigueur morale. Être mou comme plâtre. Ces hommes mous et faciles à décourager se mouraient de fatigue et de sommeil (MICHELET, Hist. romaine, t.2, 1831, p.18). Je suis un bien bon homme. Doux, doux, flasque. Mou comme une purée de citrouille (CLAUDEL, Pain dur, 1918, I, 3, p.423):
• 7. Puis, dit un autre, Manerville est un pauvre sire, sans esprit, mou comme du papier mâché, se laissant manger la laine sur le dos, incapable de quoi que ce soit.
BALZAC, Contrat mar., 1835, p.324.
♦Être mou comme une chiffe, une chique.
♦Être une pâte, une cire molle. Être malléable, sans caractère. Moi, j'étais une cire molle qui recevais toutes les empreintes (SAND, Lélia, 1833, p.59).
3. Qui dénote ou suggère la mollesse.
— [En parlant de la morphologie d'une pers. ou d'une manifestation de son comportement] Un long corps souple, un visage imberbe, des gestes mous, un air de fille (THARAUD, Dingley, 1906, p.23). La flamme d'un briquet éclaira un instant ses mains unies, son menton mou, sa bouche épaisse (MAURIAC, Noeud vip., 1932, p.177). Le visage était charnu, les traits mous, un peu bouffis, comme ceux d'un noctambule qui n'a pas dormi son content (MARTIN DU G., Thib., Été 14, 1936, p.28):
• 8. ... une jeune fille grasse et blanche, un peu caséeuse, comme les personnes qui vivent à l'ombre et parmi les laitages, ficelait lymphatiquement les paquets, interrogeait avec une malice molle le bonhomme...
ARNOUX, Chiffre, 1926, p.21.
— [En parlant du style, de l'exécution d'une oeuvre plastique, littér. ou mus.] Puis il reprit la page et se mit à lire. «C'est bien, me dit-il (...) mais un peu mou (...)» (FROMENTIN, Dominique, 1863, p.57). Il [l'orchestre du Conservatoire] a été mou, très mou (WILLY, Bains de sons, 1893, p.102).
♦Avoir une touche molle, un pinceau mou. M. Coulmann a une nature morale assez riche, et c'est assurément un homme d'esprit, mais son pinceau est mou (SAINTE-BEUVE, Nouv. lundis, t.9, 1864, p.138).
4. Qui amollit, qui invite à la mollesse.
— [En parlant d'une perception sensorielle (une musique, une odeur, etc.)] La molle odeur vineuse qui s'exhale des pressoirs et embaume l'air invite encore à ce laisser-aller familier (THEURIET, Mariage Gérard, 1875, p.194). Et voici qu'en ce moment elle ne pouvait plus se défaire d'une de ces musiques molles qui traînait en elle (NOAILLES, Nouv. espér., 1903, p.314):
• 9. À Chartres (...) une bouffée de cave très douce, alanguie par une senteur molle et presque étouffée d'huile, vous souffle au visage lorsqu'on pénètre dans les solennelles ténèbres de la forêt tiède [la cathédrale].
HUYSMANS, Cathédr., 1898, p.7.
— [En parlant d'une condition climatique chaude et humide] Temps, air mou. L'air en est si relâché, si mou, qu'on ne peut se traîner (SAND, Corresp., t.2, 1839, p.120).
— [En parlant d'un mode de vie, d'un système éducatif] Une vie de pleurs, d'extases, de rêveries, une vie molle et paresseuse (FLAUB., Smarh, 1839, p.109). Cette culture générale, tant vantée jadis, ne nous fait plus l'effet que d'une discipline molle et relâchée (DURKHEIM, Divis. trav., 1893, p.5). Une éducation trop molle et confortable développe ici les mêmes effets qu'une éducation rigide (MOUNIER, Traité caract., 1946, p.354).
— [Déterm. un nom propre de pays] La molle Asie, la molle Ionie. L'astre aimé de la molle Italie (BARBIER, Ïambes, 1840, p.172).
C. — Emploi adv.
1. Sans vigueur ni fermeté. Vous parlez mou, Monsieur Rudler, et vous parlez vulgaire (PÉGUY, Argent, 1913, p.1171). Nos acteurs jouent mou. Les leurs ont du naturel, un dynamisme inouï (MORAND, New-York, 1930, p.174).
2. Pop. et fam. Doucement, avec précaution. Vas-y mou! Vas-y mollo! Vas-y mou! Il ne faut pas que cela se voit de trop (H. BAZIN, Vipère, 1948, p.152).
II. — Subst. masc.
A. —[Désignant une chose]
1. État, caractère de ce qui est mou. Je dédaigne et je hais les hommes; et mon pied Sent le mou de la fange en marchant sur leurs nuques (HUGO, Légende, t.2, 1859, p.413). Mon regard s'accouple avec la couleur, ma main avec le dur et le mou (MERLEAU-PONTY, Phénoménol. perception, 1945, p.248).
— En partic. Tension plus ou moins grande (d'un cordage, d'un filin, d'une chaîne, etc.).
♦Avoir, prendre du mou. Être détendu, se détendre. Les chaînes [de la barre du gouvernail] qui s'enroulent sur les tourteaux à empreintes prennent du mou au bout d'un certain temps (CRONEAU, Constr. nav. guerre, t.2, 1892, p.398). La transmission par chaîne sera bonne s'il y a du mou dans la chaîne (CHAMPLY, Nouv. encyclop. prat., t.6, 1927, p.195).
♦Donner, lâcher, laisser du mou. Détendre. L'ensemble des fils et des cordages [d'une antenne de T.S.F.] ne doit pas être trop tendu: il faut laisser un peu de mou, afin d'éviter la rupture en cas de retrait (COUSTET, T.S.F. prat., 1924, p.47):
• 10. ... de mon côté, je tirais de mon mieux, m'arc-boutant, me raidissant sur les pieds, écrasant les ripatons du Bulgare qui gueulait, lui disant: — Donne du mou, sacré diable!
CENDRARS, Bourlinguer, 1948, p.174.
♦Au fig. L'espace et le temps ne nous contraignent pas tyranniquement, nous concèdent du mou et des marges: rien n'interrompt notre carrière vagabonde, confuse (ARNOUX, Roy. ombres, 1954, p.23).
2. Chose molle, partie molle d'une chose.
a) Rare. L'été, dit-il, c'est du poison. Le soleil, le chaud, le mou des arbres de la terre, ça pourrit. Mais l'hiver... (GIONO, Eau vive, 1943, p.109).
b) Poumon des animaux de boucherie vendu souvent comme viande de moindre qualité pour l'alimentation des chats. Va chercher du mou au petit chat, dit Gérard (CHAMPFL., Avent. Mlle Mariette, 1853, p.75). Il demeurait en extase, en face des grands mous pendus aux crocs de la criée (ZOLA, Ventre Paris, 1873, p.776):
• 11. Quand je rentrai, après trois heures de queue et de hurlements devant les cuisines, et que tous eurent vu, de leurs yeux vu, en quoi consistait au juste la distribution: cinq litres environ de bouillon liquide où nageaient trois morceaux de mou gros comme des noisettes, il y eut sur tous les visages une telle expression d'atterrement que j'en fus plus triste que de ma propre déception.
AMBRIÈRE, Gdes vac., 1946, p.39.
c) Pop. Partie charnue du corps, le corps dans son ensemble.
♦Rentrer dans le mou (de qqn). Attaquer (quelqu'un) sans ménagement. Synon. rentrer dans le chou (v. ce mot D), dans le lard (de qqn) (v. lard B 2). (Dict. XXe s.).
♦Se magner le mou. Se dépêcher. Synon. se magner le train (pop.). Dans son langage nous trouvons ces expressions (...) magne-toi le mou (...) expressions qui n'étaient jamais prononcées d'une façon claire, mais plutôt murmurées d'une voix un peu sourde, et comme en dedans, sans les voir (J. GENET, Querelle de Brest, III, 1947, p.209 ds CELLARD-REY 1980).
— Crâne, cervelle.
♦Bourrer le mou (à/de qqn). Tromper, abuser (quelqu'un). Oh! On la connaît! dit Gaspard. Nous bourre pas l'mou, va, fais ton service (BENJAMIN, Gaspard, 1915, p.84). Elle me reluquait indécise... Elle croyait que je lui bourrais le mou... (CÉLINE, Mort à crédit, 1936, p.493).
♦C'est du mou! Ça ne vaut rien. Il n'y a qu'une liberté, que je te dis moi, rien qu'une: c'est de voir clair d'abord, et puis ensuite d'avoir du pognon plein les poches, le reste c'est du mou!... (CÉLINE, Voyage, 1932, p.482).
B. —[Désignant une pers.]
1. Personne faible, sans énergie ni esprit de décision. Toi, tu es un mou, tu es un faible! (ACHARD, J. de la Lune, 1929, I, 6, p.12).
2. Personne modérée, hésitante, qui se rallie aux opinions les plus modérées. Mais il y a les autres, les socialistes, les radicaux, tous les types plus ou moins vaguement «de gauche», les sympathisants comme toi. Schneider a un sourire froid: «les mous.» «Disons: les tièdes» (SARTRE, Mort ds âme, 1949, p.241).
Prononc. et Orth.:[mu], []. Homon. moue, moût, mole. Style poét. masc. mol, devant voyelle ou consonne (v. supra ex. et beau, fou, etc.). Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. Adj 1. ca 1150 «de consistance non dure» terre mole (Thèbes, éd. G. Raynaud de Lage, 5015); 2. a) ca 1170 «doux, confortable» (CHRÉTIEN DE TROYES, Erec et Enide, éd. M. Roques, 693); b) 1174-76 «qui est dit avec ménagement» (GUERNES DE PONT STE MAXENCE, St Thomas, 3362 ds T.-L.); c) ca 1190 (vent) «doux, faible, non agressif» (Renard, éd. M. Roques, VIII, 7361); d) ca 1200 (la chair) «tendre, fragile» (SIMON DE FREINE, St Georges, 1126 ds T.-L.); e) 1690 (FUR.: On dit aussi du langage, qu'il est mol et affecté, quand on choisit certains mots doucereux, et quand on les prononce d'un ton languissant et effeminé); 3. a) ca 1200 «faible, sans caractère ferme, lâche» (Poème moral, 85d ds T.-L.); b) 1er quart XIIIe s. «trop souple, manquant de fermeté» (RECLUS DE MOLLIENS, Charité, 36, 7, ibid.); 4. 1587 «qui a le caractère de la mollesse ou porte à la mollesse» mols plaisirs (LANOUE, Discours politiques et militaires, p.210 ds LITTRÉ). B. Subst. 1. 1324 mol de la jambe (Arch. JJ 62, f°92 r° ds GDF.); 2. 1393 «poumon (d'un animal de boucherie)» (Ménagier, II, 126 ds T.-L.); 3. 1640 (OUDIN Curiositez, p.351: l'un veut du Mol l'autre du dur); 4. 1821 (WILL.: Mou. Portion lâche d'une manoeuvre: on dit: donner du mou; larguer, mollir, diminuer la tension à volonté). Du lat. mollis, -e «mou, souple». Fréq. abs. littér. Mou:2036. Mol:746. Fréq. rel. littér. Mou: XIXe s.: a) 1848, b) 3167; XXe s.: a) 3625, b) 3203. Mol: XIXe s.: a) 926, b) 1293; XXes.: a) 1399, b) 846. Bbg. GRUNDT (L.-O.). Ét. sur l'adj. invarié en fr. Bergen-Oslo-Tromso/, 1972, p.224, 227; pp.237-239, 247-248. — QUEM. DDL t.16.
ÉTYM. V. 1130; du lat. mollis.
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I Adj. (Toujours placé après le nom à la forme mou et avant le nom à la forme mol, quand il n'y a pas d'autre épithète).
A (Par oppos. à dur).
1 Qui cède facilement à la pression, au toucher; qui se laisse entamer sans effort. || Substance molle (→ Frai, cit. 2). || Cire (cit. 3) molle (→ Façonner, cit. 11; flexibilité, cit. 2). || Mou comme de la guimauve (cit. 2). || Fromage à pâte molle. || Fromage (cit. 3) mou (→ 1. Goutte, cit. 34). || Pain mou, biscuits mous (par oppos. à croquant). || Beurre que la chaleur rend mou. ⇒ Amollir, mollifier (vx), mollir, ramollir. — Argile molle (→ Fleuve, cit. 8). || S'embourber dans une glaise molle. ⇒ Pâteux. || Matière molle, propre à modeler. ⇒ Plastique; maniable. — Œuf à coquille molle. ⇒ Tendre (→ Fécond, cit. 4).
1 La graisse diffère du suif en ce qu'elle reste toujours molle, au lieu que le suif durcit en se refroidissant.
Buffon, Hist. nat. des animaux, la Brebis.
2 Sous ses doigts, la peluche du tapis de table était molle; ce contact lui déplut, et elle retira ses mains comme si elle les eût posées sur quelque chose de malpropre.
J. Green, Adrienne Mesurat, II, V.
♦ Anat. || Parties molles : les chairs, les viscères (par oppos. aux os. → Articulation, cit. 1). — Méd. || Chancre mou. || Tumeur molle.
2 Doux, qui s'enfonce au contact. ⇒ Moelleux, mollet. || Matelas mou (→ Artillerie, cit. 7). || Molle couche de luzerne (cit. 1). || Un mol oreiller. || « Doux et mol chevet » (→ Ignorance, cit. 9, Montaigne).
3 Sur mol duvet assis, un gras chanoine (…)
Villon, Testament, « Les contredits de Franc Gontier ».
4 (…) la lune couchée au loin sur un édredon de molles nuées.
Hugo, Notre-Dame de Paris, VII, VIII.
♦ Par ext. ⇒ Doux.
5 Cependant la molle tiédeur du bain assoupit un peu cette colère nerveuse, et Musidora laissa flotter nonchalamment ses beaux bras sur l'eau (…)
Th. Gautier, Fortunio, VI, p. 50.
♦ Doux à la vue, à l'ouïe. || Molles clartés de la lune (→ Astre, cit. 9). — Voix qui prend des inflexions (cit. 5) plus molles.
6 Elle se laissa aller au creux d'une bergère douillette, et Chéri haït le soupir mou du coussin sous le vaste séant.
Colette, la Fin de Chéri, p. 87.
4 (1316). Fig. (Spécialt). || Temps mou, humide et (généralement) chaud. || Climat mou. ⇒ Dissolvant.
7 Le matin de mars était mou et froid comme un retour d'hiver. Le ciel tombait sur les épaules et (…) des loques de brouillard traînaient encore sur les pelouses. Le temps barbouillé pourrissait les rues basses de Montmartre.
M. Aymé, le Chemin des écoliers, p. 15.
B (Par oppos. à raide, rigide).
1 Qui est dépourvu de rigidité, de raideur. ⇒ Souple. || Chien aux oreilles molles (→ Loulou, cit. 1). || Tige, taille, nuque molle. ⇒ Flexible (cit. 1). || Ressort détendu et mou. ⇒ Lâche (I., 1.). — Col mou. || Chapeau, feutre (cit. 2) mou. || De molles étoffes (→ Hélice, cit. 3). — Pente molle (→ par métaphore Endolori, cit. 2).
8 (…) la molle liane
Qui se balance (…)
Valéry, Poésies, « Album de vers anciens », Au bois dormant.
9 Des mèches molles retombaient sur le front humide, qui se renversa doucement contre l'oreiller.
J. Chardonne, les Destinées sentimentales, p. 196.
2 (En parlant de formes arrondies et un peu imprécises). || De molles ondulations de terrain (→ Îlot, cit. 2). — Spécialt. Qui a une souplesse gracieuse. || Molles saillies, molles inflexions (cit. 4) du corps féminin (→ Contour, cit. 5). || La molle rondeur de ses bras.
10 À droite et à gauche, le Loir, se déroulait, avec ses courbes molles, coulant au ras des prairies (…)
Zola, la Terre, II, VI.
♦ Fig. (En parlant d'un mouvement qui s'accomplit, se répète avec une douceur lente). || De molles oscillations (→ Frôlement, cit. 3).
3 Par oppos. à ferme (le plus souvent avec une nuance péj.). ⇒ Avachi, flasque, mollasse. || Chair (cit. 25), charnure molle (→ Livide, cit. 7). || Vous avez le ventre mou, faites donc travailler vos abdominaux. || Visage mou (→ Accentuation, cit.), aux traits mous. ⇒ Boursouflé (→ Content, cit. 10).
11 Gédéon (l'âne), devenu plus mou qu'une chiffe, alourdi de sommeil, s'endormait.
Zola, la Terre, IV, IV.
12 Le nez mou, charnu et sanguin, avait un air bonasse (…)
H. Bosco, Antonin, p. 33.
4 Par ext. Qui manque ou semble manquer de force, de vigueur (physique ou intellectuelle). || Main molle (→ Manier, cit. 7). ☑ Avoir les jambes (cit. 12) molles (→ Descendre, cit. 7), molles comme du coton. ⇒ Cotonneux; → En coton, en pâté de foie.
13 (Les chagrins) lui cassaient les jambes et les bras. Il se sentait mou à ne plus faire un mouvement, à ne pouvoir gagner son lit, mou de corps et d'esprit, écrasé et désolé.
Maupassant, Pierre et Jean, VIII.
14 (Il) aperçut (…) son compagnon, affalé sur le pont, le dos appuyé contre un rouleau de manœuvres, les jambes molles comme celles d'un pantin.
P. Mac Orlan, la Bandera, IV.
♦ Mar. || Vent mou, qui souffle faiblement. — Méd. || Pouls mou, dont les battements ne sont pas nettement perçus.
15 — Pouls rapide, évidemment. Un peu vibrant. Mais régulier.
— Oui. Et certains jours, au contraire — surtout le soir — il est petit, mou, difficile à saisir.
Martin du Gard, les Thibault, t. IX, p. 113.
C Fig.
1 a V. 1200. (Personnes). Qui manque d'énergie, de vitalité. ⇒ Abattu, amorphe, apathique, atone, avachi, cagnard, endormi (cit. 38), indolent, inerte, lymphatique, mollasse, nonchalant. || Femme molle et geignarde. ⇒ Gnan-gnan. || Élève mou, qui traîne sur ses devoirs. ⇒ Flemmard (fam.), lambin, lent.
♦ Par ext. (Actions; aspect, comportement). ⇒ Languissant. || Air (→ Effilé, cit. 7), gestes mous. || Démarche molle.
16 Cette perpétuelle mourante ne se répand pas en molles plaintes. Elle a le pessimisme sans merci des esprits lucides qui voient net et osent conclure (…)
Émile Henriot, Portraits de femmes, p. 266.
b V. 1265. (Personnes). Qui manque de vigueur morale, de caractère. ⇒ Aveuli, faible, inconsistant, lâche, veule. || Homme crédule (cit. 6) et mou. ⇒ Facile (vx); bonasse, chiffe; → Cire, pâte molle. || Il était plus mou qu'une femme, incapable d'héroïsme (cit. 7). ⇒ Femmelette. → N'avoir pas une goutte de sang, avoir du sang de navet dans les veines. || Esprits mous, cervelles molles (→ aussi Impérieux, cit. 6). — Lâcheté (cit. 1) molle.
17 On n'a jamais vu de client pareil, dit Villemot indigné, qui se retourna contre Schmucke. Vous êtes mou comme une chiffe.
Balzac, le Cousin Pons, Pl., t. VI, p. 787.
♦ (Actions). Qui manque de conviction, de ténacité. || N'opposer qu'une molle résistance. || Élever de molles protestations.
18 (…) tous mes vœux pour vous seront mols et timides (…)
Corneille, Héraclius, III, 1.
19 Il préparait ainsi le terrain, donnait par avance les raisons de l'insuccès de ses molles démarches. Car il ne se souciait pas de perdre son crédit à recommander avec chaleur ce parent incapable, et si peu reluisant.
Montherlant, les Célibataires, I, III.
c Qui manque de sévérité, de rigueur morale. || Précepteur trop mou (→ Avoir un bras de coton). — Éducation (cit. 8) molle.
20 Mon enfance même a été conduite d'une façon molle et libre, et exempte de sujétion rigoureuse. Tout cela m'a formé une complexion délicate et incapable de sollicitude.
Montaigne, Essais, II, XVII.
♦ Par ext. || Molle complaisance. || Molle indulgence.
2 (1690). Bx-arts, mus. et littér. Qui manque de fermeté, de vigueur (en parlant du style, de l'exécution d'une œuvre plastique et musicale). || Style d'une grâce (cit. 79) un peu molle (→ Abondant, cit. 7). || Pianiste dont le jeu est mou. || Touche molle, manière molle (Académie). || Dessin mou. — Par métonymie. || Un pinceau mou.
3 Vieilli ou littér. (Personnes). ⇒ Efféminé (cit. 3).
21 Ce roi fort mol et voluptueux.
Racine, Notes historiques, LV.
♦ (Choses). Qui a le caractère de la mollesse (4.). ⇒ Amollissant, efféminé. || Paroles molles (→ Impression, cit. 17). || Molles chansons (→ Lyre, cit. 6). || Molle langueur (cit. 17). ⇒ Voluptueux. || Molles délices (→ Imbécillité, cit. 1).
22 Ô Aristippe, ce manteau fastueux fut payé par bien des bassesses. Quelle comparaison de ta vie molle, rampante, efféminée, et de la vie libre et ferme du cynique déguenillé !
Diderot, Regrets sur ma vieille robe de chambre.
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II Adv.
1 Pop. Doucement, sans hâte, sans violence. || Vas-y mou (→ pop. Mollo).
23 Maurice le gifla deux fois avec son poing fermé. « — Vas-y mou, dit Zézette, c'est un môme. »
Sartre, le Sursis, p. 155.
2 Péj. Avec mollesse, mollement. || Musicien qui joue trop mou.
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III N.
1 Fam. et péj. Personne faible de caractère, qui recule devant les risques, les responsabilités. || On ne peut pas compter sur lui, c'est un mou. — REM. Le féminin est pratiquement inusité en ce sens. — Personne qui adopte des points de vue jugés trop modérés.
2 N. m. Ce qui est mou. || Le mou et le dur.
24 (…) cet affreux mélange du sec et de l'humide, du dur avec le mol, de la lumière avec les ténèbres, qui constituait ce chaos (…)
Valéry, Eupalinos, p. 121.
3 Spécialt. (En parlant d'un cordage, d'une courroie…). || Avoir du mou : n'être pas tendu. || Donner du mou à un hauban, le détendre. || Il y a trop de mou. || Donner un peu de mou. — ☑ Loc. fam. Il y a (y a) du mou dans la corde à nœuds : les choses ne sont plus maîtrisées, vont à vau-l'eau, sans réaction active.
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CONTR. Consistant, coriace, dur, résistant, rigide. — Ferme, fort, vigoureux. — Agissant, alerte, ardent, bouillant, dynamique, empressé, énergique, entreprenant, impétueux, indomptable, preste, vif. — Dur (subst.).
COMP. et DÉR. Amollir, mollasse, mollement, mollesse, mollet, mollifier, mollir, mollo. — (Du même rad.) Émollient.
HOM. 2. Mou, moue, moût; formes du v. moudre.
Encyclopédie Universelle. 2012.